tag:blogger.com,1999:blog-52344786934154548882024-03-19T16:09:04.330-07:00John and Mary going to schoolCoupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.comBlogger25125tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-53987568345973834232011-07-14T22:20:00.000-07:002015-07-01T17:55:56.629-07:00Fishing: a vacation day<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on">
<div style="text-align: justify;">
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhcDXjIo8IBvAxBFFnrSgTUKnUatDI6vOxvrWQzACRwzepsUKS9HWDKHJrUATORLKg1-DNlAX49PrPC1ODp-DrKMLFxydKwyTIkiAzk7pIssofmoBnFtx4EIvhgBEgqIh16lO4TJFe6Xhk/s1600/24-+Fishing.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="287" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhcDXjIo8IBvAxBFFnrSgTUKnUatDI6vOxvrWQzACRwzepsUKS9HWDKHJrUATORLKg1-DNlAX49PrPC1ODp-DrKMLFxydKwyTIkiAzk7pIssofmoBnFtx4EIvhgBEgqIh16lO4TJFe6Xhk/s400/24-+Fishing.jpg" width="400" /></a></div>
<div style="text-align: center;">
</div>
<div style="text-align: center;">
<br />
<b>FISHING: A VACATION DAY</b></div>
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhcDXjIo8IBvAxBFFnrSgTUKnUatDI6vOxvrWQzACRwzepsUKS9HWDKHJrUATORLKg1-DNlAX49PrPC1ODp-DrKMLFxydKwyTIkiAzk7pIssofmoBnFtx4EIvhgBEgqIh16lO4TJFe6Xhk/s104/24-+Fishing.jpg"><i>Fishing: a vacation day</i></a>, en français, <i>La pêche: un jour de vacances</i>. Tel est le titre du vingt-quatrième et dernier tableau de la série <b>conversation anglaise</b>. Il n’y a pas grand chose à rajouter à ce qui a été dit des précédents tableaux. La famille Martin, élargie cette fois aux grands-parents, sont au chalet sur le bord du lac, vacance idéale pour John & Mary qui en profitent pour faire trempette dans les eaux du lac en compagnie de leur cousin. Pendant que monsieur Martin et son père taquinent le poisson (oh! la belle prise), sur la véranda, madame Martin, la grand-mère et l’oncle Henry prennent le soleil. Tout autour du lac, sur des monticules aménagés, tout un ensemble de petites villas quasi identiques, à toiture rouge, sont distribuées en alternance à droite et à gauche. Deux canots, un voilier font des eaux du lac une sorte de rue de banlieue vénitienne. Le ciel est chargé de cumulus heureux, la vie est belle, et c’est là que s’arrête le cycle de John & Mary.<br />
<br />
Lorsque j’avais six ou sept ans, mon père m’emmena une fois à la pêche, à Iberville. Il n’y avait plus que des crapets sur les rives du Richelieu, mais on parvint à pêcher une barbote je crois, que ma mère fit cuire. Rien de passionnant. On pêchait sur le bord de l’eau et il aurait fallu louer une chaloupe pour aller un peu plus au centre de la rivière, ce qui aurait sans doute terrifier ma mère. Alors, on est resté sur la rive, et on a pris ce qui déviait le long des fonds peu profonds. Là non plus, il y avait peu de ressemblance avec la partie de pêche des Martin. Pourtant, la chaloupe du père Martin ne s’est pas très éloignée de la rive rocailleuse. Faut-il croire que ce lac est poissonneux qui fait de chaque prise une pêche miraculeuse? Décidément, les Martin sont protégés par les dieux! À moins que la journée se termine par une tragédie: le petit cousin qui se noie? Ou John? Ou Mary? En tout cas, rien ne laisse présager l’épouvantable à la fin de cette journée. Les nuages orageux qui couvraient le ciel dans la retouche du tableau <i>Mary and John going to school </i>se sont dispersés. Le danger s’éloignant, l’angoisse s’évapore, comme les eaux sous le soleil d’été.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhVSsn6ebwDzrHquhAjWGJg0pSIZSbvUQwUw_PWF3S89jM33KOrTq0uVQtkl-jUI-_VVcx_9nBWgMtY08nHC6e0G_9bpkKHewIX7Yc9UIbafe_pKz26RI3DhvW32tfBFrl_UkHBVDTvklQ/s1600/0001299614_350.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhVSsn6ebwDzrHquhAjWGJg0pSIZSbvUQwUw_PWF3S89jM33KOrTq0uVQtkl-jUI-_VVcx_9nBWgMtY08nHC6e0G_9bpkKHewIX7Yc9UIbafe_pKz26RI3DhvW32tfBFrl_UkHBVDTvklQ/s320/0001299614_350.jpg" width="320" /></a>Pourtant, cette étrange perspective différencie le tableau 24 de tous les autres. Pour une bonne raison, ses lignes de forces sont circulaires et non perpendiculaires comme dans les autres tableaux. Ici, le point central du cercle ouvert commence au quai où sont les enfants, la courbe suit le long de la rive pour tourner vers la chaloupe des Martin, puis, sortant du tableau, revient sur la rive opposée, entre la chaloupe et la maison et se poursuit de l’autre côté du lac en passant par la troisième chaloupe et le voilier pour surmonter la maison derrière celle des Martin. En fait, la dynamique du tableau suit celle d’un cercle ouvert, un <i>vertigo</i> dont le point central est bien le quai où se baignent les enfants. Derrière les eaux calmes du fleuve, là où sont les enfants, se situe l’œil du remous, l’œil du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhVSsn6ebwDzrHquhAjWGJg0pSIZSbvUQwUw_PWF3S89jM33KOrTq0uVQtkl-jUI-_VVcx_9nBWgMtY08nHC6e0G_9bpkKHewIX7Yc9UIbafe_pKz26RI3DhvW32tfBFrl_UkHBVDTvklQ/s104/0001299614_350.jpg"><i>maëlstrom</i></a>. Pas étonnant que le poisson soit repoussé en périphérie du tourbillon, vers la chaloupe des Martin.<br />
<br />
Certes, le mouvement est dissimulé derrière l’aspect <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj9_JXKyGYjzPQafIA-VJQ2NyMoXgbLge5DOaHEgU78LNcdZluyUrv5PbpY8PAhww1s48LmB5yvJPQatmzZWIoYgAjQ1Q0jYbC2brlAuJMMF-l4xvLqGsJaUfJW0dF2knmRrSiXMxg4QNI/s1600/feuillages.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="109" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj9_JXKyGYjzPQafIA-VJQ2NyMoXgbLge5DOaHEgU78LNcdZluyUrv5PbpY8PAhww1s48LmB5yvJPQatmzZWIoYgAjQ1Q0jYbC2brlAuJMMF-l4xvLqGsJaUfJW0dF2knmRrSiXMxg4QNI/s320/feuillages.jpg" width="320" /></a>paisible et estival de la scène. Les eaux du lac sont calmes, même pas poussées par un quelconque vent. Celui-ci, si on se fie aux <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj9_JXKyGYjzPQafIA-VJQ2NyMoXgbLge5DOaHEgU78LNcdZluyUrv5PbpY8PAhww1s48LmB5yvJPQatmzZWIoYgAjQ1Q0jYbC2brlAuJMMF-l4xvLqGsJaUfJW0dF2knmRrSiXMxg4QNI/s104/feuillages.jpg">feuilles des arbres</a>, en haut, à gauche, est tout simplement mort. Le ciel est dégagé de nuages, à part les cumulus de beaux temps déjà notés et aucune vague ne vient se heurter à la coque des chaloupes en arrière-plan. Du manque de vie propre aux tableaux de <b>conversation anglaise</b>, nous avançons un pas de plus en pressentant que ce climat de confiance cache bien une mort annoncée.<br />
<br />
<i>What dose this picture represent?</i> demande le professeur, et l’élève de répondre: <i>That picture represents a vacation day</i>. Un jour de vacance, le seul peut-être de tous les tableaux du manuel, est un jour où tout s'arrête. Une bombe atomique exploserait, au fond du tableau, derrière le voilier, et l’ensemble de l’image resterait aussi fixe qu’elle l’est dans le manuel. Par où, toutefois, trouver le lieu de passage entre la journée de congé et la fin du monde? Par l’étrange inquiétude que jette ce tableau <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj8clluoK3nr_dtCIGxQwsCfEN-80RzD8YrsSnmb-QTIUz37CL9WHo5OI-wo6ikcaOB5YuoFfZS8a3-rmNvkXRNy8GeEIe3ULJNR2va49FF0QqXN78zYwLjiO0YH4GN98OSwwgFyOUg1to/s1600/Atomisme+moral.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="238" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj8clluoK3nr_dtCIGxQwsCfEN-80RzD8YrsSnmb-QTIUz37CL9WHo5OI-wo6ikcaOB5YuoFfZS8a3-rmNvkXRNy8GeEIe3ULJNR2va49FF0QqXN78zYwLjiO0YH4GN98OSwwgFyOUg1to/s320/Atomisme+moral.jpg" width="320" /></a>dans l’œil de l’observateur qui se demande pourquoi le poisson est le seul à s’agiter dans la scène. En effet, Mary & John peuvent bien se préparer à sauter à l’eau pour rejoindre leur cousin qui nage vers le quai, mais, comme à l’habitude, ils sont figés dans leurs mouvements. Quelque chose saisi le temps. Les humains, les mouvements, les feuilles dans les arbres qui ne bruissent plus, les maisons déjà disposées, toutes pareilles avec leur identique toit rouge en une uniformité qui dépasse la standardisation. Enfin, dominant l’ensemble du tableau, l’un de ces <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj8clluoK3nr_dtCIGxQwsCfEN-80RzD8YrsSnmb-QTIUz37CL9WHo5OI-wo6ikcaOB5YuoFfZS8a3-rmNvkXRNy8GeEIe3ULJNR2va49FF0QqXN78zYwLjiO0YH4GN98OSwwgFyOUg1to/s104/Atomisme+moral.jpg">champignons</a> atomiques que le cumulus représente et qui apparaît couramment, dans certains volumes scolaires de la même époque, et auxquels on associe même les péchés capitaux.<br />
<br />
Est-ce à dire que les vingt-trois tableaux précédents menaient à cette apocalypse ou l’<i>Attente</i> de Œlze, que nous évoquions dans le tableau 5, se produit, enfin, au vingt-quatrième? La venue de l’apocalypse se confirmerait-elle dans le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjN5ORkh02Mw8BbE6s2BcX-Vl2dNuNjwr6OHb4PGTBuTq7Wf7G08XtMzYC2vnDofeSPWOOMGcyJjJD4VTUHMg7NAusk21TXxDWmtKGvXNpnjXOEr5VazIPLUxKIVraiERZZCb8apmEYu3U/s104/cumulus+atomique.jpg">cumulus</a> qui se dresse <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjN5ORkh02Mw8BbE6s2BcX-Vl2dNuNjwr6OHb4PGTBuTq7Wf7G08XtMzYC2vnDofeSPWOOMGcyJjJD4VTUHMg7NAusk21TXxDWmtKGvXNpnjXOEr5VazIPLUxKIVraiERZZCb8apmEYu3U/s1600/cumulus+atomique.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="110" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjN5ORkh02Mw8BbE6s2BcX-Vl2dNuNjwr6OHb4PGTBuTq7Wf7G08XtMzYC2vnDofeSPWOOMGcyJjJD4VTUHMg7NAusk21TXxDWmtKGvXNpnjXOEr5VazIPLUxKIVraiERZZCb8apmEYu3U/s320/cumulus+atomique.jpg" width="320" /></a>au loin, à l’horizon, le souffle de l’explosion emportant, en ondes répétées chalets, chaloupes, vérandas et quai, précipitant les enfants dans l’œil du chaos? Et que dire du reflet du ciel dans l’eau. Au-delà du quai, l’eau est blanchie par la réflection des nuages; plus près des pêcheurs, l’eau devient plus foncée, plus sombre aussi, comme lorsque nous nous élevons dans le ciel, en avion, et que nous sommes au-dessus des nuages et plus près de la stratosphère. Comme dans ces films américains pris au moment de l'explosion atomique expérimental d'Alamogordo en 1945, nous pourrions voir les chalets soufflés comme des châteaux de cartes, sans même nous étonner, tellement la disposition circulaire des lignes de force du tableau nous y invitent.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtn3XK6R9yW2SiOx8-iBvsQQ1kkziTcnXtysGzZgw_eU-1hvwH3QGnCwj1vg9Koib3_I7i23QwhNDvd8ARQRY_aZuvfW9wI9FPZ904GgzFsLneon-KHoAKyLyLtz-fH9pkbqDQqyi0vMo/s1600/la-bombe-atomique-americaine.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtn3XK6R9yW2SiOx8-iBvsQQ1kkziTcnXtysGzZgw_eU-1hvwH3QGnCwj1vg9Koib3_I7i23QwhNDvd8ARQRY_aZuvfW9wI9FPZ904GgzFsLneon-KHoAKyLyLtz-fH9pkbqDQqyi0vMo/s320/la-bombe-atomique-americaine.jpg" width="233" /></a>Véritable cuvette, comme à Nagasaki, le décor où se situe le lac où pèchent les Martin sert de caisse de résonance. Il s’agit de savoir si, des cris d’enfants ou des cris de terreur en émaneront et seront transmis en écho d’une montagne à l’autre. L’angoisse des <i>Fifties</i>, de l’inévitable conflit nucléaire entre les deux superpuissances ennemies, se diffusait non pas sous le signe de la panique, comme lors des sirènes annonçant les bombardements ou l’approche d’une escadrille aéroportée ennemie, mais sous celui de l'anxiété intérieure. Hiroshima et <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtn3XK6R9yW2SiOx8-iBvsQQ1kkziTcnXtysGzZgw_eU-1hvwH3QGnCwj1vg9Koib3_I7i23QwhNDvd8ARQRY_aZuvfW9wI9FPZ904GgzFsLneon-KHoAKyLyLtz-fH9pkbqDQqyi0vMo/s104/la-bombe-atomique-americaine.jpg">Nagasaki</a> ont bien enseigné qu’aucune précaution pour les bombardements ordinaires ne servait à protéger contre l’impact du soleil noir ou même des retombées atomiques après l’explosion. Comme dans l’Enfer de Dante, ceux qui seront saisis sous le grand champignon peuvent abandonner désormais tout espoir.<br />
<br />
Cet inévitable issu, après deux guerres mondiales qui ont conduit l’humanité occidentale au seuil de l’anéantissement, ne laissait que peu d'espérance en l’avenir. Derrière la joie de vivre des <i>Fifties</i> - et la sombre mélancolie dans laquelle allait s’achever les <i>Sixties</i> devait le prouver -, se cachait bien la fatalité des résultats d’un affrontement où personne ne sortirait vivant ou indemne de la destruction de masse. Inconsciemment, plus que consciemment, la lourdeur de la menace pesait sur les épaules de tous et chacun. Si <i>Peyton Place</i> faisait un drame d’une femme élevant sans mari son enfant non désiré, si un avortement ou un abandon d'enfant pouvait être considéré comme un péché mortel et sans rémission, c’est que même chaque peccadille pouvait devenir porteur d’un drame universel qui se préparait. Chaque faute commise était une justification divine de plus de détruire le monde.<br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhk48DjEddO0BUopyz6EaQGuSTeVcRkDv_e0kmXLNA8v2M4cHI90b8vMqpdQLL8jhYjRyv3_o1xWOvXNFO7Vx-Fgal9WFIg3NSCOwpN0rxg8qZX8freM3gPhcLieTOK232oNaz9B2iFuRA/s1600/PAR8976.jpg" style="clear: right; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="214" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhk48DjEddO0BUopyz6EaQGuSTeVcRkDv_e0kmXLNA8v2M4cHI90b8vMqpdQLL8jhYjRyv3_o1xWOvXNFO7Vx-Fgal9WFIg3NSCOwpN0rxg8qZX8freM3gPhcLieTOK232oNaz9B2iFuRA/s320/PAR8976.jpg" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Alamogordo, juste avant l'expérience de la première bombe atomique</td></tr>
</tbody> </table>
Le Déluge avait eu son arche de Noé, la des-<br />
truction de Sodo-<br />
me et Gomor-<br />
rhe épargna Lot et sa famille, mais rendu à la Tour de Babel, si les hommes ne moururent pas, du moins cessèrent-ils de se comprendre, et surtout de s’entendre. Le potentiel de destruction était à partir de ce moment contenu dans cette incompréhension même. Dans une conception tragique de l’Histoire émergeant de la déchristianisation et de l’abandon morale à la suprématie technicienne, il n’était d’autres espoirs que ceux mis au service de l’équilibre de la Terreur. La fin de la confiance en l’humanisme, de l’investissement dans l’amélioration de la condition humaine, de l’inutile tendresse à apporter par souci aux autres, il n’y avait plus que la brutalité, même «douce», qui menait à la raison du plus fort. C’est ce que raconte tout drame de <i>Peyton Place</i>. La raison du plus fort est celle de la pensée unique dirions-nous aujourd’hui, de la pression sociale unidimensionnelle comme l’expliquait, à l’époque, Herbert Marcuse. La soumission des volontés à la dictature démocratique des institutions du pays. L’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhk48DjEddO0BUopyz6EaQGuSTeVcRkDv_e0kmXLNA8v2M4cHI90b8vMqpdQLL8jhYjRyv3_o1xWOvXNFO7Vx-Fgal9WFIg3NSCOwpN0rxg8qZX8freM3gPhcLieTOK232oNaz9B2iFuRA/s104/PAR8976.jpg">équilibre de la terreur</a> tuait l’esprit, voire l’instinct de liberté en chacun des membres de l’humanité. Les masses s’organisaient contre l’individu, contre son autonomie, contre sa volonté, contre sa créativité. Et plus elles le menaçaient, plus l'individu faisait son jeu en s'isolant dans son domaine privé, l'<i>isolisme </i>qui ouvre sous forme d'<i>a pori </i>à<i> </i>la licence et au liberticide<i>. </i>L’extinction de cet esprit créatif remarquée tout au long de l'analyse de nos tableaux était le résultat de cette confrontation entre le pot de fer publique et le pot de terre privé.<br />
<br />
Aux anciennes dominations cléricales ou morales, les nouvelles s’abandonnaient, de préférence, à l’hédonisme, aux plaisirs comme palliatifs à une mort certaine, prochaine et inévitable. Le stoïcisme des chrétiens et des humanistes qui véhiculait des notions désuètes depuis la Grande Guerre de 14-18: chevalerie, honneur, dignité, magnanimité, droiture, fidélité, s’effaçait pour ne plus laisser place qu’à des notions morales équivoques: opportunisme, relativisme, encanaillement, parti-pris, versatilité, inconstance. Ces valeurs, qui étaient présentées comme négatives dans les <i>Fifties</i>, devaient acquérir leurs «lettres de noblesse» au cours des <i>Seventies</i>. Comme qui veut noyer son chien l’accuse d’avoir la rage, qui voulait justifier ces traits moraux négatifs n’avaient qu’à en appeler à la finitude humaine, qu’à la destruction irrécupérable prochaine, qu’à la fragilité de l’humanité dans l’immensité de l’univers, etc. À partir de ce moment, tout devenait acceptable, pour son plaisir, y compris celui de sauter à l’eau, comme de «sauter» avec la bombe. Qui n’a pas vécu dans les <i>Fifties</i> ne saura jamais ce que sont les délices de l’angoisse sans espérance.<br />
<br />
À moins qu'il vive à notre époque… Dans les <i>Fifties, </i>il était possible de continuer d’aller à l’église, à l’école, au bureau, faire des bonshommes de neige, fêter les anniversaires, faire ses devoirs le soir, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgAchAJty1j9GNOZIgtcnAMJLQMjKUUccq6XAFi_Dw9XVi9-JlkbveKQxm8MA4Ks3qyE6AwFdpWBsBDMr8huw4SppeF0ozVG0H-NxcvYFvdcbtqnvuksZ5Yk4Zy9Eod4pKsJYt5a3Xb4eo/s1600/tram.gif" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="195" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgAchAJty1j9GNOZIgtcnAMJLQMjKUUccq6XAFi_Dw9XVi9-JlkbveKQxm8MA4Ks3qyE6AwFdpWBsBDMr8huw4SppeF0ozVG0H-NxcvYFvdcbtqnvuksZ5Yk4Zy9Eod4pKsJYt5a3Xb4eo/s200/tram.gif" width="200" /></a>passer le reste du temps en famille, à écouter la grande sœur jouer du piano, aller les fins de semaines au chalet cultiver le jardin, apprendre aux filles à faire la cuisine, payer ses fruits au <i>peddler</i>, faire une visite de temps à autre à la ferme de l’oncle George, d’acheter ses produits à l’épicerie, de prier le matin, de ranger ses vêtements, d’entretenir la cuisine, de construire une niche pour le chien, de jouer au baseball l’été et au hockey l’hiver et de se sucrer le bec à la cabane à sucre, de pratiquer ses exercices physiques, d’écouter en classe, en fin de prendre des vacances, au bord du lac, l’été. Tout ce que nous présentait les tableaux de <b>conversation anglaise</b> n’était que la façon de passer le temps en attendant… On <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgAchAJty1j9GNOZIgtcnAMJLQMjKUUccq6XAFi_Dw9XVi9-JlkbveKQxm8MA4Ks3qyE6AwFdpWBsBDMr8huw4SppeF0ozVG0H-NxcvYFvdcbtqnvuksZ5Yk4Zy9Eod4pKsJYt5a3Xb4eo/s104/tram.gif">apprenait à vivre</a>, mais sans trop y investir d'affects. Apprendre que vivre, c'était d'abord se centrer sur soi, sur ses valeurs, ses désirs, leur réalisation sans trop insister sur la moralité des moyens employés. Les choses allaient comme ça, voilà!<br />
<br />
Comment pouvait-on transmettre une vision inconsciente si sombre, comme si la mort dominait par-dessus tout les forces de vie? Pour le comprendre, il faut regarder, et surtout entendre les discours qui proviennent autant de la minorité dominante <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiEddUQnvSTRzcjsz63t8ES3aIPEUZpYcj2IS-_lCYtxLOVEAW4wEBB6PKMUhJEJvMNJe40TwHdYdUyeAdKW18RJU98FHDb_r8rO0_iJhTHjmksoxsZeTxbe2Ou79a_3_aK508nqQdOD0M/s1600/kennedy-et-Krouchtchev.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="209" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiEddUQnvSTRzcjsz63t8ES3aIPEUZpYcj2IS-_lCYtxLOVEAW4wEBB6PKMUhJEJvMNJe40TwHdYdUyeAdKW18RJU98FHDb_r8rO0_iJhTHjmksoxsZeTxbe2Ou79a_3_aK508nqQdOD0M/s320/kennedy-et-Krouchtchev.jpg" width="320" /></a>que des minorités créatrices ou contestataires. Certes, la bombe atomique et l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiEddUQnvSTRzcjsz63t8ES3aIPEUZpYcj2IS-_lCYtxLOVEAW4wEBB6PKMUhJEJvMNJe40TwHdYdUyeAdKW18RJU98FHDb_r8rO0_iJhTHjmksoxsZeTxbe2Ou79a_3_aK508nqQdOD0M/s104/kennedy-et-Krouchtchev.jpg">équilibre de la terreur</a> ne jouent plus aujourd’hui le rôle qu’ils jouaient au cours des <i>Fifties</i>. À la place, l’équilibre écologique a remplacé l’angoisse de jadis en déposant sur un plateau la nécessité d’une économie capitaliste chancelante, incertaine, et sur l’autre les effets du développement économique sur l’environnement de la planète qui ne cesse de voir ses espèces végétales et animales disparaître, non plus en termes de décennies mais en termes d’années. Dans un cas comme dans l’autre, personne n'en sort gagnant: la crise économique contre la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgJhVU9FXbL_PPavqv9lHT7VYOBdPcWueJ6Lhnm6d15krCub4Xojw8dt3ofua2A5HL7SgSJrgntBUNv9lX76HdVBqEAMzJFuVwhNkT02gmj59EGCmN5YZyD3nwUmNfKeVAaGrjCNSyTO1U/s104/le-rechauffement-climatique-est-la-cause-de-l-extinction-d-especes-animales-comme-le-tigre-de-la-caspienne-par-exemple_10273_w250.jpg">sixième extinction d’espèces</a>. La différence provient surtout de la réponse collective face à ces deux séquences historiques. Dans le cas où la bombe atomique imposait une paix suspicieuse, au cours des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgJhVU9FXbL_PPavqv9lHT7VYOBdPcWueJ6Lhnm6d15krCub4Xojw8dt3ofua2A5HL7SgSJrgntBUNv9lX76HdVBqEAMzJFuVwhNkT02gmj59EGCmN5YZyD3nwUmNfKeVAaGrjCNSyTO1U/s1600/le-rechauffement-climatique-est-la-cause-de-l-extinction-d-especes-animales-comme-le-tigre-de-la-caspienne-par-exemple_10273_w250.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgJhVU9FXbL_PPavqv9lHT7VYOBdPcWueJ6Lhnm6d15krCub4Xojw8dt3ofua2A5HL7SgSJrgntBUNv9lX76HdVBqEAMzJFuVwhNkT02gmj59EGCmN5YZyD3nwUmNfKeVAaGrjCNSyTO1U/s1600/le-rechauffement-climatique-est-la-cause-de-l-extinction-d-especes-animales-comme-le-tigre-de-la-caspienne-par-exemple_10273_w250.jpg" /></a><i>Fifties</i>, la réponse était essentiellement réactionnaire, conservatrice, stoïcienne mais humaniste encore, pour ce qui en restait de crédibilité, mais surtout pragmatique avec l’investissement dans des <i>industries domestiques</i>, industries qui avaient, par deux guerres mondiales, prouvé qu'elles étaient la meilleure solution à des destructions massives, mais qui avaient pour contre-coup d'enraciner les individus dans leurs localités. Dans le cas où l’extinction des espèces biologiques impose un <i>modus vivendi</i> entre l’économie et l’environnement, la réponse est essentiellement libérale (ou néo-conservatrice), progressiste sans limites, hédoniste mais émotionnelle et opportuniste en croyant que les bonnes volontés finiront par triompher des défis insolubles. Voilà pourquoi nos optimistes cherchent des «énergies vertes» et «renouvelables», des moyens de réduire les gaz à effets de serres sans gêner la production, afin, précisément, de sauver l'économie telle qu'elle est et l'environnement avant que le saccage ne soit trop avancé. Dans un cas comme dans l’autre, l’attente de l’apocalypse se gargarise d’une bonne dose d’aceptie, un détachement pour les grands courants de pensée ou d’interprétation et une focalisation anxiogène sur des objets transitionnels (qui vont du <i>teddy bear </i>distribué par les <i>Psy Squads</i> aux sinistrés jusqu'aux amis que l’on doit (et non que l’on peut) rejoindre par <i>i-phone</i> à toute heure du jour ou de la nuit. Tout cela, le <i>maëlstrom</i> n’en fera qu’une bouchée le jour où l’effet coriolis entraînera la civilisation dans l'abysse de son arrière-existence.<br />
<br />
Voilà pourquoi, des <i>Fifties</i> aux premières décennies du XXIe siècle, deux climats analogues se sont établis. Cette permanence structurelle, nous l’avons déjà souligné, se tient dans l’évolution même du système capitaliste, dans son dépassement de ses propres contradictions pour accéder à des synthèses essentiellement techniques et bureaucratiques. C’est la technocratie contemporaine que l’on retrouvait déjà dans le petit univers des cols blancs étudiés jadis par C. Wright Mills. C’est également un conservatisme qui évolue de la tradition au maintien intact de régimes politiques qui, même démocratiques, ne reçoivent plus aucune crédibilité de la part <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgZ1nWymXo_BQZ8qx1o7ldq5iv3Jj1yis3vHhMuhq6wuVJMInopmsFOPbL-vldkdaioaQfZw2fKU9nL2_Wg5EwifJyFXb4gpO53FPTOtgW6DSh36Nyy0cBhd62Pm7aBjxNMVBjZ_SyrkBM/s1600/259553.1020.A.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgZ1nWymXo_BQZ8qx1o7ldq5iv3Jj1yis3vHhMuhq6wuVJMInopmsFOPbL-vldkdaioaQfZw2fKU9nL2_Wg5EwifJyFXb4gpO53FPTOtgW6DSh36Nyy0cBhd62Pm7aBjxNMVBjZ_SyrkBM/s320/259553.1020.A.jpg" width="217" /></a>des citoyens, tant le cynisme et l’opportunisme des hommes et des femmes politiques ont avili les aspirations les plus généreuses. Déjà dans les <i>Fifties</i>, l’humanisme d’après-guerre, d’après Auschwitz et Hiroshima, n’exerçait plus aucune influence sincère parmi les stoïciens de l’éducation cléricale. D’où cette rage d’individualisme qui accomplissait le projet sadien du capitalisme: l’<i>isolisme</i> à l’intérieur de la cellule biologique de base: la famille. L'<i>isolisme, </i>que l'on voit agir tout au long des tableaux de <b>conversation anglaise</b>,<b> </b>participe de la désagrégation progressive non seulement de cette unité domestique et économique, mais est également l'agent promoteur de l'extinction des espèces. Au cours des <i>Fifties</i>, tous les drames des petits <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgZ1nWymXo_BQZ8qx1o7ldq5iv3Jj1yis3vHhMuhq6wuVJMInopmsFOPbL-vldkdaioaQfZw2fKU9nL2_Wg5EwifJyFXb4gpO53FPTOtgW6DSh36Nyy0cBhd62Pm7aBjxNMVBjZ_SyrkBM/s104/259553.1020.A.jpg">Peyton Places</a> y prenaient racines, développements et conséquences (<i>truth or dare</i>). En vieillissant, les John & Mary des <i>Fifties</i> ont fini par comprendre que la vérité n’était pas de ce monde, peu importe où elle se logeait, alors le mensonge s’est érigé en norme. «Tout le monde ment», ne cesse de répéter le sympathique docteur House, car c’est bien la norme à laquelle tout le monde souscrit; des individus aux institutions, personne ne peut supporter la vérité tant elle nous écrase moralement. C’est alors que nous recréons l’essentiel de la caricature de la décadence de l’empire romain: du pain et des jeux. De toutes façons, les barbares ont déjà franchi les murs de la cité et se sont répandus parmi nous, et, alors que monsieur et madame Martin se montraient si fiers de leur progéniture, aujourd’hui, bien des parents bien intentionnés sont obligés de reconnaître dans leurs propres enfants, ces barbares qui consomment sans retenus et qui tout en se gavant de slogans écologistes, cultivent l’ignorance, la fatuité, la grossièreté et la bêtise, qui est le résultat de toutes les autres attitudes réunies.<br />
<br />
Si dans le tableau 24, John & Mary s’apprêtent à se jeter dans l’œil du remous qui va emporter tout le tableau aux abysses de la civilisation, on comprend pourquoi leur destin ne pouvait être que celui supposé dans l’avant-tableau où nous les rapprochions de Bonny & Clyde. La déchéance des <i>Baby-boomers</i> se révèle par leurs succès mêmes, d’où le paradoxe de ne jamais voir où le bât blesse. Si, comme la génération du premier après-guerre, elle était passée de Caïphe à Pilate, c’est-à-dire des années folles aux années trente, du charleston et du jazz à <i>Carmina Burana,</i> nous aurions pu facilement énumérer la grosseur des bourdes entraînées par cette génération: l’équivalent de la crise de 29, de la montée des fascismes, de l’explosion du colonialisme, de la perte de contrôle des innovations mécaniques et techniques, l’urbanisme et la déshumanisation des sociétés de masse. Au contraire, à partir des années 50, c’est le triomphe complet sur toute la ligne: amélioration du pouvoir d’achat à tous les niveaux de l’échelle sociale, scolarisation et soins de santé démocratisés, élévation des grades scolaires, subdivision du travail dans plusieurs directions toujours sur-spécialisées, élargissement de l’inventaire des connaissances dans tous les domaines, rythme inesoufflable de la production afin d’accroître une demande toujours plus forte pour une offre toujours à la traîne. L’inversion du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgka8MPdLlvqaz0xJs5L0xz6UYklSa-9EmjOovk5JBpe66bwJvDePlhTZSh0AhLpT7y_wYwwBFf51oLX0Hx51CwIxTm-3qBj6yeZOza2oZcAC5arZ5RUIfpQr7AppH0udgsZHUhzLydfa0/s1600/ts-eliot1%255B1%255D.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgka8MPdLlvqaz0xJs5L0xz6UYklSa-9EmjOovk5JBpe66bwJvDePlhTZSh0AhLpT7y_wYwwBFf51oLX0Hx51CwIxTm-3qBj6yeZOza2oZcAC5arZ5RUIfpQr7AppH0udgsZHUhzLydfa0/s320/ts-eliot1%255B1%255D.jpg" width="255" /></a>paradigme de Smith est le trait qui fait passer le capitalisme industriel à la société de consommation. Les paramètres des économistes jusqu’aux années cinquante, c’est-à-dire les classiques et les néo-classiques de l’économie libérale et du <i>Welfare State</i> sont maintenant dépassés et inadéquats pour la situation socio-économique du monde actuel, et le problème n’est pas de ne pas l’avoir remarqué mais de continuer à le nier tout en faisant comme si les lois d’Adam Smith et de Karl Marx continuaient à gérer l’économie comme avant. En ce sens, nous sommes bien dans un train qui fonce directement sur un mur et des mécaniciens qui ne veulent voir rien venir et continuent à accélérer l’engin. En ce sens, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgka8MPdLlvqaz0xJs5L0xz6UYklSa-9EmjOovk5JBpe66bwJvDePlhTZSh0AhLpT7y_wYwwBFf51oLX0Hx51CwIxTm-3qBj6yeZOza2oZcAC5arZ5RUIfpQr7AppH0udgsZHUhzLydfa0/s104/ts-eliot1%255B1%255D.jpg">T. S. Eliot</a> avait raison de considérer que l’apocalypse ne procédera pas par une explosion atomique, mais bien par une eschatologie graduelle et silencieuse:</div>
<div style="text-align: justify;">
<br />
<div style="text-align: center;">
<i>This is the way the world ends</i><br />
<i>This is the way the world ends</i><br />
<i>This is the way the world ends</i><br />
<i>Not with a bang but a whimper.</i></div>
<br />
<div style="text-align: right;">
Montréal</div>
<div style="text-align: right;">
</div>
</div>
<div style="text-align: right;">
14 juillet 2011</div>
</div>
Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-22377670132897382242011-07-13T18:00:00.000-07:002011-07-13T19:30:31.810-07:00Playing baseball<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgi1RATcnZ0F-5Bxag3x1yPkJxMCSPptISBcJWFMC-aKZi52RD9ry5tZOrjsQwK5p4F1TjtZ_6f7nlFA4bEqNT9eN2baKInx8LJg4F6DtlQZcDW1qysH5SYEhrvy3F7f-S8M75-Dk1Q4yA/s1600/Baseball-chick.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhRJ-w8wxI9lLr-jIHU7y_N9HWE31dP8EuPsbn8hlD7NPfAK57tOJq0GNp66KoZpsene-56sRUjwfWIyJMOh6RbGfSG2QF2MPv0jqnfMSe4vZt_8_4CAOjo3yLQ_2_asaLDakKI2sBQj70/s1600/23-+Playing+baseball.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="287" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhRJ-w8wxI9lLr-jIHU7y_N9HWE31dP8EuPsbn8hlD7NPfAK57tOJq0GNp66KoZpsene-56sRUjwfWIyJMOh6RbGfSG2QF2MPv0jqnfMSe4vZt_8_4CAOjo3yLQ_2_asaLDakKI2sBQj70/s400/23-+Playing+baseball.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: justify;"><div style="text-align: center;"></div><div style="text-align: center;"><br />
<b>PLAYING BASEBALL</b></div><br />
Le père Gédéon (Doris Lussier), personnage libéré de son créateur Roger Lemelin au cœur des années soixante, avait enregistré un disque «cochon» décrivant une partie de baseball en usant des termes anglais, termes désignant deux choses complètement différentes: la partie de baseball, mais aussi la partie de fesses. À l’époque, lorsque des amis me firent entendre ce disque, je ne comprenais pas vraiment le double sens du monologue. Comme toutes les descriptions de parties de baseball, je trouvais ça plutôt long et ennuyeux, bien que certains termes me fissent comprendre de quoi il s’agissait. Ceux qui croient que les humoristes actuels sont vraiment indécents et transgresseurs absolument irrévérencieux par leur vulgarité, laissez-moi vous dire qu'ils n’atteignent en rien la moitié de ce que pouvait raconter le sympathique personnage de <i>la famille Plouffe</i> sur son disque.<br />
<br />
</div><div style="text-align: justify;">Je ne suis pas sûr que tous les participants qui <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhRJ-w8wxI9lLr-jIHU7y_N9HWE31dP8EuPsbn8hlD7NPfAK57tOJq0GNp66KoZpsene-56sRUjwfWIyJMOh6RbGfSG2QF2MPv0jqnfMSe4vZt_8_4CAOjo3yLQ_2_asaLDakKI2sBQj70/s104/23-+Playing+baseball.jpg">jouent ici au baseball</a> ne comprendraient pas le double sens du monologue du père Gédéon. Absorbés par le jeu, nous apercevons, en avant-plan John, avec <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgi1RATcnZ0F-5Bxag3x1yPkJxMCSPptISBcJWFMC-aKZi52RD9ry5tZOrjsQwK5p4F1TjtZ_6f7nlFA4bEqNT9eN2baKInx8LJg4F6DtlQZcDW1qysH5SYEhrvy3F7f-S8M75-Dk1Q4yA/s1600/Baseball-chick.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgi1RATcnZ0F-5Bxag3x1yPkJxMCSPptISBcJWFMC-aKZi52RD9ry5tZOrjsQwK5p4F1TjtZ_6f7nlFA4bEqNT9eN2baKInx8LJg4F6DtlQZcDW1qysH5SYEhrvy3F7f-S8M75-Dk1Q4yA/s200/Baseball-chick.jpg" width="158" /></a>son chien Rover, qui ne peut participer au jeu puisqu’il a une blessure (une morsure?) à la main. Décidément, cette main… Jeu d’été par excellence, autant aux États-Unis qu’au Canada, je ne reviendrai pas sur mon indifférence face à ces sports. Tant mieux pour ceux qui y jouent; tant pis pour ceux qui regardent jouer. Pire que le hockey encore, le baseball est un sport où les temps morts ne se comptent plus, temps morts accompagnés d’une pantomime où les joueurs se regardent, effleurent la palette de leur casquette, se redressent la coquille, se penche, comme on dit, le «<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgi1RATcnZ0F-5Bxag3x1yPkJxMCSPptISBcJWFMC-aKZi52RD9ry5tZOrjsQwK5p4F1TjtZ_6f7nlFA4bEqNT9eN2baKInx8LJg4F6DtlQZcDW1qysH5SYEhrvy3F7f-S8M75-Dk1Q4yA/s104/Baseball-chick.jpg">péteux en split</a>», dresse la batte avec, à l’arrière, une sorte d’ours revêtu d’un masque, dotés de gants et un protecteur rembourré à l’avant.<br />
<br />
Le tableau <i>Playing baseball</i> est une plate copie du tableau précédent, <i>A hockey game</i>. Les joueurs occupent, comme dans l’autre, le centre du tableau. Le tracé du terrain est clairement dessiné, mais nous retrouvons la clôture derrière laquelle se tiennent les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj1f1jy2Mo5LZ5yalaQ7Vp9FoFtnSG-et7bn1WoEE0kAH5q1yjX4xU33B9UxKuii98AEwUg-dUIy4hdQ7Nykvoy2NcLqK4eimSajZZq-7jvk8BUYl7GhVvGc95GDmbqcElLyCynkPeihSw/s104/spectateurs+baseball.jpg">spectateurs</a>, encore là des parents des joueurs, mais surtout, à l’arrière-plan, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj1f1jy2Mo5LZ5yalaQ7Vp9FoFtnSG-et7bn1WoEE0kAH5q1yjX4xU33B9UxKuii98AEwUg-dUIy4hdQ7Nykvoy2NcLqK4eimSajZZq-7jvk8BUYl7GhVvGc95GDmbqcElLyCynkPeihSw/s1600/spectateurs+baseball.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="180" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj1f1jy2Mo5LZ5yalaQ7Vp9FoFtnSG-et7bn1WoEE0kAH5q1yjX4xU33B9UxKuii98AEwUg-dUIy4hdQ7Nykvoy2NcLqK4eimSajZZq-7jvk8BUYl7GhVvGc95GDmbqcElLyCynkPeihSw/s200/spectateurs+baseball.jpg" width="200" /></a>un village qui donne l’impression d’avoir été étrangement dévasté: une petite église avec son clocher encadré de ce qui semble être deux grands peupliers, une petite maison de laquelle s’échappe de la fumée (en plein été?), quelques maisons qui ont toutes l’air de sortir du modèle «bloc d'appartements», et d'autres plus clairsemées. Tout à l’arrière, des montagnes, pas très hautes, qui reproduisent l’aspect de la Montérégie, dans la vallée du Saint-Laurent. Comme les joueurs d'<i>A hockey game</i>, les joueurs de <i>Playing baseball</i> sont entièrement absorbés par leurs jeux et nous n’apprendrons rien d’eux, sinon le vocabulaire de l’équipement et des positions aux différents champs.<br />
<br />
Si le football est le jeu universitaire par excellence avant de passer dans les ligues accréditées, le baseball est plutôt un sport de quartiers. Aujourd'hui à l'intérieur d'un stade, on assiste aux parties qui <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjiKjaFOomL0LxlBMfdF9-EVYoKlepIilxQfd5cePTwt5h_f0aY8CYLuFiPGzSBcz4fTHMjyLbbPHNQto7mFyReFm8PABS4vqNX6BGeZRMOCSWP4yhkadVNadI-IznOHUcmCfsBSBeOc84/s1600/4648900530_8a268ba56e.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjiKjaFOomL0LxlBMfdF9-EVYoKlepIilxQfd5cePTwt5h_f0aY8CYLuFiPGzSBcz4fTHMjyLbbPHNQto7mFyReFm8PABS4vqNX6BGeZRMOCSWP4yhkadVNadI-IznOHUcmCfsBSBeOc84/s320/4648900530_8a268ba56e.jpg" width="320" /></a>sont l’occasion d’ingurgiter forte quantité de bière et de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjiKjaFOomL0LxlBMfdF9-EVYoKlepIilxQfd5cePTwt5h_f0aY8CYLuFiPGzSBcz4fTHMjyLbbPHNQto7mFyReFm8PABS4vqNX6BGeZRMOCSWP4yhkadVNadI-IznOHUcmCfsBSBeOc84/s104/4648900530_8a268ba56e.jpg">hots-dogs</a> steamés moutarde-choux, tant les temps d’arrêt peuvent être longs et où il ne se passe rien sur le terrain. Contrairement au hockey, qui est un sport en constante vitesse - quand il n’y a pas d’interruption -, le baseball reste un sport lent, même quand une «gazelle» s'élance à faire un circuit. Comme au hockey, l’important, pour le spectateur, n’est pas de perdre la balle de vue. Elle peut très bien se passer d’une main à l’autre pendant que le joueur se précipite d’un but à l’autre. Comme au hockey, la rondelle glisse d’une palette qui l’envoie à l’autre, il semble que le sport consiste essentiellement à suivre un objet (ballon, balle molle ou rondelle) que les adversaires essaient de s’emparer ou de viser dans un but. Toute la fable de la vie se résume à cette simple escarmouche où les vainqueurs finiront par l’emporter sur les vaincus, à moins d’arrêter, magnanimement, la partie comme on le faisait au Japon, lorsque les points étaient à égalité. Inutile de dire qu’en Amérique, ce type de <i>gentlemen agreement</i> n’aurait jamais passé à la satisfaction des spectateurs.<br />
<br />
Mais il y a une autre fonction, plus subtile, qu’exerce le sport de groupes sur les spectateurs: celui du bavardage inutile. C’est le syndrome du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjLowK3VUVKcqD3CGVfX6fNP9NFRiBp0D6FGhhpHLhjc7dpz_y2aEc3fjuYBr2IpZ9GH1aa8OCOy4Vtm4l6JC_dXe81qzyeq-GGbrFp1fhahiUC-FBGg4hrI6qcS93hsA8O5psnRBULGjQ/s104/41424_large.png">gérant d’estrade</a>. Tout le monde a son avis et ne se gêne pas pour le communiquer, donner son opinion, exercer ses <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjLowK3VUVKcqD3CGVfX6fNP9NFRiBp0D6FGhhpHLhjc7dpz_y2aEc3fjuYBr2IpZ9GH1aa8OCOy4Vtm4l6JC_dXe81qzyeq-GGbrFp1fhahiUC-FBGg4hrI6qcS93hsA8O5psnRBULGjQ/s1600/41424_large.png" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="224" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjLowK3VUVKcqD3CGVfX6fNP9NFRiBp0D6FGhhpHLhjc7dpz_y2aEc3fjuYBr2IpZ9GH1aa8OCOy4Vtm4l6JC_dXe81qzyeq-GGbrFp1fhahiUC-FBGg4hrI6qcS93hsA8O5psnRBULGjQ/s320/41424_large.png" width="320" /></a>analyses sur la stratégie déployée ou non, absoudre ou condamner un joueur pour avoir ou ne pas avoir fait tel geste, couru assez vite, frappé assez fort, attrapé la balle au vol. Pendant que les équipes sont en attentes, ces gérants d’estrade agissent comme diplômés de l’U.Q.A.M. en «animation et recherche culturelles»: ils soulèvent les applaudissements, lancent les huées à l’équipe adverse, imposent leurs injonctions aux arbitres, aux gérants de club, harcèlent un joueur jusqu’à l’écœurement. Ce sont eux qui parviennent à transformer les spectateurs d’un banc en véritables <i>hooligans</i>. Tant de mots, tant de maux. Ces sports délient les langues, permettent des défoulements inouïes de tant de ressentiments contenus à l’intérieur de chacun des spectateurs, et qui sont souvent inconnus des joueurs qui n’ont d’yeux que pour le jeu. Si dans les pays dominés ou colonisés, un sport comme le soccer soulève tant d’enthousiasmes fébriles et d’adhésions aux limites de la violence, c’est qu’il y a bien quelque chose de socialement et de psychologiquement pas sain dans ces sociétés.<br />
<br />
De plus, ces sports sont devenus des spectacles de masses depuis que les média s’en sont emparés. La radio d'abord, puis la télévision présentent le sport comme s’il était impossible de ne pas le voir et que l’entendre doublait notre plaisir. Ça se comprend à la radio, où le <i>speaker</i> décrivait une scène qui n’était pas visible pour les auditeurs; mais cette description est restée une fois que les parties ont pu être retransmises en directes à la télévision. C’est-à-dire que la télévision n’a pas fait disparaître le commentateur de la radio, de sorte que le dédoublement de la scène - du visuel à l’auditif - surcharge d’un bavardage creux et insupportable une partie qui se laisserait regarder seulement ponctuée par les cris de la foule. Pour justifier ce redoublement, on fait appel à des experts qui singent les commentateurs de l'actualité politique. Bref, ce n’est pas le sport lui-même qui joue le rôle d’agent <i>stresseur</i> dans la diffusion, mais la surcharge de commentaires - et de commanditaires - qui noient les spectateurs dans une passivité consumériste qui, en surexcitant les sens, les vident de toute vitalité pour ne plus laisser qu’une masse de chair molle s’engraisser, avachie devant un écran bavard.<br />
<br />
Jean Larose, en 1983, avait décrit la vacuité de ces commentateurs sur-commentés dans le cadre des diffusions du baseball des Expos:<br />
<br />
<i>«Écoutons par exemple le </i>Baseball des Expos<i>, à la télévision de Radio-Canada. L’exemple s’offre tellement parfait que j’hésite… Ça m’épuise d’avance. L’impression de découverte s’évanouit avec l’impression que c’est “un peu facile”. Le “trop facile” gêne en moi celui qui se compare toujours à des modèles historiques sublimes. M’enfin… Osons cette voie, historique peut-être. Écoutons donc les deux commentateurs, et surtout monsieur <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjpqjlJEpKKrpnzFaQJuU2kQ1AsS86Cf2TIhazVKnESsC5j98V-nXnl-SzqsBbM_dEmGQj2RDZhtafE1BI9IcQA_-6eMVybWUo5CjveHnqq9wFtQAx3iulko8Q7ufstMsL22htws5FLPkE/s104/307-2_page_1_photo_front_WEB.jpg">Jean-Pierre Roy</a>, le surcommentateur des commentaires de l’autre. C’est lui, l’auteur de cette locution qui passera à l’histoire: “la réaction vocale de la foule”, et </i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjpqjlJEpKKrpnzFaQJuU2kQ1AsS86Cf2TIhazVKnESsC5j98V-nXnl-SzqsBbM_dEmGQj2RDZhtafE1BI9IcQA_-6eMVybWUo5CjveHnqq9wFtQAx3iulko8Q7ufstMsL22htws5FLPkE/s1600/307-2_page_1_photo_front_WEB.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjpqjlJEpKKrpnzFaQJuU2kQ1AsS86Cf2TIhazVKnESsC5j98V-nXnl-SzqsBbM_dEmGQj2RDZhtafE1BI9IcQA_-6eMVybWUo5CjveHnqq9wFtQAx3iulko8Q7ufstMsL22htws5FLPkE/s320/307-2_page_1_photo_front_WEB.jpg" width="320" /></a><i>d’une infinité d’autres traits witzige. Écoutons: un discours historien, à plus de neuf dixièmes. Le nom, le numéro, le poids, l’erreur, le coup sûr, la chandelle,</i><i> le circuit, le point compté ou mérité ou combien laissés sur les sentiers, la courbe, la décevante, la tombante, le tire-bouchon, la lente, la rapide, le retrait comment 9-6-1 ou 5-3 ou 6-4-2, la partie lancée ou jouée ou finie ou annulée par la pluie à quelle manche en quelle année devant combien de spectateurs mangeurs de combien de hot-dogs - tout est passé à la moulinette historique, soumis à la perspective d’un incroyable appareil statistique qui renvoie le fichier du structuraliste à la préhistoire de la névrose obsessionnelle. L’auditeur est d’ailleurs initié au bricolage de son propre petit fichier statistique des Expos. Soudain, un cri: une balle, un coup. L’onomatopée fuse, ou l’épithète bien sentie, à parfum bon parler français, choisie parmi une riche palette de trois ou quatre adjectifs. Mais attention, “l’heure est sérieuse ici et il faut rencontrer la magnitude des problèmes”, et le discours historien reprend pour accompagner le coach qui sort du dug-out pour changer son combientième pitcheur malgré qu’il n’en fût qu’à sa ennième balle lancée grâce à </i>x<i> gommes ballounes chiquées pour y crachat produits. Or, vous qui écoutez le </i>Baseball des Expos<i>, vous le savez, jamais la viduité ne fit rougir les commentateurs. La gigantesque manie d’un “savoir” totalement inutile, d’une fausse science mariant l’anglicisme et l’accent “sœur” justifient apparemment le salaire et l’existence de ce commentateur dantesque. Pas de révolte. L’émeute des esprits indignés ne déferle pas vers la Maison de Radio-Canada. Au contraire, on écoute ça sérieusement, sans écouter trop trop, puisqu’il s’agit d’un “loisir”, pour passer le temps, sans douter que cela représente quand même un certain intérêt humain. Je ne vais pas vous dire que cela n’a plus rien à voir avec le sport. D’autres s’en chargent. Mais insister sur la fonction historique de ce discours, une constante mise à distance ou même en sommeil: que cherche l’homme assis devant ça sérieusement (sérieux pour rire, pas pour vrai), sinon la distance, sinon éloigner encore un coup, encore d’une couche, les forces qui le travaillent en pas pour rire, tenir l’éveil à grande distance? Évidemment, le Baseball des Expos, innocent loisir, s’emploie à “éloigner” depuis des instants de “vie” déjà tellement un sommeil des forces ardentes que je me trouve moi-même impertinent et que j’exagère…</i>» (1)<br />
<br />
Je ne continuerai pas davantage ce texte néo-nietzschéen qui voit dans le discours historien qu’une vacuité dégagée de la vie (seconde <i>Considération intempestive </i>de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjKd-a6xL7I6RK27GkMM_7aOkYdkrH-A9kyN398zLSKV_cx_fTGIdJ6hsg6XxXRVxIitvynUX9pNwpYfrs1PveoOy1jznDN7wz29u0T3Zec_V9OG5bRS8rAhq48E1biZAWb-lsLdBmMGDo/s104/139495.jpg">Nietzsche</a>).<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjKd-a6xL7I6RK27GkMM_7aOkYdkrH-A9kyN398zLSKV_cx_fTGIdJ6hsg6XxXRVxIitvynUX9pNwpYfrs1PveoOy1jznDN7wz29u0T3Zec_V9OG5bRS8rAhq48E1biZAWb-lsLdBmMGDo/s1600/139495.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjKd-a6xL7I6RK27GkMM_7aOkYdkrH-A9kyN398zLSKV_cx_fTGIdJ6hsg6XxXRVxIitvynUX9pNwpYfrs1PveoOy1jznDN7wz29u0T3Zec_V9OG5bRS8rAhq48E1biZAWb-lsLdBmMGDo/s200/139495.jpg" width="131" /></a> J’ai dit <a href="http://jcoupal.blogspot.com/2011/02/en-souvenir-du-declin-de-lempire.html">ailleurs</a> ce que je pensais des analyses de M. Larose, et je n’y reviendrai pas, sauf pour dire qu’il n’y a rien de commun entre le surcommentateur du <i>Baseball des Expos</i> et l’analyse ou même le récit historique. Dans le cas du <i>Baseball des Expos</i>, nous sommes à un discours à la troisième puissance: il y a d’abord la partie à laquelle tout le monde assiste via la diffusion visuelle, il y a le commentateur (Raymond Lebrun) enfin, le surcommentateur (le monsieur Roy en question). Appliquer la considération nietzschéenne sur ces bavardages tressés est tout ce qu’il y a de plus légitime. Sauf que le discours historien n’a rien de commun avec ces déblatérations. Parce qu’il n’y a pas de caméra qui nous rendent la vision des événements dits historiques (même contemporains) et que la définition positiviste des historiens que Nietzsche critiquait était, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiojQIRMjmoUEI4fsRcWb0kqiBJTbaCYq7H7-E-l30DnMIT_pfODe6aKihoR7Bd6eK2GUyDOQWiskW9ph7qMamAjeSmBW29qBW87qrPI3c-5j2k9v3-Cf9a88RFcjREYuFQ6TxUMdWTCQk/s1600/250px-Burckhardt.JPG" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiojQIRMjmoUEI4fsRcWb0kqiBJTbaCYq7H7-E-l30DnMIT_pfODe6aKihoR7Bd6eK2GUyDOQWiskW9ph7qMamAjeSmBW29qBW87qrPI3c-5j2k9v3-Cf9a88RFcjREYuFQ6TxUMdWTCQk/s200/250px-Burckhardt.JPG" width="135" /></a>effectivement, une histoire qui se vidait de sa vie derrière l’accumulation anecdotique et chronologique. L’un de ses collègues historiens qui enseignait à Berne en même temps que Nietzsche et avec lequel il garda toujours un lien d’amitié, Jacob <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiojQIRMjmoUEI4fsRcWb0kqiBJTbaCYq7H7-E-l30DnMIT_pfODe6aKihoR7Bd6eK2GUyDOQWiskW9ph7qMamAjeSmBW29qBW87qrPI3c-5j2k9v3-Cf9a88RFcjREYuFQ6TxUMdWTCQk/s104/250px-Burckhardt.JPG">Burckhardt</a>, helléniste et auteur d’une magnifique <i>Civilisation de la Renaissance en Italie</i>, déviait de la voie positiviste des Ranke et Monod pour rédiger une histoire «esthétique», où la vie de la Cité, de l’État, se trouvait frémissante à chaque page. Une fois de plus, Jean Larose nous démontre son ignorance de ce qu’est l’esprit de l’histoire, mais en ce qui concerne l’effet d’évidement du commentaire sportif, il a on ne peut plus raison.<br />
<br />
Avec <i>Playing baseball</i>, il n’y a pas de commentaires et encore moins de surcommentaires. Mais le tableau nous laisse toujours dans cet état de suspension de l’action qui ne le rend pas plus vivant que les autres tableaux précédents. En fait, saisi «au vif» par l’absurde, le tableau nous donne l’impression que le baseball est un sport hyperactif: le mouvement du lanceur prêt à <i>pitcher</i> la balle; l’attention défiante du frappeur (qui n’est pas dans la liste des mots de vocabulaire); les différentes postures des joueurs tout au long des champs nous laissent l’impression qu’ils vont tous s’agiter en même temps, comme dans le tableau <i>A hockey game</i>. Or seuls certains de ces joueurs vont être appelés à courir (ou pas) après la balle ou tenter de retirer le frappeur des buts.<br />
<br />
Les jeux d’équipe présentés par les tableaux de <b>conversation anglaise</b> partagent tous en commun l’impression que chacun joue pour soi, même à l’intérieur de l’esprit d’équipe. Nous savons qu’il y a là une compétition, des supporteurs, un enjeu caché dans le gant du lanceur, la fébrilité même de John qui ne peut jouer à cause de sa main. Il n’y a pas jusqu’à Rover qui semble suivre la partie comme s’il comprenait aussi bien que les humains le sens de ce sport. Comme dans <i>A hockey game</i> où les joueurs des deux équipes s’affrontaient pour la rondelle, tout indique que l’esprit d’équipe anime l’atmosphère des deux tableaux. Mais, comme la vie, cet esprit d’équipe n’y passe pas. Pourquoi?<br />
<br />
Plus facile à reconnaître qu’à expliquer? Est-ce un problème esthétique? Le schématisme des dessinateurs des tableaux de <b>conversation anglaise</b> ne parviendraient pas à transmettre la vie à travers leurs œuvres? C’est la réponse qui revient couramment au cours des expertises précédentes. Est-ce à cause de l’esprit des <i>Fifties</i>, le <i>Zeitgeist</i> de l’époque, plutôt, qui en était un où l’artificialité des vies rangées des habitants des Peyton Places d’Amérique du Nord dissimulaient, voire étouffaient la vie dans son berceau, comme la jeunesse des <i>Sixties</i> <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVshJRAG-XnaiOr8WBB9SCsLLRMeqiiW5-FhULsqwvd9rPpuDdhblAdxi2hwGdQ-rhifvR24AkEwqjPrr1iWl_0dl2CjKoyPLi1GIrT-pCNS9tPjCCMhTPwgNZANBtrnzznzOdzkOvn9g/s1600/23-+Playing+baseball+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="57" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVshJRAG-XnaiOr8WBB9SCsLLRMeqiiW5-FhULsqwvd9rPpuDdhblAdxi2hwGdQ-rhifvR24AkEwqjPrr1iWl_0dl2CjKoyPLi1GIrT-pCNS9tPjCCMhTPwgNZANBtrnzznzOdzkOvn9g/s320/23-+Playing+baseball+-+copie.jpg" width="320" /></a>devait tant le reprocher à leurs aînés et à l’<i>establishment</i>? Est-ce à cause de mon regard d’élève, à la fois fasciné et rebuté par ces tableaux et les leçons qui y étaient rattachées? Ces illustrations me semblaient la vie, celle que ne vivais pas ou dont j'étais privé, mais pourtant, aujourd'hui, je reconnais que ce qui leur manquait le plus, c'était, précisément, la vie, et qu'il y avait plus de vie en moi en lisant mes bandes dessinées de Tintin ou mes manuels d'histoire que dans les actions suggérées par ces vingt-quatre tableaux de <b>conversation anglaise</b><i>.</i> Comment percevons-nous ces cartes postales: cette vie que je ne perçois pas, d’autres, des artistes peut-être, peuvent-ils la ressentir? Est-ce là ce qu’on appelle le <i>kitsch</i> dans le sens d’une culture populaire de consommation qui vise à satisfaire le plus grand nombre de goûts communs? En tels cas, il est difficile de reconnaître, comme le fait Jean Duvignaud, une quelconque parenté du <i>kitsch </i>avec l’art baroque, si étourdissant, ornementé, activé par les éruptions de l’Histoire. Si la tradition se confronte encore avec la modernité (la tradition dans le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVshJRAG-XnaiOr8WBB9SCsLLRMeqiiW5-FhULsqwvd9rPpuDdhblAdxi2hwGdQ-rhifvR24AkEwqjPrr1iWl_0dl2CjKoyPLi1GIrT-pCNS9tPjCCMhTPwgNZANBtrnzznzOdzkOvn9g/s104/23-+Playing+baseball+-+copie.jpg">petit village reculé</a> à l’arrière-plan et ses montagnes et la modernité présente dans ce jeux qui, pourtant, est héritier lui aussi des sports amérindiens), c’est ici, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiiOcJlYdxUp1daHXPNfxMjZ-eb7D-pu1M8Jj8WM0TbhXJ1UBs-gzeTVnMGLIJ8aLAKZBZTOhdExXjBrZq1MuOoS7p71s8U9ONm6boDSGJi47KKosjgFboPMWJpsu9j5sp5rRFIig5hDEo/s1600/Photo-033-rockies-denver-equipe-baseball.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="150" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiiOcJlYdxUp1daHXPNfxMjZ-eb7D-pu1M8Jj8WM0TbhXJ1UBs-gzeTVnMGLIJ8aLAKZBZTOhdExXjBrZq1MuOoS7p71s8U9ONm6boDSGJi47KKosjgFboPMWJpsu9j5sp5rRFIig5hDEo/s200/Photo-033-rockies-denver-equipe-baseball.jpg" width="200" /></a>sur le mode ludique. Il n’y a pas encore tout l’enrobage télévisuel des décennies ultérieures. Nous sommes devant deux petites équipes qui n’appartiennent peut-être même pas à un ligue junior. Aucun uniforme ne marque de son nom qui appartient à quelle équipe, et seul le lanceur porte un costume qui le spécifie comme joueur de baseball! La foule est facilement contenue derrière la clôture et s’enthousiasme sans excès. De plus, il n’y a ni vendeur de bière ou de hot-dogs, ni mascotte, ni même un véritable <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiiOcJlYdxUp1daHXPNfxMjZ-eb7D-pu1M8Jj8WM0TbhXJ1UBs-gzeTVnMGLIJ8aLAKZBZTOhdExXjBrZq1MuOoS7p71s8U9ONm6boDSGJi47KKosjgFboPMWJpsu9j5sp5rRFIig5hDEo/s104/Photo-033-rockies-denver-equipe-baseball.jpg">terrain de baseball</a> avec lumières haut-perchées ou de bandes à l’intérieur desquelles retenir les joueurs. Dans <i>Playing baseball, </i>si la balle est frappée de manière trop forte, elle risque de se perdre dans les champs à perte de vue!<br />
<br />
Nous ne voyons donc rien de plus qu’une scène pittoresque en village plutôt même qu’en banlieue. Rien ne rapproche ce village de la ville de <i>Mary and John going to school</i>. Nous sommes plus près de la ferme de l’oncle George et de la cabane à sucre du tableau précédent que de l’atmosphère du premier cycle des tableaux de <b>conversation anglaise</b>, et le dernier tableau ne fera que confirmer cet éloignement des Martin de leur banlieue sise en étalage urbain de la grande ville où le père travaille.<br />
<br />
L’attachement à la tradition est plus forte dans ces manuels que leur élan vers l’avenir. Ce monde n'est pas celui des enfants, mais bien celui des parents. Les <i>Fifties</i> marquent décidément le franchissement d’un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBBzPmLj7nfrwfnzEkSp428zKFga3LHFIT3pjtmRiL8MLLuI6zSJ2y00DtdMRYABz2WDB7ijRPWo2Sf5BVenFRCj07jl40lROjjYiLj5PW0ARo4-yCE-TfYjVm_v7Vw1B3dY-nUZbbcik/s104/oiseau+du+tonnerre.jpg">passage sans retour</a>. Bien que nous reconnaissions, encore <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBBzPmLj7nfrwfnzEkSp428zKFga3LHFIT3pjtmRiL8MLLuI6zSJ2y00DtdMRYABz2WDB7ijRPWo2Sf5BVenFRCj07jl40lROjjYiLj5PW0ARo4-yCE-TfYjVm_v7Vw1B3dY-nUZbbcik/s1600/oiseau+du+tonnerre.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBBzPmLj7nfrwfnzEkSp428zKFga3LHFIT3pjtmRiL8MLLuI6zSJ2y00DtdMRYABz2WDB7ijRPWo2Sf5BVenFRCj07jl40lROjjYiLj5PW0ARo4-yCE-TfYjVm_v7Vw1B3dY-nUZbbcik/s320/oiseau+du+tonnerre.jpg" width="212" /></a>aujourd’hui, tout ce qui appartenait au monde d’avant, plus rien ne correspond, en esprit du moins, à ce que ce «tout» représentait à l’époque. Pour le surintendant de l’instruction publique, pour les enseignants, pour les commissaires scolaires, pour les autorités ecclésiastiques qui avaient droit de regard (et de censure) des manuels scolaires de l’époque, pour les parents, pour tout le monde qui avaient le plus d’intérêt à promouvoir et diffuser ces manuels, c’était la représentation d’un monde qu’ils voulaient perpétuel et éternel malgré et contre tous les vents de changements qui soufflaient sur le Québec d’après-guerre. La Grande Guerre avait déjà beaucoup bouleversé, aux lendemains de 1918. Après 1945, l’américanisation menaçait, par sa langue et ses religions hérétiques, l’orthodoxie linguistique et catholique de la «race» canadienne-française. Comme si, pour résister à cette anglicisation forcée de l’américanité, les concepteurs des manuels s’étaient livrés à une guerre sans merci en vue de faire triompher l’illustration sur le vocabulaire, la scène statufiée, pétrifiée, sur la vie agressive et bouleversante. L’incessante réaction de l’image sur le vocabulaire agit comme une stratégie défensive et négative. Il en était de même dans les manuels d’histoire, de lecture française (avec <i>Pieds nus dans l’aube</i> de Félix Leclerc), avec les manuels de bienséance et les <i>connaissances usuelles</i>, voire même les livres de calcul de Philippe Beaudry. Le dit du vocabulaire et le non-dit des tableaux, c’est la conclusion que nous pouvons tirer de ces tableaux des <i>Fifties</i>, qui caractérise aussi bien la société québécoise que l’ensemble de la vieille société puritaine américaine de l’Est.<br />
<br />
Note<br />
<br />
(1) J. Larose. «Picture yourself», in <i>L'Histoire vécue, </i>Montréal, <i>Liberté</i> # 147, juin 1983, pp. 118-120<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBBzPmLj7nfrwfnzEkSp428zKFga3LHFIT3pjtmRiL8MLLuI6zSJ2y00DtdMRYABz2WDB7ijRPWo2Sf5BVenFRCj07jl40lROjjYiLj5PW0ARo4-yCE-TfYjVm_v7Vw1B3dY-nUZbbcik/s1600/oiseau+du+tonnerre.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><br />
</a></div><br />
<div style="text-align: right;">Montréal<br />
13 juillet 2011</div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-10789615198072393712011-07-12T21:35:00.000-07:002011-07-13T09:37:20.168-07:00Making maple sugar<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0aLWijfRYgIxZ91warQMTjjh6T72g8PvSXBKSHc7IoLSwUqvPUDCHbDdqdoPOEdIKo_hDYr6HRzWvWomCqxAzBvjD7EK1Md0H0SEbVfNFKdRZ8rkRXDumEMZQZzHBy2kwfFgewTMCOV0/s1600/22-+Making+maple+sugar.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="292" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0aLWijfRYgIxZ91warQMTjjh6T72g8PvSXBKSHc7IoLSwUqvPUDCHbDdqdoPOEdIKo_hDYr6HRzWvWomCqxAzBvjD7EK1Md0H0SEbVfNFKdRZ8rkRXDumEMZQZzHBy2kwfFgewTMCOV0/s400/22-+Making+maple+sugar.jpg" width="400" /> </a></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><b>MAKING MAPLE SUGAR</b> </div><div style="text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">D’une carte de Noël à une autre carte postale, voici le tableau sur la randonnée du sirop d’érable. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0aLWijfRYgIxZ91warQMTjjh6T72g8PvSXBKSHc7IoLSwUqvPUDCHbDdqdoPOEdIKo_hDYr6HRzWvWomCqxAzBvjD7EK1Md0H0SEbVfNFKdRZ8rkRXDumEMZQZzHBy2kwfFgewTMCOV0/s104/22-+Making+maple+sugar.jpg">John & Mary sont à l’érablière</a>, en avant-plan de l’image. Mary apporte le contenu de la chaudière vers le tonneau tandis que John ne peut s’empêcher de boire le contenu de la sienne. Espérons qu’on ne lui a jamais raconté l’anecdote des morveux qui allaient pisser dans les chaudières dans les érablières. Quoi qu’il en soit, le tableau nous présente, en une image, la cueillette de la sève d’érable et la cabane à sucre, où elle sera transformée en sirop, en tire ou en autre produit de ce que la leçon de vocabulaire appelle franchement <i>a domestic industry</i> (traduit par <i>industrie domestique</i>). Industrie appropriée à une saison, en mars/avril dite <i>sugaring season</i>, ou le <i>temps des sucres.</i> Les perspectives d’éducation économique ne sont jamais absentes longtemps dans les tableaux de <b>conversation anglaise</b>.</div><div style="text-align: justify;"></div><div style="text-align: justify;"><br />
Plus que le traditionnel temps des sucres, l’image nous offre en un seul coup d’œil les différentes étapes de l’<i>industrie domestique</i>. À l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj8BkPr-qjCpIVQqajEYTYTgrvEdHIK7EHuiE7R-bFq1QxsAJtOo__u21oRjESpQeCL24j3-Ju1C4zxR3lbFggyAZJjTITPetbLbSQzcNPpbkXRxIRqsJEzB9iOWkr9WbmsXE6paU5fHzY/s104/cabane+%25C3%25A0+sucre.jpg">extrême droite</a>, nous voyons un homme entailler l’érable. D’autres coupent, à la hache, des troncs d’arbres afin de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj8BkPr-qjCpIVQqajEYTYTgrvEdHIK7EHuiE7R-bFq1QxsAJtOo__u21oRjESpQeCL24j3-Ju1C4zxR3lbFggyAZJjTITPetbLbSQzcNPpbkXRxIRqsJEzB9iOWkr9WbmsXE6paU5fHzY/s1600/cabane+%25C3%25A0+sucre.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="287" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj8BkPr-qjCpIVQqajEYTYTgrvEdHIK7EHuiE7R-bFq1QxsAJtOo__u21oRjESpQeCL24j3-Ju1C4zxR3lbFggyAZJjTITPetbLbSQzcNPpbkXRxIRqsJEzB9iOWkr9WbmsXE6paU5fHzY/s320/cabane+%25C3%25A0+sucre.jpg" width="320" /></a>les ranger le long du mur de la cabane. À l’intérieure, on aperçoit la bouilloire et un homme qui alimente le feu. Des raquettes sont appuyées sur le mur extérieur de la cabane dont les fenêtres sont entrouvertes, tout comme la porte, afin de laisser sortir le surplus de chaleur accumulé. La fumée qui sort amplement de la cheminée nous indique que l’<i>industrie domestique</i> fonctionne à plein rendement. C’est indispensable, car à la gauche, tiré par un cheval, arrive le baril où les participants ont déversé les chaudières fixées sous les chalumeaux. Couché sur le flanc sur un traîneau, le baril permet d’accumuler des litres du divin nectar des visiteurs. Les sillons dans la neige, devant la cabane, montrent que ce n’est pas son premier voyage - ni son dernier. Pour l’époque. l’industrie de l’érablière était fort rentable. Trait pittoresque, l’illustrateur a cru bon d’asseoir un écureuil sur un tronc d’arbre et un autre qui court au galop tout à côté.<br />
<br />
Comme dans tous les tableaux de <b>conversation anglaise</b>, il n’y a pas de plaisir sans une dose d’investissement d'efforts et de travail. Si John & Mary apparaissent comme les consommateurs de la sève d’érable, ils sont plantés au cœur d’un processus de production qui va de la cueillette à la transformation, avant de donner le produit fini. Il s’agit bien d’une cabane à sucre plus industrielle que festive. Le pittoresque de la scène, c’est pour les enfants. On chercherait en vain les tables remplis de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_ARQldyi7HsbJVYK9-sqhFMvi8kvc09giLRM1T0Zx_IselUMzVYBVTGsijqM3ia2M9rQuygkMFRt2yrzVjjrXqDFvCh-ASNWxdUTXr76hFTAGLnstSRLV2m28CzcpqiyVIvt-dBpyCss/s1600/Relais+interieur_foule_408.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="172" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_ARQldyi7HsbJVYK9-sqhFMvi8kvc09giLRM1T0Zx_IselUMzVYBVTGsijqM3ia2M9rQuygkMFRt2yrzVjjrXqDFvCh-ASNWxdUTXr76hFTAGLnstSRLV2m28CzcpqiyVIvt-dBpyCss/s320/Relais+interieur_foule_408.jpg" width="320" /></a>produits sucrés, souvent conservés depuis la récolte de l’année précédente. On n’imagine pas un orchestre jouant du rigodon ou un <i>juke-box</i> faisant tourner des disques de Murielle Millard. Pas de piste de danse non plus et encore moins de grandes salles où pratiquer la danse en ligne. Pour être une <i>industrie domestique</i>, la cabane à sucre ne s’est pas encore transformée en <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_ARQldyi7HsbJVYK9-sqhFMvi8kvc09giLRM1T0Zx_IselUMzVYBVTGsijqM3ia2M9rQuygkMFRt2yrzVjjrXqDFvCh-ASNWxdUTXr76hFTAGLnstSRLV2m28CzcpqiyVIvt-dBpyCss/s104/Relais+interieur_foule_408.jpg">industrie touristique,</a> ce qu’elle deviendra au fur et à mesure que les <i>Sixties</i> avanceront. La concurrence des marchés d’alimentation forcera les propriétaires de cabanes à sucre à amplifier leurs activités vers les salles de réceptions.<br />
<br />
Je me souviens d’avoir été une fois, avec ma classe, en septième année, à une cabane à sucre du mont Saint-Grégoire, près d’Iberville. On était en 1967 je crois. Comme tous les mois de mars s’étirant vers sa fin, il y avait des redoux et le climat, plutôt morne, nous permettait d’aller faire des balades le long de la route. À nos risques et périls! J’y ai vu mon premier animal mort, un chien je pense, probablement frappé par une voiture. De retour à la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgnkIa2b1ZIwDiY0KzTE5bnQyNdqQsHtVJ3qLpCsRdKnopmgH9qmj1fa8rZQd4sToL6xyszNnv0wmm4pAuJsoqcORpla6GyQHwaB9kXJdYxIvKEp3Yn1TgtmFtJ3-pTMoJ8_Oly-qU5jw0/s1600/Cabane02.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgnkIa2b1ZIwDiY0KzTE5bnQyNdqQsHtVJ3qLpCsRdKnopmgH9qmj1fa8rZQd4sToL6xyszNnv0wmm4pAuJsoqcORpla6GyQHwaB9kXJdYxIvKEp3Yn1TgtmFtJ3-pTMoJ8_Oly-qU5jw0/s320/Cabane02.jpg" width="320" /></a>cabane, où on nous servait les traditionnelles crêpes arrosées de sirop d’érable, les patates rôties, les saucisses bacon et jambons, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgnkIa2b1ZIwDiY0KzTE5bnQyNdqQsHtVJ3qLpCsRdKnopmgH9qmj1fa8rZQd4sToL6xyszNnv0wmm4pAuJsoqcORpla6GyQHwaB9kXJdYxIvKEp3Yn1TgtmFtJ3-pTMoJ8_Oly-qU5jw0/s104/Cabane02.jpg">fèves aux lard</a> (que je ne mangeais pas), tarte aux sucres et autres confiseries qui finissaient par nous lever le cœur, le tout culminait avec la raclette sur la neige étalée (que l’on conservait déjà au congélateur tant la neige autour de la cabane avait fondue) et dont nous trempions un morceau de bois afin que le sucre fondu se cristallise pour que nous le mangions. Je comprend fort bien cette intonation du sympathique sociopathe docteur House lorsqu’il renifle sur un <i>Canadian</i>, son voisin, l’odeur <i>écœurante</i> de sucre d’érable.<br />
<br />
En effet, la feuille d’érable n’est pas le symbole du Canada pour rien. L’unifolié rouge complète, avec le castor du 5¢ les symboles naturels du pays. Ce n’est pas parce que le Canada est, en soi, un pays particulièrement «sucré», même si un premier ministre a déjà dit que nous étions les «pluss meilleur pays au monde», mais cette feuille d’érable rappelle la «tradition» au sens le plus vaste du terme, de tout le pays. En fait, seul l’Est du Canada est un pays à cabanes à sucre. L’érable n’est pas une espèce très répandue sur la côte du Pacifique. C’est donc le Canada de la Nouvelle-France et de l’Amérique du Nord britannique que célèbre la tradition, et, de fait, l’érablière fut la canne à sucre des colonies nord-américaines.<br />
<br />
D’ailleurs, si le printemps est considéré comme la saison des sucres, il n’y avait pas qu’à cette <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjGf8gMBEXrcMCYGBFuBfUXGgTbtPMkETeta5IUpJ8SNeqBzZEQy3juUTsf4c_TAkuvxRuNQ2LGMCcPz-UIYhv_LOCTB2pZhFmmbp5VAN8LOlMAou7-wOl0MEPtsJ3C0DuCnQtzxLPF6Oo/s1600/La+Sainte-Catherine.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjGf8gMBEXrcMCYGBFuBfUXGgTbtPMkETeta5IUpJ8SNeqBzZEQy3juUTsf4c_TAkuvxRuNQ2LGMCcPz-UIYhv_LOCTB2pZhFmmbp5VAN8LOlMAou7-wOl0MEPtsJ3C0DuCnQtzxLPF6Oo/s320/La+Sainte-Catherine.jpg" width="248" /></a>période de l’année que le sucre était mis en évidence. Je pense au 25 novembre, un mois avant Noël, où dans la salle des écoles où j’ai été, la direction organisait annuellement la fête de la Sainte Catherine, avec les <i>Klondyke</i>, en fait de la tire de mélasse enrobée dans une papillote dorée, morceau de sucre assez dur pour les dents d'ailleurs, tout cela aspergé de liqueurs douces sucrées, préparait déjà notre future vie de diabétique. Les leçons nous apprenaient que c’était <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjGf8gMBEXrcMCYGBFuBfUXGgTbtPMkETeta5IUpJ8SNeqBzZEQy3juUTsf4c_TAkuvxRuNQ2LGMCcPz-UIYhv_LOCTB2pZhFmmbp5VAN8LOlMAou7-wOl0MEPtsJ3C0DuCnQtzxLPF6Oo/s104/La+Sainte-Catherine.jpg">Marguerite Bourgeoys</a>, la fondatrice de la première école de Ville-Marie, qui accueillait petits blancs et petits «sauvages», qui aurait inventé cette tradition. Il semblerait qu’au Canada, le sucre soit associé à toutes les traditions patriotiques et nationales.<br />
<br />
</div><div style="text-align: justify;">Sainte Catherine était la patronne des philosophes. Récupération chrétienne du supplice que les chrétiens d’Alexandrie infligèrent à <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgu4RQb2WdzCWF6aR9viszeH_ak3BK-6VG2hiuv1IB8VGjcH5IeWEX7y3mYPspec3pvgRGbVaRHsAxsexCgwpN_Xoo8ptDSgoHf4Z0T40RoCmbfPziMWc7F1QyOOblIDD3VwT9y9onVz64/s104/hypathie1.jpg">Hypathie</a>, une philosophe néo-platonicienne, tout ça dépassait l’entendement des enfants, bien que les leçons de catéchisme soumettaient cet entendement <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgu4RQb2WdzCWF6aR9viszeH_ak3BK-6VG2hiuv1IB8VGjcH5IeWEX7y3mYPspec3pvgRGbVaRHsAxsexCgwpN_Xoo8ptDSgoHf4Z0T40RoCmbfPziMWc7F1QyOOblIDD3VwT9y9onVz64/s1600/hypathie1.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgu4RQb2WdzCWF6aR9viszeH_ak3BK-6VG2hiuv1IB8VGjcH5IeWEX7y3mYPspec3pvgRGbVaRHsAxsexCgwpN_Xoo8ptDSgoHf4Z0T40RoCmbfPziMWc7F1QyOOblIDD3VwT9y9onVz64/s320/hypathie1.jpg" width="214" /></a>à de plus rudes distorsions. Sainte Catherine était davantage reconnue, à l’époque, comme patronne des vieilles-filles, ce qui n’avait rien à voir ni avec le sucre, ni avec les érables. Être vieille-fille à l’époque était plutôt assez mal vue. Ce n’était ni être religieuse (épouse du Christ), ni être mariée (épouse d’un homme pour lui donner des enfants), et accepter de rester célibataire et seule, c’est-à-dire «stérile» pour le reste de ses jours demandait une forte dose d'autonomie qui n'était pas donnée à toutes les femmes. Il y avait, bien sûr, le côté sombre, c’est-à-dire celui du lesbianisme, qui était inclu dans les jugements que l’on pouvait porter sur ces femmes sans hommes, mais la discrétion imposait le silence. Voilà peut-être pourquoi on les retrouvait si souvent à l’église. Un peu comme un sentiment de culpabilité refoulé de la part des catholiques d’avoir lapidé une femme philosophe, les vieilles-filles rappelaient le péché de la stérilité que les anathèmes bibliques font peser sur les criminels. Meurtriers et victimes répétaient, annuellement, le cycle de la culpabilité sous des apparences de fêtes traditionnelles où les enfants s’empiffraient, souvent à en être malade, de sucreries. Douce vengeance.<br />
<br />
La saison de mars, donc du temps des sucres, précédait généralement la période des fêtes de Pâques. Elle se situait dans le carême, période où il était recommandé de faire abstinence de toutes gâteries. Mais l’<i>industrie domestique</i> a ses impératifs que les impératifs religieux ne peuvent bousculer, et cela explique la sobriété qu’affiche, malgré tout, le tableau 22. Alors qu’aujourd’hui le carême n’est plus de mise, ni au niveau du jeûne ni au niveau du plaisir interdit, comme la saison des pommes en automne, la saison des sucres se manifeste par un côté commercial et festif impensable dans les <i>Fifties</i>. À considérer le tableau en question, la transgression du carême apparaît déjà peu sérieuse, surtout à voir John vider le contenu de la chaudière, incapable d’attendre que tires et sirops soient prêts à la consommation.<br />
<br />
Le sucre, avec le sel, sont considérés aujourd’hui comme les deux <i>mass murders</i> les plus actifs en Amérique du Nord. On leur attribue, outre le diabète dont je suis atteint, les maladies cardio-vasculaires, des allergies alimentaires, la haute pression, l’obésité - cela va de soi - et quantité d’autres petits problèmes. Avec les graisses animales, ils forment le triumvirat des nouveaux cavaliers de l’Apocalypse. Pourtant, le sucre naturel, à lui seul, ne cause pas le diabète. Le sucre transformé, sucre blanc qu’on verse à profusion dans les pâtisseries, est le principal agent du diabète. Il y a, parmi les inventions commerciales nouvelles, de véritables «bars à pâtisseries<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEix287o9tV-VZZhzvs1Hw-ewlu6yXDlGTMtZh6pkAIgvG9_vQ_F7aSHn8chZEiubBJxNENDUQT3njJetu5ABiPViQNAkkw_-tVfH5bqDEkbWtbGqUt9k33p2vZk9wZ0bD1JcxLeOiOWrxs/s1600/grandma-mollases1.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEix287o9tV-VZZhzvs1Hw-ewlu6yXDlGTMtZh6pkAIgvG9_vQ_F7aSHn8chZEiubBJxNENDUQT3njJetu5ABiPViQNAkkw_-tVfH5bqDEkbWtbGqUt9k33p2vZk9wZ0bD1JcxLeOiOWrxs/s200/grandma-mollases1.jpg" width="141" /></a> sucrées» - j’en connais un sur la rue Mont-Royal où l’été, lorsque la porte est ouverte, et lorsque je passe devant, une écœurante odeur de sucre nous prend au nez et serait suffisante pour déclencher un coma diabétique! -, «bars» qui offrent quantités de sucreries tout aussi riches les unes que les autres, et qui n’ont rien de l’odeur ni du goût des biscuiteries et confiseries de mon enfance (la chaîne des biscuiteries Oscar). Et cela, sans compter les chocolats au lait, les gâteaux à la crème, les tartes dont on honore parfois le profil simiesque de certains politiciens, et autres sucres candies qui se vendent à profusion dans les commerces aux détails. Tout cela renvoie la bonne vieille <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEix287o9tV-VZZhzvs1Hw-ewlu6yXDlGTMtZh6pkAIgvG9_vQ_F7aSHn8chZEiubBJxNENDUQT3njJetu5ABiPViQNAkkw_-tVfH5bqDEkbWtbGqUt9k33p2vZk9wZ0bD1JcxLeOiOWrxs/s104/grandma-mollases1.jpg">mélasse</a> loin en arrière.<br />
<br />
De plus, il y a les métaphores que l’on fait avec le sucre et qui sont associées à l’amour. La Saint-Valentin, en février, est une autre occasion de refiler le diabète à son partenaire en le gavant de cœurs sucrés enrobés de chocolat. <i>Sweet</i> n’est plus un adjectif qui se borne au sucre de la sève d’érable. Les chansons américaines répètent le mot depuis des générations. Pourtant, le sucré n’est pas particulièrement un goût que l’on retrouve sur la peau ou les lèvres, à moins qu’on y ait mis du parfum. Comme on dit, si on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre, une saison en forêt, l’été, le corps enduit de parfum sucré nous montrera bien avec quoi on les attire. Le sucre serait-il un piège à cons? En tout cas, beaucoup y tombent, et parfois s’y précipitent.<br />
<br />
Outre les métaphores sucrées, il y a les métaphores purent érotiques. Le chalumeau au-dessous du quel est suspendu une chaudière donne à l’arbre une allure masculine, et sa sève est moins son sang que sa <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhjL_0xImnNGPEUyEnXoG5KVQD4LQPD23TueIlfZVjpB4PzttKpWh5fhPrznGxRgkU33g7yHb0LfjAfUmgQhaB7Lj_U1uAn7iZAlPg2b2Hgx-7RhXempF05yoZCEGbijcYnC0UTbUEo57A/s1600/%25C3%25A9rable.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhjL_0xImnNGPEUyEnXoG5KVQD4LQPD23TueIlfZVjpB4PzttKpWh5fhPrznGxRgkU33g7yHb0LfjAfUmgQhaB7Lj_U1uAn7iZAlPg2b2Hgx-7RhXempF05yoZCEGbijcYnC0UTbUEo57A/s320/%25C3%25A9rable.jpg" width="78" /></a>semence. Il y a de la fellation dans la cueillette de l’eau d’érable, comme le montre la façon dont John ingurgite la sève de sa chaudière. Cette sève, non encore transformée, est symbole de la vie dans l'Imaginaire des peuples primitifs; elle est naturellement associée au sang et au sperme animal et humain. C’est la vallée de lait et de miel dont parle la Bible; de lait maternel et de miel spermique (qui pourtant n’a pas l’air si sucré que ça!). L’analogie, en ce printemps annoncé, révèle le réveil de la vie dans les arbres endormis. Le linceul de neige est à la limite sur le point d’être évaporé ou fondu sous les chauds rayons du soleil. L’activité avec laquelle s’affairent les <i>hommes</i> nous dit que bientôt, le travail d’ensemencement des champs commencera, avec les belles journées de mai et de juin. Il n’y a pas jusqu’aux <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhjL_0xImnNGPEUyEnXoG5KVQD4LQPD23TueIlfZVjpB4PzttKpWh5fhPrznGxRgkU33g7yHb0LfjAfUmgQhaB7Lj_U1uAn7iZAlPg2b2Hgx-7RhXempF05yoZCEGbijcYnC0UTbUEo57A/s104/%25C3%25A9rable.jpg">traits de givre,</a> qui suivent les branches et les troncs d’arbres, qui n’agissent pas comme une vue aux rayons X de ce qui se passe d’invisible pour les yeux dans chaque arbre de l’érablière.<br />
<br />
Voilà l’importance du rite qui se voit mise en exergue. Comme Noël avec le solstice d’hiver et la Saint-Jean-Baptiste avec le solstice d’été, le temps des sucres est le rite de l’équinoxe du printemps, comme les fêtes des récoltes est celui de l’équinoxe d’automne. Voilà la tradition que perpétue cette fête des sucres, désormais réduite à un <i>jingle</i>: «À la cabane, allons à la cabane, ohé!» Pour les <i>Fifties</i>, la tradition était encore toute proche des rites ruraux, comme je l’ai souligné à plusieurs reprises. C’est dans la mesure où la partie de sucre rejoint Pâques que la fête à la cabane prend un sens; en elle-même, elle n’est qu’une tradition rurale liée à la saison plus qu’à une quelconque transcendance.<br />
<br />
De tous les tableaux de <b>conversation anglaise</b>, <i>Making </i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiUB_Is7XXf-Po_BJ8wotpSfOGvAJEyGLztFElB3HU4Pr7tTKZLGiKv-MCjV2MOrGEBjpY6XPh8BJMK-qMJL-q16LcO9GV5G4gWHDMU9lYpavF19LFO5N4uu7mJ3eQj3jPCAgOALdC4IvM/s1600/marc-aurele-fortin.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="227" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiUB_Is7XXf-Po_BJ8wotpSfOGvAJEyGLztFElB3HU4Pr7tTKZLGiKv-MCjV2MOrGEBjpY6XPh8BJMK-qMJL-q16LcO9GV5G4gWHDMU9lYpavF19LFO5N4uu7mJ3eQj3jPCAgOALdC4IvM/s320/marc-aurele-fortin.jpg" width="320" /></a><i>maple sugar</i> est peut-être l’un des plus travaillés au niveau graphique. C’est en cela qu’il est une véritable carte postale. Il essaie de rejoindre la tradition paysagiste propre à l’art canadien, sans toutefois atteindre la valeur d’un Marc-Aurèle Fortin ou d’une scène des peintres du <i>Group of Seven</i>. Le réalisme de la scène n’évite pas l’usage des traits de couleurs pour décrire la neige, à l'exemple des scènes d'hiver de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiUB_Is7XXf-Po_BJ8wotpSfOGvAJEyGLztFElB3HU4Pr7tTKZLGiKv-MCjV2MOrGEBjpY6XPh8BJMK-qMJL-q16LcO9GV5G4gWHDMU9lYpavF19LFO5N4uu7mJ3eQj3jPCAgOALdC4IvM/s104/marc-aurele-fortin.jpg">Fortin</a>. Cela ne veut pas dire que ce tableau s’élève au-dessus des autres en ce qui concerne l’aspect scénique figé et dénué de vie. Comme toujours, l’impossible capacité à atteindre la vitalité du réel rend le tableau schématique. Comme une peinture de salon vendue chez Walmart à $25.95, il illustre, il ne crée pas.<br />
<br />
Le corpus des leçons du manuel tire à sa fin, et il n’était pas rare, vu le retard généralement pris dans le cours de l’année, que les derniers tableaux de <b>conversation anglaise</b> aient été survolés assez rapidement. Aussi, est-ce le dernier à nous présenter une activité purement liée à l’économie. J’ai dit, d’un tableau à l’autre, combien l’aspect économique de la production et de la consommation était présent dans les différentes scènes, surtout à l’intérieur du second cycle des leçons. Ici, en présentant une <i>industrie domestique</i>, les concepteurs du tableau semblent atteindre une limite que le manuel ne dépassera pas: celui de la grande entreprise, de la foule des employés et travailleurs, cols blancs et cols bleus; la production en séries répondant à des critères de standardisation. Tout ce qui meuble les tableaux de John & Mary reste acquis, non produits, et le regard est visiblement tourné vers l’arrière plutôt que vers l’avenir de la société.<br />
<br />
À l’époque, à la fin des années quarante, les concepteurs ne pouvaient peut-être pas entrevoir le monde <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiNz7divYHXqDUk02oIeWVIhqvQBiQ16rtdvk12f_bbSf0udxIkTmoXjJ8vmw3zR6gLMtkq5jcWWSYeQYHFSubahbe4ndjAegns4qMqSFVvUuthKwPWFsTd99u_8YE61uAct_aSUeqjuxc/s1600/baril+de+s%25C3%25A8ve.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="243" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiNz7divYHXqDUk02oIeWVIhqvQBiQ16rtdvk12f_bbSf0udxIkTmoXjJ8vmw3zR6gLMtkq5jcWWSYeQYHFSubahbe4ndjAegns4qMqSFVvUuthKwPWFsTd99u_8YE61uAct_aSUeqjuxc/s320/baril+de+s%25C3%25A8ve.jpg" width="320" /></a>tel qu’il deviendrait au cours des décennies suivantes. Ou s’ils l’anticipaient, ce n’était pas sans crainte, d’où le besoin de maintenir les activités traditionnelles comme modèles à partir desquels apprendre le vocabulaire de la langue seconde. Le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiNz7divYHXqDUk02oIeWVIhqvQBiQ16rtdvk12f_bbSf0udxIkTmoXjJ8vmw3zR6gLMtkq5jcWWSYeQYHFSubahbe4ndjAegns4qMqSFVvUuthKwPWFsTd99u_8YE61uAct_aSUeqjuxc/s104/baril+de+s%25C3%25A8ve.jpg">cheval</a>, le traîneau, le baril d’eau d’érable, la cabane qui est véritablement une cabane… tout ce rite existait indépendamment de l’<i>industrie domestique</i>, et c’est ce rite plus que l’industrie elle-même que les concepteurs cherchaient à conserver. Mais déjà, certains établissements orientés vers la production d’exportation trahissaient le rite pour se consacrer quasi uniquement à l’industrie qui n’était plus du tout domestique. Comme la ferme de l’oncle George, la cabane à sucre du tableau 22 est irrémédiablement condamnée.<br />
<br />
Lorsque je traverse les parcs de Montréal - le parc Fullum, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj0Zwa0YWgpm0-kfuWjDdewiuMLWbIE2i646-DulRJ9zseh0LU9juSANnpfMpAzuQZOVEcdMO9dx2eQ65SNOR5-YbhUGHzrDNcPyaSQKiWDqlrn0reHzFqWVHBy1gTRbR2pGM-ArT0f4Cs/s1600/Olivier.JPG" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj0Zwa0YWgpm0-kfuWjDdewiuMLWbIE2i646-DulRJ9zseh0LU9juSANnpfMpAzuQZOVEcdMO9dx2eQ65SNOR5-YbhUGHzrDNcPyaSQKiWDqlrn0reHzFqWVHBy1gTRbR2pGM-ArT0f4Cs/s320/Olivier.JPG" width="240" /></a>le parc Lafontaine -, je suis surpris de voir des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj0Zwa0YWgpm0-kfuWjDdewiuMLWbIE2i646-DulRJ9zseh0LU9juSANnpfMpAzuQZOVEcdMO9dx2eQ65SNOR5-YbhUGHzrDNcPyaSQKiWDqlrn0reHzFqWVHBy1gTRbR2pGM-ArT0f4Cs/s104/Olivier.JPG">citadins</a> s’extasier avec leurs appareils photos devant un écureuil. On leur montrerait un vulgaire rat et ils en auraient le dégoût; ajoutés lui une queue touffue à l’extrémité retournée, et le même monde pousse un soupir béat en le bombardant de clic! clic!! Les écureuils vivaient dans les érablières jadis, aujourd’hui, ils vivent dans les parcs urbains. <i>La grande transformation</i>, c’est précisément cela. Le capitalisme a vidé les campagnes et les boisés de leur vie et l'a transposée, suivant des modèles fantaisistes, dans les parcs urbains. L’eau d’érable ne se retrouve plus, pour la plupart d’entre nous, que dans des conserves achetées en magasin. Beaucoup de ses sous-produits sont faits à partir de sucre de canne ou (un temps) de betterave, ou quoi qu’il en soit, de sucre raffiné ajouté. L’artificiel supplante le naturel. <i>Les animaux dénaturés</i> ne se bornent plus aux animaux de zoos, ce sont les humains, dans leur quotidienneté existentielle qui sont aujourd'hui dénaturés. La vie végétale, de même, subit des «adaptations» au grand commerce qui l’exclut de toute <i>industrie domestique</i>.<br />
<br />
Dernier tableau à propagande économique, encore rattaché aux <i>industries domestiques</i> à la veille de leur disparition, fidèle encore à des traditions ancestrales dont le sens du rite est essentiellement oublié, le manuel <b>conversation anglaise</b>, sans le savoir, participait d’une inconsciente cérémonie funèbre. Celle d’un monde ancien confronté à l’invasion agressive de l’<i>American Way of Life</i>. <i>Requiescat in pace.</i></div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: right;">Montréal<br />
12 juillet 2011</div><div style="text-align: justify;"></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-51767985094383762272011-07-11T21:31:00.000-07:002011-07-12T03:47:35.146-07:00Building a kennel<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhLUI381D-JYERkxDtf-HmleKhziYWlzRWOMF_rqnC7Wt_IK4zcG7jHuO5xx77wSx85ZpP1iPvCYAvYitXU-ErQH2eznNMOfFnaAOdrsjU6nVNGraehyphenhyphenbOnuMXHPQtUDUp1tWyiy1zVPqQ/s1600/21-+building+a+chennel+-+copie.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhiMwcxZv0165WZbjmbTzHB5_3ulriqrpWshDsduFLQKgXXSCW3KIYBXPudk6yK2V8TLatQiSFU5FFshYUTmtM8Dt7IBGTJJRHG0Nxmkk1qHacYotfEFDxecVtWpOzHQDtTtnxlJkt_i3Y/s1600/13314910.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9r1UZhFeNTZlXza2PeFQI3y7IbG2cRK6ufHFH5clNk53m4p9ndnI6-rxoacjS15ODCG-sDY7p6NFHupvnqjbGmTvj40hbrPIqtr4PAkPxS2xkTyx5QurAAaD0wo-yl4nhTS6bcRb_ek8/s1600/21-+building+a+chennel.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="292" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9r1UZhFeNTZlXza2PeFQI3y7IbG2cRK6ufHFH5clNk53m4p9ndnI6-rxoacjS15ODCG-sDY7p6NFHupvnqjbGmTvj40hbrPIqtr4PAkPxS2xkTyx5QurAAaD0wo-yl4nhTS6bcRb_ek8/s400/21-+building+a+chennel.jpg" width="400" /> </a></div><div style="text-align: justify;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><b>BUILDING A KENNEL</b></div><br />
Voici Rover redevenu un bon chien bâtard, plutôt que la version fox-terrier dans laquelle il apparaît dans certains tableaux (le 2 le 11). Pour le récompenser, voici que le père Martin, délaissant son costume de chez Bovet pour se délasser, bien que sa chemise soit toujours <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhLUI381D-JYERkxDtf-HmleKhziYWlzRWOMF_rqnC7Wt_IK4zcG7jHuO5xx77wSx85ZpP1iPvCYAvYitXU-ErQH2eznNMOfFnaAOdrsjU6nVNGraehyphenhyphenbOnuMXHPQtUDUp1tWyiy1zVPqQ/s1600/21-+building+a+chennel+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="267" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhLUI381D-JYERkxDtf-HmleKhziYWlzRWOMF_rqnC7Wt_IK4zcG7jHuO5xx77wSx85ZpP1iPvCYAvYitXU-ErQH2eznNMOfFnaAOdrsjU6nVNGraehyphenhyphenbOnuMXHPQtUDUp1tWyiy1zVPqQ/s320/21-+building+a+chennel+-+copie.jpg" width="320" /></a>bouclée jusqu'au cou, participe à la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9r1UZhFeNTZlXza2PeFQI3y7IbG2cRK6ufHFH5clNk53m4p9ndnI6-rxoacjS15ODCG-sDY7p6NFHupvnqjbGmTvj40hbrPIqtr4PAkPxS2xkTyx5QurAAaD0wo-yl4nhTS6bcRb_ek8/s104/21-+building+a+chennel.jpg">construction du chenil</a> pour le chien. Pendant qu’il assène les derniers coups de marteau sur le toit, John scie une planche qui dépasse et Mary peint la toiture, rouge cela va de soi, comme l’était la toiture de la ferme et de la cabane à lapins à la ferme de l’oncle George. Rover, lui, est tout excité, comme s’il apprenait qu’il allait bientôt avoir sa maison à lui, sans un seul Martin sur ses pattes. Derrière eux, une clôture qui semble concrétiser ce que nous disions à propos du tableau précédent sur l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhLUI381D-JYERkxDtf-HmleKhziYWlzRWOMF_rqnC7Wt_IK4zcG7jHuO5xx77wSx85ZpP1iPvCYAvYitXU-ErQH2eznNMOfFnaAOdrsjU6nVNGraehyphenhyphenbOnuMXHPQtUDUp1tWyiy1zVPqQ/s104/21-+building+a+chennel+-+copie.jpg"><i>isolisme</i></a>, et le mur de Berlin érigé entre la vie privée des Martin et leur vie publique.<br />
<br />
C’est probablement la première fois que nous voyons une activité menée en famille et qui ne soit pas une contrainte domestique. Le plaisir de partager un ouvrage en commun, construire un chenil pour Rover, rassemble la famille dans une même activité où ils peuvent partager les tâches. Le tableau permet, à l’occasion, de faire parader une série d’outils, un peu la réponse «machiste» à <i>Learning to cook</i>, sauf que Mary est présente comme son frère John, ce qui n’était pas le cas dans le tableau 13. Il faut dire qu’ici, comparé aux tableaux précédents, John a vraiment une figure «féminine», ce qui apparaît étrange face à la parade d’outils aux allures «péniennes» qui défile autour de la scène: villebrequin et mèches, tournevis, clé anglaise, vis, ciseau, équerre, marteau, hache, colle, clous, niveau, étau, rabot, lime, pinces, mesure à ruban, pied de roi. À cela s’ajoute les outils présents dans le tableau: scie, planches, chaudières et, le produit fini, le chenil, la niche. Nous sommes donc bien à l’équivalent masculin de <i>Learning to cook</i>, et, à la place de Ricardo, Stéphano et autres nonos, nous en appelons aux talents télévisuels de …Monsieur Bricole.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7EL7A14ukhKMZbABa81wzUjeWDIGEeq2QgjWlNc_lKoQJbdfG3-tTvtBqGh-NNiz0v4dFF_TIIKxWzGRjMy5f3CjYtTShXZsjrUHNFBTlpaKyDnDDs9fQBlvfP_8UT1z21rqF7YuzK_8/s1600/040217monsieur-bricole1_n-1.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7EL7A14ukhKMZbABa81wzUjeWDIGEeq2QgjWlNc_lKoQJbdfG3-tTvtBqGh-NNiz0v4dFF_TIIKxWzGRjMy5f3CjYtTShXZsjrUHNFBTlpaKyDnDDs9fQBlvfP_8UT1z21rqF7YuzK_8/s320/040217monsieur-bricole1_n-1.jpg" width="320" /></a>La télévision québécoise des <i>Sixties</i> était remplie de «monsieurs» qui tous avaient une spécialité à exhiber devant les spectateurs. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7EL7A14ukhKMZbABa81wzUjeWDIGEeq2QgjWlNc_lKoQJbdfG3-tTvtBqGh-NNiz0v4dFF_TIIKxWzGRjMy5f3CjYtTShXZsjrUHNFBTlpaKyDnDDs9fQBlvfP_8UT1z21rqF7YuzK_8/s104/040217monsieur-bricole1_n-1.jpg">Monsieur Bricole</a>. Monsieur Pourquoi. Monsieur Muscle. Mon oncle Kessel… Bricolage, connaissances usuelles pour enfants, exercices pour renforcer les muscles, soins pour petits animaux, ils se succédaient devant la caméra, commandités par des quincailleries, des fabricants d’outils, des compagnies d’alimentation pour animaux, des fabricants de produits naturistes… Sans oublier le journal des agriculteurs avec l’émission interminable de <i>La semaine verte</i>, il faut dire que la télévision a toujours pris son rôle d’éducatrice au sérieux!<br />
<br />
Autant d’émissions plates.<br />
<br />
Il n’en était pas encore de même dans les <i>Fifties</i>. La radio pesait encore de son poids, car c’est elle qui fournissait les écrivains qui rédigeaient les téléromans qui s’avéraient être la suite logique des radioromans du matin (<i>Un homme et son péché</i>, le matin à la radio; <i>les Belles Histoires des Pays d’en-haut</i> le lundi soir à la télé racontent le même milieu <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJbAcua9njheh87gmtEbQjdyMvAy-Lve-wWHMselfeFUa_zqCKNdpozFEaEyzvmEe4Vl6kOFn57vd1hA_RF2ei_85mZkE33fy8OR6xLL8sB9l6dEHW5xlNVsJMLSqL-aPg2YaazEcYzmY/s1600/91086-jacques-normand-roger-beaulu-animateurs.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="185" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJbAcua9njheh87gmtEbQjdyMvAy-Lve-wWHMselfeFUa_zqCKNdpozFEaEyzvmEe4Vl6kOFn57vd1hA_RF2ei_85mZkE33fy8OR6xLL8sB9l6dEHW5xlNVsJMLSqL-aPg2YaazEcYzmY/s320/91086-jacques-normand-roger-beaulu-animateurs.jpg" width="320" /></a>et les mêmes personnages inventés par Claude-Henri Grignon). Les animateurs de radio avaient une diction et un professionnalisme qu’ils durent adapter afin de passer le changement de médium, et comme au temps du passage du cinéma muet au cinéma parlant, plusieurs voix radiophoniques s'avérèrent incapables de franchir le saut devant la caméra. Il fallait être un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJbAcua9njheh87gmtEbQjdyMvAy-Lve-wWHMselfeFUa_zqCKNdpozFEaEyzvmEe4Vl6kOFn57vd1hA_RF2ei_85mZkE33fy8OR6xLL8sB9l6dEHW5xlNVsJMLSqL-aPg2YaazEcYzmY/s104/91086-jacques-normand-roger-beaulu-animateurs.jpg">Roger Baulu</a> pour passer, à la fois, à la radio et à la télé sans avoir à changer son style. La télévision était une outre nouvelle dans laquelle on versait un vieux vin. Au bout d’une génération, on jeta le vin et on versa du vin nouveau dans l'outre devenue vieille. Car la télévision devint vite un médium suranné, dès les <i>seventies,</i> lorsqu'on fabriqua pour elle des séries télés hyper-moralisatrices, peu divertissantes, noyées dans des émissions d’information toujours de plus en plus diluées d'aspects critiques et des films fabriqués industriellement à Hollywood et mal doublés en France. Dans tout ça, les monsieur Bricole se succédaient, tantôt commandités par telle quincaillerie, tantôt par telle autre. Des cabanes à moineaux aux niches à chien en passant par des boîtes aux lettres «stylisées», il s’en est scié du bois, planté des clous et déversé des flots de peintures devant des caméras qui ne captaient que le noir et blanc.<br />
<br />
Mon père aurait voulu être menuisier, mais il avait la nuque dure, comme disait Yahweh, et ne voulut jamais aller dans aucune école de menuiserie. Il faut dire que son niveau de scolarité était très bas. Après la guerre, le gouvernement aurait pu lui payer ces cours, mais pour des raisons que j’ignore, il n’y alla pas. Il continua à faire des petites choses dans la cave de la maison ou la «<i>shed</i>» qui jouxtait <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj2c2_-oAu2xQbMkdOWu-xbOgbitJ2qfjFG4jP5nJJpnoUm3rWlvF6WFGf8Q-IDrvqcMPvV4U4duWTf6zpWBGtioxelfILenLHzBO9nCOhGKqWPbw_vxmEXu81Ekua1wHefdZHaRKm1kIs/s1600/auto+de+bois.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="215" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj2c2_-oAu2xQbMkdOWu-xbOgbitJ2qfjFG4jP5nJJpnoUm3rWlvF6WFGf8Q-IDrvqcMPvV4U4duWTf6zpWBGtioxelfILenLHzBO9nCOhGKqWPbw_vxmEXu81Ekua1wHefdZHaRKm1kIs/s320/auto+de+bois.jpg" width="320" /></a>toujours les logements que nous louions. Sa grande spécialité: aiguiser les égoïnes! C’était son passe-temps, et malgré l’insistance de ma mère, il ne tenait pas à me montrer à bricoler. Moi, je regardais, curieux, mais sans attirance. Restait l’odeur du brin de scie frais râpé et du métal des différentes pièces d’outillage. Son chef d’œuvre de menuiserie? Un cendrier sur pied vernis! Tout le reste, il faut le dire, était plutôt pitoyable. Sauf une fois. Je voulais avoir une de ces petites autos à pédales pour me promener sur le trottoir. Or ces autos se vendaient chers, aussi décida-t-il de m’en fabriquer une <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj2c2_-oAu2xQbMkdOWu-xbOgbitJ2qfjFG4jP5nJJpnoUm3rWlvF6WFGf8Q-IDrvqcMPvV4U4duWTf6zpWBGtioxelfILenLHzBO9nCOhGKqWPbw_vxmEXu81Ekua1wHefdZHaRKm1kIs/s104/auto+de+bois.jpg">…en bois</a>. Vous ne le croirez peut-être pas: mais ce fut le succès du quartier. Son coffre avant, qui dissimulait la mécanique des essieux et le pédalier ressemblait au capot d’une Rolls Royce! Elle n’avait rien à envier aux bolides des courses de chars! Décidément, c’est le plus beau cadeau qu’il m’ait fait.<br />
<br />
C’est l’ironie de la raison qui veut qu’il ne suffit pas de suivre une recette à la lettre ou un plan pour devenir automatiquement un maître cuisinier ou un Monsieur Bricole. Il en est de même dans toutes les disciplines. À une époque où l’improvisation est devenue la solution sans effort à toutes les tâches, nous nous en apercevons au fur et à mesure que les termes d’incompétence et de malhabilité deviennent fréquents sur les lèvres de tous et chacun, et qu’il en coûte parfois des rappels après la mort accidentelle d’ouvriers ou de consommateurs. En effet, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhiMwcxZv0165WZbjmbTzHB5_3ulriqrpWshDsduFLQKgXXSCW3KIYBXPudk6yK2V8TLatQiSFU5FFshYUTmtM8Dt7IBGTJJRHG0Nxmkk1qHacYotfEFDxecVtWpOzHQDtTtnxlJkt_i3Y/s1600/13314910.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhiMwcxZv0165WZbjmbTzHB5_3ulriqrpWshDsduFLQKgXXSCW3KIYBXPudk6yK2V8TLatQiSFU5FFshYUTmtM8Dt7IBGTJJRHG0Nxmkk1qHacYotfEFDxecVtWpOzHQDtTtnxlJkt_i3Y/s320/13314910.jpg" width="320" /></a>s’il y a tant de rappels d’automobiles, de nourriture, de jouets pour enfants, de vices de fabrication ou de construction, c’est bien qu’à quelque part, la tâche a été bâclée. Quelqu’un n’a tout simplement pas fait le boulot pour lequel il est payé, ou l’a si mal fait que c’est pire que s’il ne l’avait pas fait du tout. Alors que les <i>Fifties</i> pouvaient se vanter d’avoir fabriquer des réfrigérateurs qui ont duré un demi-siècle et plus, des poêles increvables, des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhiMwcxZv0165WZbjmbTzHB5_3ulriqrpWshDsduFLQKgXXSCW3KIYBXPudk6yK2V8TLatQiSFU5FFshYUTmtM8Dt7IBGTJJRHG0Nxmkk1qHacYotfEFDxecVtWpOzHQDtTtnxlJkt_i3Y/s104/13314910.jpg">automobiles</a> jamais rappelées, des équipements de cuisine jamais démodés, des tourne-disques et des téléviseurs qui, à part quelques lampes à remplacer, pouvaient durer des années, les produits fabriqués de nos jours sont pour faits pour durer une saison, le temps qu’un nouveau modèle, une nouvelle technologie viennent les remplacer. Il n’y a pas jusqu’aux premiers ordinateurs qui se montrent plus viables que les plus récents, payés beaucoup moins chers et aux possibilités quasi illimitées!</div><div style="text-align: justify;"><br />
Est-ce l’éthique du travail bien fait qui s’est perdue en cours de route ou tout simplement la mentalité consumériste qui veut que l’on renouvelle constamment ses équipements pour le simple goût du neuf? La tyrannie de la mode exige-t-elle une dose d’incompétence qui justifie le peu de viabilité <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfUZAjFb0H5lSS-Ari2-i1BZAvEH3amdSbRvOZ4Bn0OGd6d9oqOIZUZKoePi2XNZ7AGXlBHWojmvrUylYY7Nl8bX2FImv0ScTytBnCUxVBEteZSnfHIED11fudyglE_Gur8E6iAX-LyQM/s1600/MR-Clean%25281%2529.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="194" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfUZAjFb0H5lSS-Ari2-i1BZAvEH3amdSbRvOZ4Bn0OGd6d9oqOIZUZKoePi2XNZ7AGXlBHWojmvrUylYY7Nl8bX2FImv0ScTytBnCUxVBEteZSnfHIED11fudyglE_Gur8E6iAX-LyQM/s320/MR-Clean%25281%2529.jpg" width="320" /></a>d’équipements qui trop vite s’usent, s’essoufflent ou tout simplement tombent dans une panne perpétuelle, accumulant ainsi la montagne de déchets non dégradables qui sera le monument élevé par nos contemporains à la gloire de l’efficacité capitaliste? Sur ce point, la quantité de nos déchets sera tout simplement indépassable dans l’Histoire, tant elle n’était pas si élevée durant les <i>Fifties</i> et tant que nous commençons à peine à prendre conscience et à remédier à la pollution mondiale. Après Monsieur Bricole, le temps en est venu à <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfUZAjFb0H5lSS-Ari2-i1BZAvEH3amdSbRvOZ4Bn0OGd6d9oqOIZUZKoePi2XNZ7AGXlBHWojmvrUylYY7Nl8bX2FImv0ScTytBnCUxVBEteZSnfHIED11fudyglE_Gur8E6iAX-LyQM/s104/MR-Clean%25281%2529.jpg">Monsieur Net</a>.<br />
<br />
<i>Building a Kennel</i> ne nous dit pas seulement qu’elle est la base du travail du bois. Il nous dit le plaisir de travailler en famille. La famille Martin, en tant que «famille traditionnelle» se présente comme une «famille normale», et dans toute famille normale, le père doit montrer ses habiletés à ses enfants. Pour les leur transmettre, bien sûr, mais aussi pour montrer qu’il n’est pas seulement un pourvoyeur, le chasseur qui revient avec sa proie dans son portefeuille. Il a des dons, des talents, des passe-temps. Il peut jouer au golf, au bowling, aux boules, au tennis. Il sait aussi bâtir une niche, réparer une pièce automobile, une bicyclette, construire une clôture pour bien marquer son territoire de propriétaire. Il a mil petits dons qui font son souvenir dans la mémoire de ses enfants une fois qu’il sera disparu, car tous les pères ne sont pas Dwight David Eisenhower. Au-delà de la compétence professionnelle, il y a l’habileté des petits maîtres qui n’est pas à négliger. Un passe-temps paternel peut devenir la carrière d’un fils, d’une fille.<br />
<br />
Une niche, c’est l’équivalent d’une maison (sa future toiture rouge renvoie à celle de la maison à l’arrière-plan). Il en a probablement mesuré les plans, égalisé les proportions, la symétrie, l’angle d’ouverture de la porte, la largeur pour que Rover s’y sente confortable. En ce sens, <i>Building a kennel</i> est une leçon de responsabilité paternelle. Une famille compte sur le père, sur l’homme, pour asseoir les plans de la vie domestique. Apporter le butin, mais aussi l’exploiter <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg0VFhSagsAZPhMY1KUjSEApV9dEjL837FqoERRMBupzdc8lr1805UvEzyj5XzF0XdObtq4Q13eW7Hq5OrTq1W1miNhlxg8vMNF18fK4r0bKtBInj2BvZhKEYr5XcVP_KRQhzk_WLbqKmQ/s1600/280px-BalzacBirotteau01.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg0VFhSagsAZPhMY1KUjSEApV9dEjL837FqoERRMBupzdc8lr1805UvEzyj5XzF0XdObtq4Q13eW7Hq5OrTq1W1miNhlxg8vMNF18fK4r0bKtBInj2BvZhKEYr5XcVP_KRQhzk_WLbqKmQ/s200/280px-BalzacBirotteau01.jpg" width="168" /></a>au maximum au profit de toute la maisonnée. La symétrie des pièces, comme celle de la niche, évoque l’équité dans le foyer; chacun a sa place, et chacun reçoit ce qui doit lui être dû selon la tradition et les mœurs. Il ne peut tolérer l’injustice entre ses membres. Bref, il doit veiller à l'harmonie de son foyer, au soutien, au maintien et à l'équilibre familial. Ce drame, Balzac déjà l’inscrivait dans sa <i>Comédie humaine</i>, à travers des personnages comme <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg0VFhSagsAZPhMY1KUjSEApV9dEjL837FqoERRMBupzdc8lr1805UvEzyj5XzF0XdObtq4Q13eW7Hq5OrTq1W1miNhlxg8vMNF18fK4r0bKtBInj2BvZhKEYr5XcVP_KRQhzk_WLbqKmQ/s104/280px-BalzacBirotteau01.jpg"><i>César Birotteau</i></a> et son envers, <i>le père Goriot</i>. Le cinéma américain des <i>Fifties</i> mettait à son programme des pièces d’Eugen O’Neill ou de Tennessee Williams où le défi était toujours le maintien de la domesticité familiale contre les tentations incestueuses ou homosexuelles qui venaient, finalement, détruire l’illusion du rêve puritain des «pères de la nation».<br />
<br />
Aujourd’hui, les niches s’achètent toutes faites. Plus aucun père ne se dépense à la construire lui-même, et s’il le fait, il y a des chances pour que ce soit pour son seul plaisir, ses enfants ne se <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSJnCI05t5LjnlwXBNIJkH44lreZq-sM32BltRTbRR5bLemVYQDIqOJ_f2GaHQL34a4CFf9HZMYYvDaDLffQy0iNdUWQeWZ0XIN8ud1XqKcJ38M6l_O_Fqqyw8cUq3-xFYqZPEc4b58Lk/s1600/421953_3409370257_34.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="150" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSJnCI05t5LjnlwXBNIJkH44lreZq-sM32BltRTbRR5bLemVYQDIqOJ_f2GaHQL34a4CFf9HZMYYvDaDLffQy0iNdUWQeWZ0XIN8ud1XqKcJ38M6l_O_Fqqyw8cUq3-xFYqZPEc4b58Lk/s200/421953_3409370257_34.jpg" width="200" /></a>sentant pas intéressés le moindrement à perdre un après-midi de jeux à scier des planches ou planter des clous. Le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSJnCI05t5LjnlwXBNIJkH44lreZq-sM32BltRTbRR5bLemVYQDIqOJ_f2GaHQL34a4CFf9HZMYYvDaDLffQy0iNdUWQeWZ0XIN8ud1XqKcJ38M6l_O_Fqqyw8cUq3-xFYqZPEc4b58Lk/s104/421953_3409370257_34.jpg"><i>ready-to-wear</i></a> s’applique également aux habitations, qu’on achète toutes conçues, choisies dans le catalogue d’un entrepreneur en construction. D’où l’aspect unidimensionnel, standardisé des maisons de banlieue. La créativité n’est plus de ce monde, du moins en modèle de condos et de coopératives. La «créativité», si on peut lui donner ce nom, dans la construction de maisons ou d’appartements d’habitation, s’est diffusée en système capitalistes, sortie tout droit des régimes totalitaires italiens, allemands et russes. La laideur a un prix, celui de la brutalisation des mœurs, et tout a été livré dans une seule boîte d’emballage.<br />
<br />
Voila ce qui n’était pas encore le cas, en Occident du moins, durant les <i>Fifties</i>, et nous aurions eu peine à le croire considérant que ces bâtiments carrés et sans joie étaient l’expression architecturale domestique des régimes totalitaires. Les petites maisons de banlieues avaient sans doute un aspect peu artistique, mais chaque maison était unique en elle-même. Elle évoquait la spécificité de l’individualité, de sa famille et non son appartenance à un moule. C’est à partir des <i>Sixties</i> que le modèle des pays de l’Est entra en Amérique, suivant en cela les pays d’Europe de l’Ouest qui trouvaient le style juste assez bon pour les H.L.M. Dans les banlieues, ces maisons appartements se multiplièrent, d’abord en duplex et triplex, puis en blocs appartements, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgEF1TtM_RbgOYAPoUndzDz6IB2t2O5-TYLvcR0w-5COcPZqu6r9SisyClgnGzsVWlhfu0RipNJPqkifSVm9dhdyJlr5EJuCpEPB_xCLJWnotbV2v6-YzLsrtQlEsICSycowajo-PkilqA/s1600/768.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="206" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgEF1TtM_RbgOYAPoUndzDz6IB2t2O5-TYLvcR0w-5COcPZqu6r9SisyClgnGzsVWlhfu0RipNJPqkifSVm9dhdyJlr5EJuCpEPB_xCLJWnotbV2v6-YzLsrtQlEsICSycowajo-PkilqA/s320/768.jpg" width="320" /></a>comme ceux que nous voyions déjà dans le tableau 6. Le processus d’enfermement postulé par Foucault pour le XVIIe siècle était devenu la norme, même en Amérique du Nord. Si les petites maisons cossues de banlieue, comme celle des Martin, pouvaient résister encore à la standardisation, même au prix du mauvais goût, elles n’allaient pas tarder à céder devant l’envahissement de ces nouveaux types d’habitation où, sous des faux airs d’ornements et de styles, toutes les portes se confondent avec les mêmes boîtes aux lettres situées aux mêmes endroits, sous les mêmes luminaires, avec le même nombre de marches à chaque escalier et le même palier d’entrée. Le style cubique <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgEF1TtM_RbgOYAPoUndzDz6IB2t2O5-TYLvcR0w-5COcPZqu6r9SisyClgnGzsVWlhfu0RipNJPqkifSVm9dhdyJlr5EJuCpEPB_xCLJWnotbV2v6-YzLsrtQlEsICSycowajo-PkilqA/s104/768.jpg">Pointe-aux-Trembles</a>, quartier résidentiel de l’est de Montréal, revêtu d’une ornementation baroque crémeuse afin de lui enlever son arrière-goût affreusement prolétarien, pouvait servir la petite-bourgeoisie avec la même satisfaction qu’il servait les prolétaires est-européens. Il suffisait de mettre bien de la crème dans l’apparence pour lui donner un air bourgeois, et le tout était joué.<br />
<br />
La niche de Rover sera à l’image de la maison des Martin. Les blocs appartements ne sont pas à l’image de la grande bourgeoisie des quartiers riches des métropoles. Ils sont le fruit d’un métissage des plus abjects qui soient: la fonctionnalité communiste derrière le style bourgeois. Comme le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiG9E6ch-0cnuJbJ4rPjL2merOLCDqZqAjG7I4RAOQta4Z9AVJv05zgEYjIsAYGJ0OHkdWYZJzXfKQB83MoIRB80ceQRj9j50ddt5odkO03c3CGgIMBicBsfJlQAaOymzkFPTmZk8Qaon0/s1600/etalement-urbain.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="256" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiG9E6ch-0cnuJbJ4rPjL2merOLCDqZqAjG7I4RAOQta4Z9AVJv05zgEYjIsAYGJ0OHkdWYZJzXfKQB83MoIRB80ceQRj9j50ddt5odkO03c3CGgIMBicBsfJlQAaOymzkFPTmZk8Qaon0/s320/etalement-urbain.jpg" width="320" /></a>léninisme s’est mêlé au système capitaliste avec ses politiques de lignes de partis dépendant d’une administration performante, l’Occident a épousé le pire de ce qui était encore séparé et antithétique dans les <i>Fifties</i>. Le <i>Village global </i>de McLuhan ne sera pas constitué de petites niches de Rover, mais des blocs appartements, des gratte-ciel, des résidences Soleil et autres sous-produits d’une architecture de masse sans imagination, moulés au mauvais goût et au <i>kitch</i> des consommateurs d’un certain âge qui, dans leur jeunesse, avait découvert le <i>kitsch</i>, précisément, dans la décoration domestique de leur bungalow de banlieue. Certes, ce mauvais goût n’avait pas été pensé en fonction de créer de fausses façades à des blocs fonctionnels et froids. Mais la société de masse poursuivait son développement sur ses bases standards en fonction de l’explosion urbaine et de l’étalement des quartiers en périphérie. Une fois la limite atteint de l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiG9E6ch-0cnuJbJ4rPjL2merOLCDqZqAjG7I4RAOQta4Z9AVJv05zgEYjIsAYGJ0OHkdWYZJzXfKQB83MoIRB80ceQRj9j50ddt5odkO03c3CGgIMBicBsfJlQAaOymzkFPTmZk8Qaon0/s104/etalement-urbain.jpg">étalement urbain</a>, le mouvement, comme un élastique trop longtemps étiré, ne pouvait que rebondir d'abord sur les banlieues puis dans les centre-villes. Tout le monde les aimait parce que tout le monde les habitait; tout le monde les habitait parce que tout le monde les aimait. Devant cette tautologie, l’art n’a plus que sa taire.<br />
<br />
La famille Martin est décidément une famille «normale», «traditionnelle», et comme le dit un des enfants de la série québécoise, <i>Les Parent</i>, c’est donc une<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi8jNa31CrgfdDgcMBcMnd1nZbCFHy1hD7TTkm44o8nwGQFyLsOwoYWTjq3r8DSBbtqQIbkhkqSBpRHfhgI9DMAvhNI-XGfuk7YEnnYt51YrJAYpq7WuYxORKR_WAr0YJbCXbOco3MTtEs/s1600/niche.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi8jNa31CrgfdDgcMBcMnd1nZbCFHy1hD7TTkm44o8nwGQFyLsOwoYWTjq3r8DSBbtqQIbkhkqSBpRHfhgI9DMAvhNI-XGfuk7YEnnYt51YrJAYpq7WuYxORKR_WAr0YJbCXbOco3MTtEs/s320/niche.jpg" width="235" /></a> famille plate. Toujours surprise, suspendue dans ses actions, comme posant pour un photographe de salon, la vie est absente de cette scène comme des précédentes. Ce qui reste, c’est la leçon morale, l’étalage des biens et la sécurité de la propriété, cette quête de l’<i>isolisme</i> qui est même transposée sur le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi8jNa31CrgfdDgcMBcMnd1nZbCFHy1hD7TTkm44o8nwGQFyLsOwoYWTjq3r8DSBbtqQIbkhkqSBpRHfhgI9DMAvhNI-XGfuk7YEnnYt51YrJAYpq7WuYxORKR_WAr0YJbCXbOco3MTtEs/s104/niche.jpg">chien</a> qui, tout en s’excitant de sa niche, devrait deviner qu’il ne pénètrera plus si souvent dans la maison familale pour assister au réveil de John, comme dans le tableau 2. L’unité de la famille, comme idéologie du temps, sa sécurité comme anxiété généralisée de l’époque, enfin la poétique où, autour d’une scène, gravitent les objets désignés par le vocabulaire, l’emporte sur l’action, son but, son sens et sa portée. Le paradoxe, c’est à quel point ce goût de l’intérieur ne correspondit pas à un goût d’intériorité. <i>Au commencement était l'action; </i>cette phrase du Faust de Gœthe ne s'applique sûrement pas à <b>conversation anglaise.</b><br />
<br />
En effet, nous cherchons la spiritualité dans ces tableaux, même dans ceux où sont célébrés la messe et Noël. La conduite morale l’emporte sur tout, y compris la vie des êtres. La réflexion sur le travail ne dépasse pas le niveau du devoir (<i>homework</i>) et du délassement familial (<i>Building a kennel</i>). Ce que le caractère bourgeois semble mépriser, c’est la nécessité pour toute civilisation d’associer une élévation de l’âme des individus dans son processus d’édification matérielle, strictement réservée à des satisfactions économiques et politiques, où la corruption et le cynisme ont aujourd’hui pris la mesure. Le rendement avec lequel, la famille attelée à la tâche, permet à Rover de se trouver équiper d’une niche qui l’isolera encore plus de son «milieu» familial dit à quel point nous finirons, probablement tous, seuls et abandonnés …comme un chien.<br />
<br />
<div style="text-align: right;">Montréal</div><div style="text-align: right;">11 juillet 2011</div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com7tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-11657723043444398852011-07-10T21:21:00.000-07:002011-07-11T10:39:07.284-07:00In the kitchen<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9QoALtjYrj1mr8ceB_RdQl1-ufOGV9ziOYje6uWcwqAwKJe_eGgnyrF3gSdMplGsxDFH_rZNR1OCzybZtN7Ci4E6cML5sqVAwSdPyoU_7OGqQkJLLmawViKpX3LlKEYjoLHiCZ0g8s0U/s1600/20-+in+the+kitchen.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="291" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9QoALtjYrj1mr8ceB_RdQl1-ufOGV9ziOYje6uWcwqAwKJe_eGgnyrF3gSdMplGsxDFH_rZNR1OCzybZtN7Ci4E6cML5sqVAwSdPyoU_7OGqQkJLLmawViKpX3LlKEYjoLHiCZ0g8s0U/s400/20-+in+the+kitchen.jpg" width="400" /></a></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdG-4Z27hHthItitaNPCB9Ppkj3xcxIXFHBAdqZw-e0b915wlpNN7fN6DpmVuIk2lMiYz3H4K1oNzBG2xx0FilKFfAOWanb5TFH3327qXnmmrIjB3a96CJy9FXcztLQP3VoK0Eb19dZoU/s1600/20-+in+the+kitchen.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"> </a></div><div style="text-align: center;"></div><div style="text-align: center;"><b>IN THE KITCHEN</b><br />
<br />
</div><div style="text-align: justify;">Nous voici, enfin, pénétrant dans la pièce la plus importante de la maison des Martin: la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdG-4Z27hHthItitaNPCB9Ppkj3xcxIXFHBAdqZw-e0b915wlpNN7fN6DpmVuIk2lMiYz3H4K1oNzBG2xx0FilKFfAOWanb5TFH3327qXnmmrIjB3a96CJy9FXcztLQP3VoK0Eb19dZoU/s104/20-+in+the+kitchen.jpg">cuisine</a>. Conforme au détail que nous présentait le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQ2cH2qPepU4qIS9dSocatbLvUschcM5xAaX71cicurvKWiujiSgXGMwL37HLNeZRcGGy2ZZ1GCD2IYgOvzNZ78lDEfmpovdLwN2ItBz9DUnnhn2Q1-pDoLBxXjs0FjiwHKqFg-t1_2E8/s104/13-+Mary+makes+cakes+-+copie.jpg">tableau 13</a>, la cuisine des Martin correspond au <i>design</i> des cuisines des <i>Fifties</i>. En cela, elle est le centre de la révolution culturelle de la société de consommation: la <i>culture électro-ménagère</i>, comme l’appelle l’historien québécois Yvan Lamonde. Vaste, spacieuse, équipée des plus récents modèles de pièces <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQ2cH2qPepU4qIS9dSocatbLvUschcM5xAaX71cicurvKWiujiSgXGMwL37HLNeZRcGGy2ZZ1GCD2IYgOvzNZ78lDEfmpovdLwN2ItBz9DUnnhn2Q1-pDoLBxXjs0FjiwHKqFg-t1_2E8/s1600/13-+Mary+makes+cakes+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="175" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQ2cH2qPepU4qIS9dSocatbLvUschcM5xAaX71cicurvKWiujiSgXGMwL37HLNeZRcGGy2ZZ1GCD2IYgOvzNZ78lDEfmpovdLwN2ItBz9DUnnhn2Q1-pDoLBxXjs0FjiwHKqFg-t1_2E8/s200/13-+Mary+makes+cakes+-+copie.jpg" width="200" /></a>ménagères: réfrigérateur, poêle au gaz (avant l’électricité) et des armoires, des tiroirs à n’en plus savoir quoi y mettre à l’intérieur. Je dénombre 13 armoires de haut pour 6 armoires de bas, 11 tiroirs de bas. On devine toutes les pièces d’équipement de cuisine que cela prend pour remplir ces espaces. De plus, le frigidaire est un modèle aux coins arrondis, mais à deux portes pour le haut et deux pour le bas. Le poêle surmonte un fourneau et un tiroir pour ranger les chaudrons et casseroles tandis qu’un fourneau supplémentaire jouxte le poêle. L’évier est rempli de vaisselles, et comme le sexisme ne démord pas, c’est Mary qui lave la vaisselle pendant que son frère John l’essuie. Madame Martin frotte le dessus du fourneau tandis que son paresseux de mari est assis à la table de la dînette et, à son habitude, lit le journal et fume une bonne pipe. Décidément, soit qu’il surveille la montée ou la descente de la bourse ou encore qu’il est obsédé par les nouvelles sportives, papa Martin n’a guère d’autres manifestations de vie, jusqu’ici, que de manger, lire son journal et fumer sa pipe. Un tabouret permet aux gens de se reposer tandis que la chatte Pussy (dont le poil noir est devenu gris (?)) lape son lait en en renversant sur le plancher vert. Il est cinq heure moins vingt à l’horloge, on est donc après le souper (on soupe tôt chez les Martin), puisque les enfants font la vaisselle avant d'aller faire leurs <i>homeworks</i>.<br />
<br />
Il est dans l’ordre des choses que la cuisine soit le centre de l’ère de l’abondance de l’<i>American Way of Life</i>. Il est d’usage, aussi, qu’elle soit le centre de tous les merveilleux apports de la mécanique moderne dont la démocratisation rend la révolution industrielle toujours accessible aux individus autant qu’aux entreprises. La famille, qui a toujours été une unité de production de base, apparaît ici comme le cœur d’une entreprise industrielle. Le père-patron, la mère-coordinatrice, les enfants-ouvriers. Le monde de cols blancs du bureau de monsieur Martin est reproduit <i>stricto sensu</i> dans sa propre demeure.<br />
<br />
Le jaune mât et le vert foncé domine le décor. Les bancs de la dînette et du tabouret sont recouverts <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEifK9Nof_yZwdC6iEcuFK9STWq6Zik1NrqOQNe2rtG815Opr7Cn68ya1hdJh-Kvu_Ylhm_aWZ7cNFyCOSujxYEAcBzac6T6LRUmEBiokcZBrdeZyDrskJIik1FHB0ZeT6J5XifPu2B30Q0/s1600/maman+dans+la+kitchen.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEifK9Nof_yZwdC6iEcuFK9STWq6Zik1NrqOQNe2rtG815Opr7Cn68ya1hdJh-Kvu_Ylhm_aWZ7cNFyCOSujxYEAcBzac6T6LRUmEBiokcZBrdeZyDrskJIik1FHB0ZeT6J5XifPu2B30Q0/s200/maman+dans+la+kitchen.jpg" width="113" /></a>d’une cuirette verte agencée à la couleur du plancher. Le chrome commence une pénétration modeste de la cuisine par la structure métallique de la table de la dînette et des pieds du tabouret. Dans moins de dix ans, toute la pièce en sera saturée. La <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEifK9Nof_yZwdC6iEcuFK9STWq6Zik1NrqOQNe2rtG815Opr7Cn68ya1hdJh-Kvu_Ylhm_aWZ7cNFyCOSujxYEAcBzac6T6LRUmEBiokcZBrdeZyDrskJIik1FHB0ZeT6J5XifPu2B30Q0/s104/maman+dans+la+kitchen.jpg">silhouette</a> de madame Martin évoque encore la cuisinière des années quarante. Ses talons hauts dans la cuisine déparent avec le gros tablier et la robe qu’on jurerait faite pour une soirée. Les enfants Martin sont, de même, fidèles à leur garde-robe. Malgré l’heure, le père Martin n’a pas encore appris à relaxé et à dénouer sa cravate ni à enlever son veston. Comme on l’a vu au tableau 11, il va les garder toute la soirée.<br />
<br />
De tableau en tableau, la vie des Martin nous apparaît, aujourd’hui, une véritable vie «drabe», sans fantaisie ni audace. Pourtant, Mary et John semblent heureux de leur sort, et le bonheur domestique n’est pas mieux représenté que par la satisfaction de Pussy qui lape son lait. Le confort, c’est le bonheur. La leçon du tableau est aussi simple que ça, et nous apprend rien de nouveau sur la mentalité qui a présidé à la confection des tableaux de<b> conversation anglaise</b>.<br />
<br />
Là où les révolutions s’accomplissaient ordinairement à travers la guerre civile et la violence, dans les effondrements de structures économiques et des régimes politiques, celle de la société de consommation se déroule paisiblement, au niveau strict des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhoYGmyA-LXpYcGFky_I5j2rQA24Mw94dKHrqo2MQf4fj1MiUWorD53kGQQ5LHzG4UfsWCTm3yZVV1I286w8VF7UOlyg21B3G9JIXO0g_hSo0HJrlZv0j_rDnu4tJiU7QHqzo_BgRkTCm8/s1600/783---Cuisine-des-annees-50.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="224" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhoYGmyA-LXpYcGFky_I5j2rQA24Mw94dKHrqo2MQf4fj1MiUWorD53kGQQ5LHzG4UfsWCTm3yZVV1I286w8VF7UOlyg21B3G9JIXO0g_hSo0HJrlZv0j_rDnu4tJiU7QHqzo_BgRkTCm8/s320/783---Cuisine-des-annees-50.jpg" width="320" /></a>mentalités, et la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhoYGmyA-LXpYcGFky_I5j2rQA24Mw94dKHrqo2MQf4fj1MiUWorD53kGQQ5LHzG4UfsWCTm3yZVV1I286w8VF7UOlyg21B3G9JIXO0g_hSo0HJrlZv0j_rDnu4tJiU7QHqzo_BgRkTCm8/s104/783---Cuisine-des-annees-50.jpg">cuisine</a> en est le centre comme l’Assemblée nationale du Tiers-État en France en 1789. Ici, la <i>culture électro-ménagère</i> apprend à se délester des tâches domestiques aliénantes. Le vieux rêve d’Aristote semble être sur le point de se réaliser: l’homme, animal trop noble pour être réduit à des tâches inférieures, se verra remplacé par des esclaves, non plus humains - la démocratie proscrit l’esclavage avec lequel elle est incompatible, sinon par le biais du salariat -, mais mécaniques avivées par le pouvoir électrique. Nombre de ces appareils, d’ailleurs, ne semblent pas figurer dans le tableau: grille-pain, cafetière, malaxeur, etc n’y apparaissent pas. De plus, on ne voit aucune fiche électrique dans le mur sur le comptoir et le poêle est encore au gaz. Nous serions alors à la limite des <i>Fifties</i>. À moins que tout cela soit déjà là, mais cachés dans les armoires. Nous pourrions croire que l’appareil situé à côté du poêle est une lessiveuse à vaisselle, mais alors pourquoi les enfants la lave-t-elle à l’évier?<br />
<br />
C’est le paradoxe du tableau 20: la cuisine est un espace équipé, modernisé, aéré, mais les inventions de l’heure s’y font remarquer par leur absence. On en reste au <i>desing</i> de la pièce, non tant à son équipement. Le contraste avec nos actuelles cuisines, c’est que ces dernières sont réduites dans <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjRncm0yvLfC9Ev7WjSaaZPeMtnKdwOLW2WbAbcSKb6uTgcztFURDSybjE1ogvrq3URTrit7BWaILdHQRXHuXnRurOWXya6tNly0yqgcQAy5cjL1j4hPoRjGf45M4slQz_kIYytm1OxyOA/s1600/Toilet.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="222" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjRncm0yvLfC9Ev7WjSaaZPeMtnKdwOLW2WbAbcSKb6uTgcztFURDSybjE1ogvrq3URTrit7BWaILdHQRXHuXnRurOWXya6tNly0yqgcQAy5cjL1j4hPoRjGf45M4slQz_kIYytm1OxyOA/s320/Toilet.jpg" width="320" /></a>l’espace qu’elles occupent dans l’ensemble de la superficie du logement. À dire vrai, l’espace occupé par une cuisine, aujourd’hui, est fortement comparable, sinon inférieure, à celui occupé par la salle de bain. Il semble même que la salle de bain est le doublet de la cuisine: même importance de la plomberie, du réchaud (pour l’eau chaude), de la propreté, de l’équipement sophistiqué. L’une est pour l’absorption de la nourriture, l’autre pour son évacuation. La scène du <i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjRncm0yvLfC9Ev7WjSaaZPeMtnKdwOLW2WbAbcSKb6uTgcztFURDSybjE1ogvrq3URTrit7BWaILdHQRXHuXnRurOWXya6tNly0yqgcQAy5cjL1j4hPoRjGf45M4slQz_kIYytm1OxyOA/s104/Toilet.jpg">Fantôme de la liberté</a> </i>de Buñuel (1974) qui nous présente un grand dîner bourgeois où les chaises de la table à dîner ont été remplacées par des bols de faïence sanitaire et les petits cubicules où on se fait livrer la nourriture, inverse précisément cette familiarité des deux appartements. Lorsqu’on a un trois à demi à louer, la demie est-elle la cuisine ou la salle de bain?<br />
<br />
Mais ici, la cuisine est vaste, et la seule image entrevue de la salle de bain, dans le tableau 2, nous apparaît moins vaste que la cuisine. À l’époque, la frontière «bienséante» entre le grand respect dû à la nourriture («Donnez-nous aujourd’hui notre pain quotidien») et la honte que suppose l’excrétion, est une ligne de démarcation qui se trouve intériorisée aussi bien dans les mœurs que dans la disposition des pièces. Nous n’imaginons pas la «salle du trône» à côté de la cuisine. Les odeurs, sévèrement classées, ne se mêlent pas. Les sujets de conversation non plus.<br />
<br />
La vie bourgeoise est une vie hypocrite, faite de feintes, de mensonges, de négations. L’apparence stylisée de ses membres contribuent à surcharger le tableau de cette apparence qui font que nous ignorons ce qu’est, en réalité, la famille Martin. Qu'en sont réellement ses membres. Que savent-ils, que pensent-ils, individuellement, personnellement, honnêtement? Voilà comment le secret finit par générer des «hypothèses», des «doutes», des «on-dit», enfin des ragots. Les rumeurs ne provenaient pas de l’extérieur dans les Peyton Places des <i>Fifties</i>, elles étaient générées de l’intérieur même de la «forteresse vide». Tant d’armoires (et nous ne voyons qu’un tiers de la cuisine!), tant de placards, tant de tiroirs secrets ne pouvaient que signifier qu’il y <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTX1tRs9LFapzZCnwiQ7ZnCkNcatqwOxvpW0kCkEu0Z2e1ihL0_GcLOO54UdsBXdjMfDabAqed-kyeMkI0c40DwQ8Qe_gLp2X_goTOQxvToVBAkJN6EzoZF0TziXG7b4svyhpXKyWABIU/s1600/regards+parall%25C3%25A8les.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="152" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTX1tRs9LFapzZCnwiQ7ZnCkNcatqwOxvpW0kCkEu0Z2e1ihL0_GcLOO54UdsBXdjMfDabAqed-kyeMkI0c40DwQ8Qe_gLp2X_goTOQxvToVBAkJN6EzoZF0TziXG7b4svyhpXKyWABIU/s320/regards+parall%25C3%25A8les.jpg" width="320" /></a>avait plus que les utilitaires qui se dissimulaient dans ces caches. La dynamique qui anime la famille est, comme toujours, suspendue dans le temps vide. Personne ne se regarde. Les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTX1tRs9LFapzZCnwiQ7ZnCkNcatqwOxvpW0kCkEu0Z2e1ihL0_GcLOO54UdsBXdjMfDabAqed-kyeMkI0c40DwQ8Qe_gLp2X_goTOQxvToVBAkJN6EzoZF0TziXG7b4svyhpXKyWABIU/s104/regards+parall%25C3%25A8les.jpg">regards</a> du père et du fils sont orientés, parallèlement, dans la même direction. Celui de Mary s’égare à travers la fenêtre. Madame Martin baisse les yeux sur son four, tandis que Pussy montre son «point d’interrogation» à l’ensemble de la famille. Les bouches sont entrouvertes, mais aucune parole ne semble en sortir, et si l’on voulait imaginer un dialogue entre les membres de la famille, nous serions bien en peine de deviner de quoi ils peuvent s’entretenir, toujours à leurs affaires individuelles.<br />
<br />
N’en faisons surtout pas un drame. Personne ne tirera le tiroir qui contient la coutellerie pour poignarder un autre membre de la famille. La bonne humeur et la cordialité sont le premier message <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgPP65HNpFt_7HCBkRVht2IsFBhW760HXNX85nkESwlsJGOpUW2wwX4UUxdmZ7OlV8FW-6ZiR_7JdbXKkByVWxmSZueAgf4YE2NESxb0IsrThZcnHENvJMNX2uRWcvklmhOs5cEXzyvl08/s1600/barbe_belue_decor_redimensionnee2.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="150" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgPP65HNpFt_7HCBkRVht2IsFBhW760HXNX85nkESwlsJGOpUW2wwX4UUxdmZ7OlV8FW-6ZiR_7JdbXKkByVWxmSZueAgf4YE2NESxb0IsrThZcnHENvJMNX2uRWcvklmhOs5cEXzyvl08/s200/barbe_belue_decor_redimensionnee2.jpg" width="200" /></a>que les concepteurs du tableau veulent nous faire croire. Et sans doute, n’y a-t-il pas raison de mettre en doute l’amour mutuel que se portent les membres de la famille Martin. Le problème réside précisément dans le fait que ce bonheur familial est enfermé sur lui-même, replié sur ses membres, et qu'il a besoin de se repli pour «s'épanouir». Encerclés de tiroirs et d’armoires, un peu comme la caricature qui nous montre un individu dans un cercle avec plusieurs portes à sa disposition, chaque membre de la famille est en position d'ouvrir la mauvaise porte d'armoire, d'où un tigre pourrait surgir et sauter sur lui pour le dévorer. Par contre, s’il ouvre la bonne, il sera sauvé. Madame Martin s’apprêterait-elle à ouvrir la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgPP65HNpFt_7HCBkRVht2IsFBhW760HXNX85nkESwlsJGOpUW2wwX4UUxdmZ7OlV8FW-6ZiR_7JdbXKkByVWxmSZueAgf4YE2NESxb0IsrThZcnHENvJMNX2uRWcvklmhOs5cEXzyvl08/s104/barbe_belue_decor_redimensionnee2.jpg">porte du four</a>? Qui sait ce qui en sortira?<br />
<br />
La pièce est pourtant bien éclairée, bien ouverte sur l’extérieur par deux fenêtres situées sur le même mur, un devant l’évier, l’autre à la dînette. Comme ce n’était sans doute pas un soir d’anniversaire ou de fête, la famille a soupé dans la dînette à même la cuisine. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjNHAww585MauvScXd4Xe-omY_A4CSFlX1TDJBcf3d9grZKqECEUPn1Q6DMzJ-P94q5FrVuc9GBGhHJy80sdQT_9Rf7jTWo19d56hLlQROgIatxB1s2Ml4lTBm3pLRIhOnE_EyXm61eKLI/s1600/main-annees-50-modifiee-plus-grande.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="194" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjNHAww585MauvScXd4Xe-omY_A4CSFlX1TDJBcf3d9grZKqECEUPn1Q6DMzJ-P94q5FrVuc9GBGhHJy80sdQT_9Rf7jTWo19d56hLlQROgIatxB1s2Ml4lTBm3pLRIhOnE_EyXm61eKLI/s200/main-annees-50-modifiee-plus-grande.jpg" width="200" /></a>La maison des Martin est grande et il faut beaucoup marcher pour la parcourir en son entier. C’est tout ce que nous en sauront, rendu à la fin de notre itinéraire de <b>conversation anglaise</b>. L’aspect caché ou secret de la «forteresse Martin» peut apparaître exagéré, mais le fait est que les fenêtres sont lourdement bordurées de rideaux fantaisistes. L’habillement des femmes, Mary et sa mère, est digne d’un costume de cosmonaute tandis qu’on se rappelle ce que j’ai dit du costume harnaché du père Martin. Il y a plusieurs épaisseurs de tissus qui enrobent le corps des Martin. Rideaux, vêtements, tapis, cuirette; tout est vêtu et revêtu. Tant de tissus finissent par relever du rôle de la cote de mailles et de l’armure médiévales. À <i>Peyton Place</i>, tout le monde s’enfouit dans sa demeure, lieu privé opposé au <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjNHAww585MauvScXd4Xe-omY_A4CSFlX1TDJBcf3d9grZKqECEUPn1Q6DMzJ-P94q5FrVuc9GBGhHJy80sdQT_9Rf7jTWo19d56hLlQROgIatxB1s2Ml4lTBm3pLRIhOnE_EyXm61eKLI/s104/main-annees-50-modifiee-plus-grande.jpg">lieu public</a>, mais surtout lieu de dissimulation opposé au lieu où les apparences et les ornementations peuvent s’exhiber.<br />
<br />
Cette pièce, avons-nous dit, est le cœur de la révolution des mentalités, de la révolution culturelle des <i>Fifties</i>. C’est l’endroit où la<i> culture électro-ménagère</i> a favorisé le développement, beaucoup mieux <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHhx2AimSazKMiVsRUv0pvWHjU30LOYl7JVNkUAW00jJUl1tKmr5n1iz8nEw7zrzc5qrZvewtrkOLoJOndMFavj6ljr4nVLGQ_qg0BZvNQFEC5YwKFqKlDxphYaPqMoh9IEbq3qMX5Dis/s1600/schema-recup-edp.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="169" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHhx2AimSazKMiVsRUv0pvWHjU30LOYl7JVNkUAW00jJUl1tKmr5n1iz8nEw7zrzc5qrZvewtrkOLoJOndMFavj6ljr4nVLGQ_qg0BZvNQFEC5YwKFqKlDxphYaPqMoh9IEbq3qMX5Dis/s200/schema-recup-edp.jpg" width="200" /></a>que dans le salon où le tourne-disque électrique et la télévision n’ont fait qu’ouvrir une porte sur le grand monde de la politique. Ici, c’est bien d’une «révolution (d')intérieur(e)» qu’il s’agit. Parce que c’est l’endroit où le crû devient cuit, la culture l’emporte sur la nature. L’opposition entre la salle de bain et la cuisine provient de cette ligne de démarcation entre crû et cuit. Le seul lien, c’est l’évier, par où les déchets de tables dilués dans le savon, va retrouver les autres <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHhx2AimSazKMiVsRUv0pvWHjU30LOYl7JVNkUAW00jJUl1tKmr5n1iz8nEw7zrzc5qrZvewtrkOLoJOndMFavj6ljr4nVLGQ_qg0BZvNQFEC5YwKFqKlDxphYaPqMoh9IEbq3qMX5Dis/s104/schema-recup-edp.jpg">tuyaux</a> servant à l’évacuation des excréments. Le poêle et le four sont au cœur de cette pièce, d’où l’attention que leur porte la mère. Faire la vaisselle, à côté de faire la cuisine, c’est un jeu d’enfant, et c’est pourquoi cette tâche revient, d’abord à Mary, en tant que fille héritière de sa mère, et en second à John. Une fois devenu adulte, il pourra faire comme son père: des enfants pour essuyer la vaisselle!<br />
<br />
Personne ne s’est assis sur le tabouret car le travail, dans la cuisine Martin, procède comme à l’entreprise ou à l’armée: debout, presque au garde-à-vous. Seul John semble prendre un peu ses aises en s’appuyant mollement sur le rebord du comptoir. Mary, un peu fatiguée, s’appuie tantôt sur une jambe, tantôt sur l’autre. La mère reste bien droite, penchée vers l’avant, mal équilibrée sur ses souliers à talons hauts. Le père, comme tout officier supérieur, à le derrière posé sur sa banquette recouverte de cuirette. Ce constat nous force donc à revenir sur la séparation privée/publique, surtout si l’on organise </div><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxLZM-wpp8A-6YGjx0FEd2EfhgvM55_6-1bizxos_77LEpMSsbbYdVSfmXCkQxMkgIjNCCiimgOueFyam5cG2RfinUWbGZqU5T9nRJplwl-mgHyBBaSbLnZOQINKtX41zkyiwpAr5VNao/s1600/Les100%252Bgrands_11-02_18.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="261" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxLZM-wpp8A-6YGjx0FEd2EfhgvM55_6-1bizxos_77LEpMSsbbYdVSfmXCkQxMkgIjNCCiimgOueFyam5cG2RfinUWbGZqU5T9nRJplwl-mgHyBBaSbLnZOQINKtX41zkyiwpAr5VNao/s320/Les100%252Bgrands_11-02_18.jpg" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Rupture vie privée/vie publique: <i>Loft Story</i></td></tr>
</tbody></table><div style="text-align: justify;">sa vie privée comme est organisée notre vie publique. Cette nette séparation, faut-il croire, ne s’était pas encore faite dans l’esprit des <i>Fifties</i>. Et cela expliquerait pourquoi la retraite dans un privé fermé pouvait laisser au public le soin d’élaborer tout un ensemble de fantaisies sur la vie secrète des voisins. La <i>culture électro-ménagère</i> allait contribuer à isoler encore plus chaque foyer de ses influences extérieures. Seuls les quelques amis privilégiés du couple et des enfants auront la possibilité d’y pénétrer d’une façon conviviale. Jusqu’ici, nous avons assisté à une certaine vie publique des Martin (l’église, l’école, les jeux saisonniers), mais jamais la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxLZM-wpp8A-6YGjx0FEd2EfhgvM55_6-1bizxos_77LEpMSsbbYdVSfmXCkQxMkgIjNCCiimgOueFyam5cG2RfinUWbGZqU5T9nRJplwl-mgHyBBaSbLnZOQINKtX41zkyiwpAr5VNao/s104/Les100%252Bgrands_11-02_18.jpg">vie publique</a> n’a pénétré dans le foyer Martin. C’est une chasse-gardée du père et non une auberge espagnole où l’on recevrait n’importe qui, n'importe quand et n'importe comment. Lorsque nous voyons les Martin en famille élargie (et si peu), c’est à la ferme de l’oncle George, comme ce sera au chalet des grands-parents. À part cela, la discrétion est de mise.<br />
<br />
Ce processus de l’individualisme, amorcé dans la bourgeoisie occidentale au XVIIe siècle et accélérée au XIXe, prend enfin la pleine mesure de ses propensions à l’<i>isolisme</i> prêché par le marquis de Sade. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjeEQgg_5FuE81gplJoJTBejzNh_J1E5mo0EYYvz7yhkeY0fuYmkeVbaNWN_oZ3saHgHAaqpDs5os3jBPmDkiIGhaN_OeksNSOFGbNTXNnRAI7-VoWlBmh3sODRv0XWl1YN_zT-YQ1ZtpQ/s1600/papa+dans+la+cuisine.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjeEQgg_5FuE81gplJoJTBejzNh_J1E5mo0EYYvz7yhkeY0fuYmkeVbaNWN_oZ3saHgHAaqpDs5os3jBPmDkiIGhaN_OeksNSOFGbNTXNnRAI7-VoWlBmh3sODRv0XWl1YN_zT-YQ1ZtpQ/s320/papa+dans+la+cuisine.jpg" width="173" /></a>Chacun vivant dans ses fantaisies où les autres n’interviennent que comme objets de sa satisfaction. Les affects sont limités au minimum et ne concernent que leurs manipulations pour en tirer soit des avantages matériels ou des gratifications morales (satisfaction de l’orgueil, de l’envie, de la puissance). <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjeEQgg_5FuE81gplJoJTBejzNh_J1E5mo0EYYvz7yhkeY0fuYmkeVbaNWN_oZ3saHgHAaqpDs5os3jBPmDkiIGhaN_OeksNSOFGbNTXNnRAI7-VoWlBmh3sODRv0XWl1YN_zT-YQ1ZtpQ/s104/papa+dans+la+cuisine.jpg">Monsieur Martin</a> nous apparaît comme un monstre rempli de gratifications: familiale, sociales, financières, citoyennes, etc. Sa pipe indique sa puissance virile comme son pouvoir social et son autorité domestique. La haute tenue de madame Martin en fait la conjointe idéale, le trophée toutes catégories de son époux. Ses enfants sont les petits princes appelés à prendre la succession de la dynastie. Toute cette ostentation de la satisfaction rend suspecte les fiertés proclamées. La sincérité des comportements, de la politesse, de la serviabilité. Le mensonge fleurit derrière le sourire de chacun. Que se pense-t-il sincèrement, réellement, dans cette part de chacun d’entre eux, irréductible à toute autre qu’est l’<i>agressivité</i>?<br />
<br />
Le monde des <i>Fifties</i> était pourtant un monde à peine sortie de la Seconde Guerre mondiale et plongée presqu’aussitôt dans la Guerre Froide. Le climat d’anxiété nucléaire pesait sur le comportement des individus, surtout en Amérique, qui n’avait pas connu les destructions massives d’une Europe résignée à la destruction. Dans le concert de la civilisation occidentale, l’Amérique était prête à prendre le relais de l’Europe, ce qui ajoutait de la responsabilité sur ses épaules morales. C’est à cette succession qu’aspire monsieur Martin et sa famille. Non pas seule, bien sûr, mais à travers sa collectivité nationale. Américaine ou Canadienne, l’avenir appartenait à la civilisation extrême-occidentale. Une partie de l’Europe était divisée en territoires hostiles, voires ennemis, écrasés par le géant soviétique qui menaçait, avec son communisme, de dissoudre les valeurs les plus chères de la «Civilisation», c’est-à-dire la propriété privée. Il n’y avait donc pas de risque à prendre et de se laisser aller. D’où la tenue quasi chevaleresque d’une dynastie de croisés prête à reprendre les armes à nouveaux contre son ennemi universel.<br />
<br />
Voilà en quoi le repli sur sa «forteresse vide» devenait un préambule à l’affrontement anticipé, même s’il ne devait jamais venir. Comme tout le reste, la Guerre Froide fut davantage une guerre pratiquée en secret (espionnage, trafic noir, dossiers montés et falsifiés de toutes pièces, accusations et répressions gratuites, etc.). Elle se livrait, elle aussi, les volets clos.<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrxqv4bsf-rBCORrXCkwUdSeKjnLRcznAeKcnbyl2UcFMi3yalT7-9jathVQbuqfTlX4mxNCWrW9dnUuXSJWB0Pe3KcH98228yASsYaPvufsJLNNWuEBgrNCOi1kN4MS-VsTqz1YFOySQ/s1600/images.jpeg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="181" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrxqv4bsf-rBCORrXCkwUdSeKjnLRcznAeKcnbyl2UcFMi3yalT7-9jathVQbuqfTlX4mxNCWrW9dnUuXSJWB0Pe3KcH98228yASsYaPvufsJLNNWuEBgrNCOi1kN4MS-VsTqz1YFOySQ/s320/images.jpeg" width="320" /></a> Elle reprenait toutes les attitudes de la <i>culture électro-ménagère</i> (machines codées à envoyer des messages aux agents du K.G.B. ou de la C.I.A., écoutes électroniques, caméras de surveillance, agents délateurs, double langage). Du téléphone, en effet, on accédait à l’écoute électronique; d’un agent dénoncé, on disait qu’il «était cuit»; d’une commère, on la traitait de «fouine»; la famille regardait la télévision comme un agent secret regardait à travers une caméra de surveillance, etc. La guerre secrète que fut la Guerre Froide fut menée sur le mode de l’électro-ménager jusqu’à ce que l’informatique et les satellites d’espionnage fassent monter d’un cran l’obsession <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrxqv4bsf-rBCORrXCkwUdSeKjnLRcznAeKcnbyl2UcFMi3yalT7-9jathVQbuqfTlX4mxNCWrW9dnUuXSJWB0Pe3KcH98228yASsYaPvufsJLNNWuEBgrNCOi1kN4MS-VsTqz1YFOySQ/s104/images.jpeg">panoptique</a> des États paranoïaques.<br />
<br />
Les <i>Fifties</i> furent une période de transition dont l’anomie fut réduite à sa plus simple expression, la frontière entre le privé et le publique, appelée à dresser un mur tout aussi épais que celui de Berlin. Coïncidence ou pas, c'est lorsque le mur de Berlin tomba, en 1990, qu'on commença à présenter des émissions de télévisions voyeuristes dont <i>Loft Story </i>reste le symbole francophone. Comme à Berlin, l'écran télévisé projetait la vie privée dans le cadre de la vie publique. Désormais s'offrait à voir combien, dans les <i>Fifties, </i>la limite entre le crû et le cuit distinguait les passions chaudes et dangereuses de la sagesse rationnelle de savoir les faire cuire et comment les apprêter, avant qu’elles nous brûlent le bout des doigts. Ainsi, la froide cuisine des Martin servait-elle à préparer le cuit derrière un mur fermé sur lui-même, contre tout regard publique indiscret.</div><div style="text-align: right;">Montréal<br />
10 juillet 2011</div><div style="text-align: justify;"></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-72858178375240054742011-07-09T22:25:00.000-07:002011-07-10T09:50:28.319-07:00Playing house<div class="separator" style="clear: both; color: black; text-align: justify;"><span style="color: red;">G.F. - Le tableau qui suit contient des scènes de violence morale osées faites aux féministes et n’est pas à conseiller pour les fillettes pré-pubères et les adolescentes innocentes. La discrétion féminine est requise</span>.</div><div class="separator" style="clear: both; color: black; text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgkj57nH1_beVQBLoNbMpXizPliZ5G0Nuz_ZfzlQcXhIiCKQgqCcNVaySvf74Ip3jzV-U5OY5WvQExu-TdUHtZJps8XKe_9Hg72Qwq_akN4-vDpbyRSGvc78wS7qZD7yiSLHM2wLbVy5Ss/s1600/19-+at+de+sawing+machine.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="288" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgkj57nH1_beVQBLoNbMpXizPliZ5G0Nuz_ZfzlQcXhIiCKQgqCcNVaySvf74Ip3jzV-U5OY5WvQExu-TdUHtZJps8XKe_9Hg72Qwq_akN4-vDpbyRSGvc78wS7qZD7yiSLHM2wLbVy5Ss/s400/19-+at+de+sawing+machine.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><b>PLAYING HOUSE</b></div><div style="text-align: justify;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgkj57nH1_beVQBLoNbMpXizPliZ5G0Nuz_ZfzlQcXhIiCKQgqCcNVaySvf74Ip3jzV-U5OY5WvQExu-TdUHtZJps8XKe_9Hg72Qwq_akN4-vDpbyRSGvc78wS7qZD7yiSLHM2wLbVy5Ss/s1600/19-+at+de+sawing+machine.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"></a><br />
Pendant que John est au hockey à regarder de vigoureux jeunes adolescents s’élancer sur la patinoire, sa sœur Mary a invité sa copine Louise, sa meilleure amie, à venir faire du repassage à la maison. C’est du moins ce que nous apprend la leçon. Ensemble, ils jouent à l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgkj57nH1_beVQBLoNbMpXizPliZ5G0Nuz_ZfzlQcXhIiCKQgqCcNVaySvf74Ip3jzV-U5OY5WvQExu-TdUHtZJps8XKe_9Hg72Qwq_akN4-vDpbyRSGvc78wS7qZD7yiSLHM2wLbVy5Ss/s104/19-+at+de+sawing+machine.jpg">entretien domestique</a>, plus précisément les travaux proprement féminins: couture et repassage sont au programme. Bref, Mary et Louise jouent à la maman. Ou apprennent à devenir midinettes à l’âge adulte. C’est sage, c’est de leur âge et c’est simplistement sexiste.<br />
<br />
Le tableau 19 est à proprement parlé une des images qui ramassent le plus de stéréotypes sexistes de l’éducation humaniste des <i>Fifties</i> en un seul coup d'œil. C’est l’éducation dans laquelle les mamans des Peyton Places d’Amérique du Nord dispensaient à leurs fillettes. Coudre les franges des rideaux, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjT8Ifoqh5xyTycHcx_GzS937-bxcPj_7EXfKZkqWlYexkqOJwrwTBQs8vaDIa9pDIFN0oO27n4cPYxiI8p_15I3OMEOkbQ7HfpzZ7ShcIU8gjvaDW7xXJ2pVgRj6LDfCxHbupRv-zW_20/s1600/46372925.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjT8Ifoqh5xyTycHcx_GzS937-bxcPj_7EXfKZkqWlYexkqOJwrwTBQs8vaDIa9pDIFN0oO27n4cPYxiI8p_15I3OMEOkbQ7HfpzZ7ShcIU8gjvaDW7xXJ2pVgRj6LDfCxHbupRv-zW_20/s320/46372925.jpg" width="320" /></a>repasser les chemises lavées et séchées, jouer à la poupée, à l’entretien de sa maison. C’est l’éducation qu’a sans doute subit la Nora d’Ibsen, dans sa célèbre pièce <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjT8Ifoqh5xyTycHcx_GzS937-bxcPj_7EXfKZkqWlYexkqOJwrwTBQs8vaDIa9pDIFN0oO27n4cPYxiI8p_15I3OMEOkbQ7HfpzZ7ShcIU8gjvaDW7xXJ2pVgRj6LDfCxHbupRv-zW_20/s104/46372925.jpg"><i>Maison de poupée</i></a>. J’ai gardé un souvenir impérissable de cette pièce lorsque je la vis jouer au théâtre du Gésu, dans le temps qu’il était situé dans le sous-sol de l’église des Jésuites, sur Bleury. Andrée Lachapelle y était éblouissante et le simple décor du salon norvégien évoquait la carte postale du confort domestique dans les pays nordiques. Plutôt que la classique traduction du comte Prozor, le texte s’exprimait dans un français (sans québécisme) parfait. Que la pièce fut reçue, aujourd’hui plus qu’à l’époque, comme un manifeste d’affirmation féminine, c’était là rien de plus que normal; que ce soit un manifeste proprement féministe, il faudrait y ajouter quelques bémols. Ibsen a toujours pensé en termes d'individualités et non de corporations.<br />
<br />
Il est incontestable que le féminisme a apporté beaucoup à notre société. Aucune idéologie, depuis le syndicalisme du XIXe siècle, n’a autant fait pour la reconnaissance des droits individuels face aux pressions sociales. Dans le cas des femmes, l'effort fut plus grand encore car si les ouvriers pouvaient déclencher des grèves pour exercer un rapport de force sur les patrons, les femmes ne pouvaient avoir recours à des stratégies comparables face aux hommes. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEimWzC-YtAuccy3ClH3xZDWK8jtOZtDssEj9WYBJh-eSoguOVVmsYSApz-JTjliSBOPXhTE9aorrz1vcDTuwmojgFFhju1LLiwqcJ4RUerqbuwZXkOc25nRjKBJLxTMCzzy0Mkb97Ffk5U/s1600/article_88_large_l-assembl-e-des-femmes.JPG" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="130" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEimWzC-YtAuccy3ClH3xZDWK8jtOZtDssEj9WYBJh-eSoguOVVmsYSApz-JTjliSBOPXhTE9aorrz1vcDTuwmojgFFhju1LLiwqcJ4RUerqbuwZXkOc25nRjKBJLxTMCzzy0Mkb97Ffk5U/s320/article_88_large_l-assembl-e-des-femmes.JPG" width="320" /></a>Il y avait, certes, les exemples de <i>Lysistrata</i> et de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEimWzC-YtAuccy3ClH3xZDWK8jtOZtDssEj9WYBJh-eSoguOVVmsYSApz-JTjliSBOPXhTE9aorrz1vcDTuwmojgFFhju1LLiwqcJ4RUerqbuwZXkOc25nRjKBJLxTMCzzy0Mkb97Ffk5U/s104/article_88_large_l-assembl-e-des-femmes.JPG"><i>l’Assemblée des Femmes</i></a> d’Aristophane, auteur dramatique de comédies de la Grèce classique, mais le but de ces pièces ne visait rien de plus que de dénoncer la guerre civile - la fameuse guerre du Péloponnèse - en montrant que ce qu’il y avait de plus insensé que la tuerie entre frères, c’était de voir les femmes sortir de leur gynécée et prendre le pouvoir. Ce n’était pas d’ailleurs un combat contre tous les hommes, mais contre ceux surtout qui maintenaient l’autorité patriarcale sur le droit civil et la société politique. Si le mouvement fut au départ de nature sociale plutôt bourgeoise - les suffragettes sont contemporaines des premières associations de défense et de protection des animaux -, sa lente évolution, tout au long du premier XXe siècle, conduisit finalement à élargir la conscience que les femmes pouvaient avoir de leur situation dans «la machine sociale» capitaliste.<br />
<br />
À partir de ce moment, il devint donc normal de rencontrer sur la ligne de front le pire ennemi de l’émancipation féminine: c’est-à-dire le manuel scolaire. <b>Conversation anglaise</b> ne faisait sûrement pas exception à la règle. Maintenant que Mary sait faire la cuisine, il faut qu’elle élargisse le champ de ses compétences au travail féminin. On l’a vue, dès le tableau 4, s’atteler à repriser un vêtement que rien ne nous dit qu’il lui appartenait à elle ou à son frère John. Maintenant, nous en sommes aux rideaux et au repassage: Mary est une grande fille maintenant. On ne fête pas son anniversaire (et pour cause, papa Martin voudrait sans doute qu'elle reste telle qu'elle est jusqu'à la fin de ses jours, et ne voit donc pas les années passer), mais elle vieillit quand même, notre petite Mary!<br />
<br />
On se souvient qu’après la prise du pouvoir par le Parti Québécois, en novembre 1976, le nouveau gouvernement indépendantiste s’engagea à relancer la Révolution tranquille, dans le domaine social et <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEicBSGryZunGDJ2Roaon4hpni-2Ye8WDoD4zzvDmaHS2Y36BKyKSMF37-I5Xw81gnP8BMbfcyTJ2SJThynlfWKIFW9xveYr3-uKA9-F4O4LubNERg8aSAbM46re6TiuUitmqJy0yr5SmFg/s1600/lise-payette.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEicBSGryZunGDJ2Roaon4hpni-2Ye8WDoD4zzvDmaHS2Y36BKyKSMF37-I5Xw81gnP8BMbfcyTJ2SJThynlfWKIFW9xveYr3-uKA9-F4O4LubNERg8aSAbM46re6TiuUitmqJy0yr5SmFg/s200/lise-payette.jpg" width="143" /></a>culturel cette fois. Après les grèves généralisées de la fonction publique sous le précédent gouvernement libéral, la voie était ouverte maintenant pour considérer le retard de la condition féminine des Québécois pris par rapport aux femmes américaines et canadiennes-anglaises, engagées déjà dans la lutte pour le droit à l’avortement, les pensions alimentaires, la garde des enfants en cas de séparation de couples, la lutte contre l’intimidation et le harcèlement sexuels au travail. La ministre <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEicBSGryZunGDJ2Roaon4hpni-2Ye8WDoD4zzvDmaHS2Y36BKyKSMF37-I5Xw81gnP8BMbfcyTJ2SJThynlfWKIFW9xveYr3-uKA9-F4O4LubNERg8aSAbM46re6TiuUitmqJy0yr5SmFg/s104/lise-payette.jpg">Lise Payette</a>, une vedette du petit écran, journaliste et courriériste connue, prit en charge le ministère. Durant la campagne référendaire de mai 1980, elle commit rien de moins qu’une gaffe impardonnable. Ne comprenant pas qu’il est dangereux de mêler des causes en voulant les lier pour obtenir plus de poids, elle lança, en pleine Assemblée nationale, au chef libéral de l’opposition, le délirant Claude Ryan, une attaque biaisée contre sa femme qu’elle associait à Yvette, un personnage de manuel scolaire, à qui on avait appris comment servir les petits mâles chauvins. Ti-Claude s’enragea tout rouge - la couleur de son parti -, et les Fédéralistes saisirent l’occasion pour nommer l’<i>Obersturmbannführer</i> Michelle Tisseyre pour mener la campagne des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhVWkTsbcFWh6kwgmB1-xIsRxTfawgRAVlveA71kt6uZmfxE4USsJ00pKsdPua8z2ForQ8hK6LgxqBoYFFCsRAuEeklSLaMRyrx4O4ZCAUrlPfDNObU0k92Oy514ekhldypVInhuHfQD0U/s104/yvettes-lise-payette.jpg"><i>Yvettes</i></a>. Mâchoires crispées,<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhVWkTsbcFWh6kwgmB1-xIsRxTfawgRAVlveA71kt6uZmfxE4USsJ00pKsdPua8z2ForQ8hK6LgxqBoYFFCsRAuEeklSLaMRyrx4O4ZCAUrlPfDNObU0k92Oy514ekhldypVInhuHfQD0U/s1600/yvettes-lise-payette.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="144" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhVWkTsbcFWh6kwgmB1-xIsRxTfawgRAVlveA71kt6uZmfxE4USsJ00pKsdPua8z2ForQ8hK6LgxqBoYFFCsRAuEeklSLaMRyrx4O4ZCAUrlPfDNObU0k92Oy514ekhldypVInhuHfQD0U/s320/yvettes-lise-payette.jpg" width="320" /></a> regard perdu dans le lointain, coiffure en broussaille, elle anima, avec à ses côtés une femme d’aussi grande intelligence que Thérèse Casgrain, une des premières féministes à monter sur les barricades depuis les années 20, le rassemblement des <i>Yvettes</i>, le 7 avril 1980, au Forum de Montréal (le même qui avait vu l’émeute de 1955), où se retrouvèrent 15 000 femmes pour le Non. Si on ne peut dire que la victoire du Non du 20 mai suivant ne relève pas spécifiquement de cet événement de foule, il n’a sûrement pas contribué à la cause du Oui.<br />
<br />
Ce fut une maladresse, et malgré toutes les tentatives féministes pour justifier l’intervention de Lise Payette, le fait demeure que la cause féministe et la cause nationale n’avaient pas à interférer l’une dans l’autre. Accuser les femmes qui voteraient «Non», comme l’épouse malade du chef de l’opposition, lui-même un hystérique impatient, d’être des Yvettes heureuses et soumises, c’était un mépris patriarcal lancé par une femme qui se disait féministe. Si les féministes deviennent patriarcaux, alors que reprocher au tableau 19? La question nationale n’était en rien reliée à la question féministe et <i>vice versa</i>. Dénoncer la récupération stratégique fédéraliste, c’était avouer proprement avoir eu tort de lancer cette boutade contre Yvette. Celle-ci se vengeait en trouvant auprès des adversaires du camp du Oui, un appui solide. Il y avait là un gros trou d’obus sous la ligne de flottaison et il arriva au camp de Oui ce qui était arrivé au Titanic, avec moins de gloire cependant. Pour se consoler, Lise Payette <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhaSF_1F6zzR0Z62HKeMLWzRIxUGAzeJD9HGbj55Gt7s2401vOzKzkhN2Jhit6NZAvhYMzgmTMeBnyqM0LQ0kAoM-pua3bcS3sHeRrEKxmLjJiAAeXf02XYg_2wfA_ZS0rWQ7iboflZvvc/s1600/default.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="150" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhaSF_1F6zzR0Z62HKeMLWzRIxUGAzeJD9HGbj55Gt7s2401vOzKzkhN2Jhit6NZAvhYMzgmTMeBnyqM0LQ0kAoM-pua3bcS3sHeRrEKxmLjJiAAeXf02XYg_2wfA_ZS0rWQ7iboflZvvc/s200/default.jpg" width="200" /></a>renonça à la politique et s’en alla …à Radio-Canada, écrire des téléromans dans la mode populaire à l’époque du <i>western spaghetti</i>, dans le but de conscientiser la cause des femmes en opposant des petites bourgeoises travaillantes, sincères, ouvertes, professionnelles à des mâles chauvins, hypocrites, fermés et pleins de duplicité. Là encore, le sort lui joua un mauvais tour car son type d’homme macho, adultère, lâche et menteur devint l’idole des spectatrices! Après Yvette, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhaSF_1F6zzR0Z62HKeMLWzRIxUGAzeJD9HGbj55Gt7s2401vOzKzkhN2Jhit6NZAvhYMzgmTMeBnyqM0LQ0kAoM-pua3bcS3sHeRrEKxmLjJiAAeXf02XYg_2wfA_ZS0rWQ7iboflZvvc/s104/default.jpg">Jean-Paul Belleau</a> fut le deuxième iceberg à frapper sous la ligne de flottaison le paquebot Payette. <i>Odd couple…</i> Les deux font la paire, etc.<br />
<br />
Les manuels scolaires de mon enfance étaient sexistes. Voilà une évidence sur laquelle je ne reviendrai pas. Ils assignaient aux femmes aussi bien qu’aux hommes - ce que les féministes passent volontiers sous silence - une fonction, un rôle social très délimité. Ils nourrissaient des stéréotypes qui s’appuyaient sur des préjugés individuels tels qu’une femme au volant d’une automobile est un danger publique. Comme ces manuels s’adressaient aux enfants, il n’était pas question de penser qu’un jour Mary puisse conduire une auto. On ne voit jamais madame <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgF5N-S03U6moOYAVnapL2KAon2MFMEGsyEgj0Daif_wd2XAlvdqjklkvYG8832BL9Fc_PAKAEYROpXw0KWqasrzJWqeVxM5_yRYwiobiZWa-YtPhX6nmtqw_l3FXRm3IwNfmFJYXvMSPo/s1600/petite+sainte+nitouche.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="170" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgF5N-S03U6moOYAVnapL2KAon2MFMEGsyEgj0Daif_wd2XAlvdqjklkvYG8832BL9Fc_PAKAEYROpXw0KWqasrzJWqeVxM5_yRYwiobiZWa-YtPhX6nmtqw_l3FXRm3IwNfmFJYXvMSPo/s200/petite+sainte+nitouche.jpg" width="200" /></a>Martin au volant d’une automobile. Sa vocation est d’être coquette, gentille - comme Yvette -, mais sérieuse et bien mise. Mary serait, ce qu’on disait à l’époque, «<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgF5N-S03U6moOYAVnapL2KAon2MFMEGsyEgj0Daif_wd2XAlvdqjklkvYG8832BL9Fc_PAKAEYROpXw0KWqasrzJWqeVxM5_yRYwiobiZWa-YtPhX6nmtqw_l3FXRm3IwNfmFJYXvMSPo/s104/petite+sainte+nitouche.jpg">une jeune fille rangée</a>». Ce n’est probablement pas sans angoisse que la famille Martin attendait le jour où Mary aurait ses premières règles. La première érection ou la première pollution nocturne de John ne causerait probablement pas de telles anxiétés. La crise sexuelle et morale était impensable dans cet univers des <i>Fifties</i>, bien que tout le monde savait que la nature est la nature et que les humains en font partie. Pour le meilleur comme pour le pire.<br />
<br />
En attendant, dès les leçons des premiers manuels scolaires, le sexisme visant à inférioriser le rôle des femmes dans la société et dans le couple domestique entrait en action. De la petite fille qui passe le balai «pour aider sa maman» et l’autre qui <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhO49XccQdPTsx5D3aSgpvObrpAdhKlyM7FxFN5tYDYQWcYSyGRpg9rL9B00XAMbq3CLub1Dfiw_9oqHy06C1sy42THWGTBP6WiJ3u_3mSINF5ud-8aClbLYqQiC64Wp9Hzh5kxpVsNISA/s1600/ma%25C3%25AEtresse+contente.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="165" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhO49XccQdPTsx5D3aSgpvObrpAdhKlyM7FxFN5tYDYQWcYSyGRpg9rL9B00XAMbq3CLub1Dfiw_9oqHy06C1sy42THWGTBP6WiJ3u_3mSINF5ud-8aClbLYqQiC64Wp9Hzh5kxpVsNISA/s200/ma%25C3%25AEtresse+contente.jpg" width="200" /></a>essuie la vaisselle dans le manuel de lecture de 3e année au manuel de bienséance ou Diane passe l’aspirateur, si la technique a bien évolué pour ramasser la poussière, l’esprit, lui, est resté le même. Robert, par contre, console sa jeune sœur - l’inverse n’est pensable que si la sœur est plus âgée que le petit frère. Dans une autre leçon de ce manuel, le stéréotype de la fillette bavarde (qui deviendra commère une fois adulte), Louise (ce n’est pas l’amie de Mary, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFXi2S8pENobzjj49z4rD0gdFdivj3Bfyv3f21Jmq5s0qTKPg_QdCNL_iJNseVL0d4ETDYrmMFial_IM-iybycNq7FiconhDLHpn8oZvN6SxziG48-yQtgrRTqHCdm2BERAVo05ylIhlo/s1600/petit+saint.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="170" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFXi2S8pENobzjj49z4rD0gdFdivj3Bfyv3f21Jmq5s0qTKPg_QdCNL_iJNseVL0d4ETDYrmMFial_IM-iybycNq7FiconhDLHpn8oZvN6SxziG48-yQtgrRTqHCdm2BERAVo05ylIhlo/s200/petit+saint.jpg" width="200" /></a>celle-là, en tout cas) est punie par son institutrice. Et la leçon est directe: «Louise devra s’excuser auprès de son institutrice», pour que, finalement, «Louise [soit] heureuse, son <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhO49XccQdPTsx5D3aSgpvObrpAdhKlyM7FxFN5tYDYQWcYSyGRpg9rL9B00XAMbq3CLub1Dfiw_9oqHy06C1sy42THWGTBP6WiJ3u_3mSINF5ud-8aClbLYqQiC64Wp9Hzh5kxpVsNISA/s104/ma%25C3%25AEtresse+contente.jpg">institutrice… contente</a>». La rétribution ici est moindre que dans l’exemple donnée deux pages avant, lorsque son petit frère, René, a mal fait son devoir et que le professeur l’a renvoyé refaire. La logique de l’autorité fonctionne à plein: «Si le professeur me punit, il fait son devoir; moi, je n’ai pas fait le mien». Mais, «Bientôt, je serai un petit garçon parfait. Du moins, je l’espère». Et l’image nous le présente, bienheureux, avec une <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFXi2S8pENobzjj49z4rD0gdFdivj3Bfyv3f21Jmq5s0qTKPg_QdCNL_iJNseVL0d4ETDYrmMFial_IM-iybycNq7FiconhDLHpn8oZvN6SxziG48-yQtgrRTqHCdm2BERAVo05ylIhlo/s104/petit+saint.jpg">auréole de saint</a> sur la tête! La juste rétribution elle-même apparaît sexiste!<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgz0FPc7gU5MWrr-tuZxwVhFt2YR-llW-vZhpDkVg1BBD49po48ZPatK3wUI4dzKuBYt9EvbMDSiQntfDa1ximUNjfmk7wOj5s4l7-P7a2BoHRMpo3hDSDb_Y6Jo_tgMzAFurIO39f-_fc/s1600/messe.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="183" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgz0FPc7gU5MWrr-tuZxwVhFt2YR-llW-vZhpDkVg1BBD49po48ZPatK3wUI4dzKuBYt9EvbMDSiQntfDa1ximUNjfmk7wOj5s4l7-P7a2BoHRMpo3hDSDb_Y6Jo_tgMzAFurIO39f-_fc/s200/messe.jpg" width="200" /></a>On comprend donc un peu mieux pourquoi les manuels scolaires se sont trouvés les premiers sur la ligne de feu des campagnes féministes. Toutes les notions de galanterie y compris, ont été emportées par l’assaut. Fini le temps où après s’être trempé le bout des doigts dans l’eau du bénitier, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgz0FPc7gU5MWrr-tuZxwVhFt2YR-llW-vZhpDkVg1BBD49po48ZPatK3wUI4dzKuBYt9EvbMDSiQntfDa1ximUNjfmk7wOj5s4l7-P7a2BoHRMpo3hDSDb_Y6Jo_tgMzAFurIO39f-_fc/s104/messe.jpg">Richard</a> les offrait aux doigts gantés de sa sœur. Si Antoine était impoli en éternuant dans la figure du garçon assis en face de lui dans l’église, Denise, elle, se servait de son mouchoir pour tousser et se moucher le plus silencieusement possible. Même à l’église, c’est Simone qui ramasse un papier qui traîne par terre car «elle désire que son église reste propre», comme le plancher à la maison. Dommage qu’elle n’ait pas apporté son balai ou son aspirateur à l'office. Malgré toutes ces sottises d'un autre âge chevaleresque institué par la littérature courtoise, la perte de la galanterie, non seulement entre hommes et femmes, mais également entre membres du même sexe, équivaut à une perte énorme par laquelle la <i>brutalisation</i> des mœurs n'a cessé d'entrer.<br />
<br />
Ces auteurs de manuels exagéraient-ils? Non, ils faisaient une propagande qui n’était rien de plus qu’une «vision de l’esprit». Ces règles, sous-produits des péchés véniels et mortels en religion, respectaient la règle morale dont nous avons déjà parlée, établie depuis les leçons d’Érasme. Le sexisme y était implicite, pour ne pas dire inconscient, tant la division en genres, parmi les plantes et les animaux que parmi les hommes, apparaissait comme une <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi-AhKYrR5d2nAZA-kidwjt0XA5gYjmCfMg4GV9NGhDlyQiLGtd_rXIEuHzQjxl7k6XmGDb0Wt4cpFf_0N6lcZ3x2JlKDlzb36IyQRtSQ_Z9Sm0kjmiWWgNyHM2NFnbJ6G8eYj_9Pmtgrc/s1600/punition.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="160" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi-AhKYrR5d2nAZA-kidwjt0XA5gYjmCfMg4GV9NGhDlyQiLGtd_rXIEuHzQjxl7k6XmGDb0Wt4cpFf_0N6lcZ3x2JlKDlzb36IyQRtSQ_Z9Sm0kjmiWWgNyHM2NFnbJ6G8eYj_9Pmtgrc/s200/punition.jpg" width="200" /></a>«loi naturelle» à laquelle il fallait conformer les mœurs, d’où ces idées de «mœurs contre-nature» qui, de l’homosexualité aux comportements non appropriés à son sexe, étaient considérées condamnables. Là où la société civile établissait des peines de prison ou de montants d’argent, la civilité imposait son code au prix d’un rejet pur et simple de la communauté s’il arrivait à quiconque de s’y soustraire. D’où les méchants enfants punis, comme la petite Louise du manuel de bienséance, ou rédimé, comme le petit René. Ce manichéisme des attitudes et des comportements demeura longtemps la vision simpliste des communautés humaines, aussi bien occidentales que de la plupart des autres civilisations.<br />
<br />
Alors, <i>Playing house</i>, que le manuel traduit par la formule «Jouer à la poupée» est une traduction libre. Les poupées sont sagement déposées dans le carrosse ou le ber. <i>Playing house</i>, c’est jouer à la maison aussi, mais pourtant, à l’extérieur, par la fenêtre, nous ne voyons pas tomber de pluie. Les petites filles <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj6GjdhD_t8-cZpQ1W1GMF2Y9SrXF1aJDiIh6hpsTWhkm_3ACdIorCjjVJ-mZEMpYF44xz85a9jchZQddvo3zx8S37xCoL0RhTmsC2D1jAiYKOz6s9kbVj7iG3mhXL5jxfpILY4OzaSnYM/s1600/fer+%25C3%25A0+repasser+-+copie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="148" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj6GjdhD_t8-cZpQ1W1GMF2Y9SrXF1aJDiIh6hpsTWhkm_3ACdIorCjjVJ-mZEMpYF44xz85a9jchZQddvo3zx8S37xCoL0RhTmsC2D1jAiYKOz6s9kbVj7iG3mhXL5jxfpILY4OzaSnYM/s320/fer+%25C3%25A0+repasser+-+copie.jpg" width="320" /></a>pourraient, si elles le voulaient, aller sauter à la corde ou jouer à la marelle, comme font toutes les petites filles de leur âge quand elles jouent vraiment. <i>Playing house</i>, finalement, c’est, traduit littéralement, «Jouer à la maison», c’est-à-dire «Jouer à l’entretien de la maison», l’apprentissage continue depuis le tableau 4, comme je l’ai dit. La portée idéologique du manuel <b>conversation anglaise </b>ne dévie pas d’une seule ligne. Tous les articles présents sur la table servent à la couture: ciseaux, dé à coudre, bobines de fil, pelote d’épingles et, bien sûr, la machine à coudre. À l’arrière, Louise repasse ce qui semble être un tablier, mais elle use d’une invention des <i>Fifties</i> qui encouragea les femmes de maison et les bonnes à mieux faire leur travail: le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj6GjdhD_t8-cZpQ1W1GMF2Y9SrXF1aJDiIh6hpsTWhkm_3ACdIorCjjVJ-mZEMpYF44xz85a9jchZQddvo3zx8S37xCoL0RhTmsC2D1jAiYKOz6s9kbVj7iG3mhXL5jxfpILY4OzaSnYM/s104/fer+%25C3%25A0+repasser+-+copie.jpg">fer à repasser <i>électrique</i></a>. Enfin, comme dans tous les autres tableaux, la pièce présentée comme gynécée (c’est-à-dire dévolue aux femmes), a les murs d’un vert tendre. Mary est reconnaissable à son éternelle boucle dans les cheveux, qui ressemble à l’un de ces choux que l’on pose sur les cadeaux de Noël. Louise en arrière aussi à un «choux» jaune sur la tête. Supposons donc que c’est bien Mary qui est à l’avant-plan du tableau. De toute façon, on s’en fout.<br />
<br />
Nous comprenons mieux maintenant pourquoi la jeune Mary se trouva au Forum pour supporter les <i>Yvettes</i>. Elle avait été éduquée ainsi, à devenir une femme<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjXOpNE9Lmpxeb069PyLs1TivLlYxVU9PfSfK5ouI_LldqHsIsdvWd7OdVrbPf3SlSrnTpUOH-dzCmkRfpi9UIk_yxpVyUbR72T5a9L25232ifHS4ww62xg0IQsg8lXeJYKTXneyYR3tgU/s1600/Mary+au+rouge+%25C3%25A0+l%25C3%25A8vres.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjXOpNE9Lmpxeb069PyLs1TivLlYxVU9PfSfK5ouI_LldqHsIsdvWd7OdVrbPf3SlSrnTpUOH-dzCmkRfpi9UIk_yxpVyUbR72T5a9L25232ifHS4ww62xg0IQsg8lXeJYKTXneyYR3tgU/s320/Mary+au+rouge+%25C3%25A0+l%25C3%25A8vres.jpg" width="313" /></a> fière de sa fonction sexuelle et sociale, mère et épouse. Venir lui lancer cette tarte à la crème en pleine campagne référendaire, c’était l’insulter dans son Être intime et profond. <i>Femmes potiches femmes boniches</i>, titrait l’un de ces livres-manifestes féministes de l’époque. En effet, nous remarquons que Mary s’est appliquée un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjXOpNE9Lmpxeb069PyLs1TivLlYxVU9PfSfK5ouI_LldqHsIsdvWd7OdVrbPf3SlSrnTpUOH-dzCmkRfpi9UIk_yxpVyUbR72T5a9L25232ifHS4ww62xg0IQsg8lXeJYKTXneyYR3tgU/s104/Mary+au+rouge+%25C3%25A0+l%25C3%25A8vres.jpg">rouge aux lèvres</a>. Louise aussi. Et leurs cils, ne les croirait-on pas retouchés au pinceau? Mary une <i>Barbie</i>? C’est pousser un peu loin. Quoi qu’il en soit, le sens du tableau est encore là bien prononcé. Mary est belle, encore fillette, elle est déjà une petite femme. Plus à son avenir que son frère John qui passe son temps à se divertir avec Rover [<i>sic</i>], elle développe son habileté manuelle à la couture et à l’entretien ménager. Voilà pourquoi elle joue à la maison - dans les trois sens du terme. Poupée, Intérieur, Fonction domestique.</div><div style="text-align: right;"><br />
<br />
Montréal<br />
9 juillet 2011</div><div style="text-align: justify;"></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-11439963901678541142011-07-08T21:08:00.000-07:002011-07-09T10:18:29.498-07:00A hockey game<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgH6fCQPZVFo8XvPCB-DMWk1sp6Zhks8XVb4qPrFT9zqH2eFsMdFoVf2I3XkwWqj3xZ-XmSBS4J4G2oxfsuGv2-Si8-zPgyzlMf1B1JtTAXpALj58fZa03_ra4Jkym6RyBtBqt1h6LSAQY/s1600/A+hockey+game.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="280" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgH6fCQPZVFo8XvPCB-DMWk1sp6Zhks8XVb4qPrFT9zqH2eFsMdFoVf2I3XkwWqj3xZ-XmSBS4J4G2oxfsuGv2-Si8-zPgyzlMf1B1JtTAXpALj58fZa03_ra4Jkym6RyBtBqt1h6LSAQY/s400/A+hockey+game.jpg" width="400" /></a><b> </b><br />
<br />
<b>A HOCKEY GAME</b></div><div style="text-align: justify;"><br />
Pour ceux qui ne l’auraient pas remarqué, je suis un être absolument hors catégorie. Un traître. Un anarchiste. Un homme conduit par la pensée négative. Bref, un méchant. Voilà ce qui explique que, même Québécois, je n’aime pas le hockey! <i>Nordiques</i> ou <i>Canadiens</i>, les équipes sont pour moi absolument sans intérêts. Il y avait un temps, voilà près de trente ans de ça, je regardais au moins les éliminatoires. Mais les commentaires bavards, le stress que suscite ce type de sport de vitesse et les fréquents arrêts pour tout et pour rien, les gestes vulgaires des joueurs qui viennent de faire glisser une rondelle dans un but, et ma petite chatte blanche, Évangéline, qui essayait d’attraper ces petites fourmis qui couraient sur mon écran de télé en noir et blanc, m’ont définitivement convaincu que je n’étais pas du calibre des amateurs de sport, pour moi l’ennui en bouteille!<br />
<br />
Il est vrai qu’on crédite au hockey un épisode fameux de l’histoire du Québec. Laissons le site de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh7buGQWhiwQ9sdG-3WHE9xP7dN1IdT1xGQn4HlwPEBMaE2toFiep2QGmnnOazfMKnN1XY9ovd222fNTlc7Wmzsea8aJaqmmXgCMYalFQcA7TRshJ3zl57TyTb1T8yQCGkJk4Mvqc6Gj-o/s1600/Parkhurst+1951-52+Richard.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh7buGQWhiwQ9sdG-3WHE9xP7dN1IdT1xGQn4HlwPEBMaE2toFiep2QGmnnOazfMKnN1XY9ovd222fNTlc7Wmzsea8aJaqmmXgCMYalFQcA7TRshJ3zl57TyTb1T8yQCGkJk4Mvqc6Gj-o/s320/Parkhurst+1951-52+Richard.jpg" width="228" /></a>l'équipe du <i>Canadien</i> de Montréal nous raconter l’anecdote: «<i>Le 17 mars 1955, le match entre les </i>Red Wings<i> et les </i>Canadiens<i> s'annonce des plus explosifs. Des milliers de spectateurs se présentent au Forum pour protester contre la suspension de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh7buGQWhiwQ9sdG-3WHE9xP7dN1IdT1xGQn4HlwPEBMaE2toFiep2QGmnnOazfMKnN1XY9ovd222fNTlc7Wmzsea8aJaqmmXgCMYalFQcA7TRshJ3zl57TyTb1T8yQCGkJk4Mvqc6Gj-o/s104/Parkhurst+1951-52+Richard.jpg">Maurice Richard</a>, imposée par le président de la Ligue nationale de hockey Clarence Campbell. Quelques jours plus tôt, le 13 mars 1955, les </i>Canadiens<i> et les </i>Bruins<i> de Boston s’étaient livré un furieux duel. Après 15 minutes et 11 secondes de jeu dans la troisième période, Hal Laycoe avait atteint Richard à la tête avec son bâton. En voulant s’interposer, le juge de ligne Cliff Thompson a reçu un coup de poing au visage de la part du numéro 9, qui est aveuglé avec le sang qui lui coule dans les yeux. Pour ce geste, Richard est suspendu pour les trois dernières parties de la saison de même que pour la totalité des séries éliminatoires tandis que Laycoe, l’agresseur, s’en tire indemne. Le sentiment d'injustice éprouvé par les amateurs des </i>Canadiens<i> est poussé au maximum lorsque Campbell se présente au Forum pour assister à la rencontre. Une bombe lacrymogène explose, la manifestation tourne à l'émeute. Les </i>Canadiens<i> doivent alors déclarer forfait après la première période. Le lendemain de l’émeute, le «Rocket» s’adresse à la population et réussit à apaiser les esprits</i>».<br />
<br />
On disait alors au Québec, qu'il y avait deux sports: le hockey et la politique, et les deux semblaient se copier l’un l’autre jusqu’à cette soirée de 1955, où, à la suite de la punition considérée comme injuste du joueur vedette, les deux se rencontrèrent dans la rue. Les partisans, oubliant leur retenue, occasionnèrent une émeute incendiaire qui se généralisa autour du Forum de Montréal. De cet incident, les «visionnaires», <i>a posteriori</i>, décidèrent que c’était là un signe avant-coureur de la Révolution tranquille des <i>Sixties</i>: Maîtres chez nous! Le ras-de-bol du colonialisme anglo-saxon? Sans doute, mais le signe avant-coureur d’un mouvement social? J’en doute. Combien de parties de soccer se terminent aujourd'hui dans la bataille de calibre d'émeutes, avec <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg66ZCCONjX4_iPeKoj_naX_Yof9Tq2ty61CDDLmZg-c_T3qxpNkPQL-tbMzzE6iReyJURBydPzyU2nkVP2XOY618ZLn9x7Nw50dFgKsZjW3HelwNKftqValNEVDVK_jxm0cXlnfbnGkJI/s1600/17-richard2837.JPG" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="187" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg66ZCCONjX4_iPeKoj_naX_Yof9Tq2ty61CDDLmZg-c_T3qxpNkPQL-tbMzzE6iReyJURBydPzyU2nkVP2XOY618ZLn9x7Nw50dFgKsZjW3HelwNKftqValNEVDVK_jxm0cXlnfbnGkJI/s320/17-richard2837.JPG" width="320" /></a>blessés et morts, et dont on ne fait pas pour autant des «signes avant-coureurs» d’une quelconque révolution. Bien au contraire. Jamais l’aliénation aux dominants n’apparaît plus tenir qu’à ces moments, où, précisément, le potentiel de violence des dominés est dérivé dans son expression vers un affrontement sans conséquences des sportifs. Il n’en allait pas autrement le soir de la condamnation de Maurice Richard. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg66ZCCONjX4_iPeKoj_naX_Yof9Tq2ty61CDDLmZg-c_T3qxpNkPQL-tbMzzE6iReyJURBydPzyU2nkVP2XOY618ZLn9x7Nw50dFgKsZjW3HelwNKftqValNEVDVK_jxm0cXlnfbnGkJI/s104/17-richard2837.JPG">Clarence Campell</a>, le dirigeant de la ligue, s’était montré mauvaise figure de Père injuste, comme le gouverneur colonial Dalhousie en 1837, ce qui entraîna les fils déçus et humiliés vers la Rébellion que l’on sait. Il en fut de même le soir du 17 mars 1955. La scène de l'affrontement, toutefois, n’était plus l’arène du Parlement mais la patinoire d’un forum. Comme le chantait Plume Latraverse: «Tout le monde se tient quand tout le monde est peureux».<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5BQ6px2iY6BNWNSWwNpkhhEG0hSZAQIva8GCnJSPLN0cKRGlx270oETNACLh-FVR-tAfajy7e1l1SC7MgaVY6ySQ8_kYT51CwiXbE99sb0TBlppnpM_EetmgohCUDkrkoyDi04FHYk6s/s1600/sauvjmp11318.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5BQ6px2iY6BNWNSWwNpkhhEG0hSZAQIva8GCnJSPLN0cKRGlx270oETNACLh-FVR-tAfajy7e1l1SC7MgaVY6ySQ8_kYT51CwiXbE99sb0TBlppnpM_EetmgohCUDkrkoyDi04FHYk6s/s1600/sauvjmp11318.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5BQ6px2iY6BNWNSWwNpkhhEG0hSZAQIva8GCnJSPLN0cKRGlx270oETNACLh-FVR-tAfajy7e1l1SC7MgaVY6ySQ8_kYT51CwiXbE99sb0TBlppnpM_EetmgohCUDkrkoyDi04FHYk6s/s1600/sauvjmp11318.jpg" /></a></div>Voilà pourquoi, inconsciemment, il est facile de relier les événements, qui ont pourtant une distance de cinq années entre eux, comme si la Révolution tranquille de 1960 avait été annoncée par l’émeute du Forum. Pourtant, la Révolution tranquille est venue d’une <i>minorité créatrice</i> qui a su s’intégrer dans un vieux parti moribond depuis un quart de siècle et qu’elle a su revigorer malgré son chef frileux. Pourquoi attribuer à des pantins sportifs le bénéfice de la créativité d’une minorité qui avait bien compris que le Québec, dans sa situation à la mort de Maurice Duplessis, n’allait nulle part. Même son successeur, le fidèle <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5BQ6px2iY6BNWNSWwNpkhhEG0hSZAQIva8GCnJSPLN0cKRGlx270oETNACLh-FVR-tAfajy7e1l1SC7MgaVY6ySQ8_kYT51CwiXbE99sb0TBlppnpM_EetmgohCUDkrkoyDi04FHYk6s/s104/sauvjmp11318.jpg">Paul Sauvé</a>, avait commencé, dans les cent jours que la mort lui laissa pour marquer de son empreinte la politique québécoise, posa les bases de ladite révolution.<br />
<br />
Le hockey est donc pourvoyeur de mythes, comme jadis les romans picaresques racontaient des histoires de chevalerie à ne pas tenir debout. Le <i>Don Quichotte</i> de Cervantès poussa le genre au chef-d’œuvre universel. Pour nous,<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHx9b0xfdq9E3fkO72-4Z5NtMgNNRFsNh2MaN0aY-Tu2FQIIKWe5taKHq_lVaMXr6gQlm5qkwcB-tCPHbKOA8HYu5bcASIreAiDkK3AcoAgn690-MYCROPkcPkhwAKt28NEcbg5Y8iB2c/s1600/Tin+man+Dick+Gamble.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="186" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHx9b0xfdq9E3fkO72-4Z5NtMgNNRFsNh2MaN0aY-Tu2FQIIKWe5taKHq_lVaMXr6gQlm5qkwcB-tCPHbKOA8HYu5bcASIreAiDkK3AcoAgn690-MYCROPkcPkhwAKt28NEcbg5Y8iB2c/s200/Tin+man+Dick+Gamble.jpg" width="200" /></a> il a suscité une série de rites <i>kitsch</i> allant de la collection et des échanges des cartes de joueurs de hockey - avant que les équipes commencent à s’échanger les joueurs pour vrai! - jusqu’à ces patinoires sur table avec <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHx9b0xfdq9E3fkO72-4Z5NtMgNNRFsNh2MaN0aY-Tu2FQIIKWe5taKHq_lVaMXr6gQlm5qkwcB-tCPHbKOA8HYu5bcASIreAiDkK3AcoAgn690-MYCROPkcPkhwAKt28NEcbg5Y8iB2c/s104/Tin+man+Dick+Gamble.jpg">joueurs</a> en panneaux à deux dimensions que l’on actionnait par des manettes et qui se lançait une bille noire qui tenait le rôle de la rondelle. Et les deux chandails des équipes de métal reproduisaient les deux équipes nationales en rivalités: le chandail bleu des <i>Maple Leafs</i> de Toronto, et le chandail rouge des <i>Canadiens</i> de Montréal. Mes parents crurent m’initier à un jeu viril - ce qui était pourtant étonnant de la part de mon père qui haïssait le hockey pour mourir -, et qui m’apparaissait sans intérêt puisque, étant enfant unique, je n’avais personne avec qui y jouer!<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhnOv5HGa1Zcsde-4K6SscNNNcpM28xFgUdfUoFEv_FRDfWu_L76k3dhESZRe8qHsplWhxn5JW80CHAgGtlwDpLqeUGyKwXoYBkHjYKhubQ6SYR4bZLpgWm_aLv_VNxCFcainKV4dxDOSA/s1600/CS.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhnOv5HGa1Zcsde-4K6SscNNNcpM28xFgUdfUoFEv_FRDfWu_L76k3dhESZRe8qHsplWhxn5JW80CHAgGtlwDpLqeUGyKwXoYBkHjYKhubQ6SYR4bZLpgWm_aLv_VNxCFcainKV4dxDOSA/s200/CS.jpg" width="130" /></a></div>Dans le tableau 18 de <b>conversation anglaise</b>, c’est à une reproduction de ce jeu que l’on assiste. Les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjO_QzDOLpCZ8gjmqC2vRkC-g36WZr_d6qK4rJNLljq8D2odHxCb-EpOP8SM8w0TrIT9bKpliKo8Xpcc7LpE6BnaHPhPwp0ULVNzdwb1pv1U1o1ic2Hp8XhwlevSkJhWhpRjng49pixIdo/s104/A+hockey+game.jpg">deux équipes</a>, dont les garçons semblent plus âgés que ne l’est John, laissent supposer que nous sommes là dans le seul tableau de la série où la famille Martin, si elle apparaît, ne peut être qu’à l’arrière-plan, très éloignée, parmi la foule de spectateurs derrière la bande. C’est une patinoire extérieure située en zone rurale plutôt qu’urbaine, ou possiblement dans une banlieue encore peu développée. C’est une partie sérieuse, avec arbitre et parents venus encourager leurs fils prodiges qui pourraient être tentés d’en faire une carrière professionnelle, comme les élèves des <i>High Schools</i> dans le monde anglo-saxon rêvent d’une carrière professionnelle au football. Pour eux, le hockey est un sport passionnant, et ils se donnent à fond, comme des chevaliers d’une croisade nouvelle, où la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhnOv5HGa1Zcsde-4K6SscNNNcpM28xFgUdfUoFEv_FRDfWu_L76k3dhESZRe8qHsplWhxn5JW80CHAgGtlwDpLqeUGyKwXoYBkHjYKhubQ6SYR4bZLpgWm_aLv_VNxCFcainKV4dxDOSA/s104/CS.jpg">coupe Stanley</a> tiendrait la place du Saint Graal.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjsxAomTFooWrYig4VTp3rcw_z67cxaG3Rjx81cwfgcM58fpz55P3BA4R2XP3Tbz7aD1IfzEg9T59BUvag9YHjWRez3rJT0aq4D46Rhlk-szREhne-MQVgK_CO0hH2FX6H59c9CpFQhPQA/s1600/8300_1080_frontenac_g.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjsxAomTFooWrYig4VTp3rcw_z67cxaG3Rjx81cwfgcM58fpz55P3BA4R2XP3Tbz7aD1IfzEg9T59BUvag9YHjWRez3rJT0aq4D46Rhlk-szREhne-MQVgK_CO0hH2FX6H59c9CpFQhPQA/s320/8300_1080_frontenac_g.jpg" width="139" /></a></div>Ici, les règlements sont réduits au strict minimum: le respect des règles est évident et donne au sport la même dignité que jadis le combat honnête et loyal avec l’adversaire. Nul coup de traître. Nulle tentative de blesser ou de transférer son agressivité de la course vers le «sport de contact». Nulle hystérie de <i>hooligans</i> ne vient ternir l’enthousiasme parmi les spectateurs accoudés à la bande. Nous sommes encore dans un sport civilisé. Les joueurs, non seulement ne portent pas de casques ni de visières, ni de genoux rembourrés ni aucune de ces armures à cote de maille qui font l’équipement du joueur professionnel moderne, mais ils n’en sentent nul besoin. La violence dans les sports n’est pas encore un thème cancérigène du sport professionnel ou amateur. Ces affrontements renouvellent sans cesse les confrontations nationales entre les deux «peuples fondateurs» du Canada. C’est toujours l’éternel affrontement entre <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjsxAomTFooWrYig4VTp3rcw_z67cxaG3Rjx81cwfgcM58fpz55P3BA4R2XP3Tbz7aD1IfzEg9T59BUvag9YHjWRez3rJT0aq4D46Rhlk-szREhne-MQVgK_CO0hH2FX6H59c9CpFQhPQA/s104/8300_1080_frontenac_g.jpg">Frontenac</a> et Phipps, entre Montcalm et Wolfe qui se réactive sur les patinoires de banlieues et de villages. Tantôt le vainqueur c’est Frontenac, tantôt c’est Wolfe. Et on remet ça «à la prochaine chicane».<br />
<br />
Lorsque la ville de Québec se dota d’une équipe qui dura le temps que durent les équipes de secondes catégories, les Nordiques, l’affrontement se déplaça. Les Québécois perdirent de vue les <i>Maple Leafs</i> de Toronto pour ériger l’affrontement politico-sportif en véritable guerre civile: les glorieux <i>Canadiens</i>, avec leur chandail rouge et leurs dirigeants liés au <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiCmBxpsIdeWyUsaxvQQNLgxFGphSTUEExNEuGjTL64y4q23cvsBTrkXgh7yB_oDxZwd-9P99blmzaBzC8_8Zs6-OmR794yiQl16DYgTqaZa4kli24cCDRc_PFzFtQIKJ0vvoiFTq6p3gY/s1600/nordiques1-larges.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiCmBxpsIdeWyUsaxvQQNLgxFGphSTUEExNEuGjTL64y4q23cvsBTrkXgh7yB_oDxZwd-9P99blmzaBzC8_8Zs6-OmR794yiQl16DYgTqaZa4kli24cCDRc_PFzFtQIKJ0vvoiFTq6p3gY/s200/nordiques1-larges.jpg" width="200" /></a>milieu de la politique fédérale, devinrent les Phipps et Wolfe, tandis que les joyeux <i>Nordiques</i> devenaient l’équipe de la capitale «nationale», avec leur chandail «bleu», et s’attribuaient le rôle de Frontenac …et de Montcalm. D'une guerre civile canadienne, le sport devenait une guerre civile québécoise. Les référents symboliques étaient subvertis. Mais le combat n'en fut que plus hystérique tant il est vrai, qu’au sport comme dans les guerres, se sont les affrontements fraternels qui sont les plus violents. On pourrait même aller jusqu'à croire que l'utilisation de ce club, qui de 1971 à 1979 n'avait fait partie que de ligues parallèles jusqu'à ce qu'on l'incorpore dans la Ligue Nationale de Hockey (LNH), fut une stratégie politique en vue de détourner les nationalistes qui s'engageaient dans la voie du référendum sur la souveraineté du Québec de 1980. D'une rivalité intercanadienne, on obtenait une rivalité interquébécoise. Ce qui fut une réussite qu'aurait sûrement applaudit Machiavel puisque, effectivement, le référendum fut perdu. Cette équipe dura une quinzaine d’années, et lorsqu'elle fut vendue à Denver en 1995 (autre année référendaire, mais l'équipe, financièrement, était un gouffre déficitaire), elle se réincarna en <i>Avalanche</i> du Colorado. Comme le Phœnix qui renaît de ses cendres, les joueurs, une fois l’équipe vendue, se retrouvant dans la capitale d"un <i>État</i> américain avec salaires indexés, se mirent à gagner la coupe Stanley, ce qu’ils n’avaient jamais réalisé en tant qu’équipe de la ville de la <i>province</i> de Québec. De son côté, la Sainte Flanelle ne retrouvait plus, comme adversaire, ses bon vieux <i>Maple Leafs</i>, mais des équipes américaines, dont Boston, Pittsburg, Philadelphie et New York parmi les plus acharnés. La charge politique du hockey se voyait ainsi désamorcée.<br />
<br />
Si la vieille caricature française concernant l’Affaire Dreyfus - un premier dessin représente une grande famille attablée au repas, où le patriarche avertit: <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjyQ4yRWTofvRzhFank7_msoW-bdvAUq-1fJh5_MDremqwVO20JnXH9YM_arISxDD7-qVRGyNE1ShAUq4TI-z7_MeiMIglq_Fmmgysz6YXwJiAfE54alkrdVsFzcZbNsiSWpWrCNQ9lF_Q/s1600/223607.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjyQ4yRWTofvRzhFank7_msoW-bdvAUq-1fJh5_MDremqwVO20JnXH9YM_arISxDD7-qVRGyNE1ShAUq4TI-z7_MeiMIglq_Fmmgysz6YXwJiAfE54alkrdVsFzcZbNsiSWpWrCNQ9lF_Q/s320/223607.jpg" width="264" /></a>«Surtout, ne parlons pas de l’affaire Dreyfus»; dans le second dessin, où tout est sens dessus dessous, les convives se menaçant de leurs fourchettes et de leurs couteaux, la vignette constate: «Ils en ont parlé» -, pouvait s’appliquer aux foyers québécois, ce serait sûrement pour les résultats d’une partie de hockey. On discute encore à savoir si un but de l’affrontement en éliminatoire entre <i>Canadiens</i> et <i>Nordiques</i>, but contesté qui entraîna une véritable bagarre générale sur la patinoire, le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgFQtw-hWuQWLr5wLHGKNI8tsf_VzaGSYU21ivxcKaYUqWXEoJKFHoGsMZD9ei6XFwoRCV2KfnQghPNK1QCjgywQLFHjtC5_oVv2Mx-qCEPKu7QmbUFgr-5PnO7V1SIn5kutDNpBPYYCjo/s104/Bataille_Nordiques_Canadiens8.jpg">Vendredi Saint de 1984</a>, était bon ou non. On ne dira toutefois pas que cette bataille, qui suscite toujours de vives controverses dignes de l’émeute du Forum de 1955, marque un signe avant-coureur de la souveraineté du Québec. C’est dire la dose de tension affective, érotique comme destrudinale, qui anime les Québécois lorsqu’ils deviennent partisans d'une équipe de hockey.<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgFQtw-hWuQWLr5wLHGKNI8tsf_VzaGSYU21ivxcKaYUqWXEoJKFHoGsMZD9ei6XFwoRCV2KfnQghPNK1QCjgywQLFHjtC5_oVv2Mx-qCEPKu7QmbUFgr-5PnO7V1SIn5kutDNpBPYYCjo/s1600/Bataille_Nordiques_Canadiens8.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgFQtw-hWuQWLr5wLHGKNI8tsf_VzaGSYU21ivxcKaYUqWXEoJKFHoGsMZD9ei6XFwoRCV2KfnQghPNK1QCjgywQLFHjtC5_oVv2Mx-qCEPKu7QmbUFgr-5PnO7V1SIn5kutDNpBPYYCjo/s320/Bataille_Nordiques_Canadiens8.jpg" width="320" /></a></div><br />
Tout cela, maintenant, est devenue une affaire de gros sous: des plafonds salarial, des cotas sur les dépenses des équipes, des arénas adaptés à la fois pour les parties de hockey et pour les spectacles de foule, des propriétaires de ligues et des syndicats de joueurs autonomes (de plus, qui voit la contradiction?); le hockey est devenu, comme on disait de la lutte Grand-Prix dans le temps, une «affaire arrangée». L’arrivée massive de joueurs des pays d’Europe de l’Est a changé complètement la sonorité des noms des joueurs sur la glace. Les prix d’assistance au Forum, sans parler des loges retenues par les grosses compagnies pour en profiter pour faire des affaires, avec services et pitounes à volonté, indiquent que l’occasion d’un affrontement sportif est plus que propice à des échanges «d’enveloppes brunes». Si le pourrissement d’une collectivité, comme pour le poisson, commence par la tête, au Québec, elle commence par la queue.<br />
<br />
La faible démographie, la pauvreté relative de la grande bourgeoisie québécoise, les petits contrats de diffusion médiatique font que les sports-spectacles ont tendance à s’effacer assez rapidement. Voilà près de trente ans, les Montréalais ont eu leur équipe de baseball, les <i>Expos</i> - le club fut créé en 1967 - <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgmT9SBZ1lqTGvCx-mBpt1UCtMXZguftusVFsPl5SGr53AYRnM8ETyqGI-ruWwoNgXCquATKCpYfCadZmn8IFMkoFHYLegNeRmSvDN7p_-mcgPoER3eclPicKdT3S6u-nm1mWfNViLZsFw/s1600/youppi-1.JPG" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="232" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgmT9SBZ1lqTGvCx-mBpt1UCtMXZguftusVFsPl5SGr53AYRnM8ETyqGI-ruWwoNgXCquATKCpYfCadZmn8IFMkoFHYLegNeRmSvDN7p_-mcgPoER3eclPicKdT3S6u-nm1mWfNViLZsFw/s320/youppi-1.JPG" width="320" /></a>qui ne laissa, en disparaissant, à l’équipe de hockey du <i>Canadien</i>, qui en était dépourvu, que sa mascotte <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgmT9SBZ1lqTGvCx-mBpt1UCtMXZguftusVFsPl5SGr53AYRnM8ETyqGI-ruWwoNgXCquATKCpYfCadZmn8IFMkoFHYLegNeRmSvDN7p_-mcgPoER3eclPicKdT3S6u-nm1mWfNViLZsFw/s104/youppi-1.JPG">Youppi</a>, montre que le baseball était difficilement rentable à Montréal. L’histoire du club de football (canadien) les <i>Alouettes</i>, est remplie de hauts et de bas, de périodes fastes en coupe Grey, et d’autres pitoyables jusqu’à l’extinction. Maintenant, le sport à la hausse - et pour cause: moindre coût d’équipement (un chandail, un short, une coquille, un but et un ballon) -, c’est le soccer. Le Mundial est maintenant suivie avec la même fureur enthousiaste que dégageait le hockey jadis. Il est vrai que la multiethnicité des Québécois de 2011 favorise cet enthousiasme et renvoie aux nostalgiques les démonstrations euphoriques pour les gladiateurs de la glace. Tous les espoirs sont maintenant investis dans ce sport, malgré le fait que l’<i>Impact</i>, l’équipe montréalaise, ne soit pas encore intégré, ni n’ait la stature pour compétitionner avec les équipes dynamisées d’Europe, d’Amérique latine et même d’Extrême-Orient.<br />
<br />
Mais il faut revenir au hockey, thème de la leçon 18. Ce sport qui utilisait couramment le vocabulaire anglais dans sa description à la radio trouva en <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgE-IGGLpyGfvpVrJUYfrxamILb1jR4vuhb2aWbL-f3j9OKMKguw33ZhvhspEQqpq0T9-gPqVPzRthmPou0DARPkQ5hHPPtnJM3UrVVnWKk3kI7rGHEV5UJVyvjLlprxpmZ4X-_f8MQPQE/s104/ep07_ReneLecavalier01.jpg">René Lecavalier</a> un commentateur intelligent et qui introduisit le vocabulaire et le style français dans la description des parties. Sa voix, avec celle de Jean-Maurice Bailly et de quelques autres, ont pendant des années, à la radio d’abord, puis à la télévision à partir des années 1951, avec la célèbre et défunte <i>Soirée du Hockey</i> du samedi soir, donner l’impression que ce sport amérindien converti à la canadienne,<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgE-IGGLpyGfvpVrJUYfrxamILb1jR4vuhb2aWbL-f3j9OKMKguw33ZhvhspEQqpq0T9-gPqVPzRthmPou0DARPkQ5hHPPtnJM3UrVVnWKk3kI7rGHEV5UJVyvjLlprxpmZ4X-_f8MQPQE/s1600/ep07_ReneLecavalier01.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgE-IGGLpyGfvpVrJUYfrxamILb1jR4vuhb2aWbL-f3j9OKMKguw33ZhvhspEQqpq0T9-gPqVPzRthmPou0DARPkQ5hHPPtnJM3UrVVnWKk3kI7rGHEV5UJVyvjLlprxpmZ4X-_f8MQPQE/s1600/ep07_ReneLecavalier01.jpg" /></a> pouvait se décrire, sans ridicule, d’une manière à affirmer la langue minoritaire du Canada. En cela, et plus que dans l’émeute du Forum, le hockey a contribué à l’affranchissement des Québécois de leur statut de colonisé. Le hockey pouvait se pratiquer «à l’anglaise», mais il se décrivait en français. En quelques années, ce qui est plutôt rare dans les phénomènes de mentalité, une tradition s’installait, mieux même, s’imposait. Le <i>goaler</i> de mon enfance devenait le gardien de but, tout simplement. Les <i>left</i> et <i>right wings</i>, les ailiers gauche et droit, le <i>puck</i> la rondelle, le <i>net</i> le filet, etc. Si la leçon du tableau 18 est si courte par rapport aux précédentes, c’est qu’on tenait, à l’époque, c’est-à-dire à la fin des années quarante, le langage technique du hockey comme anglais, et définitivement acquis. Rien n’était plus faux et propre à être démenti dans les années à venir.<br />
<br />
Des petites équipes de quartiers ou des équipes soutenues par une commandite privée (une entreprise, une chaîne, etc.) constituées d’employés ou d’ouvriers de ladite commandite à l’organisation des premières ligues de hockey junior, mineur puis majeur, la société de consommation nord-américaine <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiq5a2LFGTW-_5UEnFF6zfU7Z8wWntmaMTA9U2Z_yqfbiflrjDDOQDj_U3x6xlXo07tHbbUIfHkn11eX1Rdg_TdpfbF2fJ3CSyRnd-skvWfxayoq6bBjRZFAkLaXUntsUFRiYp9sfif7X8/s1600/accueil_souvenir_rocket_richard_fr.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiq5a2LFGTW-_5UEnFF6zfU7Z8wWntmaMTA9U2Z_yqfbiflrjDDOQDj_U3x6xlXo07tHbbUIfHkn11eX1Rdg_TdpfbF2fJ3CSyRnd-skvWfxayoq6bBjRZFAkLaXUntsUFRiYp9sfif7X8/s320/accueil_souvenir_rocket_richard_fr.jpg" width="320" /></a>trouvait ses premiers cirques alimentés de pains …hot-dogs, de bières, de confiseries et de croustilles. Il n’y manquait que l’empereur pour lever ou abaisser le majeur (pardon! le pouce) pour se retrouver dans la cirque romain de la décadence. Les foules agressives, hurlantes, vociférantes, menaçantes échangèrent leur enthousiasme pour le défoulement collectif. C’est ce qui est spectaculaire dans l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiq5a2LFGTW-_5UEnFF6zfU7Z8wWntmaMTA9U2Z_yqfbiflrjDDOQDj_U3x6xlXo07tHbbUIfHkn11eX1Rdg_TdpfbF2fJ3CSyRnd-skvWfxayoq6bBjRZFAkLaXUntsUFRiYp9sfif7X8/s104/accueil_souvenir_rocket_richard_fr.jpg">émeute de 1955</a>. L’humeur des Québécois avait certes changé, mais leur représentation collective, leur vision d'eux-mêmes à l’intérieur d’un Canada qui bénéficiait de l'isolement des deux solitudes demeurait. La conscience historique que l’Amérique du Nord appartenait, en entier, autant aux francophones qui l’avaient parcourue en tous sens qu’aux anglophones qui l'avaient exploitée; le commandement des autorités religieuses et politiques de ne pas recourir, ni à la désobéissance civile ni à la rébellion violente pour faire gagner ses droits, toutes ces convictions étaient suffisamment ancrées dans leur esprit pour ne pas faire déborder la crise du Forum en prise de la Bastille. On devait s’en rendre compte, vingt-cinq ans plus tard, lors de la soirée du référendum de mai 1980.<br />
<br />
Le hockey, sport politique en 1955? Oui. Le hockey, sport violent en 2011? Oui. Le hockey sport politique et violent en 1955? Oui, mais pas toujours et pas dans toutes les occasions - n’oublions pas que l’émeute s'est produite au moment des éliminatoires. Le hockey sport violent et politique en 2011? Violent plus que toujours, politique moins que jamais. La subtilité de <i>A game of hockey</i>, c’est précisément que nous sommes au cœur de la partie, qu’il n’y a pas de but marqué, que les joueurs se passent la rondelle sans qu’on puisse dire si des<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgzy9LZAPBsPai7yrxIAu67iHc4P7lmBevN3Rhr565Sjgs4xuW1Q215l5rn6e5hERHu-sffrt3QtOLWXX7K5JHcXvYyGgpZHTYpJGO0ViWi941eaWuL2b5B2HPxwCap_dJGr-Vc-8M1LWw/s1600/16bdd1d1-020d-41b5-819c-2dbf114e2778.jpg" style="clear: right; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="242" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgzy9LZAPBsPai7yrxIAu67iHc4P7lmBevN3Rhr565Sjgs4xuW1Q215l5rn6e5hERHu-sffrt3QtOLWXX7K5JHcXvYyGgpZHTYpJGO0ViWi941eaWuL2b5B2HPxwCap_dJGr-Vc-8M1LWw/s320/16bdd1d1-020d-41b5-819c-2dbf114e2778.jpg" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Alfred Hitchcock, <i>I Confess, </i>tourné à Québec en 1953 </td></tr>
</tbody></table><i>Canadiens</i> et des <i>Maple Leafs</i>, lesquels finiront par mener la rondelle jusque dans le filet de l’adversaire. Rien n’est décidé et tout est laissé suspendu entre victoire et défaite. Ce tableau n’avait donc rien pour susciter la controverse, surtout au Québec. Cependant, il traduisait une certaine conscience nationale incertaine. La suspension - celle de Maurice Richard en 1955 comme celle de tout en peuple depuis l50 ans -, le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgzy9LZAPBsPai7yrxIAu67iHc4P7lmBevN3Rhr565Sjgs4xuW1Q215l5rn6e5hERHu-sffrt3QtOLWXX7K5JHcXvYyGgpZHTYpJGO0ViWi941eaWuL2b5B2HPxwCap_dJGr-Vc-8M1LWw/s104/16bdd1d1-020d-41b5-819c-2dbf114e2778.jpg"><i>suspens</i></a> à la Hitchcock, s’abandonnait à la volonté de le trancher ou pas. En acceptant de se faire, d’un côté comme de l’autre, il y aurait un vainqueur et un vaincu. En refusant de trancher, on préférait <i>match nul</i> et tout le monde gagnant. Telle est la leçon morale de l’Histoire du Canada telle qu’elle se présente, encore aujourd’hui, en 2011. Et, pour la grande majorité des Québécois, cela semble être la sagesse même.</div><div style="text-align: right;">Montréal,<br />
8 juillet 2011</div><div style="text-align: justify;"></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-63788303410599795692011-07-07T22:21:00.000-07:002011-07-08T08:47:22.264-07:00Christmas morning<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiCYQLxFk1ci_lDBx7UF7k_qBps6sgJKwNmWiAv1t57z89tnrWxXXXHI-AAjlWsARwbB7SQXF9abvwzOtF4If02KP9uVe01c91TenI4y-7o-ejO2FUiISTYFz-AwmOvss5862cm7rRyQ0I/s1600/marley-visits-scrooge.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqam-pd7I0UBKOIEt5DCJZLAMpe2NUvfc3LcB5UEN24rn-tJWqLza3zKWDn0Z3ws77i2EqxisZqW7u3mt1mv0tY_2cmI0qAcHypG6_iFOFpUjrZ7WnHcLuOoR_-WXWE0vzjP48Oc_Lubw/s1600/bas%252C+foyer%252C+cr%25C3%25A8che.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgYsaNTiPQeweSLBvCYv7ZY-1lwfTDfXWHAcIOQxlmF26SUZM1HPVf0EC5X1jd6vEv2asfRaxF1mVb6OadGYgf2CdSpHtISXMyYVYDfiAOHAasSk6oON4it_ibOgLctqR7WPVtrAsgQtkY/s1600/17-+christmass.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="283" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgYsaNTiPQeweSLBvCYv7ZY-1lwfTDfXWHAcIOQxlmF26SUZM1HPVf0EC5X1jd6vEv2asfRaxF1mVb6OadGYgf2CdSpHtISXMyYVYDfiAOHAasSk6oON4it_ibOgLctqR7WPVtrAsgQtkY/s400/17-+christmass.jpg" width="400" /> </a></div><div style="text-align: justify;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><b>CHRISTMAS MORNING</b></div><br />
Le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgYsaNTiPQeweSLBvCYv7ZY-1lwfTDfXWHAcIOQxlmF26SUZM1HPVf0EC5X1jd6vEv2asfRaxF1mVb6OadGYgf2CdSpHtISXMyYVYDfiAOHAasSk6oON4it_ibOgLctqR7WPVtrAsgQtkY/s104/17-+christmass.jpg">matin de Noël</a>. Tel est le titre du tableau 17 de <b>conversation anglaise</b>. Soyez rassurés, je ne reviendrai pas sur mes Noëls d’antan. Seulement, autant le tableau <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiCYQLxFk1ci_lDBx7UF7k_qBps6sgJKwNmWiAv1t57z89tnrWxXXXHI-AAjlWsARwbB7SQXF9abvwzOtF4If02KP9uVe01c91TenI4y-7o-ejO2FUiISTYFz-AwmOvss5862cm7rRyQ0I/s1600/marley-visits-scrooge.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiCYQLxFk1ci_lDBx7UF7k_qBps6sgJKwNmWiAv1t57z89tnrWxXXXHI-AAjlWsARwbB7SQXF9abvwzOtF4If02KP9uVe01c91TenI4y-7o-ejO2FUiISTYFz-AwmOvss5862cm7rRyQ0I/s200/marley-visits-scrooge.jpg" width="165" /></a>présentant la ferme de l’oncle George s'inscrivait dans le cliché de la carte postale, autant le tableau 17 s'inscrit dans le cliché de la carte de Noël. Ces sous-produits <i>kitsch</i> des traditions épuisées appartiennent davantage à la culture anglo-saxonne qu’à la culture francophone ou latine. Inspirées des contes de Noël de Charles Dickens, même lorsqu’il s’agit du Noël d’une famille qui n’est certainement pas celle de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiCYQLxFk1ci_lDBx7UF7k_qBps6sgJKwNmWiAv1t57z89tnrWxXXXHI-AAjlWsARwbB7SQXF9abvwzOtF4If02KP9uVe01c91TenI4y-7o-ejO2FUiISTYFz-AwmOvss5862cm7rRyQ0I/s104/marley-visits-scrooge.jpg">Scrooge</a>, c’est-à-dire la famille Martin, c’est l’esprit de Noël de Dickens qui ronfle devant le feu de foyer du tableau.<br />
<br />
On a écrit des thèses sur le rôle que joue Noël dans l’œuvre de Dickens. Tandis que papa et maman regardent à la dérobée, cachés par le rideau, le tableau nous présente un autre angle du <i>living room</i> qui semble peut concorder avec celui du tableau 11! C’est ici que Dickens vient bouleverser la perspective des dessinateurs du manuel <b>conversation anglaise</b>. Son esprit envahit, comme celle d’un fantôme, la scène où les enfants, à leur lever, le matin de Noël (ils n’auraient donc pas assisté à la messe de Minuit?), découvrent les jouets accumulés sous le sapin. L’anachronisme s’arrête là toutefois, car ces jouets sont bien ceux des <i>Fifties</i> et non les humbles jouets du XIXe siècle. Ils sont étalés, ici, sur le tapis, encerclant le sapin et la crèche, seule symbole religieux de la fête. L’aspect hétéroclite de l’énumération laisse plutôt pantois: colis non encore déballés, éléphant sur roue que l’on tire avec une corde, la poupée dans les bras de Mary, un tambour, une boîte surprise (<i>jack in the box</i>), enfin un superbe train électrique avec gare et aiguillage, un cheval tirant sa carriole vide et le bel avion (militaire, à spécifier) que tient, avec un regard ébahi, le petit John. Bref, c’est le bonheur sur terre.<br />
<br />
Cette «<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgguYwpcnIg3KLe_oLKBrp8bAv08Rl_mcYfUSCexJk4OWnGjLHahcv-fOziFAMA_z9sYDUOzU0BF9gbI76FVdfeC0l1T4JfujQPKQKAs4q24-7KvxO8rauOzCZs1CirGHrfgZB8xEKj3kc/s104/noel.gif">carte de Noël</a>» que traduit la poétique du tableau 17 était des plus courantes. Se souhaiter <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgguYwpcnIg3KLe_oLKBrp8bAv08Rl_mcYfUSCexJk4OWnGjLHahcv-fOziFAMA_z9sYDUOzU0BF9gbI76FVdfeC0l1T4JfujQPKQKAs4q24-7KvxO8rauOzCZs1CirGHrfgZB8xEKj3kc/s1600/noel.gif" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="151" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgguYwpcnIg3KLe_oLKBrp8bAv08Rl_mcYfUSCexJk4OWnGjLHahcv-fOziFAMA_z9sYDUOzU0BF9gbI76FVdfeC0l1T4JfujQPKQKAs4q24-7KvxO8rauOzCZs1CirGHrfgZB8xEKj3kc/s200/noel.gif" width="200" /></a>joyeux Noël et Bonne Année n’est pas évident. Nous le voyons aujourd’hui où la tendance se perd, d’une part noyée dans le consumérisme de «la période du temps des fêtes», d’autre part par la solitude qui isole les individus des uns des autres, réduisant les souhaits à une simple convenance. Prendre le temps, un dimanche après-midi du début décembre, pour étayer les cartes de souhaits et les distribuer entre nos connaissances, éviter de répéter deux années de suite la même carte, faire en sorte que la carte n’apparaisse pas insultante pour les récipiendaires (ma mère détestait recevoir une carte de Noël présentant des chandelles allumées!), faire en sorte de bien soigneusement éviter d’oublier un parent, un ami, cela demandait du temps, coûtait de l’argent, exigeait un surplus d’âme que ne nécessite pas une poignée de main au hasard.<br />
<br />
Dans les <i>Fourties</i>, les <i>Fifties</i>, et encore dans les <i>Sixties</i>, la tradition anglo-saxonne été adoptée depuis longtemps par les Canadiens Français. Les cartes <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfCcqZwhm1KgZVAtPh4xS7f_NIkD0WOZynHHGEibaFrVMtjnM7qbWWKfGQVRBXcSDTwVs4bPr7Zecm16RW_s_ScBDS71FrzYwh-sXMGqKTbjfcrfWY3_JnMbVZYPlvJtC12gocfxn5qy4/s1600/2719487066_11.gif" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="252" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfCcqZwhm1KgZVAtPh4xS7f_NIkD0WOZynHHGEibaFrVMtjnM7qbWWKfGQVRBXcSDTwVs4bPr7Zecm16RW_s_ScBDS71FrzYwh-sXMGqKTbjfcrfWY3_JnMbVZYPlvJtC12gocfxn5qy4/s320/2719487066_11.gif" width="320" /></a>s’achetaient en séries, dans des boîtes aux différents modèles. Certaines étaient particulièrement dessinées pour les enfants, d’autres pour les adultes. Des Père Noël, des lutins, des traîneaux remplis de cadeaux s’adressaient aux enfants; des thèmes religieux, familiaux, des paysages d’hiver aux adultes. Certaines cartes se voyaient saupoudrer de cristaux pour donner l’impression du givre. D’autres étaient très colorées. D’autres, encore, plus sobre. Certaines étaient strictement religieuses, à l’opposé il y en avait toujours de plus en plus qui étaient <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfCcqZwhm1KgZVAtPh4xS7f_NIkD0WOZynHHGEibaFrVMtjnM7qbWWKfGQVRBXcSDTwVs4bPr7Zecm16RW_s_ScBDS71FrzYwh-sXMGqKTbjfcrfWY3_JnMbVZYPlvJtC12gocfxn5qy4/s104/2719487066_11.gif">laïques</a>, commerciales. Les formules, banales, répétaient toujours les mêmes types de souhaits: santé et prospérité, bonheur et joies. Il y en avait pour Noël, d’autres pour la Bonne Année, enfin le <i>combo</i> des deux fêtes. Et comme l’Épiphanie et la Sainte-Famille étaient fêtées dans la même période, les vacances s’étiraient sur presque trois semaines. La période des fêtes, contrairement à nos jours, pouvaient s’étirer sur une longue période.<br />
<br />
Si pour les femmes, c’était la période de la mangeaille; pour les hommes, c’était souvent l’occasion de beuveries. Les habitués des chantiers, des travaux saisonniers, du monde agraire en repos s'abandonnaient, de génération en génération, aux beuveries de gin, de brandy, de mixtes avec un pourcentage d’alcool comparable à la vodka. Les rasades se suivaient, l’une n’entendant pas l’autre, jusqu’à l’épuisement des facultés des noceurs. Puis, au réveil, sans prendre de café, ni de repas, la beuverie reprenait de plus belle. Il est difficile de s’imaginer l'endurance des estomacs et des foies qui absorbaient toute cette quantité de boisson! Et c’était ainsi, sans dérougir, pendant deux à trois semaines avant que la soif d’alcool ne s’épuise et qu’après un mixte de soupes, de conserves de spaghetti et d’autres produits mélangés, les hommes en viennent à se ressaisir et à reprendre le travail qui était le leur.<br />
<br />
La période des fêtes était perçue, en général, comme un temps de délestage du travail, de l’école, des devoirs et des leçons, des obligations habituelles. Il y avait peu de gens seules à l’époque tant que chacun était inséré dans un réseau familial ou deux. Même les célibataires et les religieux avaient leur <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjYyOSyLHyS-g5sCpNu7uEROlr1q5s-zsYAq_NFkRznrSV8Do1PAYXVxmdw9ktRKMVhncTkpOQ8y7CVELjRfS9vh0PqjH2SkfAbVVfbFEYJpWzBUFcqb3Bt1DQLqOjWP4tD_AYYSK04Sqo/s1600/edmond+joseph+massicotte+1875-1929.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="235" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjYyOSyLHyS-g5sCpNu7uEROlr1q5s-zsYAq_NFkRznrSV8Do1PAYXVxmdw9ktRKMVhncTkpOQ8y7CVELjRfS9vh0PqjH2SkfAbVVfbFEYJpWzBUFcqb3Bt1DQLqOjWP4tD_AYYSK04Sqo/s320/edmond+joseph+massicotte+1875-1929.jpg" width="320" /></a>famille chez qui passer la période du temps des fêtes. C’était le temps des retrouvailles, des réconciliations, des pardons. Au-delà de l’Idéologique chrétien, il y avait ce symbolisme, autour de la naissance de l’enfant Dieu, que les irritants de ce monde pouvaient être surmontés (sens profond du mot «Noël»). Cette paix, parce que nous vivions en des temps constamment menacés du fléau de la guerre, n’avait pas de prix. Le temps des épreuves devait être tenu pour passé et l’importance de la qualité de la vie humaine la rendait précieuse aux yeux de tous et chacun. Alors qu’aujourd’hui, cette période, avec celle de la saison estivale, est l’une des deux où se tuent le plus de gens - surtout des jeunes gens - au volant de leurs autos sur les routes, à l’époque, elle se prêtait à un resserrement, suspendant les hostilités ou les rancunes. Il y avait bien des dérapages, entre les oncles, entre les tantes, entre les cousins, entre les frères et sœurs, mais rien de suffisamment sérieux pour que s’oublie l’essentiel du rite inscrit de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjYyOSyLHyS-g5sCpNu7uEROlr1q5s-zsYAq_NFkRznrSV8Do1PAYXVxmdw9ktRKMVhncTkpOQ8y7CVELjRfS9vh0PqjH2SkfAbVVfbFEYJpWzBUFcqb3Bt1DQLqOjWP4tD_AYYSK04Sqo/s104/edmond+joseph+massicotte+1875-1929.jpg">messe de Minuit</a> à la fête des Rois.<br />
<br />
Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui considèrent cette période comme insupportable en tous points. L’interruption de la banalité quotidienne devient un traumatisme psychologique. On n’hésite pas à retourner au travail dès le lendemain de Noël ou du Jour de l’An. Certains <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqam-pd7I0UBKOIEt5DCJZLAMpe2NUvfc3LcB5UEN24rn-tJWqLza3zKWDn0Z3ws77i2EqxisZqW7u3mt1mv0tY_2cmI0qAcHypG6_iFOFpUjrZ7WnHcLuOoR_-WXWE0vzjP48Oc_Lubw/s1600/bas%252C+foyer%252C+cr%25C3%25A8che.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqam-pd7I0UBKOIEt5DCJZLAMpe2NUvfc3LcB5UEN24rn-tJWqLza3zKWDn0Z3ws77i2EqxisZqW7u3mt1mv0tY_2cmI0qAcHypG6_iFOFpUjrZ7WnHcLuOoR_-WXWE0vzjP48Oc_Lubw/s320/bas%252C+foyer%252C+cr%25C3%25A8che.jpg" width="256" /></a>magasins ont été un temps ouverts, même les jours de fêtes! Il a fallu des pressions sur le gouvernement du Québec pour que Noël et le Jour de l’An redeviennent journées fériées. Beaucoup subissent la période du temps des fêtes comme un fardeau désagréable. Les voyages en famille sont un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqam-pd7I0UBKOIEt5DCJZLAMpe2NUvfc3LcB5UEN24rn-tJWqLza3zKWDn0Z3ws77i2EqxisZqW7u3mt1mv0tY_2cmI0qAcHypG6_iFOFpUjrZ7WnHcLuOoR_-WXWE0vzjP48Oc_Lubw/s1600/bas%252C+foyer%252C+cr%25C3%25A8che.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a>long calvaire. Les familles éclatées se dispersent entre pères et mères divorcés ou remariés. Les cadeaux sont devenus l’ultime incitation à garder les jeunes à la maison pour le jour de fête, et encore ne restent-ils pas toute la journée. Les coûts pour un Noël sincèrement et sérieusement fêté (achat du sapin de Noël, des décorations, de la couronne à la porte, des crèches et des villages, etc.) sont de plus en plus exorbitants. Voici, en plus, les listes de cadeaux préparés pour chacun des individus. Le temps des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqam-pd7I0UBKOIEt5DCJZLAMpe2NUvfc3LcB5UEN24rn-tJWqLza3zKWDn0Z3ws77i2EqxisZqW7u3mt1mv0tY_2cmI0qAcHypG6_iFOFpUjrZ7WnHcLuOoR_-WXWE0vzjP48Oc_Lubw/s104/bas%252C+foyer%252C+cr%25C3%25A8che.jpg">bas de Noël</a> où l’on déposait pommes et oranges est passé depuis longtemps. Fête évoquant la simplicité par cette seule présence de la crèche, Noël est un nœud complexe d’attentes et de déceptions.<br />
</div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgSq3a-klyLU2fuCajdgh7_6vXQ9AFikk4RX7TUfdXkEopfHu34Aj1M8rICFSGNNzttJnrtOSyaCajXULBEqmZ8qgxZOoeGmcbVuRPmmFRqfVAKPICIFRkEMWCjMagAUmQ02vsZdNEbsRc/s1600/boxing-day-2008-canada.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="178" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgSq3a-klyLU2fuCajdgh7_6vXQ9AFikk4RX7TUfdXkEopfHu34Aj1M8rICFSGNNzttJnrtOSyaCajXULBEqmZ8qgxZOoeGmcbVuRPmmFRqfVAKPICIFRkEMWCjMagAUmQ02vsZdNEbsRc/s200/boxing-day-2008-canada.jpg" width="200" /></a></div><div style="text-align: justify;">Comment s’en étonner? La décléricalisation contenait en elle-même la déchristianisation, et par le fait même on alla jusqu’à évoquer les fêtes païennes du solstice d’hiver pour justifier les rencontres festives de la fin décembre. Toute la peine du monde frappe les membres des familles divorcées, les célibataires isolés, les veufs et les exilés. Noël est devenu synonyme de supplice, de tortures morales insupportables. La tristesse l’emporte, d’une manière ou d’une autre, sur les réjouissances traditionnelles. Les vœux pieux renouvelés chaque année de dé-commercialiser Noël échouent à parvenir à surmonter la grande vague du <i>Boxing Day,</i> le lendemain de Noël, où des vagues de consommateurs se précipitent pour dépenser leurs cadeaux de Noël ou procéder à des échanges dans tous les magasins. C’est l’une des journées les plus rentables de l'année pour le commerce en tous genres!<br />
<br />
Nous comprenons maintenant pourquoi la tradition des cartes de Noël tend à disparaître. Le téléphone, le courriel électronique, la caméra vidéo à transmission instantanée, valent mieux que les bonnes vieilles cartes. Malheureusement, on dit rarement ce que la pudeur levée nous permettait d’écrire dans une carte de souhaits. La mécanisation des moyens de communication permet de conserver le discours de façade. On souhaite les meilleurs souhaits à ceux que nous haïssons pour tuer. L’hypocrisie a trouvé d’autres voies par où s’exprimer. Cela aussi contribue au cynisme et à la tristesse que l’époque tend à accroître parmi les individus.<br />
<br />
Noël, une catastrophe à l'ère de la post-modernité? Sans doute. Mais surtout un aboutissement d’une longue évolution qui, déjà au temps de Dickens, commençait à <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3P2Zqwbnu4U-LMd9oiXaVKOesjW-9j6Xw9YfFjzalGAnWvz_bSeX4svWZCOe3T51RjS3kEQj39mQCQwVy-jj5aeXiThoefGkOcuDmRJjCiKcU6QnFTn93brPkmKuAEbLoeX5fL6MNHcY/s1600/childrens399_2000.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3P2Zqwbnu4U-LMd9oiXaVKOesjW-9j6Xw9YfFjzalGAnWvz_bSeX4svWZCOe3T51RjS3kEQj39mQCQwVy-jj5aeXiThoefGkOcuDmRJjCiKcU6QnFTn93brPkmKuAEbLoeX5fL6MNHcY/s320/childrens399_2000.jpg" width="208" /></a>se manifester et dont le personnage de Scrooge était le protagoniste. Les affaires ont priorité sur les affects. Si le cauchemar ramène Scrooge à de meilleurs sentiments face aux souffrances du pauvre Tiny Tim, c’est là un tour de passe-passe de l’auteur. C’est la conscience malheureuse, la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3P2Zqwbnu4U-LMd9oiXaVKOesjW-9j6Xw9YfFjzalGAnWvz_bSeX4svWZCOe3T51RjS3kEQj39mQCQwVy-jj5aeXiThoefGkOcuDmRJjCiKcU6QnFTn93brPkmKuAEbLoeX5fL6MNHcY/s104/childrens399_2000.jpg">conscience coupable</a> de tout capitaliste affairiste devant les exigences du mode de production qui lui impose de ne pas sacrifier une seule journée, une seule dime, à la misère humaine. Cette conscience malheureuse finira par l’emporter, car le cauchemar de Scrooge trouve son inversion dans celui de son employé et de sa famille qui «rêvent» que le vieillard arrive avec la dinde de Noël pour toute la famille et l’argent pour permettre de sauver et de guérir le jeune garçon. Ce renversement, du rêve à la réalité, n’est que de la poudre aux yeux qu’on appelle la <i>bienfaisance</i>. Le lendemain de la journée, l’impératif économique reprendra ses droits et la conscience malheureuse retrouvera son indifférence de tous les jours. En peu de temps, le rêve s’évanouira et les traitements du pauvre Tiny Tim seront finalement interrompus faute de paiements …jusqu’aux prochains remords, à la prochaine fête de Noël, dans un an!<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhQXV9e2_oPuGBijw67gYOJp47yDMaME-mk5iqNgnvFTWhEy3ruYbfaS4LN0lP3qC8ywvLSwBgm82nzZ6lsBd5h3QNRsbxn9X4e5udm27IuOOkeSRDkSIoVdDOM9G6VFiqiiL8EpmrZLbo/s1600/Guignol_e.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhQXV9e2_oPuGBijw67gYOJp47yDMaME-mk5iqNgnvFTWhEy3ruYbfaS4LN0lP3qC8ywvLSwBgm82nzZ6lsBd5h3QNRsbxn9X4e5udm27IuOOkeSRDkSIoVdDOM9G6VFiqiiL8EpmrZLbo/s320/Guignol_e.jpg" width="208" /></a>Aujourd’hui, si je m’en tiens au Québec, le gouvernement rabat sa responsabilité face à la justice sociale à la solution P.P.P. partenariat privé/publique, ce que représente la <i>bienfaisance</i>, la charité des Chagnon, Jean Coutu et autres millionnaires de la <i>business</i> qui fournissent des «petits déjeuners» aux enfants avant d’aller à l’école (que mangent-ils pour déjeûner les fins de semaine?), la clinique du bon docteur Julien reprend la charité de ces médecins qui soignaient jadis sans être rétribués par les pauvres, au temps où l’assurance-maladie n’existait pas encore. La <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhQXV9e2_oPuGBijw67gYOJp47yDMaME-mk5iqNgnvFTWhEy3ruYbfaS4LN0lP3qC8ywvLSwBgm82nzZ6lsBd5h3QNRsbxn9X4e5udm27IuOOkeSRDkSIoVdDOM9G6VFiqiiL8EpmrZLbo/s104/Guignol_e.jpg">guignolée des média</a>, j’en ai parlé, passons outre. Et combien d’autres opérations de charité médiatisées et présentées comme des interventions individuelles essentielles face à l’incurie de l’État à résoudre un problème qu’il ne veut pas résoudre - celui de la justice sociale -, permet de renouer avec une idée du Noël traditionnel avec laquelle la réalité n’a jamais eu affaire. Noël n’a jamais signifié l'occasion d'accomplir un acte de charité à la Perrichon.<br />
<br />
Devant ces mutations de l’esprit du temps des fêtes, nous sommes impuissants à changer le cours pris par la tristesse dont se revêt Noël. Sans doute le décor naturel y est-il pour quelque chose aussi. Ne pensons plus à cette neige d’antan <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTe0FVHR7Ejh_DFnU01KzQw2RtOlEXapavMLYnjsCYyapvW5im_yK_3Bz_9627o9-p7SmhanmHbsohrI438D_PMM3yTNHeG3kDgvW1McuID9zLiamX0qr6VEZrvTCDQkzsQ4fuByWujmk/s1600/barbie-and-ken-together-again-valentine%2527s-news.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTe0FVHR7Ejh_DFnU01KzQw2RtOlEXapavMLYnjsCYyapvW5im_yK_3Bz_9627o9-p7SmhanmHbsohrI438D_PMM3yTNHeG3kDgvW1McuID9zLiamX0qr6VEZrvTCDQkzsQ4fuByWujmk/s200/barbie-and-ken-together-again-valentine%2527s-news.jpg" width="200" /></a>avec laquelle John, Mary et leur cousin (?) faisaient un gros bonhomme de neige à l’image du père Martin. Les pluies verglaçantes, les redoux et les chutes drastiques de températures, exercent des variations qui entraînent avec elles les tempéraments. Le sapin n’est plus dans la forêt à proximité, il est déjà entreposé dans un <i>Canadian Tires</i> ou quelque autre quincaillerie de centre d’achat. Les décorations se vendent en série dans les Dollorama ou les Villages du dollar. Les jouets sont devenus des jeux vidéos où de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjRLbHksz-8JbSUKxGqO4rKe7WAGaNLyCbRDvvqSOVCixId0Mwc4fc2ylIll4-FzS9nA60i0pGDrN4qeXSYDwOifK9Q1HNybsbrVw2DZZIwhQhIE7_xfxlXJn8SfDG3QHfyv36u-OxhwrQ/s1600/krusty40gif.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="187" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjRLbHksz-8JbSUKxGqO4rKe7WAGaNLyCbRDvvqSOVCixId0Mwc4fc2ylIll4-FzS9nA60i0pGDrN4qeXSYDwOifK9Q1HNybsbrVw2DZZIwhQhIE7_xfxlXJn8SfDG3QHfyv36u-OxhwrQ/s200/krusty40gif.jpg" width="200" /></a>poursuivants, les enfants s’identifient à des personnages poursuivis dans des décors fantastiques semés de pièges en 3D. La violence et l’érotisme ont remplacé, très jeune, l’avion de guerre et le train de marchandise de John. La poupée de Mary n’intéresse plus les petites filles depuis que <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgTe0FVHR7Ejh_DFnU01KzQw2RtOlEXapavMLYnjsCYyapvW5im_yK_3Bz_9627o9-p7SmhanmHbsohrI438D_PMM3yTNHeG3kDgvW1McuID9zLiamX0qr6VEZrvTCDQkzsQ4fuByWujmk/s104/barbie-and-ken-together-again-valentine%2527s-news.jpg">Barbie et Ken</a> sont devenus, depuis les <i>Sixties</i>, les poupées <i>sex-symbols</i> que l’on peut habiller et déshabiller sans gêne ni pudeur. Il n’y a pas jusqu’au <i>jack in the box</i> qui n’ait appris les mots grossiers et cyniques de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjRLbHksz-8JbSUKxGqO4rKe7WAGaNLyCbRDvvqSOVCixId0Mwc4fc2ylIll4-FzS9nA60i0pGDrN4qeXSYDwOifK9Q1HNybsbrVw2DZZIwhQhIE7_xfxlXJn8SfDG3QHfyv36u-OxhwrQ/s104/krusty40gif.jpg">Krusty</a>, le clown <i>gambler</i> et érotomane de la populaire série-télé <i>The Simpsons</i>. La musique adoucissait les mœurs se plaisait à dire Voltaire: avec la musique électronique, les rythmes obsessionnels du <i>slam</i>, ses rimettes plates, le bruit qui a remplacé l’harmonie, comme le crû le cuit, la régression n’apparaît jamais aussi belle qu’en ce temps de Noël.<br />
<br />
Il reste bien les choux que l’on colle sur le papier d’emballage des cadeaux, les ficelles de couleurs qui ceintures les boîtes, les motifs enfantins dessinés sur ces papiers, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiLEnOcdwbAC1v0anDEUGyu1Fl75bWlkA6v4OLs994mnBJYUpuRLbV1F6jY4WaEBfYiSlQ5tgpi0zATUQdkJw91D3f3py_rKjfIWmEE7_BkKSpeZeqHhNoTTBr-L2j-94lmRqUk3eP2G7k/s1600/grinch_santa.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="150" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiLEnOcdwbAC1v0anDEUGyu1Fl75bWlkA6v4OLs994mnBJYUpuRLbV1F6jY4WaEBfYiSlQ5tgpi0zATUQdkJw91D3f3py_rKjfIWmEE7_BkKSpeZeqHhNoTTBr-L2j-94lmRqUk3eP2G7k/s200/grinch_santa.jpg" width="200" /></a>ces interminables <i>feel good</i> movies que l’on passe et repasse, chaque année, sans arrêt sur toutes les chaînes de télévision, les chorales qui entonnent le Joyeux Temps des Fêtes. Les <i>crooners</i> n’ont rien perdu de leur popularité. Et les mille et une versions de <i>Christmas Carol</i> de Dickens, bien sûr. Après le Père Noël, la Mère Noël, le petit renne au nez rouge, on a ajouté d’autres personnages, moins connus jusqu’à une certaine époque, dans l’almanach des pitres de Noël: le bonhomme de neige Frosty déjà mentionné et le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiLEnOcdwbAC1v0anDEUGyu1Fl75bWlkA6v4OLs994mnBJYUpuRLbV1F6jY4WaEBfYiSlQ5tgpi0zATUQdkJw91D3f3py_rKjfIWmEE7_BkKSpeZeqHhNoTTBr-L2j-94lmRqUk3eP2G7k/s104/grinch_santa.jpg">Grinch</a>, version «verdâtrisée» de Scrooge. Comme on l’aura constaté, on tourne en rond, épuisant l’esprit de Noël de Dickens jusqu’à ses multiples sous-produits commerciaux.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiluObNtz_XsfOLQfVvnst4L2FdW7C-KTHgN-ByHOykXL9zleWq7trT7R0IeRj-dlOn5UhohlT7IdY0Q7syzHNxZJayNXNANxiGZk_beYCkqpSBKVyJrGwSCQyCbd9XkThPK6V_vMg1XpM/s1600/3989.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiluObNtz_XsfOLQfVvnst4L2FdW7C-KTHgN-ByHOykXL9zleWq7trT7R0IeRj-dlOn5UhohlT7IdY0Q7syzHNxZJayNXNANxiGZk_beYCkqpSBKVyJrGwSCQyCbd9XkThPK6V_vMg1XpM/s200/3989.jpg" width="126" /></a>Mais les cartes de Noël se font plus rares. On en envoie, dessinées à l’infographie, par courriel et dans les réseaux sociaux: Twittez avec le Père Noël en bobettes; Facebookez en vous faisant passer pour un lutin du pôle nord; googlez une photo des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiluObNtz_XsfOLQfVvnst4L2FdW7C-KTHgN-ByHOykXL9zleWq7trT7R0IeRj-dlOn5UhohlT7IdY0Q7syzHNxZJayNXNANxiGZk_beYCkqpSBKVyJrGwSCQyCbd9XkThPK6V_vMg1XpM/s104/3989.jpg">gros seins</a> de votre blonde ou le pénis bandé de votre petit copain à vos amis (mais pas à vos parents); envoyez, par Flicker, la liste de vos cadeaux afin de faire rougir d’envie vos copains ou copines d’école. Rien de tel que de rendre malade de jalousie les autres en attendant de se rassembler, dès 6 heures le lendemain matin de Noël, à la porte du Futurshop, qui ouvrira à 1 heure pour le grand <i>Boxing Day</i>. Il est d’ailleurs symptomatique que ce mot n’apparaissait pas parmi le vocabulaire rattaché au tableau 17. Au temps de John & Mary, les lendemains de Noël étaient des jours fériés pour dormir et digérer. </div><div style="text-align: justify;"></div><div style="text-align: justify;"></div><div style="text-align: justify;"><br />
Encore là revient, toujours obsédante, cette question, cette problématique: devons-nous ou pas regretter le temps de John & Mary comparé au nôtre, en 2011? Le rapport à la ferme indiquait la perte d’un esprit communautaire jadis lié par l’éloignement des établissements et les corvées familiales. Le rapport à la fête indique ici une déqualification où l’abondance des <i>Fifties</i> ne fait qu’annoncer la sur-consommation des décennies à venir. La quantité, la grosseur et les prix des cadeaux de John & Mary soulignent l’abondance dans laquelle baigne la famille Martin, qui était loin d’être celle dévolue à tout le monde. L’idéal de la carte de Noël <i>Christmas morning</i> est un idéal de famille riche qui peut se permettre de le traduire dans le réel, le concret; ou encore le rêve, jamais réalisé, des enfants pauvres qui apprenaient ainsi la leçon du temps des fêtes de <b>conversation anglaise</b>. Dans les deux cas, l’association de Noël se voyait liée au pouvoir d’achat, et par le fait même, à une économie qui n’aura pas tardé à corrompre tous ces rapports qui définissaient les liens interpersonnels de Noël par des relations sociales professionnelles ou économiques de convenance.<br />
<br />
En ce sens, les <i>Fifties</i> resteront non pas la décennie de la nostalgie, mais la décennie de la prophétie.<br />
<br />
<div style="text-align: right;">Montréal<br />
7 juillet 2011</div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-9314293049215413952011-07-06T20:28:00.000-07:002011-07-21T09:55:53.721-07:00At the grocery store<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj3GWyxDqwkBrylqncbW7mJ7ITeCH42MHh8cHGMTZ91pa63u__RC7cmQo_YgdB8jtVbABosuWTpfOYF351RjmYEPvoPAARQCDshpo7k2itTI5Ehu3OPQwLvQFD1meXrL6sU-7VtdnyHQ78/s1600/mainpic_0.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"></a><img border="0" height="288" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg00X-mQplx1Rn6-clq_yKrAnOIVWzdjVNZYmpVYFCDmX8WTj62vWct-SWM8Viy8_ODYui0MyFCkGjTtbUZF2jGLVTiPLHOI0U45dADNxY2p2k7qaz2ktByHua3Uwmji6wDZX8HlIwUunI/s400/16-+at+the+grocery+store.jpg" width="400" /></div><div style="text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><b>AT THE GROCERY STORE</b></div><div style="text-align: justify;"><br />
Nous voici rendus à l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfeTsXNKHYwRSRvus7GeymO38JP9GhKs1zNI_gROKitMg0okomaUjzHnDglPDXcD02nXPwj2vPv1ial0ItXvCJCwYwMQN9KraBfcQiOtXP0VFVsiqygReN74rp4IKS5xQfa0dAdt0hsgM/s104/16-+at+the+grocery+store.jpg">épicerie</a> de monsieur Gagnon. C’est le nom que le manuel <b>conversation anglaise </b>lui donne. Celui-ci offre un panier (un autre) rempli de tomates rouges que madame Martin s’apprête à payer. John regarde avec un sourire de pantin. Belle chemise, cravaté, un gilet de laine, le charmant garçon se présente sous son meilleur jour, comme dans le tableau 3. La «<i>grocery</i>», comme l’on disait dans mon enfance, était le mot qui désignait, communément, à l’époque l’épicerie. Ici, on a l’impression qu’il indique ce qu’on appelait le «magasin général» où l’on retrouvait aussi bien de la nourriture, des épices, de la quincaillerie, des plants, etc. Ce qui est remarquable, c’est la grande vitrine qui permet de voir à l’extérieur, de l’autre côté de la rue, où un immeuble de deux étages se présente également comme un commerce.<br />
<br />
Sur le comptoir, une balance pour peser des articles à la pièce; des conserves, un paquet emballé (du café peut-être?), un calepin de factures et, à l’extrême droite, une caisse enregistreuse mécanique. À l’arrière-plan, les étagères sont remplies, de façon tassée, de toutes sortes<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj3btRHB5X-slrGyfzvkjExNJAOvq7PgyoabCVlFaLY6iRvGl7tmTDidBJDcfMQUAXDch5HeBaMY8WRpyC-uJmPdzsEpeauN98dt7Ybt_wOtHOSivKmn9u6YTl3gpMIdZO9YB1flt3ax5I/s1600/4580124-brown-paper-bag-over-white-background.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj3btRHB5X-slrGyfzvkjExNJAOvq7PgyoabCVlFaLY6iRvGl7tmTDidBJDcfMQUAXDch5HeBaMY8WRpyC-uJmPdzsEpeauN98dt7Ybt_wOtHOSivKmn9u6YTl3gpMIdZO9YB1flt3ax5I/s200/4580124-brown-paper-bag-over-white-background.jpg" width="134" /></a> de produits en boîtes, en conserves ou en bouteilles. L’importance des épices donne le nom au commerce, l’épicerie, que le terme <i>grocery</i> ne traduit pas étymologiquement. Nous sommes encore à l’époque des grands <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj3btRHB5X-slrGyfzvkjExNJAOvq7PgyoabCVlFaLY6iRvGl7tmTDidBJDcfMQUAXDch5HeBaMY8WRpyC-uJmPdzsEpeauN98dt7Ybt_wOtHOSivKmn9u6YTl3gpMIdZO9YB1flt3ax5I/s104/4580124-brown-paper-bag-over-white-background.jpg">sacs de papiers bruns</a> dans lesquels on empilait les achats. En digne garçon poli, élève de la bienséance appliquée, c’est John qui transportera le paquet jusqu’à la maison. À remarquer la cliente à l’arrière-plan, vêtue comme dans les années 40. On peut mesurer l’aspect vieillot de l’épicerie de monsieur Gagnon. Rien d’étonnant à ce fait. Beaucoup de ces commerces restèrent identiques à eux-mêmes, sans changer, durant des décennies. À la différence d’aujourd’hui, où les <i>designers</i> conseillent de changer constamment l’aménagement des comptoirs dans les super-marchés, ici la tradition s’impose encore comme une valeur dominante, de confiance et de fiabilité du commerce.<br />
<br />
J’avais cinq ou six ans à peu près. C’était avant la mort de mon grand-père maternel, en 1961. Nous allions à une épicerie qui s’appelait le «Marché Saint-Edmond», à Saint-Jean-sur-Richelieu, situé alors à un coin de rue sur Mayrand. Je me souviens que cette épicerie n’avait que deux allées (peut-être une troisième), mais étroite au point qu’il était impossible de passer deux personnes l’une à côté de l’autre. C’était un commerce dont l’intérieur était à peine comparable à celui d'un dépanneur parmi les plus petits de la ville de Montréal de 2011. Toutes les boîtes de céréales, les produits en conserves, en boîtes, en bouteilles se retrouvaient, je ne sais comment, entassés sur les étagères. En avant, face à la porte extérieure, le comptoir et la caisse enregistreuse. De ce que je me souvienne, c’était l’épicerie la plus étroite que j’ai jamais rencontrée de ma vie. Bien des années plus tard, le marché Saint-Edmond déménagea à quelques bâtiments où il avait un espace un peu plus grand.<br />
<br />
Les épiceries de l’époque étaient bien moins larges ou longues que celles des centres d’achat actuels. Elles logeaient au rez-de-chaussée de domiciles, comme on peut le voir dans l’édifice par la fenêtre. Au-dessus de la porte d’entrée ou de la vitrine était suspendue une enseigne généralement fournie par une marque déposée de boissons gazeuses ou de bière (à l’époque c’était permis). Les planchers étaient <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEicrl1Oy6gA_ML5ZYDUsOd5jfE1E7Bgpy68Kquu2IkVTyQmbBEueEA99fBn_LkS0VvpK_bAik6XxGIgkAkI7oFauTtN6R6J0zGpMJTZH39WV8y_lWv7O5MfCxxaN5AglzviVxocJJhs_Rw/s1600/5145031737_f760f80623_m.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEicrl1Oy6gA_ML5ZYDUsOd5jfE1E7Bgpy68Kquu2IkVTyQmbBEueEA99fBn_LkS0VvpK_bAik6XxGIgkAkI7oFauTtN6R6J0zGpMJTZH39WV8y_lWv7O5MfCxxaN5AglzviVxocJJhs_Rw/s1600/5145031737_f760f80623_m.jpg" /></a>souvent sur bois naturel, les tuiles ne venant que plus tard. Puis lorsque la concentration imposa des chaînes nationales: <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEicrl1Oy6gA_ML5ZYDUsOd5jfE1E7Bgpy68Kquu2IkVTyQmbBEueEA99fBn_LkS0VvpK_bAik6XxGIgkAkI7oFauTtN6R6J0zGpMJTZH39WV8y_lWv7O5MfCxxaN5AglzviVxocJJhs_Rw/s104/5145031737_f760f80623_m.jpg">Steinberg</a>, I.G.A, Spot, puis les premières chaînes québécoises, Richelieu et Métro (avant qu’elles ne fusionnent), celles-ci s’annoncèrent avec des enseignes au néon. Le «R» bleu de Richelieu et la femme avec son panier d’épicerie étaient les logos des deux compagnies francophones tandis que Steinberg se distinguait par son «S» entre deux carrés de couleurs différentes. Spot était une enseigne rouge et A&P, une distributrice américaine, avec <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhkQFU_GJWMGQR1X__iy0KOh7wF-DhShXFnPXcdy7bNMUTS130SQnuD2XFysKEbGspstkUjWCFrdSKPuFag9ce4u_VO_UW8fFw7Dok1ixIGDms5EJYhXBOFSGJYCLYskJS2Q3C0iOnBhlk/s1600/histoire_logo_shell.png" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhkQFU_GJWMGQR1X__iy0KOh7wF-DhShXFnPXcdy7bNMUTS130SQnuD2XFysKEbGspstkUjWCFrdSKPuFag9ce4u_VO_UW8fFw7Dok1ixIGDms5EJYhXBOFSGJYCLYskJS2Q3C0iOnBhlk/s1600/histoire_logo_shell.png" /></a>son cercle jaune où s’inscrivaient les trois lettres en rouges. Ces enseignes se multiplièrent durant les <i>Fifties</i>, illuminant les rues principales. Lorsque nous venions à Montréal, comme le pont Champlain n’était pas encore ouvert à la circulation, notre autobus passait par le pont Jacques-Cartier. À ses pieds se trouvaient trois garages surmontés d’immenses enseignes constituées de néons de couleurs dont les rayons s’allumaient graduellement, en balayage, illustrant à ceux qui étaient encore sur le pont, qu’une <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj3GWyxDqwkBrylqncbW7mJ7ITeCH42MHh8cHGMTZ91pa63u__RC7cmQo_YgdB8jtVbABosuWTpfOYF351RjmYEPvoPAARQCDshpo7k2itTI5Ehu3OPQwLvQFD1meXrL6sU-7VtdnyHQ78/s1600/mainpic_0.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="149" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj3GWyxDqwkBrylqncbW7mJ7ITeCH42MHh8cHGMTZ91pa63u__RC7cmQo_YgdB8jtVbABosuWTpfOYF351RjmYEPvoPAARQCDshpo7k2itTI5Ehu3OPQwLvQFD1meXrL6sU-7VtdnyHQ78/s200/mainpic_0.jpg" width="200" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjHAeLY4mlE3iW52R2rYq9Tsq-Qgoe25g6ivSebEyNrcvgjdMcpVqSqvsKEhAdWlgL54pSjF-xzGivH12FSAaHf5a5tGl-_Sj4GP7GzI7REqVTzd-CdzMm_6c2xqyORPbqbsbSBGFzXhGY/s1600/BALogo1.gif" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjHAeLY4mlE3iW52R2rYq9Tsq-Qgoe25g6ivSebEyNrcvgjdMcpVqSqvsKEhAdWlgL54pSjF-xzGivH12FSAaHf5a5tGl-_Sj4GP7GzI7REqVTzd-CdzMm_6c2xqyORPbqbsbSBGFzXhGY/s200/BALogo1.gif" width="200" /></a>station-service <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhkQFU_GJWMGQR1X__iy0KOh7wF-DhShXFnPXcdy7bNMUTS130SQnuD2XFysKEbGspstkUjWCFrdSKPuFag9ce4u_VO_UW8fFw7Dok1ixIGDms5EJYhXBOFSGJYCLYskJS2Q3C0iOnBhlk/s104/histoire_logo_shell.png">Shell</a>, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj3GWyxDqwkBrylqncbW7mJ7ITeCH42MHh8cHGMTZ91pa63u__RC7cmQo_YgdB8jtVbABosuWTpfOYF351RjmYEPvoPAARQCDshpo7k2itTI5Ehu3OPQwLvQFD1meXrL6sU-7VtdnyHQ78/s104/mainpic_0.jpg">Esso</a> et <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjHAeLY4mlE3iW52R2rYq9Tsq-Qgoe25g6ivSebEyNrcvgjdMcpVqSqvsKEhAdWlgL54pSjF-xzGivH12FSAaHf5a5tGl-_Sj4GP7GzI7REqVTzd-CdzMm_6c2xqyORPbqbsbSBGFzXhGY/s104/BALogo1.gif">B.A. </a>(British American) les attendaient à la sortie sur Delorimier près de Montigny (Maisonneuve). C’est à travers ces enseignes, ces logos, que j’appris à lire et à reconnaître les images.<br />
<br />
À l’époque, les «circulaires» étaient faites de papiers à l’encre dont l’odeur était assez fortes. Il n’y avait pas de photographies, ou très peu, toujours en noir et blanc, et représentant des pièces de viandes, des fruits ou des légumes. Le reste était des encadrés où le spécial de la semaine était inscrit. Parfois la circulaire était monochrome, parfois bichrome, mais tenait toujours sur une feuille pliée en deux, puis pliée en quatre. À côté des épiceries, des merceries annonçaient des spéciaux sur des pièces de tissus à la verge ou des pièces de vêtements déjà complétés. Les quincailleries, de même, annonçaient outils et matériaux de construction. Avec les années, les boîtes aux lettres se remplirent de ces circulaires rattachées à des magasins de plus amples fournitures.<br />
<br />
Les prix étaient aussi ridiculement bas, si on les compare à ceux d’aujourd’hui avec les quantités et les qualités équivalentes. On avait beaucoup de choses pour $1.00, alors qu’aujourd’hui on a pratiquement rien pour $20, qui était une somme considérable à l’époque, encore même pour le cours des années <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgW6R7rtWAtEmheQapHnqoIDsWJOvPIDl1wIcPWAlG86MzMtZbMjQeU0ihb_IQ6wEm0Izetey4VlwNsXP9Pa9H6VNazPdPKJ18bCH-O4UNfWX4693UslbYf7-zgcnZf3NsxuPfyQ1xhPDo/s1600/Ancienne_bouteille_en_verre_Coca_Cola_260_350.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgW6R7rtWAtEmheQapHnqoIDsWJOvPIDl1wIcPWAlG86MzMtZbMjQeU0ihb_IQ6wEm0Izetey4VlwNsXP9Pa9H6VNazPdPKJ18bCH-O4UNfWX4693UslbYf7-zgcnZf3NsxuPfyQ1xhPDo/s200/Ancienne_bouteille_en_verre_Coca_Cola_260_350.jpg" width="149" /></a>1970. En cinquante ans, l’inflation des prix a dépassé, et de loin, le pouvoir d’achat, et il n'y a pas à se féliciter. Tout cela contribuait à l’atmosphère dans laquelle se pratiquait le commerce d''alors. Les célèbres «bonbons à 1¢» et les coke format à 5¢ et format à 10¢ ne sont pas des mythes. La célèbre bouteille verte <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgW6R7rtWAtEmheQapHnqoIDsWJOvPIDl1wIcPWAlG86MzMtZbMjQeU0ihb_IQ6wEm0Izetey4VlwNsXP9Pa9H6VNazPdPKJ18bCH-O4UNfWX4693UslbYf7-zgcnZf3NsxuPfyQ1xhPDo/s104/Ancienne_bouteille_en_verre_Coca_Cola_260_350.jpg">Coca Cola</a> était une véritable petite bouteille de cola mélassé donc fort sucré (le revêtement des dents en restait collé) comparée à son imitation moderne. Le goût du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg0a3FvrJJ-OkRZZSCoyRe8ItnHSUKrFzE5GMloXE4uxVWmrc9pvSKCF0eCK9roxf3glDGXX6RI2dtf8jrY_AQX4w2Rat8eIq6UNh7Tq92s3w5VEODQ328KkjNuWOFIV6IErtFmIcsUvj0/s104/IMG_0863.jpg">Pepsi</a> était également sucré alors que celui d’aujourd’hui est pratiquement sans saveur. Il en allait de même pour le Seven-Up, avant que Coke fabrique sa propre citronette, Sprite. Aucune de ces marques n’avait de version diète, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg0a3FvrJJ-OkRZZSCoyRe8ItnHSUKrFzE5GMloXE4uxVWmrc9pvSKCF0eCK9roxf3glDGXX6RI2dtf8jrY_AQX4w2Rat8eIq6UNh7Tq92s3w5VEODQ328KkjNuWOFIV6IErtFmIcsUvj0/s1600/IMG_0863.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="150" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg0a3FvrJJ-OkRZZSCoyRe8ItnHSUKrFzE5GMloXE4uxVWmrc9pvSKCF0eCK9roxf3glDGXX6RI2dtf8jrY_AQX4w2Rat8eIq6UNh7Tq92s3w5VEODQ328KkjNuWOFIV6IErtFmIcsUvj0/s200/IMG_0863.jpg" width="200" /></a>sans caféine ou sans calorie… Tout à côté, il y avait les producteurs de liqueurs locaux. À Saint-Jean, outre le Kik un cola provincial plutôt «<i>cheap</i>», il y avait la boisson Richelieu (aucun rapport avec le commerce). Étaient offerts également des bières d’épinettes (Christin) et de nectar mousseux (chaud, ç’avait le goût de la pisse). Crush et Fanta se partageaient la clientèle des orangeades. Il y avait aussi le crème soda Snow White qui coupait la soif.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEis1SepWMkSEteQv3ay2K1a2G78vi0sBl_CFZOYeA5jQtKOgYo-1tCwFzlcT8QEgR3d6rm41KDxYOmqxC6ZrOJA3ZK-3Ai_1i4wCIi__v5aMq3kGx6dZlsquRFf_IDeEYjf7a5We9y_nEs/s1600/IMG_0862.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="150" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEis1SepWMkSEteQv3ay2K1a2G78vi0sBl_CFZOYeA5jQtKOgYo-1tCwFzlcT8QEgR3d6rm41KDxYOmqxC6ZrOJA3ZK-3Ai_1i4wCIi__v5aMq3kGx6dZlsquRFf_IDeEYjf7a5We9y_nEs/s200/IMG_0862.jpg" width="200" /></a>Et les bières! La célèbre Dow, dont l’existence s’acheva dans un scandale (40 morts) dans la région de Québec. Molson, Labatt et <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEis1SepWMkSEteQv3ay2K1a2G78vi0sBl_CFZOYeA5jQtKOgYo-1tCwFzlcT8QEgR3d6rm41KDxYOmqxC6ZrOJA3ZK-3Ai_1i4wCIi__v5aMq3kGx6dZlsquRFf_IDeEYjf7a5We9y_nEs/s104/IMG_0862.jpg">O’Keefe</a>, avec leurs produits maisons et les dérivés (Porter, etc.) avaient de quoi remplir les arrières-boutiques des épiceries. Toutes liées d’une manière ou d’une autre à des équipes sportives, elles étanchaient la soif des hommes <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFLiyq1IC6spprXkKavUnd12K-30xWNkvTISqHr7L_2o-M3JKkalOI2NuXN9yWspnG64mohiMDOWtGD_z_Y-5OTxfa21-SSM_FMhB-bYn8N9f7wWM68mr7ewDHXr5LZksjx46529Df2fA/s1600/IMG_0865.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="150" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFLiyq1IC6spprXkKavUnd12K-30xWNkvTISqHr7L_2o-M3JKkalOI2NuXN9yWspnG64mohiMDOWtGD_z_Y-5OTxfa21-SSM_FMhB-bYn8N9f7wWM68mr7ewDHXr5LZksjx46529Df2fA/s200/IMG_0865.jpg" width="200" /></a>(mais un peu moins celle des femmes) comme les liqueurs douces le faisaient des enfants. On l’offrait en grosses bouteilles comme en «cannettes», nouvelle invention à l’époque. Les six <i>packs</i> se développaient comme l’ensemble de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFLiyq1IC6spprXkKavUnd12K-30xWNkvTISqHr7L_2o-M3JKkalOI2NuXN9yWspnG64mohiMDOWtGD_z_Y-5OTxfa21-SSM_FMhB-bYn8N9f7wWM68mr7ewDHXr5LZksjx46529Df2fA/s104/IMG_0865.jpg">carton</a> qui permettait d’emmener les bouteilles à 5 ou à 10¢. Les bouteilles de 2 litres (les mesures métriques n’ayant pas encore été adoptées à l’époque) n’étaient pas courantes.<br />
<br />
Mais quoi qu’on y trouva, dans la section des légumes ou celle des viandes, ce que je me souviendrai <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiPewyxlpOZ6c7xqSZFDfw83pVepBoonB6o-rrfhdQBJrEs2dcqYYgV5tX4o2KMMyqWg0dVoB9UNLUhIbW3LTHgMAFuJaOUK0WvkIvtpK7cEtcXY6FF0DgoTO1FqgpdyYfYd8PnQCI2n4Y/s1600/CA434246.gif" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="167" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiPewyxlpOZ6c7xqSZFDfw83pVepBoonB6o-rrfhdQBJrEs2dcqYYgV5tX4o2KMMyqWg0dVoB9UNLUhIbW3LTHgMAFuJaOUK0WvkIvtpK7cEtcXY6FF0DgoTO1FqgpdyYfYd8PnQCI2n4Y/s200/CA434246.gif" width="200" /></a>toujours, c’était l’arôme. Ces épiceries dégageaient des odeurs prononcées que les super-marchés de centres d’achat ont réussi à aseptiser ou tout simplement à faire disparaître. Dès qu’on franchissait la porte, été comme hiver, nous sentions les produits: le café comme le chocolat, le thé comme la viande. Tout s’enrobait dans du papier brun ciré, le tout ficelé par une corde qui passait par des poulies à partir d’une bobine et aboutissait au-dessus de la balance. C’était l’époque où il y avait les «viandes» de charcuterie Fédéral, autre compagnie disparue à la suite du scandale de la viande avariée du début des années 1970. Le jambon cuit, le jambon pressé, le célèbre baloney, qu’on appelait le steak des pauvres, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgOKd_hy2Jn9Qf6Nemrh4U1alokdJ21WWQPs09HBLBuXPkzV3wNOv9LyL6jdq58rDdptIw8EkCmfpoQdxFFrTlk41LBrMerBM5q14XLiHp3Now5F1gpufYnUGvpi298E1ecG4WbRPbkrdE/s1600/chocolat-Baker-semi-sucr%25C3%25A9.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="100" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgOKd_hy2Jn9Qf6Nemrh4U1alokdJ21WWQPs09HBLBuXPkzV3wNOv9LyL6jdq58rDdptIw8EkCmfpoQdxFFrTlk41LBrMerBM5q14XLiHp3Now5F1gpufYnUGvpi298E1ecG4WbRPbkrdE/s200/chocolat-Baker-semi-sucr%25C3%25A9.jpg" width="200" /></a>le salami, qu’on achetait en saucisson, les saucisses de porc et bœuf «<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiPewyxlpOZ6c7xqSZFDfw83pVepBoonB6o-rrfhdQBJrEs2dcqYYgV5tX4o2KMMyqWg0dVoB9UNLUhIbW3LTHgMAFuJaOUK0WvkIvtpK7cEtcXY6FF0DgoTO1FqgpdyYfYd8PnQCI2n4Y/s104/CA434246.gif">La Belle Fermière</a>» avec son illustration d’une …fermière, comme la petite hollandaise des chips chocolatés de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgOKd_hy2Jn9Qf6Nemrh4U1alokdJ21WWQPs09HBLBuXPkzV3wNOv9LyL6jdq58rDdptIw8EkCmfpoQdxFFrTlk41LBrMerBM5q14XLiHp3Now5F1gpufYnUGvpi298E1ecG4WbRPbkrdE/s104/chocolat-Baker-semi-sucr%25C3%25A9.jpg">Baker</a>. Et, j’allais oublier: l’odeur des tabacs, surtout des tabacs à pipe aromatisés de Hollande que fumaient mon grand-père. L’odeur du «pot», à côté de ça, c’est de la merde. Le tabac s’achetait moulue ou en feuilles. Mon grand-père faisant lui-même ses cigarettes, avait ses boîtes de métal où ranger sa provision de la semaine.<br />
<br />
J’ignore, aujourd’hui, où sont passées toutes ces odeurs? Peut-être est-ce moi qui ait perdu ma faculté olfactive, toujours plus impressive à la jeune enfance? En tout cas, je donnerais pour la retrouver aujourd'hui. Les seules odeurs qui parviennent à m’imprégner m'apparaissent les plus mauvaises. Et je ne parle pas tant de la sueur humaine que de la puanteur des rues, l'inodore des magasins à rayons, de nos demeures même, les odeurs d'essences à moteur, partout… Pourtant, les stations d’essence ne manquaient pas dans les <i>Fifties</i>. La bonne odeur de la gazoline semble chatouiller particulièrement les muqueuses nasales des Américains qui ne peuvent s’en passer! Mais comme mes parents n’ont jamais eu d’auto, je ne suis donc pas vraiment imbibé de ce fumet onctueux…<br />
<br />
C’est à John que je m’identifie. C’est moi que je vois à travers lui, dans ces épiceries des années soixante. J’en reconnais le décor, la disposition des produits, le comptoir, la balance, la caisse enregistreuse, les barils de tomates qui sentaient et qui goûtaient la tomate, comme il en allait aussi des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgjBElaK64M0gQvoeeh6Vub1RpzBYaIJMA3HntsgTSsjHzJXdLhibQY3C8EP9hxWLXVtFjEeh2p1QK-e4PFy_KXXLJG6VmIWgqMqRaO_tSAXPV3J7EJM9WgZADaannKVVvbqNVYyIG-tL4/s1600/marcel-proust-madeleine.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgjBElaK64M0gQvoeeh6Vub1RpzBYaIJMA3HntsgTSsjHzJXdLhibQY3C8EP9hxWLXVtFjEeh2p1QK-e4PFy_KXXLJG6VmIWgqMqRaO_tSAXPV3J7EJM9WgZADaannKVVvbqNVYyIG-tL4/s200/marcel-proust-madeleine.jpg" width="166" /></a>concombres et des fèves jaunes. Il y avait l’odeur des jardins, l’odeur des boucheries, l’odeur des confiseries qui nous saisissaient et qui ne faisaient que rehausser les odeurs que nous percevions à l’extérieur. Comme la Madeleine de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgjBElaK64M0gQvoeeh6Vub1RpzBYaIJMA3HntsgTSsjHzJXdLhibQY3C8EP9hxWLXVtFjEeh2p1QK-e4PFy_KXXLJG6VmIWgqMqRaO_tSAXPV3J7EJM9WgZADaannKVVvbqNVYyIG-tL4/s104/marcel-proust-madeleine.jpg">Proust</a>, l’odeur du gazon frais tondu, de l’herbe après la pluie, des bosquets de lilas et des roseraies, chaque odeur, lorsqu’il m’arrive de la reconnaître aujourd’hui, me ramène à mes six et sept ans. Comme si une fois enregistrée, plus aucune autre odeur ne pouvait plus venir les chasser ni les remplacer. Elles ne me font peut-être pas rêver comme l’auteur de la <i>Recherche du Temps perdu</i>, mais elles me ramènent à une époque qui n’est plus. Je doute que jamais les enfants ne se souviendront, plus tard, de l’odeur des super-marchés d’aujourd’hui, à l’exception peut-être de la rôtisserie des poulets et des frites…<br />
<br />
La nostalgie n’est sans doute pas tant une question de poétique de l’espace que de poétique du temps. Il y a peu de chances de retrouver de tels parfums parce qu’ils appartiennent à un temps qui n’est plus le nôtre. Nous vivons à l’époque où l’asepsie est le liquide amniotique dans lequel nous finissons tous par baigner, tant la marche vers la régression psychologique et morale est rapide. Alors que nos sens cherchent désespérément à s’exciter, à s’émoustiller, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhmsM11y_DftFflMqZLf3AC2Od31Xj6iPtyMr-1XLbhGJJgnIdNHSyX1GDxriECal88DH1gkZb_w2PPrJLB1kOSEdIZRk64BgV-PGnxmJx80xveAnU82HU8wG8TJQOOB552QKgjzFDsd34/s1600/breughel_wedding.1253625801.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="224" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhmsM11y_DftFflMqZLf3AC2Od31Xj6iPtyMr-1XLbhGJJgnIdNHSyX1GDxriECal88DH1gkZb_w2PPrJLB1kOSEdIZRk64BgV-PGnxmJx80xveAnU82HU8wG8TJQOOB552QKgjzFDsd34/s320/breughel_wedding.1253625801.jpg" width="320" /></a>la banalité, là aussi, rend difficile la satisfaction de l’expérience. L’amer et le dégoût viennent facilement à bout de notre envie de manger, et ne finissons plus qu’à le faire par réflexe organique. Il faut avoir beaucoup d’argent pour pouvoir se permettre de renouveler nos expériences aromatiques. Les tableaux de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhmsM11y_DftFflMqZLf3AC2Od31Xj6iPtyMr-1XLbhGJJgnIdNHSyX1GDxriECal88DH1gkZb_w2PPrJLB1kOSEdIZRk64BgV-PGnxmJx80xveAnU82HU8wG8TJQOOB552QKgjzFDsd34/s104/breughel_wedding.1253625801.jpg">Breughel</a> parviennent même à nous mettre l’eau à la bouche, eux qui n’avaient pas le quart de ce dont nous disposons en fait de boissons et de nourritures. Doit-on rappeler la grande révolution culinaire qui accompagna la Renaissance, au moment de la découverte de l’Amérique, qui vit débarquer en Espagne et en Italie tous les fruits et légumes nouveaux découverts aux Indes et en Amérique? Eh bien, c’est un peu cette expérience que nous renouvelions lorsque nous pénétrions dans les épiceries des <i>Fifties</i>; c’est cette expérience également que nous essayons de répéter chaque fois que nous nous rendons dans un restaurant exotique. Nous cherchons la cuisine méditerranéenne, la cuisine indienne, la cuisine extrême-orientale, la cuisine éthiopienne (ô ironie qui veut que les Éthiopiens meurent de faim!) ou toute autre. Évidemment, dès que le succès pointe à l’horizon, des compagnies de production s’en emparent pour exploiter le produit à grande échelle, au risque d’en atténuer la qualité, la saveur …et les odeurs. Le succès de la cuisine libanaise a entraîné ainsi l’ouverture de chaînes de restauration concurrentes mais toutes avec le même profil standardisé.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhkQ4JhaPsoX6Fxc872dwpKkevI1XbE7Fb-_4vqqOHZVsd-AQ3rednKcukqZDFgRDSuX4U3eezy17D_XBYrRqLdcNjBzKJTQ9tIODOiD232r037shuv1rRLSUy0-YJcAWFRgJQECAL2H9g/s1600/10a0291acbab92c4f492514afcfdc402.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="316" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhkQ4JhaPsoX6Fxc872dwpKkevI1XbE7Fb-_4vqqOHZVsd-AQ3rednKcukqZDFgRDSuX4U3eezy17D_XBYrRqLdcNjBzKJTQ9tIODOiD232r037shuv1rRLSUy0-YJcAWFRgJQECAL2H9g/s320/10a0291acbab92c4f492514afcfdc402.jpg" width="320" /></a></div>Le paradoxe de cette évolution, c’est que nous retrouvons la concentration à petite échelle des commerces des <i>Fifties</i> dans la concentration à grande échelle des centres d’achat. Pour qui regarde d’un œil superficiel le monde des années cinquante et celui de l’an 2011, ils leur apparaîtront semblable tant la formule est comparable. Ils n’y verront que la différence des masses, dans les produits comme dans les prix. Finalement, monsieur Gagnon lui apparaîtra comme l’ancêtre des Walmart, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhkQ4JhaPsoX6Fxc872dwpKkevI1XbE7Fb-_4vqqOHZVsd-AQ3rednKcukqZDFgRDSuX4U3eezy17D_XBYrRqLdcNjBzKJTQ9tIODOiD232r037shuv1rRLSUy0-YJcAWFRgJQECAL2H9g/s104/10a0291acbab92c4f492514afcfdc402.jpg">Loblaws</a> et autres Provigo. Or, précisément, toute la différence ne tient pas à cette comparaison de masses et de coûts. Elle tient précisément, comme je l’ai déjà dit, aux liens interpersonnels entre la clientèle et les marchands, aux expériences sensorielles, à la proximité des produits et de leurs acheteurs. C’est la différence entre l’investissement érotique de l'action de manger et l’indifférence sensorielle olfactive que nous ressentons face à des produits qui semblent tous ne plus goûter que l’enrobage de plastique dans lequel ils ont été enrobés.<br />
<br />
Fais-je partie de la dernière génération à avoir eu la chance de goûter dans mon enfance les produits que je mangeais? Probablement pas, mais il apparaît difficile de comparer des goûts et des odeurs que l’on ne peut quantifier sur des baromètres pour en tirer des statistiques. Nos perceptions sont souvent déformées avec l’âge, avec la suite des expériences, avec les transformations qui ont modifié notre approvisionnement alimentaire. Nous avons dit à quel point il serait difficile de reconnaître la ferme moderne dans celle de l’oncle George. Nous avons dit aussi combien la disparition du <i>peddler</i> des fruits et légumes de Madame Martin laissait un vide dans la vie commerciale. Sans changer foncièrement de système économique, son évolution ne s’est faite que du point de vue du rendement quantitatif (à tous les niveaux) et non celui de la qualité. Ce déficit est irréversible mais aussi irrécupérable.<br />
<br />
Le sympathique petit, tout petit, marché Saint-Edmond de Saint-Jean-sur-Richelieu mérite que je m’y arrête ce soir, me rappelant des évocations que le tableau 16 fait surgir de ma mémoire. Souvenir d’enfance, souvenir d’enfant? À l’époque, ce n’était qu’une leçon d’anglais de plus. Aujourd’hui, c’est tout autre chose. Toutefois, cette image <i>kitsch</i> n’a pas besoin qu’on s’y arrête, ni du point de vue esthétique ni du point de vue morale: l’acte économique reste - malgré la terminologie du capital et de l’intérêt, du prix et de la dépense, de la vente et de l’achat - un «troc» tout ce qu’il y a de plus classique. Les économistes ne remarquent jamais à quel point le capitalisme est plus près du troc primitif que le service et les ponctions féodales sur la production des serfs. Voilà pourquoi notre mentalité économique est si loin de celles des peuples qui sont restés avec le sentiment qu’«un service en attire un autre» plutôt que celui du «<i>no money no candy</i>», ou «<i>they are no free lunch in America</i>». Combien de monsieur Gagnon donnaient des bonbons aux enfants, gratuits, alors que le caissier du super-marché à de la misère à encaisser le déficit d’un cent dans son tiroir.<br />
<br />
<div style="text-align: right;">Montréal<br />
6 juillet 2011</div></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-14267890525087315572011-07-05T22:40:00.000-07:002011-07-14T06:37:14.061-07:00Uncle George's farm<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEib1RyUa5_Ibb9qhw7Fd89pXPAcip7grX_2pD1PHYwf0FshHyE2wTw5uZWCPXsyDIAYoulTx_YbgO4IbNdT0B3ePY1EP3T2VRYFsYZQIE3O4zuYUsFqLJ5clUqOlzA9RIisZMQKx83xZu8/s1600/15-+at+the+farm.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="288" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEib1RyUa5_Ibb9qhw7Fd89pXPAcip7grX_2pD1PHYwf0FshHyE2wTw5uZWCPXsyDIAYoulTx_YbgO4IbNdT0B3ePY1EP3T2VRYFsYZQIE3O4zuYUsFqLJ5clUqOlzA9RIisZMQKx83xZu8/s400/15-+at+the+farm.jpg" width="400" /> </a></div><div style="text-align: justify;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><b>UNCLE GEORGE’S FARM</b></div><br />
Comme autre sortie, la famille Martin se retrouve encore une fois à la campagne, mais à la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEib1RyUa5_Ibb9qhw7Fd89pXPAcip7grX_2pD1PHYwf0FshHyE2wTw5uZWCPXsyDIAYoulTx_YbgO4IbNdT0B3ePY1EP3T2VRYFsYZQIE3O4zuYUsFqLJ5clUqOlzA9RIisZMQKx83xZu8/s104/15-+at+the+farm.jpg">ferme de l’oncle George</a>. Les enfants sont à l’avant-plan de la scène, Mary nourrit de grains les volailles tandis que John s’amuse avec la chatte et ses chatons. La mère Martin sort du jardin - on connaît déjà ses aptitudes avec les semences -, un panier de légumes à la main. On peut voir aussi des lapins avec une petite cabane qui reproduit l’aspect de la grande ferme. Une charrette de foin tirée par les chevaux s’apprête à y entrer. Cette scène bucolique offre un inventaire des animaux que l’on pouvait rencontrer sur une ferme dans les <i>Fifties</i>, même si la mécanisation de la production ne semble pas encore avoir touché le fermier (on n’y voit aucun tracteur ni aucune espèce de véhicules de ferme). Seule une voiture file au loin, sur la route.<br />
<br />
Si nous ne retrouvons pas ici le défilé habituel des animaux de ferme comme dans les deux tableaux précédents, il faut relever le découpage poétique de la scène. Tout fonctionne par cadres: celui de la basse-cour, de l’enclos aux lapins, du jardin, du pré aux vaches, de la ferme, de la porcherie auquel on peut ajouter le chien, la chèvre et l’agneau, enfin le champ derrière la grange. À l’intérieur de chaque cadre, nous retrouvons une série d’animaux dont il faut retenir les noms dans la langue seconde: dans <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguq2CXQq0vMYexWRl62TyLxK8Q7fkHNfhDI8pqor4iIAadES_bUPwvGCsWPZ7WDKnpGfalPcIKsYFmBghHjlxr8qA69zprN5XkX2bxnk6sxo0nIjQMgquGopk7V4q95WGHb398YTfro4A/s1600/mike-poulet-decapite-sans-tete-02.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="253" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguq2CXQq0vMYexWRl62TyLxK8Q7fkHNfhDI8pqor4iIAadES_bUPwvGCsWPZ7WDKnpGfalPcIKsYFmBghHjlxr8qA69zprN5XkX2bxnk6sxo0nIjQMgquGopk7V4q95WGHb398YTfro4A/s320/mike-poulet-decapite-sans-tete-02.jpg" width="320" /></a>l’enclos de la basse-cour, il y a coq et dindon, poule, poussin et canards. Une oie traverse, suivie de sa cohorte de petits, semblant rentrer sagement vers l’enclos. De même, la chatte de la ferme est étendue, se prélassant, avec ses deux chatons qui se tiennent sur elle. Le décor idyllique n’a rien de la vie quotidienne à la ferme. Elle est faite <b>par</b> des urbains <b>pour</b> des urbains, de manière à idéaliser un monde qui est l’antithèse de celui décrit par Zola dans <i>La Terre</i>! On imagine mal l’oncle George tranché d’un coup de hache la tête de l’oie ou de la poule. et le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguq2CXQq0vMYexWRl62TyLxK8Q7fkHNfhDI8pqor4iIAadES_bUPwvGCsWPZ7WDKnpGfalPcIKsYFmBghHjlxr8qA69zprN5XkX2bxnk6sxo0nIjQMgquGopk7V4q95WGHb398YTfro4A/s104/mike-poulet-decapite-sans-tete-02.jpg">corps se mettre à courir</a> quelques pas avant de s’effondrer sous les yeux horrifiés de la petite Mary! De même, la chatte a peut-être son bol de lait, mais on ne la verra pas avec un mulot mort dans la gueule. De même, verrait-on un renard sauter dans l’enclos des lapins, tant la clôture de broches semble plutôt basse! Et les vaches? Et les porcs? Il n’y a aucun prédateur dans ce tableau idyllique, pas même l’homme qui finira par mettre tous ces gentils animaux dans son assiette!<br />
<br />
Lorsque j’étais enfant et que je résidais à Iberville, petite ville encore fortement rattachée aux activités agricoles, certains des élèves étaient des fils de fermiers et, avant de se rendre en classe, avaient dû se lever fort tôt le matin pour la traite des vaches où remplir les auges à manger pour les porcs ou les chevaux. On appelait ça «faire le train». Au retour, le soir, ils étaient sans doute obligés à quelques autres travaux de la ferme et rien dans tout cela ne me semblait idyllique. John & Mary semblent s’amuser plutôt que de participer réellement à la vie de la ferme. Celle-ci se déroule ailleurs, à l’arrière, sous la large toiture rouge, autour des silos ou dans le champs d’arrière-plan. Cette image de carte postale est faite pour donner une idée nouvelle de la ferme à des enfants qui n’y vont qu’une fois ou deux par année, en visite, en vacance. Ils ne s’intègrent pas dans la vie rurale, alors qu’au moins leur mère tient un panier remplis de légumes du jardin et que leur père, suppose-t-on, aide l’oncle George «à faire le train».<br />
<br />
Cet aspect «carte postale» de la ferme de l’oncle George montre à quel point, dans les <i>Fifties</i>, la rupture entre le monde rural et le monde urbain était consommée. Les deux univers, si longtemps dépendant l’un de l’autre - l’univers urbain à l’univers <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvh_ieVCaMBuPUzhWEaSBzF5mgUQObBv1BIvHVQbz0U8OF6mPhDV8nbk0Rv8OWydJp86T-9kXPiGoEBZf7TuzkYFjS2c99RCVxqPRb9O-KAscW9n1Aj5UEUBRpFfEPym1Yn6PM2ST1FMk/s1600/Ferme-de-Paques-2.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvh_ieVCaMBuPUzhWEaSBzF5mgUQObBv1BIvHVQbz0U8OF6mPhDV8nbk0Rv8OWydJp86T-9kXPiGoEBZf7TuzkYFjS2c99RCVxqPRb9O-KAscW9n1Aj5UEUBRpFfEPym1Yn6PM2ST1FMk/s320/Ferme-de-Paques-2.jpg" width="320" /></a>rural surtout -, s’éloignent assez rapidement. À la vitesse où s’urbanise la famille Martin, celle de l’oncle George, qu’on ne voit pas dans le tableau, semble s’accrocher à des traditions techniques ancestrales. Si l’éclairage urbain est acquis - le célèbre «électeurs, électrices, électricité» que Duplessis adressait dans une campagne électoral en région -, la traction motrice avait déjà remplacé la traction animale dans la production agricole (le travail aux champs, par exemple), d’après-guerre. Ici, tout se passerait comme au début du siècle, mais dans une atmosphère sereine et joyeuse, où les animaux de la ferme ne sont rien de plus que ces animaux d’exposition de nos modernes centres d’achat, lorsqu’approche le temps de Pâques, avec ses lapins, ses chèvres, ses boucs et ses paons. Visitez la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvh_ieVCaMBuPUzhWEaSBzF5mgUQObBv1BIvHVQbz0U8OF6mPhDV8nbk0Rv8OWydJp86T-9kXPiGoEBZf7TuzkYFjS2c99RCVxqPRb9O-KAscW9n1Aj5UEUBRpFfEPym1Yn6PM2ST1FMk/s104/Ferme-de-Paques-2.jpg">Place Versailles</a>, avant Pâques, et vous comprendrez mieux l’esprit de la scène du tableau 15 de <b>conversation anglaise</b>.<br />
<br />
Cette réification de la vie rurale correspond à la même réification de la vie urbaine que les autres tableaux nous présentaient: le coin de rue devant l’église et l’école, la salle de classe, les jeux d’hiver, enfin le cottage Martin. La vie y est idéalisée au détriment de l’effort et du travail. La vie à la ferme consiste à nourrir les volailles de morceaux de pain ou les lapins de carottes, à ramasser les légumes <br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi6NClSF1IBmkqSx_9vz8lyAcDpft1TcHIYNWt2C_Z_CStYga_tTojXPks_kctkF6gewyPoCnVZbHxHNWnS6Atg6edJ8glXUkkDrVfS-29J1wwELPKvMccCLHIexycbvMGYS5WH_IwIn-0/s1600/pecheresse-1931-01-g.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="244" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi6NClSF1IBmkqSx_9vz8lyAcDpft1TcHIYNWt2C_Z_CStYga_tTojXPks_kctkF6gewyPoCnVZbHxHNWnS6Atg6edJ8glXUkkDrVfS-29J1wwELPKvMccCLHIexycbvMGYS5WH_IwIn-0/s320/pecheresse-1931-01-g.jpg" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">La Pécheresse (1931) d'Harry Beaumont</td></tr>
</tbody> </table>sans avoir à les tirer, comme s’ils sautaient de la terre dans le panier… Seuls les chevaux en arrière-plan ou ceux qui tirent la charrette de foin font des efforts. Toute la violence liée à la vie sur la ferme est occultée. Celle-ci semble même de plus en plus s’opposer comme l’alternative à la vie urbaine dans la mesure où on y retrouve toujours l’esprit communautaire de jadis. Ce n’est plus le bien opposé au mal, comme le veut la représentation mentale que les Québécois se faisaient souvent, en opposant la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi6NClSF1IBmkqSx_9vz8lyAcDpft1TcHIYNWt2C_Z_CStYga_tTojXPks_kctkF6gewyPoCnVZbHxHNWnS6Atg6edJ8glXUkkDrVfS-29J1wwELPKvMccCLHIexycbvMGYS5WH_IwIn-0/s104/pecheresse-1931-01-g.jpg">ville pécheresse</a> à la campagne chrétienne et pure. L’opposition est ici d’une autre nature. Elle oppose une innocence naturelle, liée à la vie végétale et animale, à l’innocence artificielle imposée par les pressions sociales de la vie urbaine. Comme nous l’avons vu dans les tableaux précédents, tout cela n’est que pure <i>vision de l’esprit</i>.</div><div style="text-align: justify;"><br />
Alors que le premier cycle présentait des tableaux liés à la vie d’enfant de John & Mary, le second cycle nous présente des tableaux liant de plus en plus les enfants aux rapports économiques imposés par la vie moderne. La fabrication de la nourriture d’abord, le point de départ, nous entraînera vers les origines de cette nourriture. Le passage du <i>peddler</i> avec sa charrette de fruits et légumes en ville nous permet de nous initier à l’acte économique. Madame Martin doit payer les produits qu’elle achète au jeune vendeur. Si la nourriture vient à nous, elle n’est pas gratuite pour autant. Une étape de plus et nous nous trouvons sur les lieux de production même: le jardin et la ferme de l’oncle George. C’est ici que poussent fruits et légumes, que sont abattus les animaux de boucherie après avoir été conçus, couvés, dorlotés et abrités jusqu’à maturité dans les enclos de la ferme. Du client, nous remontons ainsi au producteur, même si madame Martin n’aura à payer son panier de légumes que du seul travail de les récolter. La vie économique d’une société moderne est une organisation compliquée qui se dévoile peu à peu aux deux enfants.<br />
<br />
Et l’initiation se poursuivra dans le tableau suivant, mais <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVLovVVN2WPUwuAAyNpOFyS-tthDdZx3OzJHyM9RfjN3J7yUWcYZ7LrN97qjn2r9AjYB4OW8uCJirbXBsFNJkDIsSi9tt0QS69FgU7slUc5K5k1lNFe2DjEBYOUzikUh98yKHyPdhCpOY/s1600/15-+at+the+farm+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="202" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVLovVVN2WPUwuAAyNpOFyS-tthDdZx3OzJHyM9RfjN3J7yUWcYZ7LrN97qjn2r9AjYB4OW8uCJirbXBsFNJkDIsSi9tt0QS69FgU7slUc5K5k1lNFe2DjEBYOUzikUh98yKHyPdhCpOY/s320/15-+at+the+farm+-+copie.jpg" width="320" /></a>avant de pénétrer dans la «<i>grocery</i>» avec John et sa mère, il vaut mieux mettre en évidence le lieu de production, même si c’est sous une forme bucolique ou idyllique. La division entre la ville et la campagne est une division d’abord sociologique: les milieux ambiants sont différents, avec ses couleurs, ses odeurs, sa chaleur, la cohabitation de plusieurs espèces vivantes qui dépassent le simple duo Rover/Pussy. Le rapport entre humains et animaux n’est plus du tout le même, et la projection sur des animaux à moitié domestiqués des rapports habituels avec Rover et Pussy nous font voir que John & Mary ne distinguent pas encore nettement la vie sauvage de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVLovVVN2WPUwuAAyNpOFyS-tthDdZx3OzJHyM9RfjN3J7yUWcYZ7LrN97qjn2r9AjYB4OW8uCJirbXBsFNJkDIsSi9tt0QS69FgU7slUc5K5k1lNFe2DjEBYOUzikUh98yKHyPdhCpOY/s104/15-+at+the+farm+-+copie.jpg">vie domestiquée</a>, considérant cette dernière comme étant la mesure de toutes vies sur cette terre, douce et gentille.<br />
<br />
L’isolement de la ferme, si grande soit-elle, établit une distance physique entre la ferme de l’oncle George et son plus proche voisin. Ce n’est pas comme le cottage Martin, un chalet qui n’est qu’à quelques pas du chalet voisin et qui conserve toutes les formes de la maison urbaine. Il en est de même <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj6b6RwFBLPRhv0A_82Pxd9x4bBr1LSrmAtbhpRZYxpSPUwlcf6nZKUZEELD_6R6eV8GOKIhMxdAEEnGPpI8gPouavFZ-wST0TPIGu0A21jBw7_5p84nHlgOlwmOqTCSaHgxEeK141BmKc/s1600/a181769.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="188" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj6b6RwFBLPRhv0A_82Pxd9x4bBr1LSrmAtbhpRZYxpSPUwlcf6nZKUZEELD_6R6eV8GOKIhMxdAEEnGPpI8gPouavFZ-wST0TPIGu0A21jBw7_5p84nHlgOlwmOqTCSaHgxEeK141BmKc/s320/a181769.jpg" width="320" /></a>du temps. Ici, ce sont les saisons et les étapes du «train» quotidien qui ponctuent le rythme de la vie, alors qu’en ville, les cédules sont autrement rythmées. Enfin, les activités sont directement liées à la production - et la reproduction - de la vie. L’activité de la ferme est située, si on peut employer cette image, à mi-chemin de la chaîne de l'approvisionnement alimentaire. Elle a quitté depuis longtemps son origine, dans la chasse et la pêche, la cueillette et la pré-domestication des premiers animaux. La prédation est donc d’un autre âge, bien loin de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj6b6RwFBLPRhv0A_82Pxd9x4bBr1LSrmAtbhpRZYxpSPUwlcf6nZKUZEELD_6R6eV8GOKIhMxdAEEnGPpI8gPouavFZ-wST0TPIGu0A21jBw7_5p84nHlgOlwmOqTCSaHgxEeK141BmKc/s104/a181769.jpg">civilisation rurale</a> qui a donné la ferme de l’oncle George. De la même façon, la ferme n’est plus, contrairement au passé, l’aboutissement de la chaîne de l'approvisionnement alimentaire. On l’a vu, cet aboutissement se situe dans les marchés publiques, les grands centres d’achat, concentration de tous les biens nécessaires à la vie urbaine.<br />
<br />
Après plus d’un demi-siècle, nous savons tous que la vie urbaine va pénétrer de plus en plus la ferme de l’oncle George. Ses héritiers se spécialiseront: la ferme se transformera peut-être en laiterie et se consacrera aux sous-produits du lait. Ou peut-être se <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhQw5tt4BWhr0XwVdANj6i4GXrlR8WyUbMW9h-VCKcMs8gJ3PvMOtEI05ZHMbrMmXwU37UusAbexw8O0k05p9wq6zsM9YQDbxEdTTGzELueJ1kZ7cJS8DONENbveJ5Lv3vKqBUKZcv62P4/s1600/pigsinfacturyfarm_thumb.png" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="244" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhQw5tt4BWhr0XwVdANj6i4GXrlR8WyUbMW9h-VCKcMs8gJ3PvMOtEI05ZHMbrMmXwU37UusAbexw8O0k05p9wq6zsM9YQDbxEdTTGzELueJ1kZ7cJS8DONENbveJ5Lv3vKqBUKZcv62P4/s320/pigsinfacturyfarm_thumb.png" width="320" /></a>concentrera-t-elle sur la volaille et la basse-cour devenant un couvoir où on <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjj2_yTyIEj6b0vbSmmHHdJr8TIV_fVR7pMhyphenhyphen6_CoTcpD9Yv4J4LTf5ttq6voJ2gZoOJnOqBp0PAPKuSTGwxNK7WmjI6A1RNWINdHSyghjpwmewNyg8m8Nusnu75jLugGDOv2Qdf5LuGqw/s104/ebec1.jpg">limera les becs</a> des poussins et les ergots des poulets. Il est possible aussi que la ferme se transforme en <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhQw5tt4BWhr0XwVdANj6i4GXrlR8WyUbMW9h-VCKcMs8gJ3PvMOtEI05ZHMbrMmXwU37UusAbexw8O0k05p9wq6zsM9YQDbxEdTTGzELueJ1kZ7cJS8DONENbveJ5Lv3vKqBUKZcv62P4/s104/pigsinfacturyfarm_thumb.png">porcherie</a> industrielle, où l’on invitera les ministres et les grands exportateurs à des dégustation de purin de porc… Et si la ferme s’en tient aux activités agricoles, il faudra bien que les tracteurs fassent leur apparition dans le décor et qu’avec l’automatisme et l’informatique, qu’un véritable programme planifié par le marché ordonne la production. Il n’y aura pas jusqu’à la terre et les bâtiments, les équipements et le personnel qui deviendront l’enjeu de spéculations à la bourse. Devenus adultes, les enfants Martin ne reconnaîtront plus la vieille ferme de l’oncle George de leur enfance.</div><div style="text-align: justify;"><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjj2_yTyIEj6b0vbSmmHHdJr8TIV_fVR7pMhyphenhyphen6_CoTcpD9Yv4J4LTf5ttq6voJ2gZoOJnOqBp0PAPKuSTGwxNK7WmjI6A1RNWINdHSyghjpwmewNyg8m8Nusnu75jLugGDOv2Qdf5LuGqw/s1600/ebec1.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="228" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjj2_yTyIEj6b0vbSmmHHdJr8TIV_fVR7pMhyphenhyphen6_CoTcpD9Yv4J4LTf5ttq6voJ2gZoOJnOqBp0PAPKuSTGwxNK7WmjI6A1RNWINdHSyghjpwmewNyg8m8Nusnu75jLugGDOv2Qdf5LuGqw/s400/ebec1.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: justify;"><br />
</div>Cette mutation est aussi le produit de la modernisation et de la mondialisation. En ce sens, l’effet de choc en retour du développement des grands centres urbains forcera le milieu rural à s’adapter à ses exigences et à ses contraintes. Les villes de quelques milliers d’habitants, ou même les banlieues à la <i>Peyton Place</i> ne sont rien à côté des grandes villes. Peut-on s’imaginer qu’une ville moyenne, comme Montréal, qui avec son environnement immédiat totalisant environ 3 millions d’individus, pourrait se passer, une seule journée de l’approvisionnement en poulets? De là l’épuisement rapide de la viande de bœuf, puis de la viande de porc, puis des légumes et des fruits. Toute la chaîne d'approvisionnement alimentaire s’effondrerait dans l’incapacité de fournir les marchés, d’où l’éclatement d’une inflation des prix qui rendrait dérisoire nos actuelles indexations annuelles. C’est ce qui s’appellerait une <i>crise</i> <i>frumentaire</i>.<br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgRw_gofP_71gMzyK3OUAnFcvPA6NVUmyNnz1vYSGV7_kkTspgdYHA-yBX0w-xjHtU_GwgHO9kTpXiTOArNWdVHBVAJcO7H3IYzThZ5om6BpMBGljteeGazswqeHRHMoxeJWaXu9u1gEr8/s1600/pc+famine+ILN.+1847+-+DLRCS%252C+Universite+McGill.jpg" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgRw_gofP_71gMzyK3OUAnFcvPA6NVUmyNnz1vYSGV7_kkTspgdYHA-yBX0w-xjHtU_GwgHO9kTpXiTOArNWdVHBVAJcO7H3IYzThZ5om6BpMBGljteeGazswqeHRHMoxeJWaXu9u1gEr8/s320/pc+famine+ILN.+1847+-+DLRCS%252C+Universite+McGill.jpg" width="238" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Famine en Irlande au XIXe siècle</td></tr>
</tbody></table>Cette seule penser devrait nous faire réaliser la fragilité de la chaîne d'approvisionnement alimentaire en ce qui concerne les grands centres métropolitains. L’humanité a toujours souffert, jusqu’à une époque très récente dans l’Histoire, de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgRw_gofP_71gMzyK3OUAnFcvPA6NVUmyNnz1vYSGV7_kkTspgdYHA-yBX0w-xjHtU_GwgHO9kTpXiTOArNWdVHBVAJcO7H3IYzThZ5om6BpMBGljteeGazswqeHRHMoxeJWaXu9u1gEr8/s104/pc+famine+ILN.+1847+-+DLRCS%252C+Universite+McGill.jpg">famines</a> et de sous-alimentation. Lorsque nous voyons l’Afrique actuelle, maintenue dans cet état par les lois du marché occidental, nous éloignons de nous la simple idée que nous pourrions un jour, nous aussi, être frappés d’une telle situation de voir mourir des enfants à peine nés de mal nutrition. Pourtant c’est cette fragilité de la chaîne qui stimule la production d’hormones manipulées, de production de masse de couvoirs et de porcheries, que la modification génétique est appliquée aux produits aussi bien de la terre que de la vie animale. Les risques d’empoisonnement des individus comptent beaucoup moins que la crise frumentaire qui surgirait d’un manque temporaire (ou permanent) d’approvisionnement des grands centres occidentaux. Cette réalité est le dénie de notre économie contemporaine qui voit ses produits de luxe diminuer de prix alors que les produits de base sont en hausse constante.<br />
<br />
Nous touchons-là peut-être au plus grand scandale de notre temps. Et la complicité entre les grands producteurs et les contestataires écologistes est, sinon <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgBdrXSKyr7Ypyetj3nc1RpJph-tBOEuIFshyY_QYPn1DrWl4n0KYoBoUgSeGvED6M6IvOvLoPljmsv9d26cfwmx3mqoyhIpAHTWEh4_pFavIS5PxuxJd64fLsyinn-PtolwIHkpBTA8F4/s1600/butteloin.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="189" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgBdrXSKyr7Ypyetj3nc1RpJph-tBOEuIFshyY_QYPn1DrWl4n0KYoBoUgSeGvED6M6IvOvLoPljmsv9d26cfwmx3mqoyhIpAHTWEh4_pFavIS5PxuxJd64fLsyinn-PtolwIHkpBTA8F4/s320/butteloin.jpg" width="320" /></a>tacite entre larrons en foire, du moins le produit d’une inconscience liée à une conception apocalyptique associée à la pollution ou à la dilapidation des ressources naturelles. C’est oublier que l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgBdrXSKyr7Ypyetj3nc1RpJph-tBOEuIFshyY_QYPn1DrWl4n0KYoBoUgSeGvED6M6IvOvLoPljmsv9d26cfwmx3mqoyhIpAHTWEh4_pFavIS5PxuxJd64fLsyinn-PtolwIHkpBTA8F4/s104/butteloin.jpg">économie libérale</a>, bien après l’invention du capitalisme, a été la solution qu’ont trouvée les philosophes du XVIIIe siècle pour résoudre le problème de l’approvisionnement des villes à moindre coût des produits frumentaires. Les grandes famines du temps de Louis XIV se sont éclipsées progressivement à partir de la Révolution industrielle qui opéra, dans le domaine agricole comme dans l’industrie secondaire, à la spécialisation, à l’extension des terres de production de masse (les célèbres <i>enclosures</i>) et à la libre circulation des produits à l’intérieur des frontières nationales. Le XIXe siècle voudra étendre ce principe au-delà des frontières nationales, en luttant contre la tendance aristocratique du protectionnisme pour accéder à un libre-échange qui est universalisé aujourd’hui par les corporations comme l’O.M.C. et l’A.L.É.N.A.<br />
<br />
Quoi qu’il en soit, la nécessité urbaine et ses effets directs ne pouvait plus se contenter de fermes semblables à celle de l’oncle George et cela même dans les <i>Fifties</i>; il y a donc une grande part d’anachronisme dans le tableau 15. Ce type de fermes avait déjà tendance à disparaître et les liens entre la ville et la campagne à passer de plus en plus entre les mains des distributeurs propres à approvisionner tous les super-marchés des villes. Il n’y a pas jusqu’à la charrette du <i>peddler</i> de la scène précédente (on l’a vu avec ses fruits exotiques), à faire affaire avec ces grands distributeurs. L’avenir n’appartenait plus aux oncles Georges, mais aux <i>General Foods</i> et aux <i>Monsantos</i> de ce monde.<br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgfYyibxbz34jopHI6y0dAafRSDag8nIfjAjQSW2zpdh984TyKjpS5AP-dyrh5_SJHkOHfUkqxyUNQaDW_jk9oKoReSsBANExKdvCqUX4Nhb3DZclDiVb8gI9lTgqma67WNT5k1b5lKptc/s1600/h-20-2483362-1304365452.jpg" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgfYyibxbz34jopHI6y0dAafRSDag8nIfjAjQSW2zpdh984TyKjpS5AP-dyrh5_SJHkOHfUkqxyUNQaDW_jk9oKoReSsBANExKdvCqUX4Nhb3DZclDiVb8gI9lTgqma67WNT5k1b5lKptc/s320/h-20-2483362-1304365452.jpg" width="283" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Éruption du type de celle de l'Eyjafjallajoküll, 2010</td></tr>
</tbody> </table>Bien sûr, nous pouvons toujours avoir sa propre petite ferme à soi. Nourrir son poulet aux grains. Avoir quelques vaches pour sa propre consommation. Cultiver son jardin communautaire en plein centre-ville ou sur les terrasses juchées sur la toiture des hangars. On peut trouver son fournisseur de produits «bio» et s’imaginer que jamais notre taux de cholestérol mettra notre cœur en danger. Cela s’appelle l’adaptation urbaine. Malheureusement, il n’est pas donné à tous d’avoir le temps de cultiver un potager ou les moyens financiers d’entretenir une vache ou deux. <i>Small is beautifull,</i> je n’ai rien contre. Parfois, c’est le seul moyen de s’en sortir. Le danger de la faiblesse de la chaîne d’approvisionnement alimentaire est une menace qui demeure, quoi qu’on en dise. Il suffit d’un cataclysme naturel - on sait qu'en 1783, l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgfYyibxbz34jopHI6y0dAafRSDag8nIfjAjQSW2zpdh984TyKjpS5AP-dyrh5_SJHkOHfUkqxyUNQaDW_jk9oKoReSsBANExKdvCqUX4Nhb3DZclDiVb8gI9lTgqma67WNT5k1b5lKptc/s104/h-20-2483362-1304365452.jpg">éruption d’un volcan</a> en Islande, le Laki, causa des famines terribles, les retombées sulfuriques empoisonnant l’eau et les sols ainsi que les troupeaux de moutons de l’île, nourriture essentielle des Islandais. Sans oublier la baisse drastique de la température moyenne qui s’abattit sur l’Europe entière; des froids rigoureux encore rarement vus depuis la fin du <i>petit âge glaciaire</i> (±1200-1500).<br />
<br />
En attendant le pire, le meilleur demeure dans le fait que nos villes sont constamment approvisionnées de toutes sortes de produits, génétiquement modifiés ou pas. Enveloppés ou non d’agents de conservation. Cultivés ou domestiqués avec humanité ou sur le mode de la chaîne de montage. Qui s’interroge réellement. Pour tous les carnivores qui sentent une certaine culpabilité après avoir vu un reportage sur les couvoirs industriels et la façon dont on<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEizdZU2khfvxYkSe99zbrn2B_bTU8gxt8dkTInAHVGJmBrrMlEhZR3cH3aFa3wG7AOHvSevkh2agclZgB6p4l9EZYAFzSayrmL1jPHiZZQOWc1CqBWPe86mCQbmkhDx2CVS9ZrCNVzpW1k/s1600/478014-brocoli-dans-le-pot-pr-t--bouillir.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEizdZU2khfvxYkSe99zbrn2B_bTU8gxt8dkTInAHVGJmBrrMlEhZR3cH3aFa3wG7AOHvSevkh2agclZgB6p4l9EZYAFzSayrmL1jPHiZZQOWc1CqBWPe86mCQbmkhDx2CVS9ZrCNVzpW1k/s320/478014-brocoli-dans-le-pot-pr-t--bouillir.jpg" width="320" /></a> tue les bovidés, combien de végétariens se posent des questions sur ce que peut ressentir une carotte passée dans le broyeur à jus? Où comment le brocoli subit son <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEizdZU2khfvxYkSe99zbrn2B_bTU8gxt8dkTInAHVGJmBrrMlEhZR3cH3aFa3wG7AOHvSevkh2agclZgB6p4l9EZYAFzSayrmL1jPHiZZQOWc1CqBWPe86mCQbmkhDx2CVS9ZrCNVzpW1k/s104/478014-brocoli-dans-le-pot-pr-t--bouillir.jpg"><i>ébouillantement</i></a> progressif? Mais non, voyons, les fruits et légumes ne sentent rien. Ils ne sont pas dotés de centres nerveux ni de sensibilités: on peut donc les «tuer» comme on veut pour nous en nourrir et bénéficier d’une meilleure santé sans mauvaise conscience. Qu'en savons-nous si les fruits et les légumes ne sentent pas leur destruction par l’alimentation des humains? A-t-on oublié comment l'abbé Mersenne, jésuite, frappait à grands coups de pieds le ventre enceinte de son chienne en prétendant qu'elle nous souffrait pas et que les cris qu'elle laissait échapper n'était que l'effet mécanique des <i>esprits animaux </i>cogités par son ami Descartes? Ignore-t-on que tout racisme commençait par ce type de négation, et alors que les dames patronnesses anglaises fondaient la Société pour la Protection des Animaux, des théoriciens, leurs proches souvent, élaboraient des thèses raciales qui hiérarchisaient les différentes ethnies humaines? Le grand Wagner traitait les Juifs comme inférieurs aux chiens, à son chien surtout. Alors, ne dit-on pas, face à la vie, qu’un meurtre reste un meurtre?<br />
<br />
<div style="text-align: right;">Montréal<br />
5 juillet 2011</div></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-12822279817689030322011-07-04T21:14:00.000-07:002011-07-05T14:22:59.476-07:00Fruit and vegetables<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiozG5_GiwEN3kr9QuAk9-HxK5sriS4KSQ8HC_q6kFdgoAA_656TzHppdJuJ7ERsMx-IYAHe8mZNNsfoigfl_yw-RSxfx9DuYcMGScurzQFVLLHKUxSaYG11r0Sb5AK6IM7NGrIqTYQ5ik/s1600/14-+Fruits+and+vegetables.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="293" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiozG5_GiwEN3kr9QuAk9-HxK5sriS4KSQ8HC_q6kFdgoAA_656TzHppdJuJ7ERsMx-IYAHe8mZNNsfoigfl_yw-RSxfx9DuYcMGScurzQFVLLHKUxSaYG11r0Sb5AK6IM7NGrIqTYQ5ik/s400/14-+Fruits+and+vegetables.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: center;"></div><div style="text-align: center;"><br />
<b>FRUIT AND VEGETABLES</b></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg7hKoky-yyWdkkztHiLzInROix-MSjovv_UGW_kfPStfdk1hNM373K8AxXFkowTjLXa71iLQPFMR8DjbrWQAZ9TlP3PmYrNmxj2NCV9SoOLefjKagSPXtPrWysutL1E7gx09HEWfx2uEc/s1600/50552_91721960808_7308000_n.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"></a></div><div style="text-align: justify;"><br />
Madame Martin profite du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiozG5_GiwEN3kr9QuAk9-HxK5sriS4KSQ8HC_q6kFdgoAA_656TzHppdJuJ7ERsMx-IYAHe8mZNNsfoigfl_yw-RSxfx9DuYcMGScurzQFVLLHKUxSaYG11r0Sb5AK6IM7NGrIqTYQ5ik/s104/14-+Fruits+and+vegetables.jpg">vendeur itinérant de fruits et légumes</a> pour faire connaître à ses enfants les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxfiACDvNqzrh7WHZwfXsonrOcQW6QPEXBaX_PfSWVkNsnrlgw9n0Fju7gZiiwfA3QS6dyDq7w1XbVz2HW-peCc77DqKNDoU-lQFeLl-QsSB4u5hn2n53CcU_5TmfAaejYBJbmsy6XCAs/s1600/lait1950.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxfiACDvNqzrh7WHZwfXsonrOcQW6QPEXBaX_PfSWVkNsnrlgw9n0Fju7gZiiwfA3QS6dyDq7w1XbVz2HW-peCc77DqKNDoU-lQFeLl-QsSB4u5hn2n53CcU_5TmfAaejYBJbmsy6XCAs/s320/lait1950.jpg" width="306" /></a>produits des jardins maraîchers du Québec. Comme nous l’avons vu au tableau précédent, la cuisine des Martin, dans les <i>Fifties</i>, était encore en parfaite symbiose avec les produits du terroir. À la forme de la pinte de lait, on devine qu’il a été livré le matin même par le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxfiACDvNqzrh7WHZwfXsonrOcQW6QPEXBaX_PfSWVkNsnrlgw9n0Fju7gZiiwfA3QS6dyDq7w1XbVz2HW-peCc77DqKNDoU-lQFeLl-QsSB4u5hn2n53CcU_5TmfAaejYBJbmsy6XCAs/s104/lait1950.jpg">laitier</a> ambulant. Il en était ainsi encore au début des années soixante, lorsque j’étais enfant. Nous l’entendions venir, revêtu de son uniforme, avec sa casquette, prenant les pintes vides que nous avions laissées sur le balcon et qu’il remplaçait par des pleines. Comme on le voit, le recyclage n’est pas une invention des écologistes qui se tortillent chaque fois qu’ils entendent le mot «développement durable»…<br />
<br />
Il en était de même des pains livrés à domicile. Le boulanger aussi avait son uniforme. Nous pouvions rajouter sur notre liste des commandes spéciales, gâteaux ou pâtisseries. À l’époque, le pain blanc n’était pas encore au lait. Il en allait de même des couteaux que nous faisons aiguiser par un coutelier ambulant. Il m’arrive parfois encore d’entendre sa clochette à l’approche de sa camionnette, dans les ruelles de Montréal. Voici donc madame Martin qui achète ses fruits et légumes directement du maraîcher ambulant. Tout ces «ambulants» étaient encore, dans les années cinquante, le cordon qui unissait la ville nouvelle avec les origines rurales de ses habitants. Le super-marché, et encore moins les grandes surfaces n’avaient pas monopolisé la distribution des produits alimentaires.<br />
<br />
Tel est l’un des grands changements dont nous n’avons pas encore évalué la portée, le changement de la représentation entre les <i>Fifties</i> et notre monde. Aujourd’hui, alors que nous devons nous déplacer pour aller vers la nourriture, dans les <i>Fifties</i> encore, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhTQTdh9kdugsdb_TmWs6FmZFoBg7mVVMEcr8Si-LSL7f9dkB7QBx9p5uXrxfz9v6PUhbAlJq7RnxHB3YPpPcsvU1U4FpV9nGqup13gXYTx38yQK5vG18JwMEhQt5InbRkVuSmgKLVqM50/s1600/p_centre-d-achats-st-jerome_01.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="184" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhTQTdh9kdugsdb_TmWs6FmZFoBg7mVVMEcr8Si-LSL7f9dkB7QBx9p5uXrxfz9v6PUhbAlJq7RnxHB3YPpPcsvU1U4FpV9nGqup13gXYTx38yQK5vG18JwMEhQt5InbRkVuSmgKLVqM50/s320/p_centre-d-achats-st-jerome_01.jpg" width="320" /></a>c’était la nourriture qui venait à nous. Le dernier représentant de ces distributions à la maison, c’est le «facteur», le postier qui distribue le courrier et que le courriel est sur le point de faire disparaître. Sous le prétexte de l’amélioration des services à des coûts moindres, nous avons parié sur la concentration. Les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhTQTdh9kdugsdb_TmWs6FmZFoBg7mVVMEcr8Si-LSL7f9dkB7QBx9p5uXrxfz9v6PUhbAlJq7RnxHB3YPpPcsvU1U4FpV9nGqup13gXYTx38yQK5vG18JwMEhQt5InbRkVuSmgKLVqM50/s104/p_centre-d-achats-st-jerome_01.jpg">grandes surfaces</a> sont le produit de ce pari. Certes, il y a encore le livreur de pizza ou de poulets, mais ce sont des chiens de service: on les siffle, on paie en donnant le numéro de sa carte de crédit au téléphone, par ordinateur, ou comptant une vingtaine de minutes plus tard, lorsqu'il survient avec notre os entre ses dents. Il est difficile de le comparer à ces marchands ambulants.<br />
<br />
Ici aussi, autour de la scène principale, défilent fruits et légumes qui se prêtent aux leçons de vocabulaire de la langue seconde: pêche, poire, tomate, blé d’inde, fraises, bleuets, framboises, ail, céleri, radis, pommes de terre, haricots verts, concombres, cerises, oignons, oranges, raisins et bananes. Fruits et légumes locaux mêlés avec les fruits et légumes exotiques, le marchand offre à madame Martin, qui s’est fait relever les cheveux, tous les produits de son jardin. Aux produits présentés en périphérie, il ajoute une botte de carottes. Mary saisit une pomme de salade. À côté, on retrouve un baril de pommes, des cantaloupes, on voit même une citrouille dans la charrette du vendeur. John, lui, présente un ananas à sa mère. Le marchand ne vend donc pas que des produits de sa ferme, mais également sert d’intermédiaire à des importateurs de fruits et légumes étrangers. La rue, proprement une rue de banlieue, nous donne, enfin, une idée du décor extérieur dans lequel vivent les Martin.</div><div style="text-align: justify;"><br />
Le vendeur est un jeune homme, probablement le fils des propriétaires de la ferme qui s’occupe de la distribution en ville des fruits de leurs jardins. Il est dessiné, jeune et beau, et comme il a été dit plus haut, il offre une botte de carottes à madame Martin, qui elle-même s'est coiffée en chignon [on sait <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiEfeuaZKSYyd4P22VfhAOj3RTQfxEy5_c96aqqrKS5AEd5rkMzHXKV0-Y1zq-HBJx7FkY4bMJAZghdnxpfYpjAXSqq-vpcZ81cW8Pbt8LrdOkXvl_YGo_mnL7wgqjfY4F_EJ8FFAe8w_g/s1600/14-+Fruits+and+vegetables+-+copie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="224" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiEfeuaZKSYyd4P22VfhAOj3RTQfxEy5_c96aqqrKS5AEd5rkMzHXKV0-Y1zq-HBJx7FkY4bMJAZghdnxpfYpjAXSqq-vpcZ81cW8Pbt8LrdOkXvl_YGo_mnL7wgqjfY4F_EJ8FFAe8w_g/s320/14-+Fruits+and+vegetables+-+copie.jpg" width="320" /></a>comment les chignons blonds de Kim Novak et de Tippie Hedren émoustillaient Alfred Hitchcock]. Le Symbolique sexuel est difficile à nier. Bien des histoires, autres que celle du <i>commis voyageur </i>d'Arthur Miller, ont été à la source de drames dans les banlieues des <i>Fifties.</i> En effet, le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiEfeuaZKSYyd4P22VfhAOj3RTQfxEy5_c96aqqrKS5AEd5rkMzHXKV0-Y1zq-HBJx7FkY4bMJAZghdnxpfYpjAXSqq-vpcZ81cW8Pbt8LrdOkXvl_YGo_mnL7wgqjfY4F_EJ8FFAe8w_g/s104/14-+Fruits+and+vegetables+-+copie.jpg"><i>peddler</i></a> de fruits et légumes est proche parent du commis voyageur qui, lui, offrait et vendait des encyclopédies, du savon et toutes sortes d’abonnements. Je me souviens, nous résidions alors à Iberville vers le début des années 70, un tel homme s’était arrêté chez nous un soir, nous offrant, je crois, l’Encyclopédie Grolier. J’aurais bien aimé l’avoir, mais c’était trop cher pour les moyens de mes parents. C’est dire que le produit des vendeurs ambulants n’étaient pas nécessairement que des «<i>cossins</i>» sans valeur.<br />
<br />
Ces petites voitures arpentaient régulièrement, le matin ou l’après-midi, dans les rues de toute la ville. Les «<i>runs</i>» - pas besoin, au Québec des <i>Fifties</i>, de lire <b>conversation anglaise</b> pour utiliser des mots anglais de manière courante -, étaient partagées par différents livreurs. Toutes les rues étaient sillonnées tantôt par le boulanger, tantôt par le laitier, tantôt par le maraîcher… Il en allait ainsi tous les jours, durant la semaine, pour certains même le samedi, jamais le dimanche. Certes, longtemps leur traction furent les chevaux, mais dans les <i>Sixties</i>, c’était des camionnettes à la silhouette carrée, aux couleurs de chaque compagnie (laiterie, boulangerie, ferme, etc.). L’été, la porte était toujours ouverte tant le <i>peddler</i> avait à sortir à toutes les portes de domicile. C’était l'un des travailleurs qui devaient faire le plus grand nombre de pas en une journée.<br />
<br />
Puis, les <i>Sixties</i> avançant, de nouvelles roulottes s’ajoutèrent. Dans notre coin, il y avait, à Iberville, l’une de ces carcasses d’autobus dans lequel un «friteur» de patates, de hot-dogs et d’hambergers, à l'image de ses semblables, fréquentes alors sur les grandes voies<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg7hKoky-yyWdkkztHiLzInROix-MSjovv_UGW_kfPStfdk1hNM373K8AxXFkowTjLXa71iLQPFMR8DjbrWQAZ9TlP3PmYrNmxj2NCV9SoOLefjKagSPXtPrWysutL1E7gx09HEWfx2uEc/s1600/50552_91721960808_7308000_n.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg7hKoky-yyWdkkztHiLzInROix-MSjovv_UGW_kfPStfdk1hNM373K8AxXFkowTjLXa71iLQPFMR8DjbrWQAZ9TlP3PmYrNmxj2NCV9SoOLefjKagSPXtPrWysutL1E7gx09HEWfx2uEc/s400/50552_91721960808_7308000_n.jpg" width="282" /></a> routières américaines. Tout le monde dans la région connaissait Mickey. Dès qu’on approchait de son autobus stationnaire (elle n’avait plus de roues, étant convertie en restaurant), une bouffée de chaleur nous envahissait avec l’odeur grasse de frites plongées dans l'huile bouillonnante, les hot dogs <i>steamés</i> et les hambergers garnis. En moins de quelques temps, Mickey était devenu une célébrité locale. Presque à la sortie du pont Gouin, en entrant dans Iberville, on ne pouvait pas le manquer. Or sa réputation était devenue si grande que bientôt la ville voisine de Saint-Jean-sur-Richelieu était parcourue par une <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg7hKoky-yyWdkkztHiLzInROix-MSjovv_UGW_kfPStfdk1hNM373K8AxXFkowTjLXa71iLQPFMR8DjbrWQAZ9TlP3PmYrNmxj2NCV9SoOLefjKagSPXtPrWysutL1E7gx09HEWfx2uEc/s104/50552_91721960808_7308000_n.jpg">voiture</a> (avec des roues celle-là), qui servait les mêmes patates, hot dogs et hambergers. Lorsque les polyvalentes furent construites dans les deux villes, on vit des roulottes à Mickey attendre les élèves, à l'heure du dîner ou à la fin d'après-midi à la sortie des classes. Il était le grand concurrent du concessionnaire de la cafétéria des écoles! C’était vraiment la vie, telle qu’on peut l’imaginer dans le feuilleton <i>Peyton Place</i>, l’américanisation entrant à fond de train dans les mœurs traditionnelles québécoises. Toutes les villes s’équipèrent bientôt de roulottes sur le modèle de Mickey-patates.<br />
<br />
Entre le <i>peddler</i> de fruits et légumes et la roulotte à Mickey, c’était encore un indice marquant de la mutation que nous étions en train de subir. Non pas que l’un vendait des produits dits «naturels» et l’autre de la <i>junk food</i>. Je ne reviendrai pas sur ce point, en mettant le docteur Lecter derrière les friteuses de chez Mickey, mais plutôt sur un mode de relations entre les ambulants et la clientèle. Comme on le voit dans la scène, la relation entre la clientèle et le vendeur est cordiale. Elle est investie d’affects, c’est-à-dire qu’ils se connaissent, ne serait-ce que par habitude, coutume. La mère Martin attendait tel jour de la semaine, à telle heure de l’après-midi le vendeur de fruits et légumes - est-ce pour lui qu’elle s’est mise aussi belle? -, et s’il avait le malheur d’être en retard ou si le <i>peddler</i> n’était pas le même - une remplaçant -, alors on s’inquiétait pour lui. «Il a pris une semaine de vacance», «Sa femme vient d’accoucher d’un fils», «Son père est décédé»… Il en allait ainsi de même du vendeur s’il découvrait qu’un nouveau visage, une nouvelle personne sortait d’une porte connue: «La famille Unetelle a déménagé samedi. Mon nom est madame Machin, et voici mes enfants Jean et Paul». L’ordre des choses, sinon l’ordre du monde, était soudainement changé, et il fallait se résigner à créer une nouvelle relation, une relation purement économique qui se doublait vite d’une relation de confiance et d’estime (ou de haine) personnelle.<br />
<br />
</div><div style="text-align: justify;">C’était assez différent de l’anonymat qui s’est établie entre les caissiers et caissières des super-marchés <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjwI6KLfBFvfAekimAnktwim-N7uPzkRJyTIOcABEr4NU6rgtE52PCPMfJlIv0LWFQ43E9OPpsHopyiy9YF0VPwFHINXj2qUYzFWaVGlq9PaV39hDyz4z3IVeOkqH15dXpc7X2zEYwJKsM/s1600/46769-code-barre-codes-barres.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="145" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjwI6KLfBFvfAekimAnktwim-N7uPzkRJyTIOcABEr4NU6rgtE52PCPMfJlIv0LWFQ43E9OPpsHopyiy9YF0VPwFHINXj2qUYzFWaVGlq9PaV39hDyz4z3IVeOkqH15dXpc7X2zEYwJKsM/s320/46769-code-barre-codes-barres.jpg" width="320" /></a>et la clientèle qui dépose ses produits sur le tapis roulant et passent devant une lectrice des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjwI6KLfBFvfAekimAnktwim-N7uPzkRJyTIOcABEr4NU6rgtE52PCPMfJlIv0LWFQ43E9OPpsHopyiy9YF0VPwFHINXj2qUYzFWaVGlq9PaV39hDyz4z3IVeOkqH15dXpc7X2zEYwJKsM/s104/46769-code-barre-codes-barres.jpg">codes barres</a>. Derrière le soi-disant service adapté à la clientèle, on s’aperçoit que l’acte économique n’est plus qu’un automatisme qui vise à faire transiter l’argent de la poche du client à la grosse caisse du caissier tandis qu’un emballeur fait sauter ses œufs dans son sac d’épicerie, qui n’est plus, depuis longtemps, ce sac en papier brun encore courant dans les <i>Fifties</i>, mais des sacs de plastiques que le client paie 5¢ quand il n’apporte pas ton propre sac en tissus …au nom de l’environnement.<br />
<br />
On pensera ce qu’on voudra, mais je dis qu’il y a un déficit humain entre ce temps et celui qui est le nôtre. Au-delà de l’obsession diététique ou écologique, on oublie très vite le déficit des relations interpersonnelles que ces pratiques nouvelles, au nom de l’efficacité, du service «personnalisé» et du moindre coût, ont coûté. Pour les penseurs libéraux du siècle de Montesquieu et de Voltaire, le terme «commerce» impliquait les échanges, autant au niveau des relations humaines que des échanges commerciales. Or, le «service personnalisé», c’était dans les <i>Fifties</i> qu'il s'exerçait, entre les clients et les <i>peddlers</i>. Ces notions hypocrites de «service à la clientèle», de «service personnalisé», de «relations publiques», employées à contre-courant par les grands commerces, servent à berner les naïfs et à faire plus d’argent au dépens du consommateur.<br />
<br />
Du temps, le médecin, le pharmacien, le photographe, la mercière, le garagiste, le vendeur de meubles, le quincailler, chacun avait un nom et <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhvgSLlzk5f3X5DTATinDtVZhbiYvBwURvS2HB5NZYQp7c8bXYLpTLi23Wd1cU3pAn-hnov0I3hg0ofROHqSCP-iEJPBaJo3rIk092v7WCrWJ6y6BDIA0DjPIF2pETO-dseAXp-rMf4COw/s104/photo_279418_resize.jpg">vendeurs et clients</a> <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhvgSLlzk5f3X5DTATinDtVZhbiYvBwURvS2HB5NZYQp7c8bXYLpTLi23Wd1cU3pAn-hnov0I3hg0ofROHqSCP-iEJPBaJo3rIk092v7WCrWJ6y6BDIA0DjPIF2pETO-dseAXp-rMf4COw/s1600/photo_279418_resize.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="219" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhvgSLlzk5f3X5DTATinDtVZhbiYvBwURvS2HB5NZYQp7c8bXYLpTLi23Wd1cU3pAn-hnov0I3hg0ofROHqSCP-iEJPBaJo3rIk092v7WCrWJ6y6BDIA0DjPIF2pETO-dseAXp-rMf4COw/s320/photo_279418_resize.jpg" width="320" /></a>s’appelaient souvent, intimement, par leurs prénoms. Ils avaient fait leurs études ensemble, sur les bancs de la petite école. Ils avaient parfois fréquenté les mêmes filles, participé aux mêmes équipes sportives, pensé en même temps à rentrer dans les ordres… Parfois, ils avaient même été engagés ensemble dans l’armée, durant la guerre. Ils avaient des amis communs morts au combat. D’autres étaient revenus amochés, physiquement et mentalement, et ils devenaient des assistants au commerce d'un parent, faisant ce qu’ils pouvaient dans l'entreprise. Telle était la nature serrée des liens interpersonnels dans les <i>Fifties</i>. Aujourd’hui, il est difficile de comprendre une telle proximité. En tout cas, elle n’existe pas entre les clients et les caissiers, et encore moins avec les gérants d’établissement, et on ne parlera pas des propriétaires invisibles.<br />
<br />
Ce déficit d’affects, on essaie de le dissimuler derrière les investissements des commerçants dans des activités commanditées parce que télévisées et diffusées dans les média de masse. La charité commerciale est devenue une activité où la charité se double d’orgueil et de profits de sympathie appelés à se transformer en profits pécuniers. De la charité-spectacle, on passe aux grands mouvements liés à des activités sensés amasser des sous pour les handicapés de toutes sortes, aux campagnes de financement contre un cancer quelconque, de marches pour (ou contre?) le SIDA… Enfin, la guignolée des média où les vedettes se joignent à des animateurs maisons pour se placer au coin des carrefours les plus achalandés afin de «recueillir» des dons en argent et en nourriture. Le tout s’achève avec un chèque en <i>plywood</i> qui permet au don d’une grosse compagnie de parvenir à faire sauter le <i>jack-pot</i> de la soirée! On y verse d’abondantes larmes; on embrasse beaucoup d’enfants; on ne cesse de serrer des poignées de main fraternelles. Rien de tout ça dans le tableau 14.<br />
<br />
La perversion de la cordialité des sentiments interpersonnels est sans doute le pire des résultats de cette mutation entre les <i>Fifties</i> et le début du second millénaire. Les cancans des banlieusards sur les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgklov1kjAww9WdmJwr4-O_dPGnFGs8cscVLUCE5WswYvg2N3digEJucXy-IwKEtQB54KuLsAdATxfgS8YjxMge3PV3FULjQADFksraIpEbH0CNsGT9MPawcIDL90J823zmwObRvSiefVw/s1600/Commeres.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgklov1kjAww9WdmJwr4-O_dPGnFGs8cscVLUCE5WswYvg2N3digEJucXy-IwKEtQB54KuLsAdATxfgS8YjxMge3PV3FULjQADFksraIpEbH0CNsGT9MPawcIDL90J823zmwObRvSiefVw/s320/Commeres.jpg" width="302" /></a>relations, vraies ou supposées, entre une voisine Unetelle et le charmant jeune <i>peddler</i>, scénario typique d’un <i>Peyton Place</i>, c'est cette mutuelle surveillance morbide que la migration urbaine rejeta, préférant l’indifférence du voisinage en ville aux <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgklov1kjAww9WdmJwr4-O_dPGnFGs8cscVLUCE5WswYvg2N3digEJucXy-IwKEtQB54KuLsAdATxfgS8YjxMge3PV3FULjQADFksraIpEbH0CNsGT9MPawcIDL90J823zmwObRvSiefVw/s104/Commeres.jpg">commérages</a> des voisins de banlieue. Il y avait là un besoin de reconnaissance de sa vie privée libérée des pressions sociales écrasantes des milieux restreints. Cet éloignement était nécessaire. Ce qui rendait les Peyton Places étouffantes, c’était précisément cette promiscuité de bavardages malsains qui finissaient par salir toute vie personnelle. Des suspicions étaient portées sur des gens et demeuraient à peser comme une hypothèque sur leur réputation pour toujours. Voilà pourquoi, dans cette scène, madame Martin ose une compromission, le panier sous le bras, comme en «souvenir» du charmant et jeune <i>peddler</i>. La présence des enfants - sans doute une journée de congé en classe? - rend possible une conversation joyeuse sans que le quartier n’en pense le moindre mal. Contrairement à l’habitude, ici ce sont les enfants Martin qui servent de chaperon à leur mère.<br />
<br />
Il n’y a pas de monde idéal où les liens entre individus pourraient se serrer sans que des conflits de jalousies, d’envies et de compétitions ne viennent polluer <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEggEiv76Hmfv2qgbqr7lhjEK-IJ-vMGYuN0VugtdVpJ4JXWiYHdR0kY4a0Q38JslzV9HnkIYkhsaGF6sDIBTYTFxALFYc7Q9Xc_p5wTzuM6m3uv4Tg8eEBNU3Tet49dWzLwRhW5tPGP7F0/s1600/affiche-Le-Laureat-The-Graduate-1967-2.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEggEiv76Hmfv2qgbqr7lhjEK-IJ-vMGYuN0VugtdVpJ4JXWiYHdR0kY4a0Q38JslzV9HnkIYkhsaGF6sDIBTYTFxALFYc7Q9Xc_p5wTzuM6m3uv4Tg8eEBNU3Tet49dWzLwRhW5tPGP7F0/s320/affiche-Le-Laureat-The-Graduate-1967-2.jpg" width="230" /></a>les relations. Sans doute la dépression des mœurs à partir des <i>Sixties</i> y a joué pour beaucoup. Un film comme <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEggEiv76Hmfv2qgbqr7lhjEK-IJ-vMGYuN0VugtdVpJ4JXWiYHdR0kY4a0Q38JslzV9HnkIYkhsaGF6sDIBTYTFxALFYc7Q9Xc_p5wTzuM6m3uv4Tg8eEBNU3Tet49dWzLwRhW5tPGP7F0/s104/affiche-Le-Laureat-The-Graduate-1967-2.jpg"><i>The Graduate</i></a>, où un jeune homme tombe amoureux d’une femme mûre, a longtemps passé comme un film «<i>thought</i>», c’est-à-dire, à la limite de l’inceste, un peu comme le roman de Zola, <i>La curée</i>, à la fin du XIXe siècle. Le monde urbain n’est pas mieux, car s’il offre la discrétion des voisins, il établit une indifférence qui finit par envahir toute préoccupation sincère pour les siens. L’empathie est un sentiment que l’on dépense à la mesure de la distance qui nous sépare des objets pour lesquels nous nous soucions. Voila pourquoi le don devient un intermédiaire qui satisfait à la fois son estime de soi, son opinion positive de soi-même devant les autres face aux misères du monde. Nous clamons notre empathie au moment où notre indifférence triomphe de nos vertus à nous scandaliser de l’injustice et de l’ignominie de nos irresponsabilités collectives devant ce qu'on laisse faire et qu'on pourrait empêcher.<br />
<br />
Cette attitude n’était pas inconnue des <i>Sixties</i>. Je me souviens d’une émission de Télé-Métropole (aujourd’hui réseau TVA) animé par un animateur d’origine belge - qui passait pour avoir été un collabo durant l’occupation nazie de la Belgique avant de s’enfuir se refaire une virginité au Québec francophone et était devenu <i>speaker</i> sur les ondes radiophoniques -, et qui passait les mardis soirs: <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgIgau1MczP6md2Qgv93IwX7R6CC-nEmrnVwnkc9_1-ojBc6Ex0PmXuYJ8wA8JiRxQllGOV3E6tX_mHhDha5TcKjkhxhgkF4JCTcAdcTM0t82putpJ7fkLfQ65p6Y31qT7wmfJUI1ovp_k/s104/2606618578198080_1.jpg"><i>Le cœur sur la main</i></a>. L’émission en question nous présentait la famille pauvre de la semaine qu'une <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgIgau1MczP6md2Qgv93IwX7R6CC-nEmrnVwnkc9_1-ojBc6Ex0PmXuYJ8wA8JiRxQllGOV3E6tX_mHhDha5TcKjkhxhgkF4JCTcAdcTM0t82putpJ7fkLfQ65p6Y31qT7wmfJUI1ovp_k/s1600/2606618578198080_1.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgIgau1MczP6md2Qgv93IwX7R6CC-nEmrnVwnkc9_1-ojBc6Ex0PmXuYJ8wA8JiRxQllGOV3E6tX_mHhDha5TcKjkhxhgkF4JCTcAdcTM0t82putpJ7fkLfQ65p6Y31qT7wmfJUI1ovp_k/s200/2606618578198080_1.jpg" width="132" /></a>caméra avait été filmer chez elle, dans leur quotidien, présentant généralement l’état déplorable du logement misérabiliste d'une famille nombreuse qui demeurait alors dans le Faubourg à M'lasse, dans ces petites maisons insalubres qui pullulaient sous le pont Jacques-Cartier (aujourd’hui détruites pour permettre la construction de Radio-Canada et de l’autoroute Ville-Marie). Je me souviens d'une pièce unique où le bain était à même la cuisine. Ce type de décor fut reconstruit pour le film <i>Bonheur d’occasion</i>… À côté de ce topo, je considérais que nous étions une famille «riche»! Le double-objectif moral de l'émission était atteint: faire comprendre aux moins pauvres qu'ils n'étaient pas si pauvres que cela, et ce qui les attendait s'ils ne continuaient pas à collaborer au système économique qui les plaçait dans leur situation d'exploitation qu'ils pouvaient considérer chanceux d'être si généreux à leur égard! Si le spectateur donnait de l’argent, le sympathique <i>Frenchie</i> (c’était son surnom) promettait qu’une «vedette» irait chercher l’argent! Alors, vous comprenez l’astuce…<br />
<br />
Sans la comprendre, j’assistais-là à l’invention de l’ignominie moderne qui, par la route des téléthons et des guignolées devait parvenir à notre «coefficient d'inattention à la vie» présente, pour reprendre l’expression de Bergson. Par le charmant décor de <i>Fruit and vegetables</i>, nous pouvons encore rêver d’un temps où l'humanité n’était pas encore complètement éviscérée ou castrée pour permettre à tous les mercenaires du grand commerce d’exercer une violence déguisée sous l’affabilité d’un caissier ou d’une caissière au sourire sympathique mais dont on ne connaît rien et qui ne sera probablement plus là, à sa caisse, dans une semaine, ou un mois…</div><div style="text-align: right;">Montréal<br />
4 juillet 2011</div><div style="text-align: justify;"></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-87531514812212012522011-07-03T22:19:00.000-07:002014-08-18T10:19:10.711-07:00Learning to cook<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on">
<div style="text-align: justify;">
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDQgNaaD8cO8SuTJbqWF8so8hGrNBT7rSTq6MvRINjUvrk_THFynAd1H6XT7HkhaB-svlqUrGDFGmMfnpEZfrTYyuS6VYSyX9tRJbTPAQ4zR3dxYAQqJncGeYyqk7j6fE-Sb9zQ6UInb8/s1600/Beliveau.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhHTo3rjwg9jVNP5MZkb_iVvsYqdbmLQW5KlVuozihOYZ-1A-4FPU21KjQMBEd___VDfV89csY7OPgZMlsfMvmvRQyRO1UtwqEx6VlKyBlNs2nIfNz-G1QrNWOis78MQMLAPdEiHmTAcy4/s1600/13-+Mary+makes+cakes.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhHTo3rjwg9jVNP5MZkb_iVvsYqdbmLQW5KlVuozihOYZ-1A-4FPU21KjQMBEd___VDfV89csY7OPgZMlsfMvmvRQyRO1UtwqEx6VlKyBlNs2nIfNz-G1QrNWOis78MQMLAPdEiHmTAcy4/s400/13-+Mary+makes+cakes.jpg" height="286" width="400" /></a></div>
<div style="text-align: center;">
</div>
<div style="text-align: center;">
<br />
<b>LEARNING TO COOK</b></div>
<br />
Le second cycle des tableaux du manuel <b>conversation anglaise</b> commence, comme le premier, par une image encerclée d’un défilé tiré directement du pays de Cocagne avec les bons petits plats de Maman Martin qui, dans le cadre, enseigne à sa fille Mary à <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhHTo3rjwg9jVNP5MZkb_iVvsYqdbmLQW5KlVuozihOYZ-1A-4FPU21KjQMBEd___VDfV89csY7OPgZMlsfMvmvRQyRO1UtwqEx6VlKyBlNs2nIfNz-G1QrNWOis78MQMLAPdEiHmTAcy4/s104/13-+Mary+makes+cakes.jpg">faire la cuisine</a>. Dans le préjugé facile qui veut qu’on prend son homme par l’estomac (alors qu’on sait bien que c’est un petit peu plus bas et par un autre organe qu’il se laisse volontiers prendre), l’enseignement <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhOXByju2atrngoGLRHcItRPQ_YjRkiIIIk8oz7Vk_XBJ0NCpHipBvbXDtNeNszZprVFancNZ5F9dWwZaxw4wSvpOTgszSItTy5LMssSm_xC_aY9P0Dlt8K7st3gvJLVH1kODIX7Wo9lrg/s1600/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhOXByju2atrngoGLRHcItRPQ_YjRkiIIIk8oz7Vk_XBJ0NCpHipBvbXDtNeNszZprVFancNZ5F9dWwZaxw4wSvpOTgszSItTy5LMssSm_xC_aY9P0Dlt8K7st3gvJLVH1kODIX7Wo9lrg/s200/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg" height="174" width="200" /></a>des tâches domestiques, et en particulier de la cuisine, est la base de l’éducation d’une jeune fille honnête. Comme dans le tableau <i>The names of the part of the body</i>, nous voyons un étalage de nourriture se suivre à la queue leu leu Contrairement toutefois aux tableaux du genre, c’est plutôt de gauche à droite qu’il vaut mieux de lire le défilé des produits: pinte, chopine et verre de lait, beurre, fromage, soupe, jambon, pain, pot de confiture, petit déjeuner avec bacon, œufs, sel et poivre et café, pot de fèves au lard, tarte et gâteau, nous comprenons mieux pourquoi <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhOXByju2atrngoGLRHcItRPQ_YjRkiIIIk8oz7Vk_XBJ0NCpHipBvbXDtNeNszZprVFancNZ5F9dWwZaxw4wSvpOTgszSItTy5LMssSm_xC_aY9P0Dlt8K7st3gvJLVH1kODIX7Wo9lrg/s104/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg">maman</a> était si fière de son chapon lors de l’anniversaire de John!<br />
<br />
Dans la scène elle-même, Maman montre à Mary comment faire une tarte. Elle brasse les œufs tandis que Mary roule la pâte. La complémentarité des tâches s’exerce dans la joie et l’entente mutuelle. De plus, nous entrevoyons pour la première fois la cuisine (nous la verrons plus en détail dans un autre <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjo36sy6LtDs3ayqQGvEVGUL963NgJbrHhvAD8469lLBytzP4Bj_gP3jiWtxrx9gDIbGxXd2XfzP-YqBcMRAoGSmABLIQpEX0_MldHrkjLsuCLMm8__vA2zzEhxiUkDwgw4JOvFbxgMn1I/s1600/13-+Mary+makes+cakes+-+copie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjo36sy6LtDs3ayqQGvEVGUL963NgJbrHhvAD8469lLBytzP4Bj_gP3jiWtxrx9gDIbGxXd2XfzP-YqBcMRAoGSmABLIQpEX0_MldHrkjLsuCLMm8__vA2zzEhxiUkDwgw4JOvFbxgMn1I/s200/13-+Mary+makes+cakes+-+copie.jpg" height="175" width="200" /></a>tableau), spatieuse et commode: tiroirs et armoires, lavabo et poêle au gaz, la table placée au centre de la pièce. Tout est à portée de main. La mère Martin connaît ses recettes par cœur; pas de Ricardo ou de Jamie Oliver pour la guider dans sa recette! La cuisine est une tradition et non une matière que l’on apprend à reproduire selon un modèle universel. Chaque tradition a ses petits secrets et se les transmet de génération en génération. Le Colonel déjà cité n’a pas été le premier à avoir eu sa recette secrète d’épices et fines herbes! Ce qu’il y a de plus sympathique dans ce tableau, c’est véritablement le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjo36sy6LtDs3ayqQGvEVGUL963NgJbrHhvAD8469lLBytzP4Bj_gP3jiWtxrx9gDIbGxXd2XfzP-YqBcMRAoGSmABLIQpEX0_MldHrkjLsuCLMm8__vA2zzEhxiUkDwgw4JOvFbxgMn1I/s104/13-+Mary+makes+cakes+-+copie.jpg">passage de génération</a> qui, autour de la production en vue de satisfaire un besoin et un plaisir essentiel - la bouffe -, mère et fille présente, encore là sur un mode idéal, un savoir-faire qui se soucie peu de la théorie et de la diététique.<br />
<br />
Outre le sexisme évident sur lequel nous n’avons pas à revenir - il était inconcevable de présenter la mère apprenant à son fils à cuisiner! -, l’ensemble conserve tout le charme d’une vision idéale de l’apprentissage de la vie dans ce qu’elle a de plus commun. Ce qui ne veut pas dire que la cuisine est une connaissance commune. Il n’est pas besoin de s’appeler Brillat-Savarin pour savoir quel art est la gastronomie, les plaisirs de la bouche, de la table valant pour l’ancienne noblesse autant que les plaisirs du jeu érotique. À une époque où le sexe est réduit à son expression mécanique la plus automatique, la cuisine également a ses petits-plats congelés, sa nourriture minceur à petite portion/prix élevé. Pour les barbares, il y a toujours le <i>fast food</i> qui reste l’équivalent de l’éjaculation prématurée, tout s’avale d’une bouchée!<br />
<br />
Il va de soi que les produits cuisinés par maman Martin, même <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiHdteH7AkQldEN2RX_xQLsnNklopSYb-1urzSwnlZrwvFWx0i-KO-RbtRugMgUu9tWNwZYLwpFoXCDaPVDfsEwuNlVZGsbU_NZLPZJ_cfv64a74FECmal2FIy76WEa02qhjxT79NxFa0s/s1600/d%25C3%25A9jeuner.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiHdteH7AkQldEN2RX_xQLsnNklopSYb-1urzSwnlZrwvFWx0i-KO-RbtRugMgUu9tWNwZYLwpFoXCDaPVDfsEwuNlVZGsbU_NZLPZJ_cfv64a74FECmal2FIy76WEa02qhjxT79NxFa0s/s200/d%25C3%25A9jeuner.jpg" height="149" width="200" /></a>s’ils ne sont pas commercialisés comme ceux de maman Simard ou de maman Dion, sont représentatifs des <i>Fifties</i> en Amérique du Nord. L’assiette <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiHdteH7AkQldEN2RX_xQLsnNklopSYb-1urzSwnlZrwvFWx0i-KO-RbtRugMgUu9tWNwZYLwpFoXCDaPVDfsEwuNlVZGsbU_NZLPZJ_cfv64a74FECmal2FIy76WEa02qhjxT79NxFa0s/s104/d%25C3%25A9jeuner.jpg">œufs et bacon</a> par exemple, est <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiHdteH7AkQldEN2RX_xQLsnNklopSYb-1urzSwnlZrwvFWx0i-KO-RbtRugMgUu9tWNwZYLwpFoXCDaPVDfsEwuNlVZGsbU_NZLPZJ_cfv64a74FECmal2FIy76WEa02qhjxT79NxFa0s/s1600/d%25C3%25A9jeuner.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a>particulièrement nord-américaine. Les produits laitiers sont mis en vedette, le porc comme viande essentielle (avec le bacon et les fèves au lard), enfin le sucre avec le pain blanc, la tarte et le gâteau. En ce sens, la cuisine minceur n’est pas la préoccupation qui trotte dans la tête de la mère Martin.<br />
<br />
Ces images sont aujourd’hui pétrifiées dans notre mémoire et nous ne pouvons nous en défaire, pour ceux qui les ont connues. C’était le temps où la nourriture paraissait venir à nous alors qu’aujourd’hui <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwfgPs0aS1U-MBWhyphenhyphenY19RPxfm1MvKfNQct3zkyoOVsJPW9wtdUDtmImnpddnKUdsyC04fbY0cg5M260MJcPs2x1iBhDkUN-MjKj_ppXiljNrciomG31SsYP8mPQMau272Phr2gQUZ7QF4/s1600/goldrush.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwfgPs0aS1U-MBWhyphenhyphenY19RPxfm1MvKfNQct3zkyoOVsJPW9wtdUDtmImnpddnKUdsyC04fbY0cg5M260MJcPs2x1iBhDkUN-MjKj_ppXiljNrciomG31SsYP8mPQMau272Phr2gQUZ7QF4/s200/goldrush.jpg" height="186" width="200" /></a>il faut aller à elle, au restaurant ou au super-marché. En même temps, les liens entre le jardin, la ferme, la boucherie et la cuisine se sont irrémédiablement tranchés. La hantise de la diététique de jouer un rôle équivalent à celui de l’hygiène au siècle précédent, a, tantôt, favorisé l’ajout de produits de conservation ou de traitements qui ont occasionné bien des maux, tantôt, dénoncé ces mêmes ajouts étrangers tout en inventant le concept de nourriture «biologique» non-chimique, comme si, de toute façon, les produits que nous avions toujours mangé n’avaient jamais été des résultats de combinats chimiques et ne relevaient pas de la nature biologique. Nous n’avons jamais mis des roches ni des pierre dans notre alimentation, et les lacets transformés en spaghetti et les clous en os de poulet par <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwfgPs0aS1U-MBWhyphenhyphenY19RPxfm1MvKfNQct3zkyoOVsJPW9wtdUDtmImnpddnKUdsyC04fbY0cg5M260MJcPs2x1iBhDkUN-MjKj_ppXiljNrciomG31SsYP8mPQMau272Phr2gQUZ7QF4/s104/goldrush.jpg">Charlot</a> sont le produit d’un songe, non de la gastronomie.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj1QoXvcDtDo8OJw8V0O0X9G9WoCG76c-MjL9Kpx90Ipb8f4CPkgFZ4AfJHjogMWOZgRyqft_W1pJHnwu2XqL3cfKz2wx1cDqSNrE45ZmXTVNAwONnsdIN2KHg6PhoDnwmoGlC_drV3tNM/s1600/ph313.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj1QoXvcDtDo8OJw8V0O0X9G9WoCG76c-MjL9Kpx90Ipb8f4CPkgFZ4AfJHjogMWOZgRyqft_W1pJHnwu2XqL3cfKz2wx1cDqSNrE45ZmXTVNAwONnsdIN2KHg6PhoDnwmoGlC_drV3tNM/s320/ph313.jpg" height="320" width="254" /></a></div>
La nourriture faisait partie de la joie de vivre des <i>Fifties</i> beaucoup plus que du XXIe siècle. La gourmandise semblait le seul des péchés capitaux qui coûtait le moins en années de purgatoire. Ici, nulle pudeur, sincère ou feinte. Maître Jacques satisfaisait aussi bien Tartuffe que Don Juan. Elle était le symbole même de l’abondance d’après-guerre, après les souffrances des ventres vides durant la crise de 1929 et le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj1QoXvcDtDo8OJw8V0O0X9G9WoCG76c-MjL9Kpx90Ipb8f4CPkgFZ4AfJHjogMWOZgRyqft_W1pJHnwu2XqL3cfKz2wx1cDqSNrE45ZmXTVNAwONnsdIN2KHg6PhoDnwmoGlC_drV3tNM/s104/ph313.jpg">rationnement</a> de la Seconde Guerre mondiale. Après tant de privations, il paraissait on ne peut plus normal qu’on se reprenne des temps difficiles sur la disponibilité qui sortait des champs et des jardins de l’Amérique du Nord.<br />
<br />
Pourtant, bien de gens de ma génération se l’avouent sans le crier trop fort sur les toits, nos mères étaient de bien piètres cuisinières. Les tablées, telles que présentées dans les tableaux 9 et 13, apparaissaient surtout à l’époque des temps de fêtes. C’était ma grand-mère maternelle qui menait les opérations lors de la confection des tartes et des tourtières durant la période de l’Avent, préparant la bouffe pour le temps des fêtes. Le poulet rôti de madame Martin était cuit à l’étuvée chez nous et était d’un goût tellement fade (ma mère n’utilisait pas d’assaisonements ni d’herbes aromatiques) qu'il m'écœurait. Lorsque je découvris le poulet rôti, c’était un saut qualitatif dont vous ne sauriez évaluer la portée! Le jambon n’était plus cuit à la maison mais acheté, déjà cuit, en entier ou en tranches pour les sandwiches. Même procédé de cuisson pour le bœuf qui mijotait dans son jus gras. Les fèves au lard (que je ne mangeais pas non plus) étaient cuites sans mélasse, blêmes plutôt que brunes. Il y avait les soupes, par contre, qui étaient excellentes, mais grasses. Pour le reste, c’était du rôtissage à la poêle. C’était ainsi. Ma mère n’était pas douée pour la cuisine. Aussi, le steak était-il le succès de son livre de recette.<br />
<br />
Il faut beaucoup de temps pour faire à manger, comme on disait alors. Et très peu pour tout dévorer. L’effort est énorme pour le temps de la récompense. Il y a un déficit de la production par rapport à celui de la consommation, voilà pourquoi, malgré les cuisines hyperéquipées chez <i>Canadian Tires</i>, les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhughs6pH4oVaEAYpYZkxi7zeCaiFDhe0MEyTAJFPfFznZye8B8KWuNErfqouceLBWHWfByKBGmi8ojOy7mvzBd190A8wf1V7GFInf1QM_8xNercJMCw0EudjNS_K727UiuQmcQpCkJSGg/s1600/grand+fr%25C3%25A8re.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhughs6pH4oVaEAYpYZkxi7zeCaiFDhe0MEyTAJFPfFznZye8B8KWuNErfqouceLBWHWfByKBGmi8ojOy7mvzBd190A8wf1V7GFInf1QM_8xNercJMCw0EudjNS_K727UiuQmcQpCkJSGg/s320/grand+fr%25C3%25A8re.jpg" height="320" width="214" /></a>gens préfèrent de beaucoup aller au restaurant. Ici, le déficit est rétabli par le coût du repas. La diversité des restaurants, en genre et en qualité, des petits aux prix forts, fait que l’on peut passer sa vie à errer d’un restaurant à l’autre sans s'arrêter une seule fois dans sa «cuisine». L’ambiance familiale est remplacée par un tête à tête d’affaires ou de cul, ou par une simple connivence amicale. La musique d’ascenseur (qui n’a plus rien à voir avec celle d’Érik Satie) et les murmures des attablés couvrent les échanges individuelles. L’ambiance du repas n’est plus du tout celle décrite dans les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhughs6pH4oVaEAYpYZkxi7zeCaiFDhe0MEyTAJFPfFznZye8B8KWuNErfqouceLBWHWfByKBGmi8ojOy7mvzBd190A8wf1V7GFInf1QM_8xNercJMCw0EudjNS_K727UiuQmcQpCkJSGg/s104/grand+fr%25C3%25A8re.jpg">romans</a> de Félix Leclerc. La famille Martin, si elle vivait aujourd’hui, irait chez un traiteur, aurait recours à une équipe «ambulante» pour préparer la fête de John. La taxe sur les produits et <span style="font-size: x-small;">SERVICES</span> comble les coffres de l’État, alors que la nourriture de base est exclue des taxes. Sans doute est-ce une autre preuve de la victoire de l’<i>isolisme</i> sur le sentiment de collectivité, mais telle est la vie des temps modernes et la tradition de se transmettre les recettes de génération en génération est un art en train de mourir.<br />
<br />
Du moins, dans nos mégapoles et dans nos banlieues climatisées. Car on dépense énormément d’énergie à faire de la cuisine. On mijote avec le potage; on<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDQgNaaD8cO8SuTJbqWF8so8hGrNBT7rSTq6MvRINjUvrk_THFynAd1H6XT7HkhaB-svlqUrGDFGmMfnpEZfrTYyuS6VYSyX9tRJbTPAQ4zR3dxYAQqJncGeYyqk7j6fE-Sb9zQ6UInb8/s1600/Beliveau.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDQgNaaD8cO8SuTJbqWF8so8hGrNBT7rSTq6MvRINjUvrk_THFynAd1H6XT7HkhaB-svlqUrGDFGmMfnpEZfrTYyuS6VYSyX9tRJbTPAQ4zR3dxYAQqJncGeYyqk7j6fE-Sb9zQ6UInb8/s320/Beliveau.jpg" height="320" width="210" /></a> trempe dans notre jus comme le poulet rôti; on courre d’un rond de poêle à l’autre pour ne pas faire brûler le bacon; on ouvre et on ferme la porte du fourneau qui nous envoie sa chaleur en pleine figure pendant que cuit le jambon, et la fabrication d’une tarte ou d’un gâteau demande des heures, voire des jours de préparations à peler les pommes ou préparer les fraises ou les cerises, à tamiser la farine, à rouler la pâte, à découper des dentelles, comme une couturière de la chair. Les quantités doivent être mesurées avec autant de soin que le ferait un chimiste de son expérience en laboratoire, d’où la similarité des dispositions du laboratoire de chimie et de la cuisine familiale. Comme le chimiste revêt un sarrau, la cuisinière est équipée d’un grand tablier qui la couvre du cou au milieu des cuisses. Ce tablier a autant de poches pour contenir les gants qu’utilise la cuisinière comme le chimiste en a pour manipuler les solutions après son sur-vêtement. Si ce n’était de l’esprit qui préside à l’opération alchimique, nous pourrions croire, effectivement, qu’ils pratiquent tous deux la même profession.<br />
<br />
Alors, ma mère était aussi mauvaise cuisinière que j’étais mauvais élève en chimie - science que je détestais par dessus tout. Aussi, vous devinerez qu’étant seul et chargé de ma tâche, je n’ai pas le goût ni l’instinct pour la cuisine! Voilà pourquoi je me surprends, rêvant devant ce tableau d’un autre temps à vrai dire, que je n’ai connu que comme figure de l’idéal domestique. De fait, les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgzP0mFpPPpVp5fyKSeHtL0A_v_pS67A6lAq5A_sXMHBP-TfSOynW0K3SWWO77Rwak_nJAqUvcHxWz5b_Hx5lehAbe513E8exwS9WQOTxT-qy1QccMf5lGOQjOR8BOQmzOgHQtPDzWsBcg/s104/albert_tessier.jpg">prélats domestiques</a> (dont les initiales à la suite de leur titre de clerc étaient «P.D.» [<i>sic</i>]) étaient des religieuses et même des religieux qui enseignaient la cuisine. Les clercs masculins enseignaient surtout la chimie aux garçons et les religieuses la cuisine aux filles. Cette éducation supérieure valait surtout pour les cours professionnels et les petites Mary étaient professionnelles de la cuisine comme les pauvresses se faisaient professionnelles du sexe. La première était formée pour attraper un mari; la seconde une maladie vénérienne ou une grossesse non désirée. Idéale la vie domestique durant les <i>Fifties</i>?<br />
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgzP0mFpPPpVp5fyKSeHtL0A_v_pS67A6lAq5A_sXMHBP-TfSOynW0K3SWWO77Rwak_nJAqUvcHxWz5b_Hx5lehAbe513E8exwS9WQOTxT-qy1QccMf5lGOQjOR8BOQmzOgHQtPDzWsBcg/s1600/albert_tessier.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgzP0mFpPPpVp5fyKSeHtL0A_v_pS67A6lAq5A_sXMHBP-TfSOynW0K3SWWO77Rwak_nJAqUvcHxWz5b_Hx5lehAbe513E8exwS9WQOTxT-qy1QccMf5lGOQjOR8BOQmzOgHQtPDzWsBcg/s400/albert_tessier.jpg" height="296" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le poète Nérée Beauchemin, causant avec Mgr Albert Tessier, P.D.</td></tr>
</tbody></table>
Sommes-nous autres choses que des fonctions dans nos sociétés, malgré leur évolution culturelle? La question de l’Être a sans doute été la plus grande problématique philosophique débattue au XXe siècle, et elle semble avoir laissée peu de traces dans l’organisation de la société. Les espaces de liberté ont permis aux filles de Mary de ne pas aimer cuisiner ou de faire de la cuisine comme passe-temps et non comme hameçon à maris. De plus, les hommes se sont découverts autant d’intérêts, voire de passions pour la cuisine. La séparation des sexes n’entraînant plus la ségrégation des professions, on a considéré ce mouvement d’émancipation comme une véritable transformation de l’Être au cours des <i>Sixties</i>. Mais le fait est que la vie professionnelle des hommes et des femmes les ont rejeté du confort vers l’utilitarisme des relations domestiques. Si le divorce, vécu autrement que comme une tragédie au sein de la famille, était quasi impensable du temps des Martin, aujourd’hui peu de couples, même mariés par les très saintes onctions du prélat catholique, s’imaginent qu’ils finiront leurs jours ensemble comme au premier jour de leur rencontre. Le romantisme ne fait pas le poids devant les performances des <i>climax </i>sexuels.<br />
<br />
Voilà peut-être l’une des raisons qui fait de l'art de cuisiner un dérivatif à la vie professionnelle. Nous ne faisons plus la cuisine pour notre plaisir ni pour la fonction domestique du temps des Martin, mais comme un «<i>shock absorber</i>» - tout comme l’orgasme -, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqSS-m1lgHyNNcbzgk5593rivxIVCMCTGcummsytGLeFo-XLoYpT-P43VoatrkjEvAtqqEZB3kkCxH30CkcM8MNFJIb8EPrMeyi_7yA1wLrftDtiTW6tB0RBCVn03-3ScGfLPx9EfIUNI/s1600/boulimie.jpeg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqSS-m1lgHyNNcbzgk5593rivxIVCMCTGcummsytGLeFo-XLoYpT-P43VoatrkjEvAtqqEZB3kkCxH30CkcM8MNFJIb8EPrMeyi_7yA1wLrftDtiTW6tB0RBCVn03-3ScGfLPx9EfIUNI/s320/boulimie.jpeg" height="250" width="320" /></a>à travers lequel nous passons nos frustrations professionnelles et nos échecs amoureux. Ne dit-on pas que l’obésité chez les femmes est un produit de la frustration sexuelle? Vraie ou pas, légende urbaine ou sondage Gallup à l’appui, cette affirmation renvoie à une vision de l’éclatement domestique. Nous l’avons dit, l’obésité, l’anorexie, la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqSS-m1lgHyNNcbzgk5593rivxIVCMCTGcummsytGLeFo-XLoYpT-P43VoatrkjEvAtqqEZB3kkCxH30CkcM8MNFJIb8EPrMeyi_7yA1wLrftDtiTW6tB0RBCVn03-3ScGfLPx9EfIUNI/s104/boulimie.jpeg">boulimie</a>, les maladies telles le diabète ou les cancers du système digestif, sont des <i>maladies de civilisation</i>. Certes, la sédentarité a sa part de responsabilité, mais cela ne fait que confirmer l’affirmation précédente. Il y a cela, bien entendue, mais il y a aussi la façon de vivre cette relation à la nourriture qui pose aussi problème.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidtooAK1u0Neof5pC46W-PmAr1nEgQTnPTZ4argEpGUXteWOpXysh_-VcYbZVTQ2zVMZlzBOpEhPzNU2NxeA3gRMoTkZN3WopQgdgbBB9IiD0uRnMwTrHbsGyu2PecC2_Tfku_S8du8x8/s1600/measles.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidtooAK1u0Neof5pC46W-PmAr1nEgQTnPTZ4argEpGUXteWOpXysh_-VcYbZVTQ2zVMZlzBOpEhPzNU2NxeA3gRMoTkZN3WopQgdgbBB9IiD0uRnMwTrHbsGyu2PecC2_Tfku_S8du8x8/s200/measles.jpg" height="200" width="175" /></a></div>
Du temps de la famille Martin, les problèmes qui créaient angoisses et peurs relevaient de la politique, des épidémies encore (pour les maladies d’enfants; on venait à peine de trouver le traitement qui venait à bout de la tuberculose, les maladies bactériologiques). On multipliait les vaccins contre la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidtooAK1u0Neof5pC46W-PmAr1nEgQTnPTZ4argEpGUXteWOpXysh_-VcYbZVTQ2zVMZlzBOpEhPzNU2NxeA3gRMoTkZN3WopQgdgbBB9IiD0uRnMwTrHbsGyu2PecC2_Tfku_S8du8x8/s104/measles.jpg">rougeole</a>, la rubéole, la scarlatine, les fièvres de toutes sortes qui avaient tant décimé le monde au cours des siècles. On envisageait pas encore l’avenir où les maladies cardiaques et les phénomènes d’obésité et d’anorexie seraient parmi les premières causes de décès. Il y avait jusqu’à la cigarette et aux produits du tabac qui étaient vantés par les médecins eux-mêmes comme sans conséquence sur la vie humaine! Il y a bien eu l’épisode du SIDA dans les années quatre-vingts qui a créé un retour du fantasme de l’épidémie mortelle à grande échelle, faisant passer le sexe avant la nourriture comme fonction organique sous surveillance. Mais plus le temps de l’épidémie (qui se poursuit toujours) semblait s’éloigner dans le temps, plus la hantise des maladies consécutives à la mauvaise alimentation prenaient une ampleur obsessionnelle qui doublait la santé alimentaire d’une névrose qui peut conduire à une «paranoïa alimentaire»! Les soviétiques et les martiens sont remplacés par le gras-trans et le sucre raffiné. Un diététicien <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgr1Gh9CMOMKCXlTzd9Gd5D2lxd8MHqEFHl0QK9fo92ukx-N1XDsfDOA4AwhLpMfB7V-Kb5lOAHJzP_PsJTG2PaMxDI0V_oJ2Fj6aOfB01J5ESopR5R4X2st4DoKlZ3IlKDeFDTWFUUre0/s104/103500-mitsou-anime-kampai-votre-sante.jpg"><i>kampaï</i></a> de la télé d’État canadienne prendrait probablement tout ce qui gravite autour de la cuisine de madame Martin pour nous dire que l’un équivaudrait au couteau de Norman Bates, un autre à la <i>chainsaw</i> du massacreur à la scie, un autre à des balles dum-dum dans les intestins. De la flore intestinale, nous passons progressivement à la faune intestinale et à l'obsession végétalienne. Finalement, le gastronome le plus à la pointe de la cuisine moderne ne serait-il pas le docteur Hannibal Lecter? Quoi que son plus grand crime c'est d'être un carnivore d'un genre tout à fait spécial.<br />
<br />
De la cuisine de madame Martin à celle du docteur Lecter, il y a tout un chemin! La cervelle de veau pour le cervelle d’humain, comme dans le film <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjWhzdNGMHohA3YJmLjLO6U8lJOp49LazoAz9tqH0M2cJk3lmP8VV1qitgkS8yxpvSn7F9NqKRePUNxPFst4pXhHg4j_stkiMQA1L_qGvVeg4eLCpjMGXVrTr1fCkgQQQIW7q8ZOx1tFx0/h120/Hannibal-hannibal-lector-5099851-1015-550.jpg"><i>Hannibal</i></a>? Les rognons d’un mauvais musicien comme dans <i>Red Dragoon</i>? La figure d’une infirmière soignante comme dans<i> Silence of the lambs</i>? Les tripes d’un policier italien <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjWhzdNGMHohA3YJmLjLO6U8lJOp49LazoAz9tqH0M2cJk3lmP8VV1qitgkS8yxpvSn7F9NqKRePUNxPFst4pXhHg4j_stkiMQA1L_qGvVeg4eLCpjMGXVrTr1fCkgQQQIW7q8ZOx1tFx0/s1600/Hannibal-hannibal-lector-5099851-1015-550.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjWhzdNGMHohA3YJmLjLO6U8lJOp49LazoAz9tqH0M2cJk3lmP8VV1qitgkS8yxpvSn7F9NqKRePUNxPFst4pXhHg4j_stkiMQA1L_qGvVeg4eLCpjMGXVrTr1fCkgQQQIW7q8ZOx1tFx0/s1600/Hannibal-hannibal-lector-5099851-1015-550.jpg" height="173" width="320" /></a>corrompu, voire sa propre main finalement (dans <i>Hannibal</i>, encore); le cannibalisme est-il la dernière frontière de la cuisine occidentale? Les petits plats amoureusement préparés qu’il apporte dans sa fuite en avion et qu’il conseille à un petit passager assis à côté de lui de goûter, comme étant de bonne manière de s’ouvrir à l’inconnu, même en gastronomie, est une parodie de notre exotisme alimentaire qui essaie de combler un manque dans le goût qui se fait sentir depuis que les mamans Martin ne sont plus de ce monde et qu’elles ont laissé la place à des professionnels salariés de la cuisine, vedettes de télévision au même titre que les sportifs et les comédiens, tous diététistes déguisés en animateurs de foules.<br />
<br /><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgr1Gh9CMOMKCXlTzd9Gd5D2lxd8MHqEFHl0QK9fo92ukx-N1XDsfDOA4AwhLpMfB7V-Kb5lOAHJzP_PsJTG2PaMxDI0V_oJ2Fj6aOfB01J5ESopR5R4X2st4DoKlZ3IlKDeFDTWFUUre0/s1600/103500-mitsou-anime-kampai-votre-sante.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgr1Gh9CMOMKCXlTzd9Gd5D2lxd8MHqEFHl0QK9fo92ukx-N1XDsfDOA4AwhLpMfB7V-Kb5lOAHJzP_PsJTG2PaMxDI0V_oJ2Fj6aOfB01J5ESopR5R4X2st4DoKlZ3IlKDeFDTWFUUre0/s200/103500-mitsou-anime-kampai-votre-sante.jpg" height="133" width="200" /></a></div>
La chair exquise! Quelles recettes le bon docteur Lecter ne nous inventerait-il pas avec les rognons sautés de Ricardo, la cervelle de Stéfano ou les <i>spare-ribs</i> du docteur Béliveau? Et je laisse Mitsou pour le dessert… Mmm! <i>Bons à s’en lécher les doigts!</i><br />
<br />
<div style="text-align: right;">
Montréal<br />
3 juillet 2011</div>
</div>
</div>
Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-5953483116519324922011-07-02T22:32:00.000-07:002011-07-03T09:43:55.743-07:00The Family in the country<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgJ2GqEip3NtYmaUFpj3LjnPmZJuuUtZgEx_i3QwB6gSH_rUZphcRWuFejZS1f42kwDOXINTpZu2vjIEGrCYoyW1L_0IvIRXn4nf_geW00gnSw3d2wpOij6dMqoEbKGbIQwR8o6bnp5lVQ/s1600/viajes_poe_cottage_landor.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><br />
</a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiTTjD5wAgS4f60KeHXjY-4IlcX_VIivXdNikVKX1t6YGvyjdKDkUQ5NR45DvZ3IU_rraoKC75-owBJogPdODjfV7azHH04PHGFhjN8fDe3io1T2MqBYxpRyE_mEFcos0Fv92k0UZ-NJ84/s1600/134789750_7cd8e8e9c0.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a><img border="0" height="288" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiN7TUdREcFRvA955TBu68r3Xs8_o7T3uwmKKIV9-J99vLZhLRx1g0l53suFpgSb8V5itdggYFelyv1Jna6NGk8cPI4Gas-WibOQQfBvVWRtqnkFMkmf7w1l3xLvT-IEccOpbM5_zelFSQ/s400/12-+at+the+garden.jpg" width="400" /> </div><div style="text-align: justify;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><b>THE FAMILY IN THE COUNTRY</b></div><br />
Après onze tableaux, nous ne verrons pas encore l’aspect extérieur de la maison à l’architecture eschérienne des Martin, mais pour le dernier tableau du premier cycle d’études, nous aurons l’occasion d’admirer le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiN7TUdREcFRvA955TBu68r3Xs8_o7T3uwmKKIV9-J99vLZhLRx1g0l53suFpgSb8V5itdggYFelyv1Jna6NGk8cPI4Gas-WibOQQfBvVWRtqnkFMkmf7w1l3xLvT-IEccOpbM5_zelFSQ/s104/12-+at+the+garden.jpg">cottage de campagne</a> des Martin. Le cottage<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgJ2GqEip3NtYmaUFpj3LjnPmZJuuUtZgEx_i3QwB6gSH_rUZphcRWuFejZS1f42kwDOXINTpZu2vjIEGrCYoyW1L_0IvIRXn4nf_geW00gnSw3d2wpOij6dMqoEbKGbIQwR8o6bnp5lVQ/s1600/viajes_poe_cottage_landor.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgJ2GqEip3NtYmaUFpj3LjnPmZJuuUtZgEx_i3QwB6gSH_rUZphcRWuFejZS1f42kwDOXINTpZu2vjIEGrCYoyW1L_0IvIRXn4nf_geW00gnSw3d2wpOij6dMqoEbKGbIQwR8o6bnp5lVQ/s320/viajes_poe_cottage_landor.jpg" width="233" /></a> Martin n’est certes pas le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgJ2GqEip3NtYmaUFpj3LjnPmZJuuUtZgEx_i3QwB6gSH_rUZphcRWuFejZS1f42kwDOXINTpZu2vjIEGrCYoyW1L_0IvIRXn4nf_geW00gnSw3d2wpOij6dMqoEbKGbIQwR8o6bnp5lVQ/s104/viajes_poe_cottage_landor.jpg"><i>cottage Landor</i></a>, mais plutôt une charmante villa de deux étages avec solarium près d’un lac. Décidément, la famille Martin quitte de plus en plus son caractère de petit-bourgeois pour monter dans l’échelle de la haute bourgeoisie. Aussi, ce n’est pas sans fierté, encore, que nous pouvons voir les membres de la famille s’activer, chacun, à embellir l’environnement du cottage. Monsieur Martin pousse une brouette remplie de terre, son épouse, un large chapeau de paille sur la tête, entretient le jardin et la culture de belles tulipes, John passe la tondeuse et Mary arrose le jardin tandis que Rover chasse Pussy jusqu'à grimper à un arbre. Une cabane à oiseaux, fixée à l’arbre, reproduit le cottage Martin, avec sa toiture rouge. Dans le monde de monsieur Martin, les oiseaux ont également part au festin, mais à leur dimension. À l’arrière-plan la voiture bleue de monsieur Martin montre qu’ils n’ont pas besoin d’attendre l’autobus pour s’y rendre.<br />
<br />
Cette leçon estivale n’en est pas une; elle n’est que la suite des onze autres tableaux, avec le même contenu lénifiant et la même vision du travail comme police morale et physique. La vie est belle parce que chacun est occupé à son affaire, tout comme à la leçon précédente du <i>living room</i>. Le tracé de pierres de couleurs différentes qui décrit un long chemin serpentant montre que le cottage Martin est une propriété privée qui récompense le dur labeur qu’y a mis monsieur Martin tout au long de sa carrière professionnelle. Il représente, de même, la récompense de son épouse, qui a toujours veillé à bien le seconder, surtout dans l’éducation des enfants qu’elle lui a donnés. Enfin, elle est une promesse pour les enfants Martin de continuer sur leur lancé d’obéissance et de travail ardu. Il ne s’agit ici ni d’un moment d’évasion, ni d’activités ludiques.<br />
<br />
Évidemment, la possibilité de posséder un cottage à l’extérieur de la ville était un privilège assez rare dans mon enfance. Comme je l’ai dit plus haut, les Martin s’éloignent de plus en plus vers le haut de l’échelle sociale. Comme pour le deuxième cycle que nous verrons au vingt-quatrième tableau, la leçon morale du tableau 12 est celle de la réussite sociale, de la fierté de la richesse qui permet d’accéder au confort intérieur: confort domestique et confort moral.<br />
<br />
Après tout, qu’y a-t-il de mal à se sentir confortable? Entre le chemin en serpentin et l’échelle appuyée à l’arbre, nous gravitons dans une application du jeu de serpents et échelles à la vie des habitants de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiyXb8WubxUSZHAQYYa9dAa226AiDCXI9gKBZgDf45bVakMN1a0NjYvKdvxkCtJnBZNiSsQIC6bYrL8jQAfIQjhZFPkCuS5vxbpXcKUdwaC2-kP7w7ZJtQuH-Mv-dcIDwy0ItBYPRCGKTc/s1600/15-+at+the+farm.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="231" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiyXb8WubxUSZHAQYYa9dAa226AiDCXI9gKBZgDf45bVakMN1a0NjYvKdvxkCtJnBZNiSsQIC6bYrL8jQAfIQjhZFPkCuS5vxbpXcKUdwaC2-kP7w7ZJtQuH-Mv-dcIDwy0ItBYPRCGKTc/s320/15-+at+the+farm.jpg" width="320" /></a>Peyton Place. La vie à la campagne est décidément le complément et non plus l’antithèse de la vie à la ville. Certes, il y a encore des fermiers et nous visiterons à un certain moment la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiyXb8WubxUSZHAQYYa9dAa226AiDCXI9gKBZgDf45bVakMN1a0NjYvKdvxkCtJnBZNiSsQIC6bYrL8jQAfIQjhZFPkCuS5vxbpXcKUdwaC2-kP7w7ZJtQuH-Mv-dcIDwy0ItBYPRCGKTc/s104/15-+at+the+farm.jpg">ferme de l’oncle George</a>, mais le cottage Martin n’a rien d’une ferme. Le jardinet ne nourrirait pas la famille pour une année, les tulipes sont là pour enjoliver l’intérieur, la terre portée par le père est pour aménager son terrain et la tondeuse passée par John pour conserver l’herbe frais rasée afin de ne pas être pris pour des propriétaires négligents. Le cottage Martin est à mi-chemin entre la ferme de l’oncle George et la résidence principale, en ville. Ce n’est certes pas le «retour à la terre» des années soixante-dix, mais ce n’est plus la ville sans possibilité de fuites.<br />
<br />
Le cottage Martin nous laisse seulement deviner que la vie des Martin peut être double, sinon trouble. Deux résidences, c’est deux possibilités de ne pas être dans l’une des deux maisons pour se retrouver dans l’autre. Tous les auteurs de <i>soap</i> télévisé de l’après-midi, ceux essentiellement regardés par les téléspectatrices, nous racontent d’inlassables feuilletons vaudevillesques avec des amants et des maîtresses rencontrés dans des cottages de campagne pendant que l’autre époux attend dans la maison principale. C’est le lieu où s’enfouissent, dans les secrets de l’adultère, les histoires les plus sordides et les tromperies les moins glorieuses. La résidence secondaire a pris la place des chambres d’hôtels de passe.<br />
<br />
Pourtant, le cottage Martin n’a rien d’une garçonnière où d’une cache pour madame Martin. Tout y respire l’ordre, la propreté, l’élégance un tantinet légère, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEizw_0c3mMmQp3nbOEkcc-IkQ88btJRSJL1RGUZg_SMC42viigLQcdHyxKatdpvosrGZGBSd9V2e8Dk5AQyOIIt4GWMAjrd3XyUHBUfgeAp9GJVH_ZNNjK-n7tLAyirIh_z8AKyBwXrMKc/s1600/Abraham_Lincoln_Birthplace_abli-ImageF.00001.jpeg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEizw_0c3mMmQp3nbOEkcc-IkQ88btJRSJL1RGUZg_SMC42viigLQcdHyxKatdpvosrGZGBSd9V2e8Dk5AQyOIIt4GWMAjrd3XyUHBUfgeAp9GJVH_ZNNjK-n7tLAyirIh_z8AKyBwXrMKc/s320/Abraham_Lincoln_Birthplace_abli-ImageF.00001.jpeg" width="320" /></a>mais rien de sombre ni d’équivoque. Les Martin renouent avec leurs origines coloniales, agriculteurs, planteurs, cultivateurs. Certes, leurs activités ne sont qu’une pâle singerie de ce que fut la vraie vie coloniale: la déforestation, l’essouchement, l’assèchement des eaux marécageuses, la lutte contre les moustiques, les animaux sauvages, l’apprivoisement des cultures, enfin la<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEizw_0c3mMmQp3nbOEkcc-IkQ88btJRSJL1RGUZg_SMC42viigLQcdHyxKatdpvosrGZGBSd9V2e8Dk5AQyOIIt4GWMAjrd3XyUHBUfgeAp9GJVH_ZNNjK-n7tLAyirIh_z8AKyBwXrMKc/s104/Abraham_Lincoln_Birthplace_abli-ImageF.00001.jpeg"> <i>log cabin</i></a>, la cabane en bois ronds symbolisée par la maison de naissance d’Abraham Lincoln. C’est la vie sauvage totalement urbanisée, malgré l’absence des symboles urbains: gratte-ciel, commerces, offices publiques, rue passante, feux de circulation, etc.<br />
<br />
Il suffit pourtant de bien regarder le tableau pour s’apercevoir que tout provient de la ville: les semis dans le jardin ont été achetés chez un horticulteur, de même que les outils qu’emploie madame Martin et la brouette de monsieur Martin chez un quincailler. Sa terre même a peut-être été achetée dans un <i>Ro-Na</i> ou un <i>Home-Depot</i> du temps. La tondeuse à gazon est de son époque mais sûrement pas construite par John. Le boyau d’arrosage conduit l’eau sur une longue distance. Le chalet, s’il est vieux, a été rénové et adapté pour perpétuer, à la campagne, le mode de vie auquel les Martin sont habitués en ville.<br />
<br />
Avouons-le, ce n’est là qu’une mauvaise pièce de théâtre que les Martin se jouent à eux-mêmes. Ils <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6FQA3r0yQWNd1lAhBqicyPR5yjvEV7RQiBc-X6OPMb4CA92Jw1TiStoeTD90r0IDRc1t5S-00np6kYzow-xF4ErBLQfDEFtoHOqzL1nqAYPRVJAX2bQibA5AjbmQ9x4al8KDAxOltHCs/s1600/greenacres1.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="239" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6FQA3r0yQWNd1lAhBqicyPR5yjvEV7RQiBc-X6OPMb4CA92Jw1TiStoeTD90r0IDRc1t5S-00np6kYzow-xF4ErBLQfDEFtoHOqzL1nqAYPRVJAX2bQibA5AjbmQ9x4al8KDAxOltHCs/s320/greenacres1.jpg" width="320" /></a>jouent aux <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6FQA3r0yQWNd1lAhBqicyPR5yjvEV7RQiBc-X6OPMb4CA92Jw1TiStoeTD90r0IDRc1t5S-00np6kYzow-xF4ErBLQfDEFtoHOqzL1nqAYPRVJAX2bQibA5AjbmQ9x4al8KDAxOltHCs/s104/greenacres1.jpg"><i>gentlemen farmers</i></a> comme ils joueraient à la grande cuisine en suivant une émission de recettes à la télé. Ils perpétuent un idéal de la vie rurale sur laquelle fut construite l’Amérique du Nord depuis le XVIIe siècle. C’est encore-là un jeu que peuvent se payer seulement ceux qui en ont les moyens tant le coût du terrain, la construction et l’entretient du cottage, et l’essence et le moyen de transport nécessaires pour s’y rendre nécessitent un bon revenu familial. Comme monsieur Martin est seul à travailler, c’est-à-dire à être salarié pour toute la famille, il n’est sûrement ni ouvrier ni employé.<br />
<br />
L’allégorie de la cabane à oiseaux fait également partie de la morale sociale de la réussite, mais elle évoque aussi la parabole des Évangiles. Dieu <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiyBvASWrPDSQeluDHVBjSsd5s5COEDjZfX4m5V4Wm_7q4cX9A8W536I6ZQRzHJhtr-qsE8wnyKXll130O99dtAewRiG5qmstmPWiKxDBeuyTUXKpPFLcXNSWWb0n-NWaOFkowV2IjrvFs/s1600/24143550-0-1307884744.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiyBvASWrPDSQeluDHVBjSsd5s5COEDjZfX4m5V4Wm_7q4cX9A8W536I6ZQRzHJhtr-qsE8wnyKXll130O99dtAewRiG5qmstmPWiKxDBeuyTUXKpPFLcXNSWWb0n-NWaOFkowV2IjrvFs/s320/24143550-0-1307884744.jpg" width="320" /></a>nourrit les oiseaux comme il assure la pureté du blanc des lys. Au cottage Martin, c’est monsieur Martin qui joue ce rôle de Dieu, et pour la société, sa promotion sociale permet à des employés ou des ouvriers d’avoir du beurre à étendre sur leur pain. Là réside la leçon religio-sociale de la culture capitaliste nord-américaine. L’abondance d’après-guerre, surtout aux États-Unis et peut-être un peu moins au Canada, laissait entendre que ces pays étaient les réussites des messages divins et libéraux, les deux liés par la réussite sociale. Avec les années de crises qui suivirent 1973, beaucoup de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiyBvASWrPDSQeluDHVBjSsd5s5COEDjZfX4m5V4Wm_7q4cX9A8W536I6ZQRzHJhtr-qsE8wnyKXll130O99dtAewRiG5qmstmPWiKxDBeuyTUXKpPFLcXNSWWb0n-NWaOFkowV2IjrvFs/s104/24143550-0-1307884744.jpg">cottages</a> Martin furent hypothéqués ou même vendus afin de permettre de sauver la résidence principale. La récente crise de 2008 a entraîné de semblables transactions de chalets et de cottages à la campagne ou sur le bord d’un lac, faisant perdre à leurs propriétaires le sel de leur existence.<br />
<br />
Nous sommes loin de nous rendre compte de la distance historique qui sépare le monde actuel de celui où les Martin pouvaient se payer un cottage à la campagne. Les valeurs libérales et capitalistes ont beau être les mêmes, mais la sérénité à laquelle elles conduisaient en ces années de menaces nucléaires et d’«équilibre de la terreur» contraste avec le cynisme et les désillusions de notre actuel confort moral et économique. Le pouvoir d’achat, en respectant les proportions d’époque, n’a pas diminué. La pauvreté s’étale dans les grands centres urbains comme dans les <i>Fifties</i>, d’où la raison des Martin pour venir s’établir dans un bled de banlieue du genre <i>Peyton Place</i>. Aujourd’hui, cette fuite dans les résidences secondaires semble ne plus être possible que pour les familles les plus riches. L’adultère est devenu banal et les ménage à trois ou à quatre, chose quasi courante. Les noms à pentures se multiplient d’enfants issus de mariages successifs des deux parents. Les adoptions de populations exogènes augmentent la variété physique des demi-frères et des demi-sœurs. Dans les <i>Fifties</i>, le racisme élémentaire ou la ségrégation religieuse au Québec rendaient ces situations tout à fait inimaginables. Voilà pourquoi, malgré un même profil idéologique, les mentalités, les mœurs et les habitus ont complètement changé et, par le fait même, la relativité des valeurs.<br />
<br />
Ce qui nous est devenu tout à fait banal faisait déjà la hantise de la morale des <i>Fifties</i>. Quand, dans les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjOOOEEEeIlazslkpv5_h7bsRSjG1pUnPsTJ9_LXev3Xuhry5ldNbBEIlqYfZNxkYSrVMm3s2WYJO6094NNgEU0eYG8p5mbQdJK7uoVkJIOxn2FgOd6XGHVbvkSsNe3um_uenJ47b5GKrc/s1600/guess_katharine_hep.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="231" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjOOOEEEeIlazslkpv5_h7bsRSjG1pUnPsTJ9_LXev3Xuhry5ldNbBEIlqYfZNxkYSrVMm3s2WYJO6094NNgEU0eYG8p5mbQdJK7uoVkJIOxn2FgOd6XGHVbvkSsNe3um_uenJ47b5GKrc/s320/guess_katharine_hep.jpg" width="320" /></a>années 60, paraîtra aux États-Unis le célèbre film: <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjOOOEEEeIlazslkpv5_h7bsRSjG1pUnPsTJ9_LXev3Xuhry5ldNbBEIlqYfZNxkYSrVMm3s2WYJO6094NNgEU0eYG8p5mbQdJK7uoVkJIOxn2FgOd6XGHVbvkSsNe3um_uenJ47b5GKrc/s104/guess_katharine_hep.jpg"><i>Devine qui vient dîner?</i></a> (<i>Guess Who’s coming to diner</i>, de Stanley Kramer, 1967), les Américains y trouveront, à travers les personnages des parents, l’expression de leur propre angoisse de voir, un jour, leur honnête petite Mary à la peau blanche s’enticher d’un John à la peau noire (ou à la religion épiscopalienne). Dans le contexte de la lutte des Afro-Américains pour l’égalité des droits civiques, ce film montrait que même les gens les plus simples et les plus honnêtes, même ceux qui se croyaient pas du tout racistes, confrontés à la réalité du problème, apparaissaient moins tolérants ou moins égalitaires dans leur application des droits de l’homme. Voilà pourquoi il n’apparaît jamais de non-blancs dans les tableaux de <b>conversation anglaise</b>. Tout y est ponctuellement «blanc», anglo-saxon et …catholique.<br />
<br />
Il en est de même du problème des différences sociales. Le monde y est exclusivement petit-bourgeois, et même grand-bourgeois, comme dans le tableau 12. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6TQ6YXSp79ki-4VhkbT2advu4l5sJyYtG2erRY_Zk95xKSXiUDWDjgERJBK1tmCWwBbuBZKIFXCTSmjYjpfHyxvKXWGleTTpdkfd4lj6qIEFxoSE1GtIuixr76TV0maa1kx-NtI3KGYE/s1600/banque80.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="228" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6TQ6YXSp79ki-4VhkbT2advu4l5sJyYtG2erRY_Zk95xKSXiUDWDjgERJBK1tmCWwBbuBZKIFXCTSmjYjpfHyxvKXWGleTTpdkfd4lj6qIEFxoSE1GtIuixr76TV0maa1kx-NtI3KGYE/s320/banque80.jpg" width="320" /></a>On n’y retrouve même pas un nègre de jardin! Les travailleurs en salopettes sont remplacés par des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6TQ6YXSp79ki-4VhkbT2advu4l5sJyYtG2erRY_Zk95xKSXiUDWDjgERJBK1tmCWwBbuBZKIFXCTSmjYjpfHyxvKXWGleTTpdkfd4lj6qIEFxoSE1GtIuixr76TV0maa1kx-NtI3KGYE/s104/banque80.jpg">employés col-blancs</a>. Ceux dont C. Wright Mills, à l’époque, essayait de dresser le portrait à travers ses enquêtes sociologiques. Ce monde des <i>Fifties</i> était-il raciste ou racial? Il était raciste parce que racial. Il ne voyait l’humanité pleine et entière que dans sa version à la peau blanche et au sexe masculin dominant. Tous les autres, c’est-à-dire tous ceux qui appartenaient à des ethnies non-blanches apparaissaient comme des humanités pas tout à fait complète. Même si cette attitude n’était teintée d’aucune haine raciale, la différenciation jouait son jeu d’isolement de la race blanche sur elle-même, comme la supérieure de toutes les autres, à l’exemple de Adam dominant toutes les autres races animales.<br />
<br />
Se sentir conforter et confortable, c’était précisément préjuger de ces différences et ces distinctions, sans même tenir des attitudes haineuses. La fraternité n’était qu’un principe abstrait expérimenté à travers les hommes de même couleur. Si la Seconde Guerre mondiale rapprocha bien des hommes blancs des hommes de couleurs, elle ne le fit pas assez cependant pour rendre possible l’égalité des droits civiques. De même, entre les généraux et les officiers et simples soldats, les distances hiérarchiques renouvelaient les frontières sociales de la vie civile.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgcWATQlAV8aMWYf5rGI0RdbnLJD9fMyWiKFcZyRkwZiJsG8qvrlsi3lPGmuM3KQV2EF-K7NvnIm3pVvvecLhd41sKS7TXuwYwwkYUaCQA3s1EoQ5UntUTu-PorZsRwFzKw2OnfufW4CrQ/s1600/African-American_History+2jpg.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgcWATQlAV8aMWYf5rGI0RdbnLJD9fMyWiKFcZyRkwZiJsG8qvrlsi3lPGmuM3KQV2EF-K7NvnIm3pVvvecLhd41sKS7TXuwYwwkYUaCQA3s1EoQ5UntUTu-PorZsRwFzKw2OnfufW4CrQ/s320/African-American_History+2jpg.jpg" width="252" /></a>Pourtant, ce mode existentiel que pratiquait la famille Martin, étant présenté comme le modèle idéal du bonheur et du confort, fut reproduit par les «races» qui parvinrent à s’imposer à l’intérieur des puissances occidentales et en particulier en Amérique du Nord, peu portée jusque-là sur le métissage officiel. Les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgcWATQlAV8aMWYf5rGI0RdbnLJD9fMyWiKFcZyRkwZiJsG8qvrlsi3lPGmuM3KQV2EF-K7NvnIm3pVvvecLhd41sKS7TXuwYwwkYUaCQA3s1EoQ5UntUTu-PorZsRwFzKw2OnfufW4CrQ/s104/African-American_History+2jpg.jpg">Afro-Américains</a> comme les Haïtiens immigrés au Québec voulurent, eux aussi, leur cottage Martin. Ils adoptèrent les singeries du passé colonial dans lequel ils n’étaient pas ou seulement dans le rôle d’esclave ou de domestique. L’émigration en Amérique du Nord signifiait l’accès immédiat à son outil mythique de la liberté: l’automobile; l’isolement dans la propriété foncière, surtout en campagne, près d’un lac, avec jardinet. Ils voulurent, eux aussi, des garçons qui tondraient la pelouse et des filles qui arroseraient le jardin. Ils allèrent au magasin général acheter des semis et à la quincaillerie des outils pour travailler la terre qui dépendait moins de l’occupation que du contrat civil de propriété.<br />
<br />
Cela peut paraître une singerie sans grande conséquence, pourtant c’est là que repose la pierre angulaire de la mondialisation actuelle. C’est dans la fascination que l’<i>American Way of Life</i> exerce sur les peuples des autres cultures et des autres civilisations que se répand le capitalisme, la démocratie, la culture médiatique de masse: ce qui constitue l’ossature du monde contemporain. Cette singerie, apportée par les techniques les plus sophistiquées, se révèle plus forte que les vieux systèmes religieux ou le droit le plus antique et le plus rudimentaire.<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvyhoTLQRDsLVNEFn0jfVmayKm6ixnQxV378ciWleRNULEEXhctYyQSh6iacGTwAuFDFPPbodvr_UQWaYvh_5yA1TPK0yE2vnhO_NStjj4V9cNj0vsYbGGGNLYZC1jMc_Duq2XN3lqVVM/s1600/un-manifestant-oppose-au-g20-fait-face-a-un-cordon-policier-a-queen-s-park-le-samedi-26-juin-2010.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvyhoTLQRDsLVNEFn0jfVmayKm6ixnQxV378ciWleRNULEEXhctYyQSh6iacGTwAuFDFPPbodvr_UQWaYvh_5yA1TPK0yE2vnhO_NStjj4V9cNj0vsYbGGGNLYZC1jMc_Duq2XN3lqVVM/s320/un-manifestant-oppose-au-g20-fait-face-a-un-cordon-policier-a-queen-s-park-le-samedi-26-juin-2010.jpg" width="320" /></a> Les plus vieilles institutions (l’Église) n’y échappent pas non plus qui font des papes des vedettes de <i>hit-parade</i>. Nous voici bien obligés d’affirmer que la vie modèle de la famille Martin est un accélérateur de l’impérialisme américain dans ses valeurs les plus étroites et les moins cosmopolites mises au service de la grande <i>Völkerwanderung</i> inaugurée dans les dernières décennies du XXe siècle et du cosmopolitisme que représentent les grandes corporations financières (Le F.M.I., la Banque Mondiale, l’O.M.C.) et politiques (l’O.N.U. et ses branches affiliées, l’Union Européenne, l’A.L.É.N.A, etc.). Le renversement du négatif au positif n’a fait qu’accélérer l’expansion de ce qui avait de plus pernicieux dans le monde occidental, et particulièrement nord-américain. Les distinctions sociales et raciales, les intolérances religieuses ou idéologiques, les confrontations politiques à l’intérieur même des nations se répandent sur un mode moins spectaculaire que dans les <i>Fifties</i> et les <i>Sixties</i>, mais elles courent selon un mode <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvyhoTLQRDsLVNEFn0jfVmayKm6ixnQxV378ciWleRNULEEXhctYyQSh6iacGTwAuFDFPPbodvr_UQWaYvh_5yA1TPK0yE2vnhO_NStjj4V9cNj0vsYbGGGNLYZC1jMc_Duq2XN3lqVVM/s104/un-manifestant-oppose-au-g20-fait-face-a-un-cordon-policier-a-queen-s-park-le-samedi-26-juin-2010.jpg"><i>soft-fascism</i></a> ou de violence ordinaire.<br />
<br />
Autres temps, autres misères. Sans doute sommes-nous moins anxieux face à un éventuel conflit nucléaire qui prévalait dans les <i>Fifties</i>, mais les angoisses se sont multipliées, ce qui fait que la fuite dans un cottage au bord du lac ne nous rassure plus autant qu’en ces années cinquante. La fuite semble inutile. À se dépayser, le tourisme a remplacé la villa à la campagne. Le dépaysement sous haute <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjCZ00YPHxRvb6xFl1TMeNwhnX3kyCgOWOQaTSkEFchMkF1PeK7bcpX9xalF_4PQAmcrEduLqfDT6cvuPL1tawmQsn71ERC8MT7k45DDnSQpC1vax8__02pUbKmOZSuzIXsKrUp9MPuhH4/s1600/logo.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="90" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjCZ00YPHxRvb6xFl1TMeNwhnX3kyCgOWOQaTSkEFchMkF1PeK7bcpX9xalF_4PQAmcrEduLqfDT6cvuPL1tawmQsn71ERC8MT7k45DDnSQpC1vax8__02pUbKmOZSuzIXsKrUp9MPuhH4/s200/logo.jpg" width="200" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi6d-YZnNLGfaXL-3pGwMVJ9innYTTnFCJWAFrYRsbcQJ5DUFuogn7iDVk1sE9k5XBYTfBOI6vAjT2I1hZ595ppEAFgYpv2Bn5721S65px1CdY8fjrBlsc_dcdA84y_8K6Z4cg9VuzN5KM/s1600/venue_search_venue_finder_holiday_inn_dubai_al_barsha733494793.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="171" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi6d-YZnNLGfaXL-3pGwMVJ9innYTTnFCJWAFrYRsbcQJ5DUFuogn7iDVk1sE9k5XBYTfBOI6vAjT2I1hZ595ppEAFgYpv2Bn5721S65px1CdY8fjrBlsc_dcdA84y_8K6Z4cg9VuzN5KM/s200/venue_search_venue_finder_holiday_inn_dubai_al_barsha733494793.jpg" width="200" /></a>surveillance dans les chaînes d’hôtels un peu partout dans le monde fait que l’on retrouve le même décor, partout où que nous soyons sur terre, avec les mêmes services et la même protection, séparés par une grille et conduits dans des autobus blindés dans la jungle des zoos anthropologiques. Il est difficile de dire où se situe le progrès dans ces voyages en bulles, même si nous voyageons plus facilement que dans les années soixante-dix, par exemple, où les aéroports et les navires de croisière étaient la cibles de terroristes, pour la plupart affiliés à des cellules révolutionnaires européennes. L’accroissement des mesures de surveillance rendent tout déplacement aussi désagréable que sécuritaire. La flambée des prix des billets d’avion et des séjours à l’étranger, surtout dans des pays aux sociétés instables, réduit le cercle des privilégiés pouvant se permettre de parcourir le monde comme les anciens <i>globe-trotters</i> des années soixante.<br />
<br />
Les tulipes de madame Martin et la brouette de terre de monsieur Martin semblent bien insignifiantes <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5MOpzYsC_tpSVZqfkQI0jXeG76KOPg8YntG_xDQ6k0vgXR82bBaViN_6L5q9Fo2ahr_IkBID0fq89UtoOhk9d9JXVjkXYT9QH8oUQDXDoiWbf2um4T5Vnrm5hVC-Yh4oPLLWNPEJDnkE/s1600/842a.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5MOpzYsC_tpSVZqfkQI0jXeG76KOPg8YntG_xDQ6k0vgXR82bBaViN_6L5q9Fo2ahr_IkBID0fq89UtoOhk9d9JXVjkXYT9QH8oUQDXDoiWbf2um4T5Vnrm5hVC-Yh4oPLLWNPEJDnkE/s320/842a.jpg" width="320" /></a>comme passe-temps pour une famille soucieuse de maintenir l’ordre et la bonne conduite, même en période de vacance et à l’extérieur de la ville. Aujourd’hui, tout cela apparaît «affreusement» petit-bourgeois, borné, sans horizon, vieillot. Ce n’était pas le cas dans les <i>Fifties</i> et les <i>Sixties</i>. Il est vrai que le développement et l’extension des banlieues en dehors des centre-villes a ramené le cottage plus proche des limites urbaines, le tout en périphérie des centres d’achat. Le cottage, aujourd’hui, c’est la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5MOpzYsC_tpSVZqfkQI0jXeG76KOPg8YntG_xDQ6k0vgXR82bBaViN_6L5q9Fo2ahr_IkBID0fq89UtoOhk9d9JXVjkXYT9QH8oUQDXDoiWbf2um4T5Vnrm5hVC-Yh4oPLLWNPEJDnkE/s104/842a.jpg">maison</a> située à Laval ou à Brossard. En fait, la résidence principale et la résidence secondaire se sont fondues en une seule. Voilà pourquoi le fait d’avoir un cottage, un chalet au bord du lac, nous apparaît moins un signe de richesse ou de réussite sociale qu’un ajout à un pouvoir d’achat qui pourrait être dépensé autrement.<br />
<br />
Il en va de même pour les enfants. On préfère les voir travailler le plus tôt possible, et même si John et Mary n’ont que sept ans, aujourd’hui existe une gamme d’activités organisées par les centres de loisirs urbains ou les camps en forêt. La vie y est plus palpitante que tondre le gazon ou arroser le jardin. De plus, monsieur et madame Martin, plutôt que de se soucier d’une seconde propriété qui leur entraînerait les mêmes préoccupations que la résidence principale, peuvent confier leurs vacances à une agence de voyage qui leur fournira le forfait idéal selon les documentaires et les guides touristiques qu’ils auront visionnés à la télévision. Comme le chantait une compagnie de téléphone vendant ses longues distances à l’époque: «la distance n’a pas d’importance».<br />
<br />
Les vacances des <i>Fifties</i> sont donc loin de ressembler aux nôtres, parce que, précisément, le monde a changé en se mondialisant sur le mode accéléré. Bien que les refoulements soient devenus des frustrations, les purs idéaux du cynisme ulcéré, la vie familiale une nouvelle tribu dysfonctionnelle, la distance culturelle entre les deux époques nous montre <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiTTjD5wAgS4f60KeHXjY-4IlcX_VIivXdNikVKX1t6YGvyjdKDkUQ5NR45DvZ3IU_rraoKC75-owBJogPdODjfV7azHH04PHGFhjN8fDe3io1T2MqBYxpRyE_mEFcos0Fv92k0UZ-NJ84/s1600/134789750_7cd8e8e9c0.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiTTjD5wAgS4f60KeHXjY-4IlcX_VIivXdNikVKX1t6YGvyjdKDkUQ5NR45DvZ3IU_rraoKC75-owBJogPdODjfV7azHH04PHGFhjN8fDe3io1T2MqBYxpRyE_mEFcos0Fv92k0UZ-NJ84/s320/134789750_7cd8e8e9c0.jpg" width="320" /></a>quand même un chemin parcouru des plus importants de l’Histoire. Cette distance s’est accomplie, peut-être, sur le mode tortueux du chemin que suit monsieur Martin avec sa brouette, mais il s’est fait avec beaucoup moins d’éclats qu’au cours des deux siècles précédents où la moindre mutation était à l’origine d’une révolte voire même d’une révolution. Tout s’est fait en douce, non pas comme un «génocide», mais comme une singerie où tout le monde se déguiserait en ce qui s’imaginait être: arabe avec le couscous du lundi; créole avec le plat d’haricots rouges le mardi; chinois avec le riz frit au poulet du mercredi; italien avec la pizza du jeudi; madelinot avec la morue du vendredi; allemand avec les saucisses et la choucroute du samedi et juif avec le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiTTjD5wAgS4f60KeHXjY-4IlcX_VIivXdNikVKX1t6YGvyjdKDkUQ5NR45DvZ3IU_rraoKC75-owBJogPdODjfV7azHH04PHGFhjN8fDe3io1T2MqBYxpRyE_mEFcos0Fv92k0UZ-NJ84/s104/134789750_7cd8e8e9c0.jpg"><i>smoaked meet</i></a> du dimanche! Comme le chantait le <i>hit</i> des années soixante-dix: «Tout le monde est pur et beau»…<br />
<br />
<div style="text-align: right;">Montréal<br />
2 juillet 2011</div></div><br />
</div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-52547812812949614582011-06-30T22:57:00.000-07:002011-07-04T10:12:02.170-07:00The Family in the living room<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div style="text-align: justify;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg7R492SXMXTphr8mQ_4ew_g-BKfIgRXxhcW3Iyljd1E10I5ugma8N7rMss3QDnzKZ_RoSNTyF2xv0kZ27JXWYGULm77WrxOD3DgoFM6uxMWsghy3WBnA_uMqyKn3RV_Ul3phvh0jq6yF4/s1600/11-+at+living-room.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="287" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg7R492SXMXTphr8mQ_4ew_g-BKfIgRXxhcW3Iyljd1E10I5ugma8N7rMss3QDnzKZ_RoSNTyF2xv0kZ27JXWYGULm77WrxOD3DgoFM6uxMWsghy3WBnA_uMqyKn3RV_Ul3phvh0jq6yF4/s400/11-+at+living-room.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: center;"></div><div style="text-align: center;"><br />
<b>THE FAMILY IN THE LIVING-ROOM</b></div><br />
Nous voici confrontés, encore une fois, à deux images de la même scène, car la scène en <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg7R492SXMXTphr8mQ_4ew_g-BKfIgRXxhcW3Iyljd1E10I5ugma8N7rMss3QDnzKZ_RoSNTyF2xv0kZ27JXWYGULm77WrxOD3DgoFM6uxMWsghy3WBnA_uMqyKn3RV_Ul3phvh0jq6yF4/s104/11-+at+living-room.jpg">famille au salon</a> a été retouchée dix ans après sa version originale. Dans cette scène, la famille Martin se prélasse, le soir, dans le salon. Papa est dans le fond de la scène, bien enfoncé dans son fauteuil, la gazette sur les genoux. Maman fait du tricot en écoutant Mary promener ses petits doigts sur les notes du piano. Elle semble bien s’exécuter puisque la mère, mélomane, sourit. John, quant à lui, s’amuse avec Rover, qui a définitivement pris, depuis le tableau précédent, l’aspect d’un fox-terrier.<br />
<br />
Comme pour les autres scènes retouchées, la nouvelle version consiste à corriger, à styliser la scène originale. Ainsi, la nouvelle version fait ressortir les pois blancs sur la robe rouge de Mary tandis que la mère, qui avait une robe avec col ouvert sur un chandail dévoilant légèrement la gorge se trouve revêtue d’un ensemble plus serré et bouclé au cou. John et papa Martin sont identiques d'une version à l'autre. Côté <i>design</i> intérieur, l’aspect du salon est totalement modernisé. Alors que le salon original apparaît comme un résidu des années 40, celui de la version nouvelle ouvre directement sur le début des <i>Sixties</i>.<br />
<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5zIf4aXiRRvGmIpOGzk9T41esCDcljBHZp4bzcWUwGIM3SCsOlZk_7kCkcSIpcON51kahgH5tjJ2xgbdByolTKI8ULoIsLTnbg3PBxqYjaGTqV43Cr11LAbpiQaCXzqO9LMqGFoUYqT4/s1600/11a-+TV+set.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="283" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5zIf4aXiRRvGmIpOGzk9T41esCDcljBHZp4bzcWUwGIM3SCsOlZk_7kCkcSIpcON51kahgH5tjJ2xgbdByolTKI8ULoIsLTnbg3PBxqYjaGTqV43Cr11LAbpiQaCXzqO9LMqGFoUYqT4/s400/11a-+TV+set.jpg" width="400" /></a></div><br />
D’abord, les murs ont changé de couleurs. Le mur jaune, derrière le père, est devenu gris dans la nouvelle version. Le tableau au mur, par contre, reste une marine que, semble-t-il, l’on retrouve dans toutes les pièces de la maison. Le mur vert, derrière le piano, est devenu d’un rouge vin dans la version retouchée. Là aussi, crucifix et tableau restent les mêmes. Si la table près du père est la même, le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh5QbRnAGstdnfQX-9Wb_glT3kUEuLVrD3bV2ZTlZpw38aCpL0Bq1-5hsBS3d3aGRX6-hFf6etrC_sp6C6y_sVxUixZKQ1J-OWtH5HSiX7z62PN9BmnrrpEzBo5QupTa5PjXe4cW_TutGw/s1600/11a-+TV+set+-+copie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="189" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh5QbRnAGstdnfQX-9Wb_glT3kUEuLVrD3bV2ZTlZpw38aCpL0Bq1-5hsBS3d3aGRX6-hFf6etrC_sp6C6y_sVxUixZKQ1J-OWtH5HSiX7z62PN9BmnrrpEzBo5QupTa5PjXe4cW_TutGw/s200/11a-+TV+set+-+copie.jpg" width="200" /></a>fauteuil ancien avec frange rose est d’un modèle plus moderne et de couleur verte dans la nouvelle version. Le <i>design</i> de la lampe et de l’abat-jour est retouché, modernisé pour les <i>Sixties</i>. Le cadre de la fenêtre est également différent. Un ciel bleu pâle marqué par quelques étoiles et un croissant de lune orange sont remplacés par un ciel bleu foncé avec un croissant de lune jaune plus réaliste dans le tableau nouveau. Le fauteuil de la mère est, dans ce tableau, assorti avec celui du père qui est vert tandis que le sien est brun. Le tapis verdâtre a été remplacé par un tapis bleu foncé. Le bahut, au fond de la pièce. est remplacé par un tourne disque pour vinyle, mais une invention nouvelle trône maintenant dans le salon: le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh5QbRnAGstdnfQX-9Wb_glT3kUEuLVrD3bV2ZTlZpw38aCpL0Bq1-5hsBS3d3aGRX6-hFf6etrC_sp6C6y_sVxUixZKQ1J-OWtH5HSiX7z62PN9BmnrrpEzBo5QupTa5PjXe4cW_TutGw/s104/11a-+TV+set+-+copie.jpg">téléviseur</a>. Un téléviseur qui est éteint. Il ne fait pas encore véritablement partie de la famille.<br />
<br />
Cette scène nous présente donc la famille Martin en pleine relaxation. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjuK9jEsiVx3_4hDNNUPPrIl9jCQiMIsEXiHazPYnAJ_Xp1ppJd5reQtpCWhKuKTQSt1xSawbuOlDqXXE_RMDEAhFmacWQFBMHCpuFSDpw7AiFw8mKkros-bIdnXoAegr8_5C3WqHbGdj0/s1600/salon+Leclerc.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjuK9jEsiVx3_4hDNNUPPrIl9jCQiMIsEXiHazPYnAJ_Xp1ppJd5reQtpCWhKuKTQSt1xSawbuOlDqXXE_RMDEAhFmacWQFBMHCpuFSDpw7AiFw8mKkros-bIdnXoAegr8_5C3WqHbGdj0/s400/salon+Leclerc.jpg" width="255" /></a>Finis les devoirs et les leçons pour les enfants; ils doivent cependant montrer leurs talents, Mary en jouant du piano, John en se faisant obéir de Rover. Ce tableau n’est certes pas moins idéalisé que les précédents et les suivants, mais il initie les Québécois à une soirée typiquement nord-américaine. Par la pièce d’abord: le salon. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, le salon est une invention assez récente dans l’habitat québécois. Chez nous, nous n’en avions pas. C’était la cuisine le lieu publique ou son prolongement, où l'on recevait les visiteurs de passage. Le salon s’imposait progressivement dans les nouvelles maisons depuis la Seconde Guerre mondiale. Seules les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjuK9jEsiVx3_4hDNNUPPrIl9jCQiMIsEXiHazPYnAJ_Xp1ppJd5reQtpCWhKuKTQSt1xSawbuOlDqXXE_RMDEAhFmacWQFBMHCpuFSDpw7AiFw8mKkros-bIdnXoAegr8_5C3WqHbGdj0/s104/salon+Leclerc.jpg">familles riches</a> se permettaient de disposer de cette pièce qui devint rapidement un emblème de l’enrichissement des classes moyennes et de l’éloignement de ses origines rurales.<br />
<br />
Un meuble manque toutefois dans les deux versions du salon: le sofa ou le divan si vous préférez. Seuls des fauteuils individuels constituent l’ameublement, plus le tabouret sur lequel est assis John. La distance entre papa et maman est même assez prononcée. À l’intérieur du couple, une distanciation pudique demeure entre les deux parents. Mary, de dos, lit avec soin la partition sur le piano. John est tout entier à se masturber… oups! à jouer avec Rover. Papa est à son journal comme maman à son tricot, les deux manifestement contents des talents de virtuose de leur fille. L’absence de sofa ou de divan permet aux parents de ne pas être trop près l’un de l’autre, ou les deux enfants de se prélasser en regardant la télé ou (pour la version originale) écouter la radio.<br />
<br />
C’est ce qui est merveilleux avec ce tableau: chacun est à son affaire (papa au journal, maman au tricot et John avec Rover) tandis que tous écoutent l’exécution de Mary au piano. Il y a un point tournant de l’histoire de la famille contemporaine que ce tableau tient à nous présenter. D’un côté, Peyton Place est une communauté où l’individualité prime sur les intérêts communautaires. En cela, finit le temps des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEggSoElnYDIYdQIHSdfdtrKgrohDQgam6g8r8ECcONelUOt4YizYcyQitHIlee8ffBP4D-urn9_SctR2B8yjJ6q1hXFlzkjOxBDU0VNWqTot7hKr0VzzFbTU2hFk8eKQfyWto29jzmnB0Q/s1600/maisonnette.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEggSoElnYDIYdQIHSdfdtrKgrohDQgam6g8r8ECcONelUOt4YizYcyQitHIlee8ffBP4D-urn9_SctR2B8yjJ6q1hXFlzkjOxBDU0VNWqTot7hKr0VzzFbTU2hFk8eKQfyWto29jzmnB0Q/s200/maisonnette.jpg" width="193" /></a>corvées collectives, des parentés élargies, des soirées dans la cuisine avant de monter à la chambre à coucher (qu’on ne verra jamais dans les tableaux de <b>conversation anglaise</b>). D'autre part, la communauté n’est pas entièrement anéantie ni orientée par le nouveau sens communautaire, celui des amis et des relations extérieures à l’endogénie. On n’imagine pas, le soir, John & Mary recevoir des amis d’école ou les parents des compagnons de travail ou des commères du voisinage. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEggSoElnYDIYdQIHSdfdtrKgrohDQgam6g8r8ECcONelUOt4YizYcyQitHIlee8ffBP4D-urn9_SctR2B8yjJ6q1hXFlzkjOxBDU0VNWqTot7hKr0VzzFbTU2hFk8eKQfyWto29jzmnB0Q/s104/maisonnette.jpg">Chacun chez soi</a> et chacun pour les siens, tel est le sens de la vie domestique que véhicule <i>The Family in the living room</i>.<br />
<br />
Malgré tout, c’est la seule scène, à part celle du repas anniversaire qui est une occasion spéciale, où nous voyons la famille réunie, détendue et relaxant, malgré le maintien toujours austère de la tenue des personnages. Bref, on la sent un peu plus vibrante, pour ne pas dire vivante. Et c’est ici que prend son sens l’expression anglaise de <i>living room</i> qui n’a rien à voir avec l’étymologie française du mot «salon» par lequel<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEioF3XGsjgf4gVP0n-SFIPpHcav64SofvoAjyC8gELgD29cV05R4C4vcsVwuhHYf_-GG0q61nB_TBu7RDl6XX2Js9JdklDSNLSomH-5DZdEShgh0_MH8dC0AWMSi07rjOI8v1lQFhk-kMA/s1600/family_tv.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="297" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEioF3XGsjgf4gVP0n-SFIPpHcav64SofvoAjyC8gELgD29cV05R4C4vcsVwuhHYf_-GG0q61nB_TBu7RDl6XX2Js9JdklDSNLSomH-5DZdEShgh0_MH8dC0AWMSi07rjOI8v1lQFhk-kMA/s320/family_tv.jpg" width="320" /></a> on le traduit. Le <i>living room</i>, c’est la pièce où l’on vit, où l’on reçoit, où l’on s’ouvre aux étrangers et où nous sommes reçus en visite. C’est le lieu où l’endogénie s’ouvre à l’exogénie. Ici, ce sont les nouvelles de l’étranger que le père Martin lit dans son journal, c’est Chopin ou Liszt que Mary joue au piano, ce sont les reportages que la mère Martin lit dans sa revue ou son livre ouvert. La radio, puis la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEioF3XGsjgf4gVP0n-SFIPpHcav64SofvoAjyC8gELgD29cV05R4C4vcsVwuhHYf_-GG0q61nB_TBu7RDl6XX2Js9JdklDSNLSomH-5DZdEShgh0_MH8dC0AWMSi07rjOI8v1lQFhk-kMA/s104/family_tv.jpg">télévision</a> sont les nouveaux visiteurs qui s’installent, confortablement, dans le salon des Martin. Ce sont des caméras, des micros ouverts sur le monde entier, tandis que la fenêtre n’est ouverte que sur un croissant de lune et les étoiles. La lumière filtrée et diffusée par l’abat-jour agit comme une projection classique du symbolisme de l’art occidental: celui du rayonnement de l’esprit (divin).<br />
<br />
Le salon petit-bourgeois reste, bien entendu, centré sur la famille, sur le cocon domestique. Comme je l’ai dit, il célèbre l’individualité dans la communauté de la famille nucléaire. En cela, il témoigne du tournant démographique pris par l’Amérique du Nord aux lendemains de la guerre et du reste de l’Occident au cours des <i>Sixties</i>. Le contrôle des naissances fait que madame Martin, vouée à son tricot, considère que, pour de bon, après John & Mary, «la <i>shop</i> est fermée». Monsieur Martin est d’ailleurs <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhhQPlEZQH9BNdFUOuVypqVtBkrlOxmDV5oqcXEjgLAtITtHAvfnbfl5vlggNsaJxBg5Msk7Ub3bCOfatx_siExwIs7AhaKbiFMjG-nRGrGijBRE7t9X7l3oaMRCmnDHlsPJ5HAnB7QlHc/s1600/20071026051229hlm_montreal_p.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="150" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhhQPlEZQH9BNdFUOuVypqVtBkrlOxmDV5oqcXEjgLAtITtHAvfnbfl5vlggNsaJxBg5Msk7Ub3bCOfatx_siExwIs7AhaKbiFMjG-nRGrGijBRE7t9X7l3oaMRCmnDHlsPJ5HAnB7QlHc/s200/20071026051229hlm_montreal_p.jpg" width="200" /></a>tout à fait de cet avis, aussi le foyer apparaît-il comme celui d’un vieux couple déjà. On s’imagine la même scène prise dix ou quinze ans plus tard, lorsque les enfants Martin seront partis de la maison; que la télé couleur aura remplacé le «vieux <i>set</i> de télévision»; que le piano sera remplacé par un orgue Yamaha à 10 vitesse; que les ton pastels auront remplacés le gris et le rouge vin des murs; que quelques objets <i>kitsch</i> rapportés de voyages décoreront la pièce; que les parents Martin auront des verres sur le nez pour lire leur journal et faire leur tricot. Comme l’un de ces portraits anthropométriques soumis au vieillissement par un logiciel <i>photoshop</i>, nous pouvons facilement prévoir ce que sera ce <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhhQPlEZQH9BNdFUOuVypqVtBkrlOxmDV5oqcXEjgLAtITtHAvfnbfl5vlggNsaJxBg5Msk7Ub3bCOfatx_siExwIs7AhaKbiFMjG-nRGrGijBRE7t9X7l3oaMRCmnDHlsPJ5HAnB7QlHc/s104/20071026051229hlm_montreal_p.jpg">salon replié</a> sur lui-même, malgré ses apparences d’ouverture, dix ou vingt ans après la fin des <i>Fifties</i>.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhpd8l42Pin5IxrlXgqNfGFkt4TNYdOpnu9k82u9rlpMaT-Spkzw_fI35iJzuWUCRNYxZhst0WsyI4FzOmABxQ2FoUb-oavDn-C4DD5WrhDcafPwinVnqklhnJlWxVXH0GsKVYAfEGdOaU/s1600/fen%25C3%25AAtre1.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhpd8l42Pin5IxrlXgqNfGFkt4TNYdOpnu9k82u9rlpMaT-Spkzw_fI35iJzuWUCRNYxZhst0WsyI4FzOmABxQ2FoUb-oavDn-C4DD5WrhDcafPwinVnqklhnJlWxVXH0GsKVYAfEGdOaU/s200/fen%25C3%25AAtre1.jpg" width="93" /></a></div><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEin8ybIjU5f-_5E9OjQAeR8ga6YD7RN5eX-CJ5U2jiQnz0U70DlPshEOmotvtMX3HnmBurMfor_G5ZgUe2oxgE9VR4u9FthzGXi4DzbgL3S8T5uxyLm8wMfJ1UjfefnLzrelPrvSc-xSTk/s1600/fen%25C3%25AAtre2.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEin8ybIjU5f-_5E9OjQAeR8ga6YD7RN5eX-CJ5U2jiQnz0U70DlPshEOmotvtMX3HnmBurMfor_G5ZgUe2oxgE9VR4u9FthzGXi4DzbgL3S8T5uxyLm8wMfJ1UjfefnLzrelPrvSc-xSTk/s200/fen%25C3%25AAtre2.jpg" width="76" /></a>Tel est le drame de la famille Martin, tel fut le drame des petites villes de banlieue où la petite-bourgeoisie, encore peu sûre de sa puissance dans la société, prise entre les masses encore prolétarisées (mais plus pour longtemps) et une haute bourgeoisie, maîtresse de jeu de l’économie nationale. Le cocon Martin est une <i>cité assiégée</i>, entre des menaces extrêmes qu’on ne voit, et pour les raisons que nous avons déjà mentionnées dans les tableaux précédents, mais qui pèsent autant sur la sécurité de la famille. L’aspect même de la fenêtre laisse transpirer une évolution qui confirme celui que nous avons entrevue dans le tableau <i>Mary and John going to school</i>. Alors que la fenêtre du tableau original présente ce qui semble être une <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhpd8l42Pin5IxrlXgqNfGFkt4TNYdOpnu9k82u9rlpMaT-Spkzw_fI35iJzuWUCRNYxZhst0WsyI4FzOmABxQ2FoUb-oavDn-C4DD5WrhDcafPwinVnqklhnJlWxVXH0GsKVYAfEGdOaU/s104/fen%25C3%25AAtre1.jpg">fenêtre à guillotine</a>, la fenêtre du second tableau se présente une <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEin8ybIjU5f-_5E9OjQAeR8ga6YD7RN5eX-CJ5U2jiQnz0U70DlPshEOmotvtMX3HnmBurMfor_G5ZgUe2oxgE9VR4u9FthzGXi4DzbgL3S8T5uxyLm8wMfJ1UjfefnLzrelPrvSc-xSTk/s104/fen%25C3%25AAtre2.jpg">fenêtre ouverte ou fermée</a>, mais jamais entrouverte. Dans le tableau original, elle descend très bas sur le mur, jusqu’à disparaître derrière le fauteuil de madame Martin, tandis que dans le tableau retouché, la fenêtre s’arrête au 2/3 du tableau. Elle serait ainsi plus haute à escalader pour un éventuel voleur.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjjnguyDH7gBZ0zviouUFzWo_O3GoZeuwaTpJwABmNAxV2Ty1Cbe1l5EFM1xt1oeYgn9VlfGmePxE2IDidxhC9brlIT3eH4s_VqCZceM534KgErbhU65A-sfL6ErVPd9SsjSQJndW3viEI/s1600/polls_nakedcity14957_2943_761298_answer_7_xlarge.jpeg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="245" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjjnguyDH7gBZ0zviouUFzWo_O3GoZeuwaTpJwABmNAxV2Ty1Cbe1l5EFM1xt1oeYgn9VlfGmePxE2IDidxhC9brlIT3eH4s_VqCZceM534KgErbhU65A-sfL6ErVPd9SsjSQJndW3viEI/s320/polls_nakedcity14957_2943_761298_answer_7_xlarge.jpeg" width="320" /></a></div>Voilà pourquoi le <i>living room</i> reste à moitié vivant. Il est même étonnant de remarquer que, comme c’est la nuit, les rideaux ne sont pas tirés, alors que dès la brumante, la plupart des foyers avaient tendance à se cacher derrière stores et rideaux. Sans doute, la fonction pédagogique des rideaux ouverts vise-t-il à bien faire comprendre aux enfants qu’il s’agit de la soirée en famille, soirée considérée encore sacrée pour l’époque. Contrairement à nos jours, on s’imagine mal, dans les <i>Fifties</i> et les <i>Sixties</i> les enfants de l’âge de John & Mary, jouer à l’extérieur une fois le soleil couché. Il y allait autant de la protection des enfants que du sentiment de sécurité des parents. La nuit restait une période dangereuse dans l’Imaginaire de l’époque. Tous les contes fantastiques ou les films policiers présentaient des situations qui se déroulaient la nuit. La <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjjnguyDH7gBZ0zviouUFzWo_O3GoZeuwaTpJwABmNAxV2Ty1Cbe1l5EFM1xt1oeYgn9VlfGmePxE2IDidxhC9brlIT3eH4s_VqCZceM534KgErbhU65A-sfL6ErVPd9SsjSQJndW3viEI/s104/polls_nakedcity14957_2943_761298_answer_7_xlarge.jpeg">télévision</a>, en noir et blanc, rajoutait une dimension impressionniste aux feuilletons et aux films qui y étaient présentés. Le Symbolique du noir et blanc comme allégorie de la lumière et des ténèbres, du bien et du mal se renouvelait avec les heures de la journée.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhpLZH1X8QYSK8QQxScia4RFIhJIQmevAi13uYU5fCcy_oYM4mvluVjx-_uI49jNSj62dLnRFl19cvEHSom9yZHkQJt7gaO1jTfnyAOV2aYshpqfu2P7TdglFiT3Y8rd05wC69_NyKwN4k/s1600/img0007.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="297" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhpLZH1X8QYSK8QQxScia4RFIhJIQmevAi13uYU5fCcy_oYM4mvluVjx-_uI49jNSj62dLnRFl19cvEHSom9yZHkQJt7gaO1jTfnyAOV2aYshpqfu2P7TdglFiT3Y8rd05wC69_NyKwN4k/s320/img0007.jpg" width="320" /></a></div>Une image tirée d’un autre <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhpLZH1X8QYSK8QQxScia4RFIhJIQmevAi13uYU5fCcy_oYM4mvluVjx-_uI49jNSj62dLnRFl19cvEHSom9yZHkQJt7gaO1jTfnyAOV2aYshpqfu2P7TdglFiT3Y8rd05wC69_NyKwN4k/s104/img0007.jpg">manuel scolaire</a> de la même époque que le tableau original <i>The Family in the living room</i>, présente une double teinte de noir et de vert. Ici aussi, le père, comme monsieur Martin, est assis sous la lampe sur pied pour mieux lire son journal tout en savourant sa pipe. Le style antique de son fauteuil est encore plus accentué que celui où le père Martin est assis. Son épouse, assise également à une distance (à première vue moins éloignée qu’entre le couple Martin), ajuste le poste de radio pour écouter les informations ou peut-être mieux de la musique. Ici, l’<i>art mécanique</i> a déjà remplacé la virtuosité de Mary. Les enfants jouent ensemble mais paraissent plus jeunes que John & Mary. À l’arrière plan, une bonne nettoie les assiettes dans le vaisselier. Entre la lampe sur table et l’horloge grand-père, nous pouvons voir la fenêtre où le store est ici baissé. Cette seconde image, moins bien travaillée que celle de <b>conversation anglaise</b>, donne une idée du confort bourgeois et du rôle que le <i>living room</i> y joue. En cela, il confirme le tableau 11: le cercle étroit de la famille, de la vie domestique et un entre-deux d’une possible ouverture sur le monde où ne rentre pas qui veut. (Ainsi, la bonne reste plongée, au loin, dans le décor verdâtre tandis que les contrastes du noir et blanc font relever les membres de la famille.)<br />
<br />
Surtout, et ici l’allègement de la rigueur de la scène trahit l’idée, il y a un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhNLKgLk_YpCpQNqnUbxGtPBB7oGEI-KEpe_WpmwXwb169lhbJhzib3OrwGJ9OkihGlVJORui-xLP5p9AApzmZkwXv7EhyphenhyphenJ99xPOoEsa9UMXQe-I8FI6Led85aeLzQEz2kSAJ6SEauHwNY/s104/cur%25C3%25A9+au+salon.jpg">ordre dans le monde du salon</a> comme dans celui de la cuisine, de la salle à manger, et des chambres à coucher. L’ordre est l’un des grands thèmes qui règnent sur l’ensemble des tableaux de <b>conversation anglaise</b>. Comme pour les tableaux précédents, cet ordre était donné dans le manuel de bienséance. D’abord, les fauteuils sont réservés aux visiteurs, tantôt l’institutrice, tantôt le curé en visite (pour venir toucher sa dîme sans doute). Le divan est l’endroit où s’asseoit le ou les membres de la famille. Si l’institutrice vient avec le curé, la priorité du fauteuil est donnée au supérieur hiérarchique des visiteurs, le curé, alors que l’institutrice s’asseoit, avec l’hôte, sur le divan. La position de l’enfant sera toujours sur le banc ou le pouf, et comme l’on peut le constater ici, John est bien assis sur un banc et Mary assise sur celui devant le piano.<br />
<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhNLKgLk_YpCpQNqnUbxGtPBB7oGEI-KEpe_WpmwXwb169lhbJhzib3OrwGJ9OkihGlVJORui-xLP5p9AApzmZkwXv7EhyphenhyphenJ99xPOoEsa9UMXQe-I8FI6Led85aeLzQEz2kSAJ6SEauHwNY/s1600/cur%25C3%25A9+au+salon.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="203" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhNLKgLk_YpCpQNqnUbxGtPBB7oGEI-KEpe_WpmwXwb169lhbJhzib3OrwGJ9OkihGlVJORui-xLP5p9AApzmZkwXv7EhyphenhyphenJ99xPOoEsa9UMXQe-I8FI6Led85aeLzQEz2kSAJ6SEauHwNY/s400/cur%25C3%25A9+au+salon.jpg" width="400" /></a></div><br />
Dans ce milieu ordonné qu’est la domesticité Martin, il est clair que les enfants ne parlent pas à moins que les parents les y autorisent. Ils ne se mêleront pas des conversations entre papa et maman. Voilà pourquoi la présence de Rover permet à John de vivre dans son univers isolé, et le piano permettre à sa sœur de s’exprimer sans ouvrir la bouche. Comme dans la leçon précédente, on les imagine mal, frère et sœur en train de se parler. Toutes les fois où nous les avons vus ensemble, depuis le tableau 2, ils demeurent muets l'un à l'autre: silencieux lorsque John prie et que sa sœur sort de la salle de bain; attentifs (et silencieux) attendant le passage de la lumière rouge à la lumière verte; Mary interrogeant Miss Leblanc pendant que John trace le <i>O Canada</i> au tableau; tout souriant mais muet, écoutant la voix du père dans la salle à dîner; muets à la table de travail; enfin muets dans le <i>living room</i>. La bouche des parents seule semble avoir le droit de s’ouvrir, et c’est pour apprécier combien John & Mary sont des enfants modèles, doués, talentueux et une réussite merveilleuse de l’éducation qu’ils leurs ont donnée.<br />
<br />
Cette vanité petit-bourgeois a certes varié de nos jours, et l’<i>encanaillement de la bourgeoisie</i> fait que le Symbolique du bien et du mal apparaît comme dérisoire, <br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgOUBpxNex4YGg956VALKoRFigzDwLNyBmsMLgMIdNZ6TOfUyViE3TmKN8hCPmcLoUlGGvECzhN6rtB8aXfswhSiubEmm5_WXKH-Ap1EB-LPIShjFFS3qFaADEJMtfJneocjLhFKSLKOLk/s1600/maison+Usher.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgOUBpxNex4YGg956VALKoRFigzDwLNyBmsMLgMIdNZ6TOfUyViE3TmKN8hCPmcLoUlGGvECzhN6rtB8aXfswhSiubEmm5_WXKH-Ap1EB-LPIShjFFS3qFaADEJMtfJneocjLhFKSLKOLk/s320/maison+Usher.jpg" width="211" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Dessin d'Alastair pour <i>La Chute de la maison Usher</i></td></tr>
</tbody></table>même si les légendes urbaines ont remplacé les anciennes superstitions d’origine rurale. Le confort du salon où la famille est rassemblée est une protection, une «forteresse vide» pour employer l’expression de Bettelheim, où l’on n’a plus à craindre ni du renard ni du loup. Une fois les portes fermées à clef, les fenêtres vissées, les rideaux tirés, le mal est rejeté à l’extérieur. Il est impossible qu’il soit à l’intérieur de la maison. Or, trop souvent nous savons qu’il y est enfermé, comme dans un conte d’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgOUBpxNex4YGg956VALKoRFigzDwLNyBmsMLgMIdNZ6TOfUyViE3TmKN8hCPmcLoUlGGvECzhN6rtB8aXfswhSiubEmm5_WXKH-Ap1EB-LPIShjFFS3qFaADEJMtfJneocjLhFKSLKOLk/s104/maison+Usher.jpg">Edgar Poe</a>. Personne n’est dupe de la fausse sécurité qu’offre la gentille petite maison privée. Lorsqu’à une émission de radio en 1939, Orson Welles adapta le roman de Herbert George Wells, <i>La guerre des mondes</i>, bien des auditeurs prirent la fiction pour la réalité. Certains sautèrent dans leur automobile pour fuir devant l’envahisseur; d’autres se terrèrent dans leurs caves ou, comme devant la foudre, dans leur garde-robe! Certains téléphonèrent aux postes de police pour dire que les envahisseurs se trouvaient dans leur jardin, enfin certains allèrent même jusqu’à se tuer dit-on. C’est l’inquiétude viscérale, mammifère, que la famille Martin enferme avec elle dans son <i>living room</i>. Toutes ses angoisses sont là, car si les peurs de voleurs, d’invasion de domicile ou de tueurs en série sont renvoyées par la fausse sécurité à un système d’alarme relié au poste de police, les angoisses, elles, restent murées à l’intérieur de la pièce, et lorsqu'elles se manifestent, nul ne peut leurs échapper. Jamais ne trouvera-t-on meilleure allégorie de la <i>Psyché</i> alarmée par le <i>Socius</i>.<br />
<br />
Cela nous ramène, bien sûr, à ce que nous disions dans le tableau 6 sur l’attente, le tableau de Œlze, et que le ciel s’ombrageant au-dessus de l’école de John & Mary évoquait de façon surréaliste. Il n’y a rien de tel ici. Le ciel est clair, on peut voir le croissant de lune et les étoiles. La demeure n’est pas plongée dans l’obscurité suite à une panne d’électricité, alors que le tableau «en vert» présenté un peu plus haut, bichromatique, apparaît comme un foyer plongé dans la semi-pénombre, un peu comme durant les temps de guerre où la radio prescrivait aux Britanniques, aux Américains et aux Canadiens de fermer leur store et de baisser les luminaires afin de ne pas attirer les bombardiers allemands. La sécurité s’est renforcée, la guerre est finie, et l’on peut commencer à entrouvrir les rideaux et lever les stores. Mais la ligne de démarcation entre le bien et le mal, le monde intérieur et le monde extérieur que représente la périphérie du carré de la maison demeure infranchissable.<br />
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtjJDNry2R9ujO6TFvoqwCD0Wx3jztdPcNIR4_WnC3FuNT-QimywW4r6TM2qVGkcvlYsJIjEaPdxkcCCWnnmjHgji2P9klnhBRVSb-ZsH433sBKGHSGsiOyd_3G5vpWaAkprYD7Ooc0SU/s1600/6a00d8341c86f753ef00e54f8a90908833-800wi.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="210" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtjJDNry2R9ujO6TFvoqwCD0Wx3jztdPcNIR4_WnC3FuNT-QimywW4r6TM2qVGkcvlYsJIjEaPdxkcCCWnnmjHgji2P9klnhBRVSb-ZsH433sBKGHSGsiOyd_3G5vpWaAkprYD7Ooc0SU/s320/6a00d8341c86f753ef00e54f8a90908833-800wi.jpg" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i>In cold blood </i></td></tr>
</tbody></table>Nous savons bien que tout ceci relève de l’ordre du fantasme (ou du phantasme). L’illusion de la sécurité est plus forte que la protection objective elle-même. Aucune porte, aucune fenêtre n’ont jamais arrêté un voleur qui voulait entrer dans l’une de ces maisons bourgeoises, ni une invasion de domicile, pas même un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtjJDNry2R9ujO6TFvoqwCD0Wx3jztdPcNIR4_WnC3FuNT-QimywW4r6TM2qVGkcvlYsJIjEaPdxkcCCWnnmjHgji2P9klnhBRVSb-ZsH433sBKGHSGsiOyd_3G5vpWaAkprYD7Ooc0SU/s104/6a00d8341c86f753ef00e54f8a90908833-800wi.jpg">tueur en série</a>. La solution magique qui conforte la famille Martin est de se tenir ensemble, quoi qu’il arrive. La rencontre du singulier et du collectif, dans cet individualisme familial réside dans la solidarité entre les membres du «clan» Martin. Ils vivent ensemble comme ils mourraient ensemble …si jamais la tragédie devait survenir. Dans l’inconscient des habitants de l’Amérique du Nord, peut-être plus <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh4ou2JtPmF6IJ77xpZJRUzsPSBKVRnCrRt6OvVr5D-1G4dXczo28U1d37EVpP4NBLQq_11A9pmZ821LTlFPUyffhvmQPAuW_Noe0VHI2Jzt1tdxusR4DCx3sUfkdA_i4uPZKGrTGO6jKM/s1600/salem.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="310" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh4ou2JtPmF6IJ77xpZJRUzsPSBKVRnCrRt6OvVr5D-1G4dXczo28U1d37EVpP4NBLQq_11A9pmZ821LTlFPUyffhvmQPAuW_Noe0VHI2Jzt1tdxusR4DCx3sUfkdA_i4uPZKGrTGO6jKM/s320/salem.jpg" width="320" /></a>que dans celui des Européens, cette proximité dans l’adversité remonte au temps où les colons peuplèrent, par petits groupes, des zones géographiques immenses. À cette époque, les habitants du village construisaient leurs maisons à proximité l’une de l’autre, serrées autour de l’Église (ou de l’Hôtel-de-Ville chez les Américains). Enfin, l’enceinte d’une palissade ou d’un mur de pierre (selon la taille de la ville et ses besoins de défense stratégique) redoublait, collectivement, les murs de chaque maison individuelle. À l’inverse, des épisodes symptomatiques telles les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh4ou2JtPmF6IJ77xpZJRUzsPSBKVRnCrRt6OvVr5D-1G4dXczo28U1d37EVpP4NBLQq_11A9pmZ821LTlFPUyffhvmQPAuW_Noe0VHI2Jzt1tdxusR4DCx3sUfkdA_i4uPZKGrTGO6jKM/s104/salem.jpg">sorcières de Salem</a> en 1692 où la légende de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhAVvsLGix_Y55z5dR4XifhyphenhyphenPVLWMSSXcQHesnxWPaYaieHrYN-QJM_g5eP28k6qEMDztBoYb97lOD69onpeH-AvCxHtbha7JXhiieyQbh5VA_n65alN0dCe9LlgLfZ0Gk-zI0XTgoCA3w/s104/707px-La_Corriveau_%2528Simpson%2529.png">Corriveau</a> au Québec ont su montrer que le mal était bien enfermé à l’intérieur des murs et que personne ne l’ignorait.<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhAVvsLGix_Y55z5dR4XifhyphenhyphenPVLWMSSXcQHesnxWPaYaieHrYN-QJM_g5eP28k6qEMDztBoYb97lOD69onpeH-AvCxHtbha7JXhiieyQbh5VA_n65alN0dCe9LlgLfZ0Gk-zI0XTgoCA3w/s1600/707px-La_Corriveau_%2528Simpson%2529.png" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="271" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhAVvsLGix_Y55z5dR4XifhyphenhyphenPVLWMSSXcQHesnxWPaYaieHrYN-QJM_g5eP28k6qEMDztBoYb97lOD69onpeH-AvCxHtbha7JXhiieyQbh5VA_n65alN0dCe9LlgLfZ0Gk-zI0XTgoCA3w/s320/707px-La_Corriveau_%2528Simpson%2529.png" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Charles W. Simpson. <i>La Corriveau</i></td></tr>
</tbody></table>Au temps de la Guerre Froide, durant les <i>Fifties</i> et encore les <i>Sixties</i>, la menace de l’invasion communiste et le fait que l’on pouvait trouver parmi les siens des partisans de cette pollution idéologique rendaient l’ensemble de l’Amérique du Nord plutôt inquiet de sa sécurité à la fois collective et personnelle. L’arrivée du téléviseur, les photographies aériennes prises des bases de lancement de missiles soviétiques stationnées à Cuba, l’assassinat trouble du président Kennedy et ses funérailles solennelles et cela, sans ajouter tous les bobards sur la présence d’espions communistes ici et là ou d’envahisseurs extra-terrestres qui <i>glowaient</i> comme ceux que nous présentait la célèbre télésérie américaine «en couleur» (<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgjal05YRdOcb96-hsHXQa_12sewcWpVOORauxWS4BBeuOXd7TzDTZwtuP-YYJsf195dwF3flk2Z76Kwb9MUYiKP6hOF-9fZaa4sVaOIl3H2qLcXr8fmd_tXIY1oRw8ELEALYU2cU1SQXE/s104/TheInvaders.jpg"><i>The Invaders</i></a>), contribuaient à la fois, à renforcer l’attente de la menace et la certitude de la sécurité. Si la guerre était bien froide, l’angoisse, l’anxiété, elles, étaient bien chaudes.<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgjal05YRdOcb96-hsHXQa_12sewcWpVOORauxWS4BBeuOXd7TzDTZwtuP-YYJsf195dwF3flk2Z76Kwb9MUYiKP6hOF-9fZaa4sVaOIl3H2qLcXr8fmd_tXIY1oRw8ELEALYU2cU1SQXE/s1600/TheInvaders.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="292" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgjal05YRdOcb96-hsHXQa_12sewcWpVOORauxWS4BBeuOXd7TzDTZwtuP-YYJsf195dwF3flk2Z76Kwb9MUYiKP6hOF-9fZaa4sVaOIl3H2qLcXr8fmd_tXIY1oRw8ELEALYU2cU1SQXE/s400/TheInvaders.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: right;">Montréal<br />
30 juin 2011</div></div><br />
</div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-8753490883335829672011-06-29T20:48:00.000-07:002011-06-30T10:26:09.939-07:00Doing their homework<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div style="text-align: justify;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHIopPhH4K7Ngh4auntDlYZzRi9Js523L3LwBYxpj1JKQsjBclea4F7BMd_f9ubWCq3T0oEfclPwcfhwqio_ONSV8IroYGxcuzt9Riel2_UApvXsOTz4LEp8UK5pi2ZkS0FZNC04CaknA/s1600/10-+John+and+Mary+doing+their+homework+-+copie.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"></a> <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjlPZ112t5vsbAtoXyg6RSTzmbF6fUvXhsrz-oMjgqKfOa-40XSBFpM3IjipeLMKAVTrLTxG1n5rNv3r8j0HF0rQiQ6k6_Zalo1MMA5htss0vZN4IrAA1dEJiDG6HsNRjZY8eazRXfZJSk/s1600/10-+John+and+Mary+doing+their+homework.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="288" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjlPZ112t5vsbAtoXyg6RSTzmbF6fUvXhsrz-oMjgqKfOa-40XSBFpM3IjipeLMKAVTrLTxG1n5rNv3r8j0HF0rQiQ6k6_Zalo1MMA5htss0vZN4IrAA1dEJiDG6HsNRjZY8eazRXfZJSk/s400/10-+John+and+Mary+doing+their+homework.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: center;"></div><div style="text-align: center;"><br />
<b>DOING THEIR HOMEWORK</b></div><br />
L’allure empesée de la mise de John & Mary que nous avons entrevue dans le tableau 9 se maintient dans leur <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjlPZ112t5vsbAtoXyg6RSTzmbF6fUvXhsrz-oMjgqKfOa-40XSBFpM3IjipeLMKAVTrLTxG1n5rNv3r8j0HF0rQiQ6k6_Zalo1MMA5htss0vZN4IrAA1dEJiDG6HsNRjZY8eazRXfZJSk/s104/10-+John+and+Mary+doing+their+homework.jpg">salle de travail</a> où ils font, ensemble, leurs devoirs. La cravate nouée autour du cou chez John et la robe pudique de Mary montrent que les enfants Martin sont <i>straight</i> vingt-quatre heures sur vingt-quatre! Ce qui est pénible de constater, c’est lors de la retouche du tableau, une dizaine d’années plus tard, rien n’a été enlevé de cette austérité dans la pose des enfants. Ici, comme dans le tableau 2 et le tableau 6, les dessinateurs ont retouché le tableau en fonction de mieux l’adapter à l’esprit des <i>Sixties</i> qui approchaient. Outre la confirmation du sexisme primaire des autres tableaux (John porte une chemise bleue et Mary une boucle rose), le chien Rover (c’est son nom) somnole dans le coin, près de la bibliothèque. L’essentiel du tableau original est donc repris dans le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJFwjh9lUwLsVt4Gy04WK3nJ6PLWKX-TBCwOixIqWPvUhgC57U_zt-fM0qIq6qGDgJQ9IP9wOktE0EnoSic-ks-MO2Kg2En6d97yBc-L_iwyvb6WP4unDTf6UIfhmJqIKAPcyKOpEx6WM/s104/10a-+Homework.jpg">tableau retouché</a>. Seule la stylisation des traits des visages et de l’ameublement distingue le second du premier tableau.<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJFwjh9lUwLsVt4Gy04WK3nJ6PLWKX-TBCwOixIqWPvUhgC57U_zt-fM0qIq6qGDgJQ9IP9wOktE0EnoSic-ks-MO2Kg2En6d97yBc-L_iwyvb6WP4unDTf6UIfhmJqIKAPcyKOpEx6WM/s1600/10a-+Homework.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="287" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJFwjh9lUwLsVt4Gy04WK3nJ6PLWKX-TBCwOixIqWPvUhgC57U_zt-fM0qIq6qGDgJQ9IP9wOktE0EnoSic-ks-MO2Kg2En6d97yBc-L_iwyvb6WP4unDTf6UIfhmJqIKAPcyKOpEx6WM/s400/10a-+Homework.jpg" width="400" /></a></div>Malgré tout, certaines modifications sont à souligner: dans le tableau original, John porte sa tête dans sa main. C’est un travail de lecture et de mémorisation sur lequel il semble se pencher. Dans le tableau retouché, il apparaît plus enthousiaste (et plus joufflue aussi, le chapon sans doute) en regardant une carte géographique dans son livre. En avant, sur la table, au premier plan, un vieux dictionnaire Larousse que l’on retrouvera tel quel dans la retouche. Mary, dans un tableau comme dans l’autre, est à un travail d’écriture. Dans le second tableau apparaît, toutefois, un dictionnaire anglais qui n’existait pas dans l’original. Les instruments scolaires sont les mêmes d’un tableau à l’autre.<br />
<br />
La pièce, aux murs verts comme dans la chambre de Mary et la salle à dîner, laisse sous-entendre que cette pièce est essentiellement «féminine». Dans le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhH-PMlxAun85CeLbQ3MEN19XKyHSY5x_PfZs__SS6EyltmaAq4z8TzAbrnIar15B0kEpKWkzH2Vq2JAn6DxzxDL4F5H2uqfBFvWEXrzN8iN38ZKqedlKMCzIFvjgYWKCCNUM82PMc47Q8/s104/10-+John+and+Mary+doing+their+homework+-+copie.jpg">tableau </a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhH-PMlxAun85CeLbQ3MEN19XKyHSY5x_PfZs__SS6EyltmaAq4z8TzAbrnIar15B0kEpKWkzH2Vq2JAn6DxzxDL4F5H2uqfBFvWEXrzN8iN38ZKqedlKMCzIFvjgYWKCCNUM82PMc47Q8/s104/10-+John+and+Mary+doing+their+homework+-+copie.jpg">original</a>, les pots disposés de chaque côté <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHIopPhH4K7Ngh4auntDlYZzRi9Js523L3LwBYxpj1JKQsjBclea4F7BMd_f9ubWCq3T0oEfclPwcfhwqio_ONSV8IroYGxcuzt9Riel2_UApvXsOTz4LEp8UK5pi2ZkS0FZNC04CaknA/s1600/10-+John+and+Mary+doing+their+homework+-+copie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="163" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHIopPhH4K7Ngh4auntDlYZzRi9Js523L3LwBYxpj1JKQsjBclea4F7BMd_f9ubWCq3T0oEfclPwcfhwqio_ONSV8IroYGxcuzt9Riel2_UApvXsOTz4LEp8UK5pi2ZkS0FZNC04CaknA/s200/10-+John+and+Mary+doing+their+homework+-+copie.jpg" width="200" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiL0ISpyk1iVCQzKSFn3ZkWlAf-TARk1GGc-KtJimeMg90SUGQgu4Jb2uxe4hqTRmQA4w7psvcpZHULoem-VEN6WxDtaUdBFEVbIlTM6utTKxBUvFHI6anapYuripVHSPFKw_nkE7O0NIk/s1600/10a-+Homework+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="151" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiL0ISpyk1iVCQzKSFn3ZkWlAf-TARk1GGc-KtJimeMg90SUGQgu4Jb2uxe4hqTRmQA4w7psvcpZHULoem-VEN6WxDtaUdBFEVbIlTM6utTKxBUvFHI6anapYuripVHSPFKw_nkE7O0NIk/s200/10a-+Homework+-+copie.jpg" width="200" /></a>de l’horloge sont vides. Dans le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5afvIQTz92hU-tuAGLJ6T9a52fAdmuzfRifWpx35w1fcmKAvO1xzCb2VKkBR2b7PRWAxpUosEa_PQjnQGUqgua9OjynsVzI6J5Ket2rP1qQG_nPrjbPzr88MAgtR3xqnHYmGCq-bXOfc/s104/10a-+Homework+-+copie.jpg">tableau retouché</a>, ils sont porteurs de plantes. En retour, les tablettes de la bibliothèque sont moins désordonnées et plus fournies en livre dans le tableau retouché que dans l’original. Dans les deux tableaux, on retrouve une marine comme dans la salle à dîner. Le calendrier religieux est mieux dessiné dans le second tableau. Les chaises et la table de travail sont plus classiques dans le tableau original que dans le second. Quoi qu’il en soit, l’impression que nous gardons est que dans le second tableau, John & Mary sont davantage heureux de faire leurs devoirs que dans le tableau original.<br />
<br />
Il faut dire que les devoirs d’école sont la chose la plus chiante jamais inventée. À une époque où l’on conseille aux travailleurs de ne pas amener leur «travail à la maison», qu’on contient les surcharges de travail, qu’on anticipe avec appréhension les <i>burn-out</i>, les enfants Martin, comme moi et tous ceux de ces générations, en plus des journées de classes à exécuter des travaux scolaires, devions amener des devoirs en plus à faire à la maison, le soir, après le souper. Il fallait que nous ayons tout notre temps l'esprit occupé par un quelconque exercice d’arithmétique ou de composition de français. Se préparer à la dictée du lendemain ou à la mémorisation des tables d'addition et de soustraction. Toujours les exercices les plus chiants disais-je, car sans cesse répétitifs, obsessionnels. Les mêmes exercices que nous faisions le jour, nous devions les répéter le soir et les fins de semaine. Aussi, je ne vois pas en quoi John & Mary peuvent sourire à continuer à besogner en dehors de leurs heures de boulot!<br />
<br />
C’est que ces travaux n’avaient rien de créatif ni de réflexif. Ce n’était toujours que des apprentissages de la mémoire sur des matières ennuyeuses desquelles, souvent, nous ne comprenions rien. Apprendre par cœur les questions et réponses du catéchisme catholique, c’était débilitant: <b>Question 42 </b>(page 18): «Qu’est-ce qu’un mystère?». <b>Réponse</b>: «Un mystère est une vérité révélée que nous ne pouvons pas comprendre». Rien à voir avec les soirées <i>meurtre et mystère</i>… Comment une telle abstraction peut-elle développer l’esprit d’un enfant de sept ans? Les problèmes d’arithmétique n’étaient pas plus sérieux, surtout à l’époque où ils se coloraient de bondieuseries: <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiMw4WgRkHEEOoetXmKTvSr0SoM_igJrMn3SzKiZ48OGClbDaiA6NBI0WWr3pPNJrivn87GAtLhQ3Yv5A2kzaX4zd4khI73gnNUlHDfnW_h3YEsJ_ESuOAx9IBWT1ZNvgXts3wJgjvctWU/s1600/clocher.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiMw4WgRkHEEOoetXmKTvSr0SoM_igJrMn3SzKiZ48OGClbDaiA6NBI0WWr3pPNJrivn87GAtLhQ3Yv5A2kzaX4zd4khI73gnNUlHDfnW_h3YEsJ_ESuOAx9IBWT1ZNvgXts3wJgjvctWU/s200/clocher.jpg" width="170" /></a>«Papa me dit qu’il peut marcher environ 2 milles 2/3 en une heure. Lors du pèlerinage au Cap-de-la-Madeleine, à l’occasion de la fête de l’Assomption, il a marché durant 2 heures 1/4. Combien de milles a-t-il marché pour se rendre au Cap?» (Manuel Gérard Beaudry, 5e année!). Les livres de lectures ou de français n’étaient pas piqués des vers non plus. Parlant de dictées, en voici une dans le genre de l’exercice d’arithmétique pour les enfants de 3e année: «Le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiMw4WgRkHEEOoetXmKTvSr0SoM_igJrMn3SzKiZ48OGClbDaiA6NBI0WWr3pPNJrivn87GAtLhQ3Yv5A2kzaX4zd4khI73gnNUlHDfnW_h3YEsJ_ESuOAx9IBWT1ZNvgXts3wJgjvctWU/s104/clocher.jpg">clocher</a> est surmonté de la croix et du coq. Le coq indique le rôle des cloches, qui est d’éveiller les chrétiens et de rappeler l’heure de la prière. Les cloches annoncent les cérémonies de l’Église: la messe, les vêpres, le salut. Elles sonnent encore pour les baptêmes, les mariages, les enterrements.» (etc.) Ici, à Église, doit-on mettre un «É» majuscule (l’institution) ou l’édifice où se rassemblent les fidèles avec un «é» minuscule? Bref, le travail consistait à répéter la <i>doxa</i> et non à l’interroger, même de manière positive.<br />
<br />
Le but de tous ces exercices redondants, qui même en se laïcisant conservèrent le même but, était de garder l’esprit occupé. Il était interdit, aux enfants, de jouer ou de rêver, car la vie n’est pas un jeu ni un rêve; c’est quelque chose de «sérieux», autant que le mot pouvait être sévère <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdrf4IsfSsWXp0gs6MjdOZQ-KD9eV-dtK1m5H5AEQNyUvtCJ-xtnaWEoEIIh4GN5_yxXRiVdMRF0V1yDdk-HEQrTD8-ca5mpxf7rDHes8yN2O0qd8KFZljsVHcSsFC91F5WyYzcRO_P5A/s1600/cat%25C3%25A9chisme.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdrf4IsfSsWXp0gs6MjdOZQ-KD9eV-dtK1m5H5AEQNyUvtCJ-xtnaWEoEIIh4GN5_yxXRiVdMRF0V1yDdk-HEQrTD8-ca5mpxf7rDHes8yN2O0qd8KFZljsVHcSsFC91F5WyYzcRO_P5A/s200/cat%25C3%25A9chisme.jpg" width="154" /></a>dans le contexte moral des petits Peyton Place d’Amérique du Nord. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgdrf4IsfSsWXp0gs6MjdOZQ-KD9eV-dtK1m5H5AEQNyUvtCJ-xtnaWEoEIIh4GN5_yxXRiVdMRF0V1yDdk-HEQrTD8-ca5mpxf7rDHes8yN2O0qd8KFZljsVHcSsFC91F5WyYzcRO_P5A/s104/cat%25C3%25A9chisme.jpg">Compulser obsessionnellement</a> des connaissances, sans doute de base, mais dont il était étroitement prescrit de ne pas dépasser, nous condamnait à une stérilité du «sur-place». Voilà pourquoi aux deux extrémités de la courbe de Pareto se trouvaient les inadaptés au processus scolaire. D’un côté, on voyait venir les <i>drop-out</i> incapables de suivre une discipline trop abstraite pour leur esprit; de l’autre, ceux dont les capacités d'abstraction étaient suffisamment développées de sorte que ces exercices mécaniques et répétitifs finissaient par les asphyxier. Mieux valait, pour l'éducation d'époque, un nombre de connaissances restreint, centré sur l’apprentissage de la langue, du calcul et du catéchisme, qu’un élargissement vers d’autres connaissances potentiellement porteuses de danger moraux.<br />
<br />
Voilà pourquoi, anarchiste déjà, je préférais les connaissances auxquelles les institutrices accordaient une portée secondaire. La géographie, les connaissances usuelles, à partir de la troisième année, où l’on apprenait les classes d’êtres, les astres du système solaire, les fleurs et les fruits, les moyens de communication, etc., et surtout, vous vous en doutez, l’histoire. Il n’y avait pas jusqu’à la bienséance et les cours d’hygiène qui m’intéressaient plus que les interminables leçons de français et de calcul. Même l’anglais, langue dans laquelle je suis devenu plutôt <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjAzCh3QIJHHG6CD3M5ehnM-mZbTtC92vmqa-ja9qQmiC6mylTYSq2xPX6m_8aU5oZv58kKfklaiy5Sjs2xvYwLcFm7j8917esAnjQp0fGlP_1O_teEGrmPKVzEpSKYKdXDt0RFNnhC2zk/s104/Bulletin.jpg">médiocre</a> à partir du secondaire à cause d’un enseignement mal foutu, m’était préférable, en partie grâce, précisément, aux tableaux de John & Mary…<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjAzCh3QIJHHG6CD3M5ehnM-mZbTtC92vmqa-ja9qQmiC6mylTYSq2xPX6m_8aU5oZv58kKfklaiy5Sjs2xvYwLcFm7j8917esAnjQp0fGlP_1O_teEGrmPKVzEpSKYKdXDt0RFNnhC2zk/s1600/Bulletin.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="310" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjAzCh3QIJHHG6CD3M5ehnM-mZbTtC92vmqa-ja9qQmiC6mylTYSq2xPX6m_8aU5oZv58kKfklaiy5Sjs2xvYwLcFm7j8917esAnjQp0fGlP_1O_teEGrmPKVzEpSKYKdXDt0RFNnhC2zk/s400/Bulletin.jpg" width="400" /></a></div>Comme je l’ai déjà raconté <a href="http://jeanpaulcoupal.blogspot.com/2010/11/lettres-un-jeune-philosophe-de.html">ailleurs</a>, l’histoire que nous apprenions était de deux qualités: l’histoire du Canada, dès la première année, et l’histoire sainte dès la troisième. La continuité de l’une à l’autre était évidente pour l’esprit, même si les faits racontés semblaient à des années-lumières de distance les uns des autres. L’histoire du Canada était plutôt assez sanglante, car dans le principe de la morale catholique de l’époque, il fallait s’en tenir surtout à «l’épopée mystique» des martyrs qui avaient répandu leur sang sur notre sol, à l’exemple des premiers martyrs de la Chrétienté. Mais l’histoire était une discipline dynamique autant que descriptive, ce que n’étaient pas les autres disciplines enseignées à l’école. Il y avait là une dimension qui me fascinait, sans doute inconsciemment, qui était celle du récit et aussi des valeurs contenues dans ce récit. Les niaiseries catholiques retenues dans le catéchisme, le livre de monsieur Beaudry (même si le père marchait à un quart de vitesse vers le Rosaire) et les livres de lectures ennuyeuses, ne retenaient pas mon attention. J’étais, et je suis toujours resté, un élève médiocre. J’aurais voulu, certes, être le premier de la classe, qui était tout un honneur, ne serait-ce que pour m’attirer la fierté de mes parents, mais je n’étais pas doué. Je m’ennuyais à l’école où tout ce qui pouvait être plate à faire était tenue pour une matière indispensable.<br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiV-Kj93Oogt_fMkRtdnRoMMhH0LVQ_8YnmVUzP4EppffkIIdtCzpgN8PmIrzpQNt9y1fSQNypHbhm8u41Ql68WqLL3R2x_1GipOyr_0gvBTdnmAyCPs_e4iD-KSb3FnE2gOxFB0JI74cE/s1600/Moscow_-_Monument_to_Peter_The_Great.JPG" imageanchor="1" style="clear: right; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiV-Kj93Oogt_fMkRtdnRoMMhH0LVQ_8YnmVUzP4EppffkIIdtCzpgN8PmIrzpQNt9y1fSQNypHbhm8u41Ql68WqLL3R2x_1GipOyr_0gvBTdnmAyCPs_e4iD-KSb3FnE2gOxFB0JI74cE/s320/Moscow_-_Monument_to_Peter_The_Great.JPG" width="213" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Statue de Pierre le Grand à Moscou</td></tr>
</tbody></table>Il faut travailler, et Dieu sait que j’ai soutenu ma part du fardeau d’Adam sur cette terre. Il faut travailler pour deux raisons, une psychologique et une autre sociologique. Psychologiquement, il faut travailler pour s’accomplir, se révéler à nous mêmes dans nos capacités et nos limites; il faut travailler pour être capable de traduire une vie éphémère en œuvre appelée à nous survivre et à nous dépasser. Il faut transmettre l’essentiel de notre subjectivité dans des œuvres qui sauront les conserver et interpeller ceux que la vie ne nous aura pas permis de rencontrer. Sociologiquement, il faut travailler pour la raison qu’évoquait déjà Charles Maurras au début du XXe siècle, parce qu’il faut laisser, en partant, un surplus à ce qui existait au moment où nous avons reçu la vie. Nous avons certes une ontologie à respecter de notre Être, mais nous avons aussi une fonction sociale à accomplir, et c’est par elle que notre Être sera moralement jugé par les siècles à venir. On a érigé des statues et des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiV-Kj93Oogt_fMkRtdnRoMMhH0LVQ_8YnmVUzP4EppffkIIdtCzpgN8PmIrzpQNt9y1fSQNypHbhm8u41Ql68WqLL3R2x_1GipOyr_0gvBTdnmAyCPs_e4iD-KSb3FnE2gOxFB0JI74cE/s104/Moscow_-_Monument_to_Peter_The_Great.JPG">monuments</a> à des hommes et à des femmes qui ont entraîné des millions de morts violentes. Par contre, les États se sont souvent montré chiches de générosité pour ceux qui avaient le plus contribué à nourrir la civilisation. Voilà pourquoi nous ne pouvons pas nous fier aux autorités pour assurer l’amélioration de la condition humaine.<br />
<br />
L’humanisme de la famille Martin est un exemple de cette aliénation de la conscience, la conscience malheureuse qui s’ignore dans un bonheur domestique où le travail ne participe pas à l’émancipation mais à la reproduction de stéréotypes abstraits traduits en comportements concrets. Bref, John & Mary sont déjà des cocus contents. On leur enseigne, comme on l’a enseigné à moi, que le monde est bon et gentil et que si nous sommes bons et gentils avec nos semblables, ceux-ci le seront envers nous. Rien de plus faux. Le mal corrompt les intentions, même les meilleures, et j’ai vu la gentillesse se montrer sous son vrai jour comme une véritable saloperie. Le fait d’avoir écrit des dictées sur les clochers surmontés de croix et de coqs, d’avoir calculé des rendonnées pédestres au Cap-de-la-Madeleine ou d’ânonner sur les mystères que j’étais trop <i>niaiseux</i> pour comprendre ne m'a rien appris sur la conduite humaine, l’histoire, au contraire, m’a permis d’accéder à la conscience de soi, à la fois comme individu dans une continuité et comme membre d’une collectivité qui s’étendait, comme les ondes qui suivent le ricochet d’un caillou à la surface de l’eau, de ma «petite patrie» à l’humanité tout entière.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgcPtPyVmGW53MStpgyNF8A4euR-kDXRLSt7wJZ0llnn-ku51nYZqoCCur7mzJnibW_hou0FaK3_Xe2UILmAUScQzgv4RyuLQ83GXCKM0kjZu1tF_CYJqE5RTq68ORzcmbXvGhy6mUIXWk/s1600/demaistre2.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgcPtPyVmGW53MStpgyNF8A4euR-kDXRLSt7wJZ0llnn-ku51nYZqoCCur7mzJnibW_hou0FaK3_Xe2UILmAUScQzgv4RyuLQ83GXCKM0kjZu1tF_CYJqE5RTq68ORzcmbXvGhy6mUIXWk/s320/demaistre2.jpg" width="213" /></a></div>Aussi, la notion de «devoir» était-elle très vicieuse. Au XIXe siècle, elle était le cheval de bataille des réactionnaires contre l’esprit des Lumières tout entier porté sur les droits (en particulier les droits de l’homme). Un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgcPtPyVmGW53MStpgyNF8A4euR-kDXRLSt7wJZ0llnn-ku51nYZqoCCur7mzJnibW_hou0FaK3_Xe2UILmAUScQzgv4RyuLQ83GXCKM0kjZu1tF_CYJqE5RTq68ORzcmbXvGhy6mUIXWk/s104/demaistre2.jpg">Joseph de Maistre</a> ne cessait d’ériger les devoirs comme plus importants que les droits: devoirs envers les autorités, quelles soient religieuses, politiques ou parentales. Les chef de file du conservatisme et de la réaction ont suivi tout au long des deux derniers siècles et le mot «devoir» est celui privilégié par les gouvernements établis, les fascistes comme les communistes, les démocrates comme les socialistes. Monarchie ou République, il y en a eu que pour les devoirs du citoyen contre ses droits, toujours confondus par le légalisme. La liste des devoirs qui vous enserrent est toujours plus longue que celle des droits qui vous libèrent, et que l’on abrège assez vite à des principes abstraits. tandis que les devoirs sont généralement concrets et accompagnés de sanctions si jamais vous venait à l’esprit l’idée d’y déroger.<br />
<br />
Il n’y a de vraies connaissances que celles qui émancipent autant l’esprit que le corps. Ce ne sont pas les contenus: mathématique, langues première et secondes, géographie et histoire ou physique et chimie: toutes libèrent comme toutes aliènent; il y va, avant tout, des intérêts personnels, des goûts particuliers, des aptitudes talentueuses et des promesses sociales de sécurité et de confort qui ne sont pas du tout à mépriser. Le seuil entre la compétence et l'incompétence se situe précisément là. Et dans ce cas, dépasser les limites de la matière scolaire ouvrira sur les meilleurs «devoirs» qui seront agréables à accomplir. De toute façon, plus nous creuserons notre champ d’intérêt particulier, plus les autres disciplines viendront s’y ajouter au fur et à mesure. Le savoir humain est entier, et il ne faut pas succomber à l’illusion de la spécialisation qui nous le présente fragmenté afin d’en ériger des parties saisies comme autant de propriétés privées exclusives des spécialistes, <i>apparatchiki</i> d’institutions universitaires ou de laboratoires de recherche. Là est l’aliénation la plus grave jamais causée au savoir; pire même que l’intoxication idéologique du religieux et du politique, la censure.<br />
<br />
John & Mary, et c’est là sans doute le bon côté de ce tableau, vivaient dans une culture humaniste qui considérait encore la culture générale comme la marque d’un esprit ouvert et sain. Et c’est là le parti que j’ai pris de cette éducation idéologiquement <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjcjTEeUOi8niVoWl97n2H3jj3IiDIcCpvkWryPueee-mPtCA59Zl4y8ucxpQKus1Y6VHRgoBHE9CzJW_VqxWLJQUEhtD9TNM-qltuPMMY9BNCNyDxj9at1alBPU1SL2zdAihB6n81QONg/s1600/01e90228.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="232" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjcjTEeUOi8niVoWl97n2H3jj3IiDIcCpvkWryPueee-mPtCA59Zl4y8ucxpQKus1Y6VHRgoBHE9CzJW_VqxWLJQUEhtD9TNM-qltuPMMY9BNCNyDxj9at1alBPU1SL2zdAihB6n81QONg/s320/01e90228.jpg" width="320" /></a>intoxiquée de calculs écrit et mental, de français parlé et écrit et du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjcjTEeUOi8niVoWl97n2H3jj3IiDIcCpvkWryPueee-mPtCA59Zl4y8ucxpQKus1Y6VHRgoBHE9CzJW_VqxWLJQUEhtD9TNM-qltuPMMY9BNCNyDxj9at1alBPU1SL2zdAihB6n81QONg/s104/01e90228.jpg">psittacisme</a> catéchétique. J’aimais apprendre, en dépit de l’école. J’aimais connaître des domaines larges et différents. Il y a un temps où le meilleur procédé pédagogique reste l’éclectisme, le temps du moins que l’esprit se retrouve, s’accorde avec le <i>Socius</i> ambiant comme avec la <i>Psyché</i> en formation. Imposer des méthodes ordonnées ne sert à rien car les motivations intérieures, qui relèvent de chaque individu, n’y sont pas. En ce qui a trait à l’intoxication idéologique, il ne fait que conditionner un esprit à l’intérieur de paramètres étroits qui équivalent à la carotte et au bâton. Malheureusement, c’était l’instruction qu’on me donna en 1960-1967 où la joie et le repentir étaient la «morale» de la lecture introduisant la lettre «j» dans mon vocabulaire.<br />
<br />
J’ai ici l’édition de 1958 de <i>Mon premier livre de lecture</i> (prix 55¢). C’est le livre de lecture qui commence par les lettres «i» et «u», avec la souris cachée dans la meule de foin et le charretier qui crie hue à son cheval. La leçon concernant la lettre «j» montre un «ange» (où il n’y a pas de «j» même si on y retrouve le son j) et la petite Jovette (le «j» évoque ici la vie joyeuse et légère de Jovette) et la portée morale qui passe de la joie, à la punition et au repentir.<br />
<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEicWX5DJu49dXuABTbQy3efg_oGUIrVpf88Bnc1Y0cSAdxT-XaJv9lMXEKautM-4XObpcxP_stzxeth6UYu8H7svpbSqAJOpTO00xQOMBQuLEiEQ5kjHNrjlng2wQl2uCYohlBuclgiPKw/s104/Ange+de+Jovette.jpg"><b>L’Ange gardien</b></a><br />
<br />
</div><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEicWX5DJu49dXuABTbQy3efg_oGUIrVpf88Bnc1Y0cSAdxT-XaJv9lMXEKautM-4XObpcxP_stzxeth6UYu8H7svpbSqAJOpTO00xQOMBQuLEiEQ5kjHNrjlng2wQl2uCYohlBuclgiPKw/s1600/Ange+de+Jovette.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEicWX5DJu49dXuABTbQy3efg_oGUIrVpf88Bnc1Y0cSAdxT-XaJv9lMXEKautM-4XObpcxP_stzxeth6UYu8H7svpbSqAJOpTO00xQOMBQuLEiEQ5kjHNrjlng2wQl2uCYohlBuclgiPKw/s200/Ange+de+Jovette.jpg" width="196" /></a><i>Quand Jovette vint au monde, les mauvais anges s’empressèrent d’accourir. Il y avait l’ange de la paresse, l’ange de la vanité, l’ange du plaisir défendu. Ils paraissaient beaux de loin, mais, de près, ils avaient une figure grimaçante et, quand ils volaient, leurs ailes claquaient comme celles des chauves-souris.</i><br />
<br />
<i>Un autre bruit d’ailes, cette fois très doux: j j j j, les mit en fuite. Ils partirent en promettant de revenir plus tard. Et l’ange gardien de Jovette - car c’était lui - commença à veiller sur son berceau. Parfois, il battait joyeusement des ailes: j j j j j et l’enfant se mettait à sourire. C’est ce qu’on appelle: sourire aux anges.</i><br />
<br />
<i>Pendant longtemps Jovette resta pieuse et sage. Chaque fois qu’elle était tentée de faire une vilaine action, elle entendait le j j j j tout triste de son ange qui s’éloignait et cela suffisait à l’arrêter.</i><br />
<br />
<i>Puis elle eut vingt ans et, comme elle était aussi légère que jolie, elle se dissipa. Au milieu du bruit des fêtes et du plaisir, jamais plus elle n’entendit le j j j j attristé de son ange gardien.</i><br />
<br />
<i>Un matin cependant, en revenant de la danse, elle se sentit très malade et comprit qu’elle allait mourir. Elle était seule et, dans le grand silence de sa chambre, elle perçut tout-à-coup le bruit d’ailes si longtemps oublié: j j j j. Avec émotion, elle se rappela son enfance pieuse, une <b>larme de repentir</b> perla à sa paupière et elle expira.</i><br />
<br />
<i>Elle fut transportée devant le divin Juge tenant une balance à la main. Les démons vinrent et entassèrent dans un des plateaux tous ses péchés. En voyant comme ils étaient nombreux, elle crut qu’elle était perdue. Mais elle entendit son bon ange arriver en hâte j j j j. Il n’avait pas grand’chose; tout ce qu’il put trouver, ce fut une pauvre petite larme qu’il déposa dans l’autre plateau de la balance. Mais, ô surprise! le plateau se mit à pencher; la petite larme pesait plus que tous les gros péchés.</i><br />
<br />
<i>L’ange gardien de Jovette prit donc son âme et, volant joyeusement j j j j j, il l’emporta au ciel.</i> (p. 46)<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhVulOvlwl7MuyZK7bIY4wOPSD7qVTIz0tlK6tYiiDhGlljdvcekfRbH72vDyL65BnUUm_Q_38CaPLdmA8UsloPwWci8Qyf1qC-7b59HSLjbIlUyP5sIVMqlpy1ZMiL9dVSOODT98LH0SE/s1600/rocher+perc%25C3%25A9.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><br />
</a></div><br />
D’où la morale que dans le catholicisme, vous pouvez faire tout le mal que vous pouvez pourvu que vous le regrettiez sur votre lit de mort, votre âme sera sauvée. C’était bien là ce qu'on appelle: gagner sur tous les tableaux à la fois; c'est la morale ou l'hypocrisie est contenue comme une <i>cherry blossom</i> dans le chocolat des bonnes intentions que nous expose la leçon «j». En 1971, parue une édition «rénovée» de ce manuel scolaire de première année. Le diable avait emporté Jovette et son ange gardien le remplaçant par un texte qui, pour être moins moralisateur, n’en était quand même pas moins d’une insipidité désolante:<br />
<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhVulOvlwl7MuyZK7bIY4wOPSD7qVTIz0tlK6tYiiDhGlljdvcekfRbH72vDyL65BnUUm_Q_38CaPLdmA8UsloPwWci8Qyf1qC-7b59HSLjbIlUyP5sIVMqlpy1ZMiL9dVSOODT98LH0SE/s104/rocher+perc%25C3%25A9.jpg"><b>Les mouettes</b></a></div><br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzBLBuPJGQzbf0AfjSToIAg20XSilRuXV1SAw2hb6cHczIB7JL25_gMpv5LftwTZON9kwZgbx5lmeD3na40aZTdF3AteKJqctsGdpJfn102yrMIJepJ5seN2akW2Jry94VSySoCP2lhsI/s1600/gar%25C3%25A7onnet.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzBLBuPJGQzbf0AfjSToIAg20XSilRuXV1SAw2hb6cHczIB7JL25_gMpv5LftwTZON9kwZgbx5lmeD3na40aZTdF3AteKJqctsGdpJfn102yrMIJepJ5seN2akW2Jry94VSySoCP2lhsI/s200/gar%25C3%25A7onnet.jpg" width="148" /></a><i>Jean est heureux. Il vient de recevoir une carte postale de son parrain qui passe ses vacances en Gaspésie. La carte représente un rocher autour duquel volent des oiseaux au plumage d’un gris bleuté!</i><br />
<br />
<i>"Ce sont des mouettes", dit la maman de Jean, </i><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhXzIY-5JMxhsy1ME5d37NQ5VcW9qRVgutu1l4FUrAERvYqHme_mi85p04Fs-dvvgJHS1a85HUHP1h0HOuDfzC-jBXMo_yBUEwjyYbw71XZFeNCc59sXlJhUnsU0c8h-PVHX8YDFEYp_WY/s1600/rocher+perc%25C3%25A9.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="159" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhXzIY-5JMxhsy1ME5d37NQ5VcW9qRVgutu1l4FUrAERvYqHme_mi85p04Fs-dvvgJHS1a85HUHP1h0HOuDfzC-jBXMo_yBUEwjyYbw71XZFeNCc59sXlJhUnsU0c8h-PVHX8YDFEYp_WY/s200/rocher+perc%25C3%25A9.jpg" width="200" /></a><i>qui ajoute: "Elles sont très nombreuses</i><i> sur les côtes de la Gaspésie. Elles font leur nid au creux des rochers et se nourrissent de poissons et de mollusques. Leurs ailes font "jj…jj" quand elles volent autour du rocher que tu vois là et qui s'appelle le Rocher Percé".</i><br />
<br />
<i>Jean souhaite aller en Gaspésie pour voir les mouettes, et pour écouter le bruit de leurs ailes: "jj…jj". </i>(p. 42)<br />
<br />
Nous n’irons pas jusque-là. En ce qui concerne Jovette, il n’y a rien de plus à dire que le mot célèbre de Victor Hugo: «Elle aimait trop le bal, c’est ce qui l’a tuée”. Pour Jean, son rêve s’est réalisé, et il est resté coincé dans le trou du Rocher Percé. C’est ce que ça donne des leçons idiotes et des devoirs imbéciles.<br />
<br />
Alors prenons plaisir au travail qui fait couler en nous la sève de la vie et laissons aux institutions scolaires le soin de saboter tout cela. Il y aura toujours des esprits rêveurs qui finiront par passer entre les mailles du filet.<br />
<br />
<div style="text-align: right;">Montréal<br />
29 juin 2011</div></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-22651283059340724292011-06-28T23:04:00.000-07:002011-07-06T20:40:30.065-07:00In the dining room<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZmoHn5oB47lP17up5DInGOCkbJn7c2jxYNIqMjzZfjIqXf91IPK_81JAiV1xxXgItginVVGpcgm8vFcWxVc5BI5s4l6CjRNQ6C6ga6debaafjpLfOaJz-1vIISW7lQbj0A28Qx1lIxYU/s1600/9-+at+the+dining+room.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="292" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZmoHn5oB47lP17up5DInGOCkbJn7c2jxYNIqMjzZfjIqXf91IPK_81JAiV1xxXgItginVVGpcgm8vFcWxVc5BI5s4l6CjRNQ6C6ga6debaafjpLfOaJz-1vIISW7lQbj0A28Qx1lIxYU/s400/9-+at+the+dining+room.jpg" width="400" /> </a></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><b>IN THE DINING ROOM</b></div><div style="text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">Nous avions entrevu la famille Martin de loin, à l’église. Maintenant, nous la rencontrons dans son intimité, dans la salle à dîner. L’occasion n’est pas banale puisqu’il s’agit «de l’anniversaire de naissance de John». Donc, notre hypothèse que John & Mary seraient jumeaux ne tient plus. L’alternative, pour que les deux enfants soient du même âge, serait que l’un des deux ait été adopté par la famille Martin. Mais rien, encore là, ne le laisse supposer. Mais oui, je sais, la didactique a sa raison que la raison ignore. Tout de même! </div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">Que nous apprend ce tableau sur les mœurs de la table dans les <i>Fifties</i>? La bonne humeur des repas en famille, surtout un jour d’anniversaire. Papa sourit <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjC14wtcOJvCnKq2mWcAfNX2Ep4GrFWrxNtpwaHfmO60Hksja6tsnICWH6LL2IYy42Ua71jYesw4nKQRPQ-aLHpz9agsoTBfC2aLQySus2nc9MXNro6hH7Qb7oJ2puOlzUPg9btzNCnHc4/s1600/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="244" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjC14wtcOJvCnKq2mWcAfNX2Ep4GrFWrxNtpwaHfmO60Hksja6tsnICWH6LL2IYy42Ua71jYesw4nKQRPQ-aLHpz9agsoTBfC2aLQySus2nc9MXNro6hH7Qb7oJ2puOlzUPg9btzNCnHc4/s320/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg" width="320" /></a>et Maman est fière de présenter son superbe poulet rôti, qui n’a rien d’un poulet tiré d’un baril du célèbre Colonel. Il a la taille d'une dinde. Probablement un authentique chapon. Tout le monde s’est vêtu sur son 31 (ou son 36, au choix). Il n’est pas question de fêter un anniversaire en costume relaxe. Papa et John (on le devine, même si on le voit de dos), ont la cravate nouée au collet. Mary n’est pas non plus vêtue en <i>souillonne</i>. Le gâteau est sur le vaisselier et nous comptons <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjC14wtcOJvCnKq2mWcAfNX2Ep4GrFWrxNtpwaHfmO60Hksja6tsnICWH6LL2IYy42Ua71jYesw4nKQRPQ-aLHpz9agsoTBfC2aLQySus2nc9MXNro6hH7Qb7oJ2puOlzUPg9btzNCnHc4/s104/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg">sept chandelles</a>, ce qui veut dire que John a sept ans (et Mary aussi, par le fait même, puisqu’ils sont dans la même classe). Bref, tout le monde a l’air «content», et le dîner s’apprête à être mémorable.<br />
<br />
Outre la tenue vestimentaire, le tableau nous offre l’élégance de l’ordre: la disposition des ustensiles (fourchettes à gauche, couteaux et cuillers à droite) relève de la bienséance telle qu’enseignée dès le plus jeune âge, car dès la première année, nous avions déjà des cours de bienséance. Les mœurs encore classiques de l’époque prescrivaient non seulement un maintien à la table, mais aussi le respect de tout un ordre de priorités entre les individus et les objets. Les hommes sont assis face à face et les femmes de même. Papa mange le premier (il lève sa cuiller), Mary la trempe encore dans le bol, John ne l’y a pas encore touché et Maman, c’est sa besogne, apporte le plat de résistance, le poulet rôti fumant. Elle mangera, comme il se doit, en dernier. Le gâteau est sur le vaisselier, derrière papa. Au centre de la table, le napperon sur lequel sera déposé l’assiette principale contenant le volatile rôti. Les murs sont d’un vert tendre, semblable aux murs de la chambre de Mary, preuve que si le père trône en roi, tout ce qui relève de la salle à dîner est de la gouvernance des femmes. Le tableau au mur, reproduisant une marine avec un voiler se prête parfaitement à l’allégorie confirmant cette hypothèse.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh4wbzbH3FZBFb-ynLt1U2ntChp61QP3RABRnZ7zYVOJZZUx1lNQbCTY1mXr_QBRc2zTVHbx6uQhTw7CInVpmTZnPF9Pms_o-KzSdC4fauJPUWEW6Dpcjg2tUi-m6QlXRnQWXi380o9w_0/s1600/pain+tranch%25C3%25A9.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="194" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh4wbzbH3FZBFb-ynLt1U2ntChp61QP3RABRnZ7zYVOJZZUx1lNQbCTY1mXr_QBRc2zTVHbx6uQhTw7CInVpmTZnPF9Pms_o-KzSdC4fauJPUWEW6Dpcjg2tUi-m6QlXRnQWXi380o9w_0/s320/pain+tranch%25C3%25A9.jpg" width="320" /></a>La seule modernité qui apparaît dans ce tableau, c’est le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh4wbzbH3FZBFb-ynLt1U2ntChp61QP3RABRnZ7zYVOJZZUx1lNQbCTY1mXr_QBRc2zTVHbx6uQhTw7CInVpmTZnPF9Pms_o-KzSdC4fauJPUWEW6Dpcjg2tUi-m6QlXRnQWXi380o9w_0/s104/pain+tranch%25C3%25A9.jpg">pain tranché</a>. Les tranches de pain sont déposées dans une assiette, et non une corbeille à pain comme l’enseigne la leçon de vocabulaire. Ce n’est sûrement pas là une coutume ancienne. Mais outre cette avancée dans la «mécanisation» - selon le mot de Siegfried Giedeon - de la vie domestique, l’éducation que les parents Martin transmettent à leurs enfants respecte la tradition humaniste élaborée depuis Érasme.<br />
<br />
L’aspect empesé du maintien et l’ordre de la dispositions des ustensiles sur la table à dîner remontent au XVIe siècle. C’est l’époque où même les plus grands penseurs </div><table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFULCnjTLaMYDtxdR0LLxHSRDtVeL5Js1q7bKJSeetVqIhjHiWEkqANFHhjaFNfpek6srJkvEF7Oo94tgvj6__Su-2QH_nRseHpJk7ahKxtHn1hEWz39yFNMz-gwnGGlJhOXJTEf2wkxY/s1600/medium_holbein_erasme.4.jpg" style="clear: right; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFULCnjTLaMYDtxdR0LLxHSRDtVeL5Js1q7bKJSeetVqIhjHiWEkqANFHhjaFNfpek6srJkvEF7Oo94tgvj6__Su-2QH_nRseHpJk7ahKxtHn1hEWz39yFNMz-gwnGGlJhOXJTEf2wkxY/s320/medium_holbein_erasme.4.jpg" width="225" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Didier Érasme</td></tr>
</tbody> </table><div style="text-align: justify;">de l’Europe essayaient d’instituer une étiquette qui distingue «l’honnête homme» du barbare. Le pédagogue qui établit de manière ponctuelle et ordonnée le code de comportement, non seulement à la table mais dans toutes les sphères d’activité quotidienne, c’est <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFULCnjTLaMYDtxdR0LLxHSRDtVeL5Js1q7bKJSeetVqIhjHiWEkqANFHhjaFNfpek6srJkvEF7Oo94tgvj6__Su-2QH_nRseHpJk7ahKxtHn1hEWz39yFNMz-gwnGGlJhOXJTEf2wkxY/s104/medium_holbein_erasme.4.jpg">Didier Érasme</a> (1466 ou 1469-1536). Six ans avant sa mort est publié son <i>De civilitate morum puerilium</i>, ou les mœurs de la civilité enseignées aux enfants. Dans ce traité, il conseille, entre autres: «À droite le gobelet et le couteau, à gauche le pain».(1) Or, c’est exactement la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-7mlNqLYpPdt-2S7adofntutBDvqF7heBbNgHPvD3Wv55jm58A0WjjJRtaHJO1p3qq_afd5DEC6TvhHiQlZZOnoVZW7RbUlh-glM_N3ytnZMNOUBD2y73JvB-QRvZoG-kmG65yiFaKkE/s104/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg">disposition</a> que nous <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-7mlNqLYpPdt-2S7adofntutBDvqF7heBbNgHPvD3Wv55jm58A0WjjJRtaHJO1p3qq_afd5DEC6TvhHiQlZZOnoVZW7RbUlh-glM_N3ytnZMNOUBD2y73JvB-QRvZoG-kmG65yiFaKkE/s1600/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="111" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-7mlNqLYpPdt-2S7adofntutBDvqF7heBbNgHPvD3Wv55jm58A0WjjJRtaHJO1p3qq_afd5DEC6TvhHiQlZZOnoVZW7RbUlh-glM_N3ytnZMNOUBD2y73JvB-QRvZoG-kmG65yiFaKkE/s200/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg" width="200" /></a>retrouvons devant John, dans le tableau 9. Le même Érasme avertit son élève: «Ne plonge pas le premier tes mains dans le plat que l’on vient de servir: on te prendra pour un goinfre et c’est dangereux. Car celui qui fourre, sans y penser, quelque chose de trop chaud dans la bouche, doit le recracher ou se brûler le palais en avalant. Tu susciteras les rires ou la pitié». Il est donc inimaginable de voir tous les bras se tendre pour arracher, qui une cuisse qui une aile du poulet rôti que maman va déposer sur la table. Ce sera même le privilège de papa de trancher, adroitement et proprement, le morceau qui conviendra à chacun. Enfin, «il est discourtois de lécher ses doigts graisseux ou de les nettoyer à l’aide de sa veste. Il vaut mieux se servir de la nappe ou de la serviette».(2) Évidemment, la publicité du célèbre Colonel dont son poulet serait bon à s’en lécher les doigts anéantit près de cinq siècles de civilité et de savoir-vivre à la table. En ce qui concerne la nappe, certes les mœurs ont évolué et personne ne songerait à s’essuyer la bouche avec son coin, par contre la serviette sert à plus qu’à s’essuyer la bouche, contrairement à l’avis du célèbre humaniste, certains s’en servent même pour se moucher ou y cracher.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFjesLw2JDI4umCSsaEr3pOT6COhY-em40_jJ0W0wvuTL8WvRFM0LWo2l3KHcereSJ8xe1s9eC3dfAvEHbRyc-4HrMeNwPk19oqCTHEiR5xX3Wxa7OCSYlgPHRs3Q6T4MW8M4AhhdQIT8/s1600/DSC03785.JPG" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFjesLw2JDI4umCSsaEr3pOT6COhY-em40_jJ0W0wvuTL8WvRFM0LWo2l3KHcereSJ8xe1s9eC3dfAvEHbRyc-4HrMeNwPk19oqCTHEiR5xX3Wxa7OCSYlgPHRs3Q6T4MW8M4AhhdQIT8/s200/DSC03785.JPG" width="150" /></a></div>Sans doute la civilité dépend-elle des mœurs et que celles-ci évoluant, la définition et les attitudes corollaires de cette civilité sont appelées à se modifier. Aujourd’hui, sans s’être trop éloigné du comportement austère de la famille Martin à la table, un assouplissement permet de rendre les repas plus conviviaux et moins cérémonieux. En sommes-nous devenus plus barbares pour autant? Sans doute pas. L’austérité bourgeoise, on l’a dit, cache souvent des brutalités qui ne conviendraient pas à nos mœurs «libéralisées». L’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgzwyBy-taHZNIESeP9m22rMHOknqDiIombLXo1Ms6m2cnuA0-8uvXcvwZxt7_6wFi7RTHp08fgiIeECs2-ZqjhmvYKI-LVoQhNOoqxC1QU9CYOT-Y5YWafMTNU9njHABGrYRFGIGb_0RI/s104/DSC03785.JPG">encanaillement de la bourgeoisie</a>, qui s’est développé au cours des années soixante-dix/quatre-vingts du siècle dernier a modifié les comportements bourgeois eux-mêmes et ce maintien nobiliaire apparaît, même dans les milieux aisés, suranné, voire purement anachronique.<br />
<br />
Mais pour les <i>Fifties</i> et les <i>Sixties</i>, ils ne l’étaient pas. Même les familles les moins aisées essayaient de se donner une étiquette. La dinde à Noël, le jambon à Pâques étaient de rigueur. La tarte aux pommes remplaçait la tarte aux cerises de nos voisins Américains, de même que la <i>Thanksgiving,</i> qui était fêtée la-bas en novembre avec la grande dinde traditionnelle, n'était au Canada en octobre, que la journée où l’on changeait les moustiquaires des fenêtres pour un double châssis en attendant les premiers froids d’automne. Le cérémonial présenté dans le tableau 9 semble donc confondre l’anniversaire de John avec un dimanche tant les cols sont empesés et le maintien droit et ordonné.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEizo7i445vxo13LCK7Smdxjhb1xF_apEt4VFTZ8rrcHGCpPIBIaDNoY-Umagkyy7gXh3xD3K4cA0W0kYjaAoaBfpAfLgSRlk3Qv02lp2Lfkbh_ZnxHNmBgSc3W41rMnh9ZZmTz5ZgQlk94/s1600/Sans+titre+1.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEizo7i445vxo13LCK7Smdxjhb1xF_apEt4VFTZ8rrcHGCpPIBIaDNoY-Umagkyy7gXh3xD3K4cA0W0kYjaAoaBfpAfLgSRlk3Qv02lp2Lfkbh_ZnxHNmBgSc3W41rMnh9ZZmTz5ZgQlk94/s200/Sans+titre+1.jpg" width="200" /></a>Cet <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEizo7i445vxo13LCK7Smdxjhb1xF_apEt4VFTZ8rrcHGCpPIBIaDNoY-Umagkyy7gXh3xD3K4cA0W0kYjaAoaBfpAfLgSRlk3Qv02lp2Lfkbh_ZnxHNmBgSc3W41rMnh9ZZmTz5ZgQlk94/s104/Sans+titre+1.jpg">ordre</a> n’était pas qu’un fantasme autoritaire. C’était l’ordre qui soutenait et préparait au bonheur de la famille. Chaque individu, en assumant sa fonction sociale selon son âge et selon son sexe, évitait de sombrer dans la barbarie qui était l’antithèse de la civilité. Comme le soulignait Érasme, parmi les conseils cités plus haut: «C’est d’un paysan que de plonger les doigts dans la sauce. On prend ce qu’on désire avec le couteau et la fourchette sans fouiller le plat tout entier comme font les gourmets (?), en s’emparant du morceau le plus près de soi».(3) Un paysan, c’est un barbare qui ne sait ni lire ni écrire et, par le fait même, se voit refouler au ban de l’humanité. Telle était la vision humaniste du temps. On ne naît pas homme, on le devient. Et les traités de pédagogie, comme ceux d’Érasme, visaient précisément à éduquer les enfants afin qu’ils deviennent des «hommes», c’est-à-dire des «adultes».<br />
</div><div style="text-align: justify;">Or traiter les enfants Martin de «paysans» serait équivalent de les traiter de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBhMKQsNJv_l3LjYGFPSSjJgVPHlJaOBJdUWlhxv8RYvEXJWJSKD2R5_EidB7_uV-JAIOON5zOkuVs-IWl4ZmLaK7Ic1FH8RMmnCiAAA_z4cZEHcKz6v6kvt2dvW6rPRT4iIIDPwJUWx4/s104/_wedding.1253625801.jpg">barbares</a>. Ce serait le désordre, l’anarchie. On se lécherait les doigts après avoir tripoté un morceau de poulet rôti avec ses<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBhMKQsNJv_l3LjYGFPSSjJgVPHlJaOBJdUWlhxv8RYvEXJWJSKD2R5_EidB7_uV-JAIOON5zOkuVs-IWl4ZmLaK7Ic1FH8RMmnCiAAA_z4cZEHcKz6v6kvt2dvW6rPRT4iIIDPwJUWx4/s1600/_wedding.1253625801.jpg" style="clear: right; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="180" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBhMKQsNJv_l3LjYGFPSSjJgVPHlJaOBJdUWlhxv8RYvEXJWJSKD2R5_EidB7_uV-JAIOON5zOkuVs-IWl4ZmLaK7Ic1FH8RMmnCiAAA_z4cZEHcKz6v6kvt2dvW6rPRT4iIIDPwJUWx4/s320/_wedding.1253625801.jpg" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Breughel. <i>Le Mariage </i>(détail) </td></tr>
</tbody> </table>mains et trempé ses doigts dans la sauce BBQ. On finirait par s’essuyer la bouche graisseuse avec le bout de la nappe et, pourquoi pas, à péter au milieu du repas. Toute cette grossièreté qui définissait, qui colorait le Moyen Âge aux yeux des Renaissants,et en particulier des humanistes de la trempe d’Érasme et que devait combattre ses traités de pédagogie, reviendrait comme règle des mœurs, et par le fait même instituerait l’anarchie comme comportement civil! Une contradiction beaucoup plus sentie que le Poétique des tableaux de <b>conversation anglaise</b> sauterait immédiatement aux yeux des bourgeois des <i>Fifties</i>. Ainsi s’explique le mépris qui se développera parmi ces bourgeois envers les <i>beatniks</i> ou les <i>hippies</i> des années cinquante/soixante que certains de leurs enfants s’empresseront de rejoindre, à titre de révolte personnelle contre l’autorité parentale et l’<i>establishment</i> social et économique.<br />
<br />
Le maintien de l’ordre est-il synonyme de la civilité? À voir la façon dont les États usent des moyens de répression lorsque leur domination est remise en question, on en douterait. Mais ce sont-là des prises de conscience qui s’effectuent dans les milieux fortement urbanisés où richesse et pauvreté se côtoient de façon impudique. Dans un petit bled, une petite ville à l’image de <i>Peyton Place,</i> il est possible d’écarter les grandes conditions sociales, où tout simplement établir une ligne de démarcation - généralement la voie ferrée - comme séparation géographique entre les possédants et ceux qui ne possèdent pas. À partir de ce moment, il est possible de vivre, d’aller à l’église, à l’école, sans jamais rencontrer ceux qui ne placent pas leurs fourchettes à gauche lorsque vient le temps des repas car ils n’ont que des sandwiches à manger.<br />
<br />
Le foyer Martin est la «Résidence Soleil» des petits-bourgeois des <i>Fifties</i>. Tout y respire la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_M8WO_nYdehUK876DcACA72gtKIry1Bq4SUOEBTl-AZsPcUo9h7i_XFIWk8_YwBQEjChPpp8c7mB4JuoyLV5Lml927KWCNsjq6uVWa7xWwkVF_WM7XRRDGPgp0w3VzSrzjUs5gciwmn0/s104/Sans+titre+2.jpg">civilité</a>, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_M8WO_nYdehUK876DcACA72gtKIry1Bq4SUOEBTl-AZsPcUo9h7i_XFIWk8_YwBQEjChPpp8c7mB4JuoyLV5Lml927KWCNsjq6uVWa7xWwkVF_WM7XRRDGPgp0w3VzSrzjUs5gciwmn0/s1600/Sans+titre+2.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_M8WO_nYdehUK876DcACA72gtKIry1Bq4SUOEBTl-AZsPcUo9h7i_XFIWk8_YwBQEjChPpp8c7mB4JuoyLV5Lml927KWCNsjq6uVWa7xWwkVF_WM7XRRDGPgp0w3VzSrzjUs5gciwmn0/s200/Sans+titre+2.jpg" width="192" /></a>l’humanisme, le savoir-vivre et le bon goût. Salière et poivrière sur la table, comme l’enrobage de sucre qui enveloppe le gâteau, nous disent qu’il s’agit bien là d’un monde sucré/salé. Rien ne manque dans le foyer Martin. Le père joue à merveille son rôle de pourvoyeur et il en est fier, même triomphant à le regarder de près. Il aime ses enfants, et surtout John qu’il fixe des yeux, comme une véritable réplique de lui-même, un jeune garçon déjà imbu de ses valeurs personnelles. Mary aussi est fière de son frère. Elle le voit, pourrait-on dire, mieux qu’un frère; comme le garçon qu’elle aimerait sans doute épouser. La vanité de la mère est orientée de façon différente. Elle regarde son poulet rôti, qui sera le plat de résistance du repas. Elle sait qu’elle en est le maître d’œuvre. Comme il a été dit, sa fonction sociale, c’est sa <i>vocation</i> maternelle, et elle se doit de ne penser à rien d’autres. Une femme au travail ne pourrait trouver le temps ni les compétences pour faire rôtir à point un si merveilleux chapon tout en prenant le temps de faire un gâteau d’anniversaire. Aujourd’hui, les traiteurs ne voient point leurs clientèles diminuer malgré l’augmentation des programmes de télévision consacrés à des recettes de cuisine, ni d’autres programmes consacrés à la diététique et aux offensives portées contre la mal-bouffe.<br />
<br />
De fait, selon nos critères, le repas que s’apprête à manger la famille Martin est déjà inscrit dans la mal-bouffe même si on n’y retrouve pas de <i>fast food</i>. Déjà le pain blanc tranché est une incursion de la mal-bouffe sur la table des Martin. La question, contrairement <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFbF047jKEnjadFDNMpS6gqSdyXxAM1xs_yeKPgH_1bnJSGeggfBsud8sw2HMTyiuSwzzQIuy5KZjWWIxddSrL0jtkHawir7Nek00ycmsVLRuF7EVfxzQgnuvELrJDd4NtmlEeW_bUcEM/s1600/frites.gif" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="156" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFbF047jKEnjadFDNMpS6gqSdyXxAM1xs_yeKPgH_1bnJSGeggfBsud8sw2HMTyiuSwzzQIuy5KZjWWIxddSrL0jtkHawir7Nek00ycmsVLRuF7EVfxzQgnuvELrJDd4NtmlEeW_bUcEM/s200/frites.gif" width="200" /></a>à celle de l’époque, n’est plus de savoir si l’on souffle sur la cuiller de potage s’il est trop chaud ou si on rechigne s’il est trop salé, mais savoir s’il est fait de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFbF047jKEnjadFDNMpS6gqSdyXxAM1xs_yeKPgH_1bnJSGeggfBsud8sw2HMTyiuSwzzQIuy5KZjWWIxddSrL0jtkHawir7Nek00ycmsVLRuF7EVfxzQgnuvELrJDd4NtmlEeW_bUcEM/s104/frites.gif">gras-trans</a> (les méchants) ou si la base est trop épaisse. La sauce, déposée dans le saucier sur la table, à la gauche du père, est déjà trop riche en calories. Enfin le poulet est rôti. Juteux à souhait, la peau peut déjà être soupçonnée de cause d’obésité chez les enfants Martin. Heureusement qu’ils font leurs exercices dans leur salle de jeux. Bref, maman s’apprête à assassiner, à petits feux, toute sa famille. En accéléré, cela donnerait la scène finale du film <i>Montenegro</i>.<br />
<br />
Comme on le voit, nos critères du bien manger et de bien-être ne sont pas ceux qui présidaient au festin de la famille Martin au cœur des <i>Fifties</i>. Et cela met en relativité toutes nos croyances concernant la santé et les diètes que nous nous imposons comme autant de remèdes-miracles appliqués à notre survie et à la diminution des coûts de soins de santé. Pourtant, dans le tableau 9, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgSfW1QVBkyy5UOt4BGHYeCRdfcZNjd5USQ-FXY92HsPHCkh4i-X011kDGLDtPwXY9cEVuKS1h1fFdncq9odjHu0GyWoT7yh4UQeEWxky-efl6aToViZgTwr0cLAKIfLjTnRTItArwwx1c/s1600/2999665151_f15763d887.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgSfW1QVBkyy5UOt4BGHYeCRdfcZNjd5USQ-FXY92HsPHCkh4i-X011kDGLDtPwXY9cEVuKS1h1fFdncq9odjHu0GyWoT7yh4UQeEWxky-efl6aToViZgTwr0cLAKIfLjTnRTItArwwx1c/s200/2999665151_f15763d887.jpg" width="175" /></a>soupçonnerait-on que M. Martin est en proie à une crise cardiaque car souffrant d’obésité? En tout cas pas plus que si on considérerait qu’il souffre d’ulcères d’estomac par le stress causé par son emploi. Monsieur Martin paraît être un homme en parfaite santé. De même, Mary n’est ni une petite boulotte et John <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgSfW1QVBkyy5UOt4BGHYeCRdfcZNjd5USQ-FXY92HsPHCkh4i-X011kDGLDtPwXY9cEVuKS1h1fFdncq9odjHu0GyWoT7yh4UQeEWxky-efl6aToViZgTwr0cLAKIfLjTnRTItArwwx1c/s104/2999665151_f15763d887.jpg">obèse</a> souffre-douleur de son école. Et voyez pourtant ce qu’ils s’apprêtent à manger! Et ce qu’ils s’apprêtent à manger est exactement ce qu’ils mangent tous les jours: soupe, plats cuisinés, épices, sucre, sel et poivre, dessert. Maman est tout entière vouée à sa tâche domestique et elle a sans doute hérité de sa propre mère une partie des recettes dont elle-même a été nourries dans son enfance. D’autre part, la sédentarité domine sur les activités physiques. Il ne faut pas se laisser imposer une vision anachronique par le tableau 1, <i>Names of the parts of the body</i>. Nous verrons surtout John & Mary à l’école, en train de faire leurs devoirs, passer une soirée au salon, faire quelques petites activités de jardin. Bien sûr, John joue au baseball, au hockey, mais sa sœur s’amuse à la poupée auprès d’une machine à coudre. Rien là pour faire maigrir des bourrelets. <br />
<br />
La relativité des mœurs condamne donc la relativité des valeurs, y compris celles accordées à la santé et à l’hygiène physiques. L’humanisme croyait à l’adage romain un <i>mans sana in corpore sano.</i> L’éducation des mœurs présidait à l’éducation de l’esprit et ne s’enfargeait pas dans le culte de la gymnastique des romantiques du XIXe siècle. Si le corps doit être sain, c’est précisément pour que l’esprit le soit. C’est ainsi que le concevait Érasme lorsqu’il donnait ses conseils. Dans son esprit, la culture n’était pas celle du paysan ignare, mais du prince éduqué aux <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEivPVCVY5Qf2GUNATfTUzkVKSXGUtQULxUe25nFPVL4xtMJBBzbupWlkE6fWuvmHJ9mnhxi5Vd2PvUJy2WFV86uSoQABkfPKOHKPohLFWM4oow5MhXEYDoQjVDr1IMO1q0s2HQCWHLijGQ/s1600/db5cea26ca37aa0L.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEivPVCVY5Qf2GUNATfTUzkVKSXGUtQULxUe25nFPVL4xtMJBBzbupWlkE6fWuvmHJ9mnhxi5Vd2PvUJy2WFV86uSoQABkfPKOHKPohLFWM4oow5MhXEYDoQjVDr1IMO1q0s2HQCWHLijGQ/s200/db5cea26ca37aa0L.jpg" width="192" /></a>langues classiques de la Grèce et de Rome. Ce n’est pas pour rien que le tableau 10, après le copieux repas du tableau 9, présentera les deux enfants en train de faire leurs devoirs scolaires. Si le développement de l’esprit ne suit pas le développement du corps, ou retarde par rapport à la maturité du corps, il s’établit une dysfonction qui présente des hommes et des femmes de 30 ans avec une maturité d’adolescent de 14 ou 15 ans. L’ignorance de la <i>Kultur</i>, de la culture intellectuelle ou, comme le disaient les humanistes bourgeois du tournant du XXe siècle, de la culture générale, pour des corps aux activités déréglées à force d’exercices disproportionnées à l’équilibre corporel, comme on en arrive à le voir dans les milieux du sport de compétition, amateurs comme professionnels, nous retournons-là à la barbarie. Toute cette diététique ne sert alors à rien, sinon qu’à exercer son emprise sur les esprits mal-sains qui se dopent de leurs propres hormones sécrétées par un surcroît d'activités physiques comme s'ils se dopaient avec des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEivPVCVY5Qf2GUNATfTUzkVKSXGUtQULxUe25nFPVL4xtMJBBzbupWlkE6fWuvmHJ9mnhxi5Vd2PvUJy2WFV86uSoQABkfPKOHKPohLFWM4oow5MhXEYDoQjVDr1IMO1q0s2HQCWHLijGQ/s104/db5cea26ca37aa0L.jpg">stéroïdes</a> pris en pharmacie.<br />
<br />
Ne gâchons toutefois pas ce repas d’anniversaire. Être épicurien n’est en rien comparable à l’hédonisme contemporain où la démesure (l’<i>hybris</i>) l’emporte sur la capacité de goûter les plaisirs. La quantité s’est substituée à la qualité. On parle d’«extra-large» de poutine et de pizza. Hmm! J’adore la pizza, mais je ne saurais en engloutir plus que mon estomac peut le supporter. Pourtant, les records Guiness ne cessent d’enregistrer le plus grand nombre de pointes de pizza engouffrées en une heure, de hot-dogs, de poutines, etc. Que l’anorexie soit le pendant de la boulimie comme maladies (parfois mortelles) chez les jeunes filles (et aussi chez certains jeunes garçons), voilà qui était inimaginable du<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzuS7O4lDoeDd3g1w8D13ZrPi4MW3GPzPScPEp827VKTsB6UYJhdMDcgc8OASEFnMGxVLvT6wCnslb9ZVoKWn3ZridwUx-IJwBi1wpRroYdWD9y_3KEWbILM6GF7NQe4uZmAcCpbkcYhM/s1600/la-grande-bouffe-andrea-ferreol-and-philippe-noire.jpg" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="217" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzuS7O4lDoeDd3g1w8D13ZrPi4MW3GPzPScPEp827VKTsB6UYJhdMDcgc8OASEFnMGxVLvT6wCnslb9ZVoKWn3ZridwUx-IJwBi1wpRroYdWD9y_3KEWbILM6GF7NQe4uZmAcCpbkcYhM/s320/la-grande-bouffe-andrea-ferreol-and-philippe-noire.jpg" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Andréa Ferréol et Philippe Noiret dans <i>La Grande Bouffe</i></td></tr>
</tbody></table>temps de John & Mary! Ce sont des maux liés à une culture foncièrement barbare survalorisant l'apparence corporelle. Le <i>super size</i> américain chez qui l’obésité est l’une des maladies morbides les plus enregistrées, repose sur la quantité devenue qualité «<i>big</i>». Un déjeuner pris là-bas équivaut à trois repas par jour ici, au Québec. Comme l’activité physique n’a aucun rapport avec les anciens travaux des anciens jours, cette quantité phénoménale de graisses, de sucres, de sels s’accumule dans le corps et, bientôt, la crise cardiaque, l’aérophagie ou tout simplement l’éclatement de la panse deviennent des issues possibles et peu honorables de vaillants guerriers fiers de leur virilité par la quantité absorbée. L’<i>American Way of Life </i>va s’achever, comme dans le film de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzuS7O4lDoeDd3g1w8D13ZrPi4MW3GPzPScPEp827VKTsB6UYJhdMDcgc8OASEFnMGxVLvT6wCnslb9ZVoKWn3ZridwUx-IJwBi1wpRroYdWD9y_3KEWbILM6GF7NQe4uZmAcCpbkcYhM/s104/la-grande-bouffe-andrea-ferreol-and-philippe-noire.jpg">Marco Ferreri,</a> par une suite de morts dues à la sur-bouffe.<br />
<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgXIJz7AsyKaXxLOmi4BG6fVMOMrtq8_V4TLxhI_a8x-bzuKFizjH_9iDEpRmGtAENzsXp0aXH1BaUcHOMS6Pfu5oKmbgR8-oulbRYQCfsezU1alRdT5ZOHutAoLq8f89Bzn_hwZU9uJg8/s1600/0515.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgXIJz7AsyKaXxLOmi4BG6fVMOMrtq8_V4TLxhI_a8x-bzuKFizjH_9iDEpRmGtAENzsXp0aXH1BaUcHOMS6Pfu5oKmbgR8-oulbRYQCfsezU1alRdT5ZOHutAoLq8f89Bzn_hwZU9uJg8/s320/0515.jpg" width="189" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Jean-Baptiste de la Salle (1651-1719)</td><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><br />
</td><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><br />
</td></tr>
</tbody></table>Il ne s’agit pas ici d’établir un contraste car les <i>super size</i> d’aujourd’hui ont souvent été éduqués dans les Peyton Place où des familles Martin fêtaient les anniversaires sur le modèle présenté par le tableau 9. <i>In the dining room</i> est un tableau idéalisé, comme tous les autres du même manuel, en vue de présenter une image parfaite du maintien des membres de la famille Martin à la table. En cela, il complète les manuels de bienséance qu’on trouvait dans le tiroir de nos pupitres. Cela faisait partie d’une éducation encore humaniste, selon les traditions maintenues, par l’enseignement religieux, dominicain ou jésuite généralement, dans la tradition d’Érasme ou de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgXIJz7AsyKaXxLOmi4BG6fVMOMrtq8_V4TLxhI_a8x-bzuKFizjH_9iDEpRmGtAENzsXp0aXH1BaUcHOMS6Pfu5oKmbgR8-oulbRYQCfsezU1alRdT5ZOHutAoLq8f89Bzn_hwZU9uJg8/s104/0515.jpg">Jean-Baptiste de la Salle</a>, fondateur des Salésiens au XVIIe siècle. Nous avons cité Érasme, je m’en voudrais d’omettre la Salle qui régna sur l’éducation morale des enfants québécois jusqu’à l’époque de la famille Martin.<br />
<br />
Norbert Elias, le grand sociologue allemand, considère <i>Les Règles de la bienséance et de la Civilité chrétienne</i> de la Salle comme un exemple de la reproduction des coutumes et modèles de cour sur de larges couches bourgeoises. «On doit se servir à Table d’une serviette, d’une assiette, d’un couteau, d’une cuillier, et d’une fourchette: il serait tout à fait contre l’honnêteté, de se passer de quelqu’une de toutes ces choses en mangeant». L’ordre est clairement établi, et la famille Martin le respecte. Écoutons-le donner d’autres conseils: «Il est malhonneste de se servir de sa serviette pour s’essuier le visage; il l’est encore bien plus de s’en frotter les dents et ce serait une faute des plus grossières contre la Civilité de s’en servir pour se moucher… L’usage qu’on peut et qu’on doit faire de sa serviette lorsqu’on est à Table est de s’en servir pour nettoier sa bouche, ses lèvres et ses doigts quand ils sont gras, pour dégraisser le couteau avant que de couper du Pain, et pour nettoier la cuiller, et la fourchette après qu’on s’en est servi». Remarquer l’expression «malhonnête» qui revient souvent, comme s’il s’agissait d’un méfait commis, car il s’agit bien, en effet, d’un «méfait» au sens où l’entendait la civilité du temps. Enfin, «Lorsque la cuillier, la fourchette ou le couteau sont sales, ou qu’ils sont gras, il est très mal honnête de les lecher, et il n’est nullement séant de les essuier, ou quelqu’autre chose que ce soit, avec la nape; on doit dans ces occasions et autres semblables, se servir de la serviette et pour ce qui est de la nape, il faut avoir égard de la tenir toujours fort propre, et de n’y laisser tomber, ni eau, ni vin, ni rien qui la puisse salir».<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhsG4kfiAomiOtl27-Ypd8dGCkrrQhoe8gq-EELv7CiegC0S9_gt8mctsEQ8bj3zWVXHKC-DBE2fD_-XvpDloALYUVon0jNp1AqLKHKunz0aJPmJwIL_E1oV1JFluk3oM5hYKAcW4nGAbw/s1600/Sans+titre+3.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="166" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhsG4kfiAomiOtl27-Ypd8dGCkrrQhoe8gq-EELv7CiegC0S9_gt8mctsEQ8bj3zWVXHKC-DBE2fD_-XvpDloALYUVon0jNp1AqLKHKunz0aJPmJwIL_E1oV1JFluk3oM5hYKAcW4nGAbw/s400/Sans+titre+3.jpg" width="400" /></a></div><br />
Certes, toute la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhsG4kfiAomiOtl27-Ypd8dGCkrrQhoe8gq-EELv7CiegC0S9_gt8mctsEQ8bj3zWVXHKC-DBE2fD_-XvpDloALYUVon0jNp1AqLKHKunz0aJPmJwIL_E1oV1JFluk3oM5hYKAcW4nGAbw/s104/Sans+titre+3.jpg">préciosité</a> avec laquelle Jean-Baptiste de la Salle enseignait l’art de la bonne conduite à Table ne fut pas retenue jusqu’aux <i>Fifties</i>. Peu importe, le père Martin n’était pas Louis XIV et l’ordre n’avait pas tant besoin de minutieux comportements pour ordonner la civilité aux comportements quotidiens. Le but de l’exercice, comme les leçons que prend le bourgeois gentilhomme dans la pièce de Molière, était de se hisser de la barbarie à la civilité, de se distinguer comme un Être de qualité et non un «vilain». Et la bienséance était cet ordre de qualité ontologique que le pédagogue voulait faire passer comme message: «Il est aussi très incivil de porter un morceau de pain à la bouche aïant le couteau à la main; il l’est encore plus de l’y porter avec la pointe du couteau. Il faut observer la même chose en mangeant des pommes, des poires ou quelques autres fruits […] Il est contre la Bienséance de tenir la fourchette ou la cuiller à plaine main, comme si on tenoit un bâton; mais on doit toûjours les tenir entre ses doigts. On ne doit pas se servir de la fourchette pour porter à sa bouche des choses liquides… c’est la cuillier qui est destinée pour prendre ces sortes de choses. Il est de l’honnêteté de se servir toujours de la fourchette pour porter de la viande à sa bouche, <i>car la Bienséance ne permet pas de toucher avec les doigts à quelque chose de gras</i>, à quelque sauce, ou à quelque sirop; et si quelqu’un le faisoit, il ne pourroit se dispenser de commettre ensuite plusieurs autres incivilitez: ce qui le rendroit fort sale et malpropre, ou de les essuïer à son pain, ce qui seroit très incivil, ou de lècher ses doigts, ce qui ne peut être permis à une personne bien née et bien élevée».(4) La famille que présente la joyeuse publicité du Colonel où tout le monde plonge ses doigts déjà gras dans le baril de poulet frit eut sans doute entraîner l’apoplexie chez le bon monsieur de la Salle. Mais, comme dit le proverbe: «autre temps, autres meurtres»…<br />
<br />
Notes<br />
<ol><li>Cité in N. Elias. <i>La civilisation des mœurs, </i>Paris, Calmann-Lévy, rééd. Col. Pluriel, #8312, 1973, p. 149.</li>
<li>Cité in N. Elias. ibid. p. 149.</li>
<li>Cité in N. Elias. ibid. p. 150.</li>
<li>Cité in N. Elias. ibid. p. 160.</li>
</ol></div><div style="text-align: right;">Montréal,<br />
28 juin 2011</div><div style="text-align: justify;"></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-65592650440335741472011-06-27T23:03:00.000-07:002011-06-28T09:41:09.720-07:00Playing in the snow<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div style="text-align: justify;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQVnsYOzw5stOihtNsw3cUedU_RBqOE231xEk-C_xl67hljazYSZcPluTFWoIRZrqEstu7WMp1tASqHHUQKDGOrMcuxAeGRJ1UQpcfRV5x8K8aoL6ti5PjOTtU8wFHUaFBLg9q7iND9U8/s1600/8-+Snowman.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="287" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQVnsYOzw5stOihtNsw3cUedU_RBqOE231xEk-C_xl67hljazYSZcPluTFWoIRZrqEstu7WMp1tASqHHUQKDGOrMcuxAeGRJ1UQpcfRV5x8K8aoL6ti5PjOTtU8wFHUaFBLg9q7iND9U8/s400/8-+Snowman.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: center;"><br />
</div><div style="text-align: center;"><b>PLAYING IN THE SNOW</b></div><br />
La saison avançant, il était normal qu’un jour où l’autre, nous vîmes John & Mary j<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgQVnsYOzw5stOihtNsw3cUedU_RBqOE231xEk-C_xl67hljazYSZcPluTFWoIRZrqEstu7WMp1tASqHHUQKDGOrMcuxAeGRJ1UQpcfRV5x8K8aoL6ti5PjOTtU8wFHUaFBLg9q7iND9U8/s104/8-+Snowman.jpg">ouer dans la neige</a>. Le tableau 8 nous les présente, avec un ami, un cousin (?), en train d’équiper un bonhomme de neige qui ressemble plus au curé Labelle qu’au prototype classique des bonshommes de neige à trois boules superposées. Chapeau <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEigrMqZHIUN_LAY2CwDBy5aWH_tl1OHldtF_PnIFZAGV4HvMrXx6qTmsm2HnE6c6f6j580sjUjFS-Hj6WeA0LTfSsDegraikoLkq5OIzqaezNR04KjR43kGhfS8dJxKjRoH5Q7la-vzyJc/s104/1t0+001.jpg"><i>stetson</i></a> sur la tête, Jean lui enfourche <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEigrMqZHIUN_LAY2CwDBy5aWH_tl1OHldtF_PnIFZAGV4HvMrXx6qTmsm2HnE6c6f6j580sjUjFS-Hj6WeA0LTfSsDegraikoLkq5OIzqaezNR04KjR43kGhfS8dJxKjRoH5Q7la-vzyJc/s1600/1t0+001.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEigrMqZHIUN_LAY2CwDBy5aWH_tl1OHldtF_PnIFZAGV4HvMrXx6qTmsm2HnE6c6f6j580sjUjFS-Hj6WeA0LTfSsDegraikoLkq5OIzqaezNR04KjR43kGhfS8dJxKjRoH5Q7la-vzyJc/s320/1t0+001.jpg" width="320" /></a>un balai dans le bras. On lui a mis ce qui semble être deux boutons pour les yeux, une pipe (celle de monsieur Martin?) et une paire de moustaches (espérons qui ne sont pas celles de monsieur Martin!). Le chien s’excite et, au pied du bonhomme, un amas de boules de neige. On devine que le prochain jeu ressemblera davantage à une<i> guerre des tuques</i> qu’à une farandole autour de bonhomme. En tous cas, il neigeait dans ce temps-là. Le ciel était gris de promesses d’autres chutes de neige tandis que le décor en est tout imprégnée, à la fois en étendu et en quantité. Des glaçons en stalactites pendent des toits des maisons et hangars. Mary tient la pelle, un traîneau et un toboggan font également partis de l’équipement. Même la rude saison est une période qui n’arrête pas l’activité de John & Mary.<br />
<br />
Bonhomme de neige est un personnage plus anglo-saxon que francophone. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiMR_aLciEduRqkre4jq4Ch4Xv_v-zcM9lcxNJjQNKvQn7rpNI-H42QtoglVwQJtXkfCkQ_c9idkR5m2krPF9z423b9-e3jRvpFJ3C-Nqa2BeBiQOtnR2tXygwCM8D7b7ea-Gp3py5bib4/s104/rusty_the_snowman_card-p137885977305871742qiae_400.jpg"><i>Rusty the snowman</i></a> a sa <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiMR_aLciEduRqkre4jq4Ch4Xv_v-zcM9lcxNJjQNKvQn7rpNI-H42QtoglVwQJtXkfCkQ_c9idkR5m2krPF9z423b9-e3jRvpFJ3C-Nqa2BeBiQOtnR2tXygwCM8D7b7ea-Gp3py5bib4/s1600/rusty_the_snowman_card-p137885977305871742qiae_400.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiMR_aLciEduRqkre4jq4Ch4Xv_v-zcM9lcxNJjQNKvQn7rpNI-H42QtoglVwQJtXkfCkQ_c9idkR5m2krPF9z423b9-e3jRvpFJ3C-Nqa2BeBiQOtnR2tXygwCM8D7b7ea-Gp3py5bib4/s320/rusty_the_snowman_card-p137885977305871742qiae_400.jpg" width="320" /></a>chanson du temps des fêtes, des dessins animés et des films 3-D qui racontent ses aventures. Dans l’iconologie actuelle, il représente plutôt un doublet de l’image des enfants, naïfs et généreux. Notre monsieur Bonhomme a le double des traits de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhqam76QqSAu_aOTqhIVA2sle03UYU8pm9jjcxPHWeF0-zEBonqRJhzczFCaDVyu13v8vWNQy7F9WAZgihuoibdU0Wsn4Xx2y9TDtqGFv7N30Bofi_fVK3yaVUAVlRjTo4CPTWXarMObso/s104/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg">M. Martin</a>. Les moustaches, la pipe, les yeux noirs fixes et le chapeau sur la tête en font un doublet de M. Martin. Cette caricature de la figure du Père n’est pas innocente puisque c’est John qui lui plante le balai (signe du sceptre royal, de l’<i>auctoritas</i> paternelle) et Mary qui, donnant l’impression de s’essuyer le front après l’effort d’avoir pelleter toute cette neige, pourrait également donner l’impression de la saluer militairement de la main droite. Si les balles de neige lui sont destinées, ne serait-ce que pour abattre sa face ronde, la mise à mort de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhm7W1sdfRoYweZPwv1NK2smspI9JSNnMaj3mzTMjsWw8ewoYs7PYt5Lk3xwHEGMutketSEDeY5ePk5CvZ984V2eA0lYH0_SBB2TcB2cpXhG4vQzFQ-WgSAdUf0Ut3X2Uti8S_FedC4LSQ/s104/8-+Snowman+-+copie.jpg">bonhomme</a> pourrait signifier la manifestation d’un rite pour le moins inquiétant. Mais ne spéculons pas sur les «<i>aftermaths</i>».<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhqam76QqSAu_aOTqhIVA2sle03UYU8pm9jjcxPHWeF0-zEBonqRJhzczFCaDVyu13v8vWNQy7F9WAZgihuoibdU0Wsn4Xx2y9TDtqGFv7N30Bofi_fVK3yaVUAVlRjTo4CPTWXarMObso/s1600/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhqam76QqSAu_aOTqhIVA2sle03UYU8pm9jjcxPHWeF0-zEBonqRJhzczFCaDVyu13v8vWNQy7F9WAZgihuoibdU0Wsn4Xx2y9TDtqGFv7N30Bofi_fVK3yaVUAVlRjTo4CPTWXarMObso/s200/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg" width="139" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhm7W1sdfRoYweZPwv1NK2smspI9JSNnMaj3mzTMjsWw8ewoYs7PYt5Lk3xwHEGMutketSEDeY5ePk5CvZ984V2eA0lYH0_SBB2TcB2cpXhG4vQzFQ-WgSAdUf0Ut3X2Uti8S_FedC4LSQ/s1600/8-+Snowman+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhm7W1sdfRoYweZPwv1NK2smspI9JSNnMaj3mzTMjsWw8ewoYs7PYt5Lk3xwHEGMutketSEDeY5ePk5CvZ984V2eA0lYH0_SBB2TcB2cpXhG4vQzFQ-WgSAdUf0Ut3X2Uti8S_FedC4LSQ/s200/8-+Snowman+-+copie.jpg" width="164" /></a><br />
L’hiver n’a jamais été ma saison favorite. Du moins pas avant le réchauffement climatique depuis une dizaine d’années qui diminue la quantité des chutes de neige en ville et la retenue de la chute du mercure. Dans ma jeunesse, disons au début des années soixante, l’hiver commençait avec la première bordée, au milieu novembre, et la neige restait au sol jusqu’au milieu de mars. Entre temps, les tempêtes se suivaient et il y avait rarement de redoux. Le mercure pouvait chuter, même le jour, à des -30º C. Neige pas neige, froid glacial ou pas, l’école, c’était sacrée …dans l’esprit de nos parents. De fait, tous les manuels scolaires s’extasiaient sur la beauté de la saison froide. Le soleil, toujours accompagné des pires froids de l’hiver, était le complément des tempêtes et des blizzards. Pour moi, c’était l’enfer sur terre. Je n’aimais ni la neige, ni le froid, ni ces vêtements lourds qui me pesaient sur les épaules, ni ces grosses bottes aux pieds. Le froid qui vous mord la peau du visage, qui vous fait larmoyer les yeux et transforme vos lobes en «oreilles de christ», dures et douloureuses au dégel.<br />
<br />
Dès que la chaleur commençait à s’effacer, à la fin de septembre, et encore plus rapidement au mois d’octobre, je commençais à déprimer. Je me souviens d’un<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEieFaOX22xvtkcdPBtJ_poYBfyejA9Hil4PUVlnDa-phQgYfDIu4Crh_2uOwN6mxp3VLNashhliMFOOKa4PrMZhZRD_MoNmdF1KlLmg8YNQ4pbgd_yZ4_shmHUwwBtjDi8sCKl_cIoMe38/s1600/noel0385jc.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="240" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEieFaOX22xvtkcdPBtJ_poYBfyejA9Hil4PUVlnDa-phQgYfDIu4Crh_2uOwN6mxp3VLNashhliMFOOKa4PrMZhZRD_MoNmdF1KlLmg8YNQ4pbgd_yZ4_shmHUwwBtjDi8sCKl_cIoMe38/s320/noel0385jc.jpg" width="320" /></a> dimanche après-midi d’octobre, vers 1963, lorsque la température commençait à chuter, être sorti pour me promener sur le trottoir de la rue Pinsonneault, à Saint-Jean-sur-Richelieu, où je m’étais amusé avec des amis durant l’été. Il n’y avait plus personne. La rue était désertée. La luminosité du soleil devenait hâve. Un suaire semblait prêt à envelopper le monde. La première neige n’était que l’occasion de me mouiller jusqu’aux os, l’humidité parvenant à traverser les deux à trois épaisseurs de vêtements que je portais. Des flaques d’eau, projetées sur nos vêtements obligatoirement propres par des automobilistes qui augmentaient leur vitesse pour arroser les «t’its culs», faisaient pleuvoir sur moi les cris d’exaspération de ma mère! Non, il y avait rien d’enchanteur dans la première neige, sinon les cartes postales et les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEieFaOX22xvtkcdPBtJ_poYBfyejA9Hil4PUVlnDa-phQgYfDIu4Crh_2uOwN6mxp3VLNashhliMFOOKa4PrMZhZRD_MoNmdF1KlLmg8YNQ4pbgd_yZ4_shmHUwwBtjDi8sCKl_cIoMe38/s104/noel0385jc.jpg">cartes de Noël</a> qu’on envoyait, par obligation, à des parents ou amis avec lesquels nos liens étaient plutôt distants.<br />
<br />
Il y avait parfois des scènes qui, en effet, me réconciliait avec la beauté de l’hiver. Cette vieille maison de brique, au coin des rues Saint-Charles et Champlain, un soir que je la vis sous une rafale de neige, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh62iErfIlqM7pAuQ2SfzWqPtgHaX8MHaazs1HyZFz7hV58colU_gHGFmINx-c7R9sA7ynDOU1GLE0dfLr20s29c3sCTlHDkfCPbWByTZVEnJXkX72iScfgX-D760FZMj48dEE4FFeQ700/s1600/Premi%25C3%25A8re+neige+couleur.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh62iErfIlqM7pAuQ2SfzWqPtgHaX8MHaazs1HyZFz7hV58colU_gHGFmINx-c7R9sA7ynDOU1GLE0dfLr20s29c3sCTlHDkfCPbWByTZVEnJXkX72iScfgX-D760FZMj48dEE4FFeQ700/s400/Premi%25C3%25A8re+neige+couleur.jpg" width="268" /></a>alors que les rues étaient éclairées par les publicités au néon, offrait un <i>contrapostó</i> nostalgique. Aujourd’hui, je savoure ces branches d’arbres du parc Baldwin, à Montréal, recouvertes de la première neige mouillée qui leur colle comme un vêtement, amplifiant les branches et formant des guirlandes étincelantes sous les rayons du soleil qui s’entrecroisent dans le ciel. Lorsque que commence la fonte, s’exerce, en effet, une magie que je ne voyais jadis que comme images de calendrier annonçant le mois de janvier et la nouvelle année. L’émerveillement de l’hiver, c’était à travers le tableau 8 ou encore cette image du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh62iErfIlqM7pAuQ2SfzWqPtgHaX8MHaazs1HyZFz7hV58colU_gHGFmINx-c7R9sA7ynDOU1GLE0dfLr20s29c3sCTlHDkfCPbWByTZVEnJXkX72iScfgX-D760FZMj48dEE4FFeQ700/s104/Premi%25C3%25A8re+neige+couleur.jpg">manuel de Français</a> des Frères Maristes inspiré de <i>Pieds nus dans l’aube</i> de Félix Leclerc que je le percevais. Aujourd’hui, je suis mieux en mesure de m’émerveiller par moi-même, surtout que les chaleurs humides de l’été mississipien que nous apprenons à apprivoiser me rend l’été insupportable. C’est comme si, approchant l’extrémité de ma vie, mon rapport avec les saisons s'était inversé. Est-ce moi qui vieillit ou le climat qui se renverse? Probablement, une coïncidence.<br />
<br />
Il est vrai que l’hiver signifie généralement un engourdissement de la nature. La sève coule à peine dans les arbres, les animaux hibernent ou se recouvrent d’une toison plus épaisse. La surface des cours d’eau se transforme en croûte de glace et les poissons s’enfoncent dans les profondeurs de la rivière. Lorsque le froid était intense et que la rivière Richelieu n’était pas complètement gelée, on voyait s’élever des vapeurs d’eau sous le soleil. Des nuages, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguyROkTnmvEhrI1HQRyj_3zsJ3MhAeqi5KKDY_6vosC2NWjmuvNbFF_MaMDrAeAYpVCwrY9_0UsG3mVnLV6dvd8q3Zn4p2DIpNcTer9ATAzJ-5P_jFdZ_UyzXLnJkcoN5E-GvwjLTtqtU/s1600/41043.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="212" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguyROkTnmvEhrI1HQRyj_3zsJ3MhAeqi5KKDY_6vosC2NWjmuvNbFF_MaMDrAeAYpVCwrY9_0UsG3mVnLV6dvd8q3Zn4p2DIpNcTer9ATAzJ-5P_jFdZ_UyzXLnJkcoN5E-GvwjLTtqtU/s320/41043.jpg" width="320" /></a>littéralement, qui recouvraient le pavé du pont Gouin de givre. À moins trente, pour être féerique, l’image n’en était pas moins difficile à soutenir pendant longtemps. Les humains aussi, normalement, devraient s’engourdir l’hiver venu. Mais les affaires font qu’il ne saurait en être question. Le froid, toutefois, a l’effet de renfermer les gens dans leur domicile, autour de la fournaise à gaz ou à huile, qui dégage des odeurs à vous soulever le cœur. De plus, le risque d’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEguyROkTnmvEhrI1HQRyj_3zsJ3MhAeqi5KKDY_6vosC2NWjmuvNbFF_MaMDrAeAYpVCwrY9_0UsG3mVnLV6dvd8q3Zn4p2DIpNcTer9ATAzJ-5P_jFdZ_UyzXLnJkcoN5E-GvwjLTtqtU/s104/41043.jpg">incendie</a> était toujours plus grand en cette saison qu’en les autres. De graves incendies dont les photographies étaient reproduites dans les journaux avaient de quoi nous sidérer et nous effrayer. Je me souviens de cette photo où, d’une maison, ne restait que la cheminée plantée debout, tout le reste ayant été brûlé, calciné tout autour. Il y avait, en prime, ces immenses glaçons qui pendaient des ruines, les écrasant sous leur poids, l’eau des bornes fontaines et des tuyaux d’arrosage qui rendait la rue une véritable patinoire. Le pire cauchemar que nous pouvions faire en cette saison, c’était bien la crainte de l’incendie.<br />
<br />
Il y avait bien le mois qui précédait Noël. Les magasins ouverts jusqu’à 9 heures tous les soirs les trois semaines précédant le jour tant attendu des enfants. Puis le dimanche précédant Noël, où nous dressions l’arbre de Noël, à vrai dire un sapin artificiel que l’on sortait et replongeait chaque année <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZcjMDiyN-J-1pfPgUBy3Uffil3H6ed-k4C-q_m2c77G5GgjUHS_pGq2gD-551X8xvx03fy_DHzm7_2V838zrTAqznS3ahsBfuiEvYROcoGglPx2qYo_pSSKeGTDqwy9BL-hNPDpeMfB0/s1600/9a8adca6.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="231" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZcjMDiyN-J-1pfPgUBy3Uffil3H6ed-k4C-q_m2c77G5GgjUHS_pGq2gD-551X8xvx03fy_DHzm7_2V838zrTAqznS3ahsBfuiEvYROcoGglPx2qYo_pSSKeGTDqwy9BL-hNPDpeMfB0/s320/9a8adca6.jpg" width="320" /></a>dans la même boîte; les vieilles figurines de plâtre blanc entremêlées de figurines coloriées, plus neuves, de la Sainte-Famille, des bergers et des rois mages; les petites maisons et l’église au clocher pour reproduire le petit village traditionnel sur de la ouate blanche; enfin les boules et les décorations de l’arbre. Tout ça sur fond de chicanes de famille. Mon père s’exaspérait et perdait patience et ma mère l’engueulait pour son incompétence. Vive l’heureux temps des fêtes! Pourtant, si mon père et ma mère formaient autour de moi un couple sans bonheur, ils n’oublièrent jamais de me donner à Noël les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZcjMDiyN-J-1pfPgUBy3Uffil3H6ed-k4C-q_m2c77G5GgjUHS_pGq2gD-551X8xvx03fy_DHzm7_2V838zrTAqznS3ahsBfuiEvYROcoGglPx2qYo_pSSKeGTDqwy9BL-hNPDpeMfB0/s104/9a8adca6.jpg">cadeaux</a> que je demandais. Les pages de catalogues remplies d’illustrations de cadeaux ou les publicités télévisées, libres de diffusion à l’époque, nous proposaient toutes sortes de jouets, aussi coûteux les uns que les autres. C’était, tantôt des albums de Tintin, tantôt des figurines des personnages des dessins animés d’Hanna-Barbera, des jeux pour faire jouer toute la famille et qui s’achevaient, comme vous l'aurez deviné, dans la chicane et les portes qui claquent. Décidément, l’hiver n’était pas ma saison. </div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhtIPc81285ZSIeP9MLjkEDUkGfCH5guu3Py46vZfGRqokrCLmc-UnXcxKy4XJN1JLRF1iiRpzMB6-H5X_LTfETvcZsixGnGYUbQwjFkOgOZJvGKzvuFhLsxB-pOsC-shlpqkTDgcjW830/s1600/ea7a8aa979420b06.jpeg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"></a></div><div style="text-align: justify;"><br />
Il faut dire que l’hiver avait peu à voir avec cette atmosphère hystérique qui, à vrai dire, courait à l’année longue. Et ce n’était pas toujours ainsi tous les jours. Bien au contraire, c’était ça vivre à Peyton Place dans les années 50-60. L’hiver donnait l’occasion de mettre des fenêtres doubles, de sorte que les engueulades de famille parvenaient moins à l’oreille des passants. Voilà pourquoi l’hiver marquait également l’engourdissement des humains. Chaque famille se réfugiait derrière les portes closes et les stores baissées. À l’exception de la couronne sur la porte, je m’étais vu engueulé une fois parce que j’avais mis des décorations aux fenêtres: il ne fallait pas attirer les regards. Comme se fondre dans la neige même qui s’amassait le longs des murs extérieurs, il fallait disparaître comme des ours dans leur grotte. L’hiver, et même Noël, en dehors des rues commerciales, était propice à des paysages gris, ternes et funèbres.<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgOyThInwcpIwm5zkefqJzQp8ap7v3dCTCkxeF1YhHh6F-E8h5JgQMsSb4v-i_ImMPIF_fAuZhKHZNhr_rL5YU0a5CPN3C6dJGoTiUXDUw_KRYRmuyBReEPEb2K2ezdS3nbouSe-H7xcys/s1600/8-+Snowman+-+copie.jpg"><img border="0" height="47" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgOyThInwcpIwm5zkefqJzQp8ap7v3dCTCkxeF1YhHh6F-E8h5JgQMsSb4v-i_ImMPIF_fAuZhKHZNhr_rL5YU0a5CPN3C6dJGoTiUXDUw_KRYRmuyBReEPEb2K2ezdS3nbouSe-H7xcys/s640/8-+Snowman+-+copie.jpg" width="400" /></a></div>Rien ne m’est jamais apparu aussi proche du néant, non la porte noire de la sacristie de l’église où va la famille Martin, que le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgOyThInwcpIwm5zkefqJzQp8ap7v3dCTCkxeF1YhHh6F-E8h5JgQMsSb4v-i_ImMPIF_fAuZhKHZNhr_rL5YU0a5CPN3C6dJGoTiUXDUw_KRYRmuyBReEPEb2K2ezdS3nbouSe-H7xcys/s104/8-+Snowman+-+copie.jpg">ciel grisâtre à perte de vue</a> durant l’hiver et surtout lorsqu’arrive le dégel, au mois de mars. Ce gris qui, uniforme, surplombe, comme un manteau inquiétant, le toit des maisons, le faîte des arbres, et se perdant jusqu'à la ligne d’horizon. Et ce que ne montre pas le tableau 8: le sable et les sels que la voirie distribue sur les routes et les trottoirs pour en amoindrir la couche glissante. Toute la neige au sol se transforme bientôt en un mélange boueux. Je me souviens, j’avais six ou sept ans, avoir eu la jambe prise dans l’un de ces bancs de boue et que je ne pouvais retirer, au milieu du boulevard Gouin. C’était tout simplement dégueulasse.<br />
<br />
Bien sûr, ceux qui aiment les sports d’hiver où les activités en plein air ne pourront que récuser le choix des mauvaises images que j’ai conservées de l’hiver. C’est ainsi. À eux d’en écrire pour faire l’apologie de la saison froide en rappelant la chanson <br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgC4BbYxKc5PggYuf3nw3dNA-1I48McbFwgie0SChn4rvOdIljvRwRrJSZl_DgHtTy9-1eoTfa0wfp4e6TcDqwK0B8IK7kUjnwmHc7WmP8D6NVn1519kDZQMgCAhgux9OMDRxnZS1w63jo/s1600/772.jpg" style="clear: right; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="276" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgC4BbYxKc5PggYuf3nw3dNA-1I48McbFwgie0SChn4rvOdIljvRwRrJSZl_DgHtTy9-1eoTfa0wfp4e6TcDqwK0B8IK7kUjnwmHc7WmP8D6NVn1519kDZQMgCAhgux9OMDRxnZS1w63jo/s320/772.jpg" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Mort de François Paradis par Clarence Gagon 1932</td></tr>
</tbody></table>de Vigneault. Moi, elle ne me convainc pas. L’hiver, c’est la saison dure. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgC4BbYxKc5PggYuf3nw3dNA-1I48McbFwgie0SChn4rvOdIljvRwRrJSZl_DgHtTy9-1eoTfa0wfp4e6TcDqwK0B8IK7kUjnwmHc7WmP8D6NVn1519kDZQMgCAhgux9OMDRxnZS1w63jo/s104/772.jpg">Celle où meurt François Paradis</a>, symbole de l’amour authentique dans <i>Maria Chapdelaine</i> de Louis Hémon. François mort, la fille Chapdelaine n’aura plus qu’à se résigner à épouser le cultivateur, clone de son père, et passer une vie à l’image de celle de sa mère; un amour raisonnable: la portée annuelle, le travail ingrat, la couvée domestique jusqu’à la fin de ses jours, pour le meilleur et pour le pire. Le torchon avait trouvé sa guenille à travers une tragédie d'hiver, et le rêve romantique était enfoui, quelque part en haut, sous les neiges et le froid. Cette histoire triste à mourir et «bête à manger du foin, c’est dommage car je ne l’aimais point», pèse sur notre littérature comme un fardeau de conscience.<br />
<br />
Il faut lire ce qu’en dit Margaret Atwood dans son étude, <i>Survival</i> - <i>Essai sur la littérature canadienne</i> - pour comprendre combien les vastes terres chantées dans la version anglaise de l’hymne <i>O Canada</i>, ne méritent pas qu’on se permette tout pour ça. L’auteur fait mention du poème de Earle Birney, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhtIPc81285ZSIeP9MLjkEDUkGfCH5guu3Py46vZfGRqokrCLmc-UnXcxKy4XJN1JLRF1iiRpzMB6-H5X_LTfETvcZsixGnGYUbQwjFkOgOZJvGKzvuFhLsxB-pOsC-shlpqkTDgcjW830/s104/ea7a8aa979420b06.jpeg"><i>David</i></a>, qui, sans le rôle romantique de François Paradis, apparaît comme le héros type de la Nature …en hiver, bien sûr: «En apparence, écrit Mme Atwood, il s’agit de deux jeunes alpinistes partis escalader un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhtIPc81285ZSIeP9MLjkEDUkGfCH5guu3Py46vZfGRqokrCLmc-UnXcxKy4XJN1JLRF1iiRpzMB6-H5X_LTfETvcZsixGnGYUbQwjFkOgOZJvGKzvuFhLsxB-pOsC-shlpqkTDgcjW830/s1600/ea7a8aa979420b06.jpeg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="128" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhtIPc81285ZSIeP9MLjkEDUkGfCH5guu3Py46vZfGRqokrCLmc-UnXcxKy4XJN1JLRF1iiRpzMB6-H5X_LTfETvcZsixGnGYUbQwjFkOgOZJvGKzvuFhLsxB-pOsC-shlpqkTDgcjW830/s320/ea7a8aa979420b06.jpeg" width="320" /></a>nouveau pic appelé “Le Doigt”. Arrivé au sommet, le narrateur glisse, son ami David essaie de le rattraper, mais tombe à son tour sur une corniche. Le narrateur descend jusqu’à lui et le retrouve écrasé mais toujours vivant. Sur l’insistance de David, il le pousse par-dessus la corniche. Celui-ci atterrit à six cents pieds plus bas, sur de la glace. La mort de David est de toute évidence une sorte d’accident dont toute la responsabilité revient au narrateur. Celui-ci a provoqué la chute de David par sa négligence (il n’a pas vérifié ses prises de pieds) et, plus directement, l’a poussé. […] Après l’accident, le narrateur dit: “Au-dessus de nous s’élevait la dernière jointure du Doigt/Faisant signe, morose, au vaste ciel indifférent”…»(1) Ce ciel, ce ciel gris, voilà ce néant atmosphérique dont je parlais plus haut.<br />
<br />
La littérature québécoise n’est pas en reste des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgEMBYrB0bU_i5ieC2Y5Mhkl6jtVZEmA1dghswe43Zf8780NFCaQwS503cyIXcqchgQtLyIAIr3H-ISMYBpds-MVTsFNXDJn7kGN5FpPL06XlOiUWr1cDRvQIcmq6LvwojesjrleKYiujI/s1600/20493658.jpeg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="309" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgEMBYrB0bU_i5ieC2Y5Mhkl6jtVZEmA1dghswe43Zf8780NFCaQwS503cyIXcqchgQtLyIAIr3H-ISMYBpds-MVTsFNXDJn7kGN5FpPL06XlOiUWr1cDRvQIcmq6LvwojesjrleKYiujI/s320/20493658.jpeg" width="320" /></a>sentiments tristes liés à l’hiver. À titre d’exemple, prenons André Langevin et son roman, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgEMBYrB0bU_i5ieC2Y5Mhkl6jtVZEmA1dghswe43Zf8780NFCaQwS503cyIXcqchgQtLyIAIr3H-ISMYBpds-MVTsFNXDJn7kGN5FpPL06XlOiUWr1cDRvQIcmq6LvwojesjrleKYiujI/s104/20493658.jpeg"><i>Poussière sur la ville</i></a>, «où la tristesse et le dégoût dévorent les deux personnages principaux, a comme décor une neige salie par l’amiante et dans laquelle on patauge. La grisaille tombe sur Macklin [Thetford Mines], comme elle imprègne les âmes de Madeleine et d’Alain. Il n’y a pas de chapitre où il n’y ait quelque allusion au temps et toute l’action du roman se situe en hiver. Quelquefois, le personnage se trouve dehors dans la poudrerie et il semble alors plus seul et plus abandonné. Quand, parfois, la neige qui couvre le sol n’est pas souillée, le paysage prend une apparence lunaire, sinistre. La nature est cruelle, sans pitié, comme la vie».(2) Lorsque le roman fut adapté au cinéma (1967) par Arthur Lamothe, le réalisateur a fort bien su traduire l’atmosphère littéraire par la photographie du paysage et insérer, au milieu du film, les séquences prises sur le vif d’un incendie qui avait court au moment du tournage.<br />
<br />
Nous voici loin du tableau 8. Certes, des poètes et romanciers ont voulu et su donner de l’hiver une image plus conforme à celle de <i>Playing in the snow.</i> L’humeur mélancolique de vieux dinosaures comme moi ne doit pas laisser supposer que les Québécois (ou les Canadiens) n’ont toujours vu dans <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjm1qK0BBpZXHsQUB4caEHwkfTPLulenZYAih1qtWHpv-KC0m8YUA9mkH2KdNxuJXHajHlcLztSWFWCgEXOKnOgTBSvzNVd_m_dXQWUtfaKGBHIawE9fA4XngIU1MTSmxnzQOGYVsZfMEE/s1600/Music_album_record_white_christmas18.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="318" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjm1qK0BBpZXHsQUB4caEHwkfTPLulenZYAih1qtWHpv-KC0m8YUA9mkH2KdNxuJXHajHlcLztSWFWCgEXOKnOgTBSvzNVd_m_dXQWUtfaKGBHIawE9fA4XngIU1MTSmxnzQOGYVsZfMEE/s320/Music_album_record_white_christmas18.jpg" width="320" /></a>l’hiver qu’une saison funèbre. Je l’ai dit, les joies de l’hiver, les promenades - en <i>sleigh</i> comme en <i>skidoo</i> - font parties des plaisirs de la jeunesse. Pour les autres, il y a la raquette, le ski en montagne ou le ski de fond, la luge et le toboggan, comme dans le tableau. Les enfants adorent se rouler dans la neige, faire des anges en battant des bras étendus sur le dos, construire des igloos ou faire des bonshommes de neige. Une ambiance parfois bon enfant se dégage de cette saison. J’en ai pour expérience un moment de l’hiver 1969. J’étais élève alors dans un annexe de l’école Notre-Dame-de-Lourdes d’Iberville, un annexe surnommé le poulailler (pour son aspect architectural et qui devait finir usine Mondor) où je passais ma huitième année (ma première année secondaire). Notre professeur d’anglais était Mlle Hébert, une belle grande blonde aux longues jambes qui nous faisait jouer, dans le mois de décembre, au moment où le ciel était gris et la neige abondante, des disques de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjm1qK0BBpZXHsQUB4caEHwkfTPLulenZYAih1qtWHpv-KC0m8YUA9mkH2KdNxuJXHajHlcLztSWFWCgEXOKnOgTBSvzNVd_m_dXQWUtfaKGBHIawE9fA4XngIU1MTSmxnzQOGYVsZfMEE/s104/Music_album_record_white_christmas18.jpg"><i>crooners</i></a> américains chantant Noël. De Bing Crosby à Frank Sinatra, nous chantions avec eux, suivant les paroles sur des feuilles, <i>Here’s come Santa Claus</i>, <i>The little Red Nosed reindeer, White Christmass, Holy Night</i> et <i>Frosty the Snowman</i>… Je regardais par la fenêtre la neige qui tombait et notre mauvaise petite chorale, qui accompagnait les chansons du disque, semblait être une parodie des chorales chantant les chants sacrés à la messe de minuit (célébration à laquelle j’ai rarement assisté, sauf une fois à la chapelle catholique du Collège Militaire Royal où travaillait mon père).<br />
<br />
L’hiver, avec ses fêtes et ses sports comme avec sa tristesse et son engourdissement, m’apparaît aujourd’hui comme la saison de la mélancolie et de la nostalgie de l’enfance …et peut-être tout cela dépend-t-il du type d’enfance qu’on a vécu. John & Mary ont vécu une belle enfance, et c’est pour cela que l’hiver évoque pour eux les bonshommes de neige et les parties de hockey, les cadeaux déballés sous le sapin et les repas pris en famille. On se plaint aujourd’hui que Noël a perdu son fond spirituel pour être commercialisé par le méchant capitalisme. Il faut bien l’admettre, dans un monde matérialiste et cynique comme le nôtre, l’amour se mesure à la grosseur des dons et au prix des cadeaux. Le reste, c’est de l’hypocrisie sociale. Perrichon et Harpagon réunis, les guignolées du temps des fêtes ne sont pas là pour les pauvres, dont on fait véritablement peu de cas dans leur condition existentielle, mais pour «sauver notre âme» de notre propre jugement et du sentiment de culpabilité qui s’en dégagerait si on comparait notre lâcheté et notre paresse quotidienne face aux misères de l’humanité. Se souhaiter Joyeux Noël et Bonne Année, comme dans la leçon qui accompagne le tableau 8, c’est devenu un rite dérisoire. Mieux vaut que la bière coule à flots et qu’on fasse des indigestions de dindes et de tourtières mal décongelées. La salmonellose à Noël, il n’y a que ça pour nous rappeler que l’hiver n’est pas la saison des rigolades.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgsl_7uBtZEtU8vkwdwJMDxdj7ycy1YjOQ_0_puKMtxY4G7cCRkzym17k7_2MTJ6aT__RRrVSa_keLzxkC61A3jH_34EkWxRqsdIal9kJNiI8TltyDQDLMeNPgCvnp67JipOUk2apE79cs/s1600/premi%25C3%25A8re+neige+noir+et+blanc.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgsl_7uBtZEtU8vkwdwJMDxdj7ycy1YjOQ_0_puKMtxY4G7cCRkzym17k7_2MTJ6aT__RRrVSa_keLzxkC61A3jH_34EkWxRqsdIal9kJNiI8TltyDQDLMeNPgCvnp67JipOUk2apE79cs/s320/premi%25C3%25A8re+neige+noir+et+blanc.jpg" width="225" /></a></div>Ca y’est, je retombe dans mon penchant <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgsl_7uBtZEtU8vkwdwJMDxdj7ycy1YjOQ_0_puKMtxY4G7cCRkzym17k7_2MTJ6aT__RRrVSa_keLzxkC61A3jH_34EkWxRqsdIal9kJNiI8TltyDQDLMeNPgCvnp67JipOUk2apE79cs/s104/premi%25C3%25A8re+neige+noir+et+blanc.jpg">mélancolique</a> et négatif. Décidément, je suis incorrigible. Mais à cinquante-six ans, il est difficile de se refaire une enfance, aussi difficile que pour une septuagénaire de se faire remonter pour la sixième fois le masque. Dans le fond, l’historicité qui maintient ensemble le Canada, au-delà des deux solitudes, c’est cet ennemi commun: l’hiver. De l’Atlantique au Pacifique, en montant du 45e parallèle après lequel nous semblons tous nous accrocher plutôt que d'émigrer vers le nord, sauf pour y travailler et y revenir une fois les forêts coupées à blanc, les barrages construits sur les rivières, les cratères lunaires creusés au forage pétrolier et gazier et des ports de ravitaillement bientôt parsemés sur l’Arctique déglacé, nous nous échangeons constamment nos mains-d’œuvre, nos compétences, nos talents. Seul le cocon culturel semble nous isoler les uns des autres, bien que le tégument soit de moins en moins étanche face à la mondialisation culturelle opérée par les États-Unis. Nous nous américanisons et dans le même mouvement, notre <i>Kultur</i>, canadienne ou québécoise, se délaye pour faire de nous des Américains parlant anglais ou français.<br />
<br />
Ce qui nous reste du tableau 8, <i>Playing in the snow</i>, sans vouloir répéter les lieux maintenant devenus communs de l’innocence et de l’insouciance, c’est combien l’hiver reste un arrière-fond québécois et canadien, une joie ou une souffrance partagée en commun, que seuls les habitants du centre-ouest des États-Unis peuvent, semblablement, partager avec nous - et ce ne sont pas là TOUS les États-Unis. L’enfance heureuse de Mary & John contrastait avec la mienne, sans doute, et n’ont-ils pas retenu de l’hiver la même impression que moi. Mais cela reste, dans le genre, une très belle carte de Noël.<br />
<br />
Notes.<br />
<ol><li>M. Atwood. <i>Essai sur la littérature canadienne, </i>Montréal, Boréal, 1987, p. 56.</li>
<li>P. Collet. <i>L'hiver dans le roman canadien français, </i>Québec, P.U.L., Col. Vie des lettres canadiennes, #3, 1965, p. 228.</li>
</ol><div style="text-align: right;">Montréal<br />
27 juin 2011</div></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-11072792778732917452011-06-26T20:40:00.001-07:002011-06-27T12:44:49.918-07:00Mary and John at school<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div style="text-align: justify;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjIVYlQ8i2Vuit2cHKJj6rn6_mcvMAh00r8iVmSTSDOdZcjHabYMKfjGwu_wi-KExoB9-oRIYdp6bRN7eT2aSDSUzEg2pkbtTlIbWm0wTWKFZOzDV4XQ9xPCyD10DStf7Iz0_CYH9VmWNg/s1600/7-+at+school.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="290" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjIVYlQ8i2Vuit2cHKJj6rn6_mcvMAh00r8iVmSTSDOdZcjHabYMKfjGwu_wi-KExoB9-oRIYdp6bRN7eT2aSDSUzEg2pkbtTlIbWm0wTWKFZOzDV4XQ9xPCyD10DStf7Iz0_CYH9VmWNg/s400/7-+at+school.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: center;"><br />
<b>MARY AND JOHN AT SCHOOL</b></div><br />
Voici Mary & John (après un détour par l’église [<i>sic</i>]) enfin arrivés <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjIVYlQ8i2Vuit2cHKJj6rn6_mcvMAh00r8iVmSTSDOdZcjHabYMKfjGwu_wi-KExoB9-oRIYdp6bRN7eT2aSDSUzEg2pkbtTlIbWm0wTWKFZOzDV4XQ9xPCyD10DStf7Iz0_CYH9VmWNg/s104/7-+at+school.jpg">à l’école</a>. Pour les gens de moins de quarante ans, ils ne verront pas l’anachronisme pourtant pattant pour les <i>Fifties</i>: les classes n’étaient pas mixtes. Les garçons avaient leur école, et les filles la leur. Et c’était encore plus vrai pour les classes primaires que pour les classes secondaires. D’ailleurs, le fait que garçons et filles soient situées sur des rangées différentes évoque la séparation des sexes dans le système scolaire de l’époque. Au Québec, il faudra attendre la réforme issue du Rapport Parent (1965) pour que l’on voit, progressivement, les garçons et les filles se côtoyer sur les bancs d’école. Certes, l’entorse à la loi scolaire du Québec de l’époque n’a qu’un but: celui de conserver les deux enfants dans la même classe. La leçon était mixte, pas la classe.<br />
<br />
De plus, nous voyons John & Mary dans la même classe. À moins que l’un des deux ait redoublé l’une de ses classes - ce qui est peu pensable considérant l’assiduité qu’ils mettent à leurs devoirs, comme nous le verrons dans un tableau ultérieur -, il faut donc supposer qu’ils ont le même âge: John & Mary seraient donc jumeaux! On reconnaît facilement Mary assise à l’avant, la main levée par sa robe rouge et la boucle qu’elle porte dans les cheveux depuis le tableau 2. On suppose également que c’est John qui est au tableau, en train d’écrire à la craie le titre de ce grand «<i>hit</i>» national: <i>Ô Canada</i>. La leçon nous apprend que le nom de l’institutrice est Miss Leblanc, une bonne descendante d’Acadiens qui maîtrise parfaitement les deux langues nationales.<br />
<br />
Miss Leblanc a des traits qui ressemblent beaucoup aux premières institutrices que j’ai eu, à l’école Forget, à Saint-Jean-sur-Richelieu (aujourd’hui école Bruno-Choquette, qui en était alors le directeur - le «principal» comme nous l’appelions). Cette grande fille, un peu hommasse, outre le fait qu’elle semble s’être frottée un peu trop les seins sur le tableau crayeux, a le maintient d’une institutrice issue des ordres religieux. Son col évoque le collet romain. Son ensemble a l’aspect d’un uniforme et son fier maintient, sa robe avec les manches jusqu’aux bras et sa longue chevelure en remplacement du voile, transpirent la cléricalité de sa formation. Les premières institutrices que j’ai eues étaient des femmes qui avaient obtenu leur brevet d’enseignement dans des cours de formation de l’enseignement catholique. Elles étaient soit des célibataires endurcies, soit des femmes mariées qui avaient élevé leur famille et dont les enfants, grands maintenant, leur permettaient de revenir à l’enseignement. C’était le cas de ma première institutrice, Mme Isabelle, dont la fille fut mon enseignante à la seconde année! À la troisième année, mon institutrice finissait sa carrière d'enseignante pour entrer dans les ordres! À ma quatrième année, la formation de mon institutrice avait sans doute été acquise parmi les SS et parce que vache, elle s’appelait Madame Vachon…<br />
<br />
Mais il faut être poli - et je le resterai - envers nos anciennes maîtresses. D’ailleurs, la confusion des sens du mot confirme que les hommes attendent de leurs «maîtresses», ces soins quasi maternels que procuraient leurs institutrices: mère sans l’être vraiment, elles en <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjXMZGG0JDQujIigmg5LnGj_xkOeaIgk-My9ELWDtzdbizwmIGa1p2bn876qsCnsF_e3Dr7AbUsHhUxff51Z6EAEhTEUxZhf0s3pXmna8pHTQO1-9rPgpQcm2jdOB3YUDhzFuVf0CwpiXs/s1600/7-+at+school+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjXMZGG0JDQujIigmg5LnGj_xkOeaIgk-My9ELWDtzdbizwmIGa1p2bn876qsCnsF_e3Dr7AbUsHhUxff51Z6EAEhTEUxZhf0s3pXmna8pHTQO1-9rPgpQcm2jdOB3YUDhzFuVf0CwpiXs/s200/7-+at+school+-+copie.jpg" width="173" /></a>accomplissaient la fonction (et on nous enseignait que nos institutrices étaient les représentantes de nos parents et que nous devions les regarder avec le même respect dû à nos parents: «père et mère honorera afin de vivre longuement», disait le commandement de Dieu). Ici, Miss Leblanc demande à John d’écrire l’hymne national de la patrie. La classe poursuit donc l’œuvre d’éducation civile déjà amorcée dans le tableau précédent. Nous montons d’un cran, d’un simple respect à un code de conduite, nous nous élevons dans la société politique (on ne parlait pas de constitution à l’époque). Tout le tableau regorge de références au Canada, si l’on omet le globe terrestre où domine le continent sud-américain. La <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjXMZGG0JDQujIigmg5LnGj_xkOeaIgk-My9ELWDtzdbizwmIGa1p2bn876qsCnsF_e3Dr7AbUsHhUxff51Z6EAEhTEUxZhf0s3pXmna8pHTQO1-9rPgpQcm2jdOB3YUDhzFuVf0CwpiXs/s104/7-+at+school+-+copie.jpg">carte</a>, au mur, nous montre un Canada lourd et pesant qui s’écrase sur les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjLpWe0Xt1sR6apxFXsprUCMDHLffw_pPrBc3p1ZJPi5jsPahTRdShSGNAThSPGDOQpmh_7f9do4gs3_TKNwoS6IrWOKbjF6YUUmlXQxx1ayrD8lqC0Fx-9XXHRCucIpiOTCZrecPsH9ps/s1600/800px-Canadian_Red_Ensign.svg.png" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="160" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjLpWe0Xt1sR6apxFXsprUCMDHLffw_pPrBc3p1ZJPi5jsPahTRdShSGNAThSPGDOQpmh_7f9do4gs3_TKNwoS6IrWOKbjF6YUUmlXQxx1ayrD8lqC0Fx-9XXHRCucIpiOTCZrecPsH9ps/s320/800px-Canadian_Red_Ensign.svg.png" width="320" /></a>États-Unis qui semblent fondre sous son poids et se replier sur le Mexique et le Golfe du Mexique. (Fantasme inconscient du complexe d’infériorité canadien par rapport à leurs voisins du Sud). Le vaste État est rouge, non en référence à l’unifolié, qui n’avait pas été conçu à l’époque, mais du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjLpWe0Xt1sR6apxFXsprUCMDHLffw_pPrBc3p1ZJPi5jsPahTRdShSGNAThSPGDOQpmh_7f9do4gs3_TKNwoS6IrWOKbjF6YUUmlXQxx1ayrD8lqC0Fx-9XXHRCucIpiOTCZrecPsH9ps/s104/800px-Canadian_Red_Ensign.svg.png"><i>Red Ensign</i></a> britannique, «avec l'Union Jack dans le canton et l'écu des Armoiries du Canada dans le battant» (1921-1965). Bien avant, les Armoiries du Canada (1868-1921) <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiYrfp4yBNeZhOPhbhfxJtYZnQpUq7IkrTVn0-KqtHDCtIYqEAW-FnEeUuF8mczoegaGbcPCajOSkxg1Y3rMuGcKhrHkw-WQbffF43aXEGjmXaaKWxub70L6jshXV4km7bopA9jX_xEsb0/s1600/250px-Flag_of_Canada-1868-Red.svg.png" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="100" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiYrfp4yBNeZhOPhbhfxJtYZnQpUq7IkrTVn0-KqtHDCtIYqEAW-FnEeUuF8mczoegaGbcPCajOSkxg1Y3rMuGcKhrHkw-WQbffF43aXEGjmXaaKWxub70L6jshXV4km7bopA9jX_xEsb0/s200/250px-Flag_of_Canada-1868-Red.svg.png" width="200" /></a>voyait l’écu constitué par les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiYrfp4yBNeZhOPhbhfxJtYZnQpUq7IkrTVn0-KqtHDCtIYqEAW-FnEeUuF8mczoegaGbcPCajOSkxg1Y3rMuGcKhrHkw-WQbffF43aXEGjmXaaKWxub70L6jshXV4km7bopA9jX_xEsb0/s104/250px-Flag_of_Canada-1868-Red.svg.png">quatre écus</a> des provinces fondatrices de 1867. Ainsi, mes premières années scolaires furent-elles composées de trois drapeaux: le <i>Red Ensign</i>, le drapeau du Québec (souvent substitué par le drapeau de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhz9FTJ0w22fLw6_DOaAYa0KxaFDRwt7H8-qpp5YcVYpjq-0M2A9nvHU_p_eO-zAsXrBmSBbxy6YApjnkCy7vB2hqZQbbBLeRe1EpkxY9d0d8tHUAbE3qUwaHD6zSE-XjcJK2kJg-78GLc/s104/sacre-coeur.jpg">Carillon avec le Sacré-Cœur</a>, bannière traversée d'une croix blanche arborant à tous les coins la fleur de lys, symbole de la monarchie française avec un Sacré-Cœur ajouté à la croisée des branches de la croix blanche), et le drapeau jaune et blanc, avec la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhz9FTJ0w22fLw6_DOaAYa0KxaFDRwt7H8-qpp5YcVYpjq-0M2A9nvHU_p_eO-zAsXrBmSBbxy6YApjnkCy7vB2hqZQbbBLeRe1EpkxY9d0d8tHUAbE3qUwaHD6zSE-XjcJK2kJg-78GLc/s1600/sacre-coeur.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="132" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhz9FTJ0w22fLw6_DOaAYa0KxaFDRwt7H8-qpp5YcVYpjq-0M2A9nvHU_p_eO-zAsXrBmSBbxy6YApjnkCy7vB2hqZQbbBLeRe1EpkxY9d0d8tHUAbE3qUwaHD6zSE-XjcJK2kJg-78GLc/s200/sacre-coeur.jpg" width="200" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgBSOu2RQRpXKQo5mOwvEXI1NCkIGqG_HtOpiKfef83ott2MQoGtA4NoJI-NwiTK0Vnhc0Z7e600EFdSvcNaA-FYagVW3uhiHegcKwhjjfAiQS4QjtZe-BTqbkzGSKjgeSbSo5qmCtwqFc/s1600/600px-Flag_of_the_Vatican_City.svg.png" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgBSOu2RQRpXKQo5mOwvEXI1NCkIGqG_HtOpiKfef83ott2MQoGtA4NoJI-NwiTK0Vnhc0Z7e600EFdSvcNaA-FYagVW3uhiHegcKwhjjfAiQS4QjtZe-BTqbkzGSKjgeSbSo5qmCtwqFc/s200/600px-Flag_of_the_Vatican_City.svg.png" width="200" /></a>tiare et les clefs croisées de saint Pierre, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgBSOu2RQRpXKQo5mOwvEXI1NCkIGqG_HtOpiKfef83ott2MQoGtA4NoJI-NwiTK0Vnhc0Z7e600EFdSvcNaA-FYagVW3uhiHegcKwhjjfAiQS4QjtZe-BTqbkzGSKjgeSbSo5qmCtwqFc/s104/600px-Flag_of_the_Vatican_City.svg.png">drapeau du Vatican</a>!<br />
<br />
Il est symptomatique de dire que dans les <i>Fifties</i>, le Canada Français était submergé de signes et de symboles patriotiques, cultivant et multipliant les appartenances: au Québec, au Canada français, au Canada héroïque des deux guerres mondiales, au Vatican source de notre autorité spirituelle, enfin à notre «petite patrie», notre localité, notre ville et notre paroisse. Aujourd’hui, on confond les drapeaux de la province et du pays et l’hymne national n’est plus connu et rarement chanté. Et lorsqu’il l’est, deux vers anglais succèdent ou<br />
<table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiVj30h-F7ISThrxMLHtuhhX7TegaW65_WBVBvSqtku6nlfi-RhsqrIKoM8RnS8iuriM_I_21YH1qGctknPLRxsL0BWLGRxkA2H-B2RaPBEA6qCSt6gZP9H_-I0zMw0wqu-7zQ0oQmqN7Q/s1600/Calixa_LAVALLEE_dessin.jpg" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiVj30h-F7ISThrxMLHtuhhX7TegaW65_WBVBvSqtku6nlfi-RhsqrIKoM8RnS8iuriM_I_21YH1qGctknPLRxsL0BWLGRxkA2H-B2RaPBEA6qCSt6gZP9H_-I0zMw0wqu-7zQ0oQmqN7Q/s200/Calixa_LAVALLEE_dessin.jpg" width="183" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Callixa Lavallée</td></tr>
</tbody></table>précèdent deux vers français. En fait, le <i>Ô Canada</i> (1881) est le plus mal aimé des hymnes nationaux du monde. Peu savent qui en est le compositeur de la musique (<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiVj30h-F7ISThrxMLHtuhhX7TegaW65_WBVBvSqtku6nlfi-RhsqrIKoM8RnS8iuriM_I_21YH1qGctknPLRxsL0BWLGRxkA2H-B2RaPBEA6qCSt6gZP9H_-I0zMw0wqu-7zQ0oQmqN7Q/s104/Calixa_LAVALLEE_dessin.jpg">Calixa Lavallée</a> (1842-1891)) et l'auteur des vers (sir Basile-Adolphe Routhier (1839-1920)). L'hymne était essentiellement un produit francophone et s'adressait à ceux qui se concevaient comme Canadiens, les anglophones ne se pouvant détacher de l'appartenance à l'empire britannique, d'où la permanence du <i>Red Ensign</i> jusqu'en 1966. Il fallut même encore, en 1966, «arracher» littéralement l'acceptation de l'unifolié… Rien de plus vrai donc que le Canada est un produit des Canadiens-Français auquel se sont progressivement ralliés les Canadiens-Anglais (poussés aussi, il faut le dire, par une plus grande indifférence de l'Angleterre qui préférait pratiquer le libre-échange avec les nations européennes et les États-Unis plutôt que de rester attachée par un pacte protectionniste colonial qui, depuis 1930, année de la signature du traité de Westminster, ne signifiait plus grand chose de concret). Aussi, est-il difficile de concevoir un <i>Ô Québec</i> - par exemple, celui de Raoul Duguay - comme substitut d'un hymne qu'on ne chante plus guère que dans quelques cérémonies protocolaires, et encore à la vitesse du <i>fastforward</i>. On a du mal à s'imaginer comment, à Québec comme à Ottawa, où l'on chanterait, l'un à la suite de l'autre, le <i>Ô Canada </i>et le <i>Ô Québec…</i></div><table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: right; margin-left: 1em; text-align: right;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJ5t9xj7RWWjU7n4qFM0a1mMISw5orQgWP1uxE4bkBzMiIrEv-5rIO2Ujho5fXmJDVg4D06QAdEOUhgkbpyk3m9IHCi9njXcnJn-6_qU4UPRgzK7xSqGaVzQu1FXYCIIeRZB2ATK2bmNQ/s1600/220px-Adolphe-Basile_Routhier.png" imageanchor="1" style="clear: right; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJ5t9xj7RWWjU7n4qFM0a1mMISw5orQgWP1uxE4bkBzMiIrEv-5rIO2Ujho5fXmJDVg4D06QAdEOUhgkbpyk3m9IHCi9njXcnJn-6_qU4UPRgzK7xSqGaVzQu1FXYCIIeRZB2ATK2bmNQ/s200/220px-Adolphe-Basile_Routhier.png" width="137" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Adolphe-Basile Routhier</td></tr>
</tbody></table><table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgpP6qcwaVBYLtrSWO5yxNsmUCq8u9ZqQkPLZWgFk0qY1F7fJ2iz0TqMpRlX8Kp7P2c5RTTI5B-TAaXqnupZYXCB6LsUi20ShuXVHcVDoSNKSe04No1V7lo2h9Z6W_Dt0jAEiOabZZ3cOk/s1600/robertstanleyweir.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgpP6qcwaVBYLtrSWO5yxNsmUCq8u9ZqQkPLZWgFk0qY1F7fJ2iz0TqMpRlX8Kp7P2c5RTTI5B-TAaXqnupZYXCB6LsUi20ShuXVHcVDoSNKSe04No1V7lo2h9Z6W_Dt0jAEiOabZZ3cOk/s200/robertstanleyweir.jpg" width="136" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Robert Stanley Weir</td></tr>
</tbody></table><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEheq8imjhv97sxO2JIgaFAY2wcYFEVe_HHwM0z_c-SDBukOW65_rlBsQ_3Y9Ws0CZujxT_mXaHccPgZjfiVsAHmGJ5_7TlsD73OOhr4Z-O5TDFoouKlJf-X5P1s7qgRqT8R5gKGgmvWoNk/s1600/o-canada-terre-de-nos-aieux-a.JPG" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"></a></div><div style="text-align: justify;">La version anglaise fut difficile à accoucher. On soumit près de vingt versions (des adaptations plutôt que des traductions) des paroles composées par sir <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJ5t9xj7RWWjU7n4qFM0a1mMISw5orQgWP1uxE4bkBzMiIrEv-5rIO2Ujho5fXmJDVg4D06QAdEOUhgkbpyk3m9IHCi9njXcnJn-6_qU4UPRgzK7xSqGaVzQu1FXYCIIeRZB2ATK2bmNQ/s104/220px-Adolphe-Basile_Routhier.png">Adolphe-Basile Routhier</a>. Parmi celles-ci, la version écrite par l'honorable <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgpP6qcwaVBYLtrSWO5yxNsmUCq8u9ZqQkPLZWgFk0qY1F7fJ2iz0TqMpRlX8Kp7P2c5RTTI5B-TAaXqnupZYXCB6LsUi20ShuXVHcVDoSNKSe04No1V7lo2h9Z6W_Dt0jAEiOabZZ3cOk/s104/robertstanleyweir.jpg">Robert Stanley Weir</a> à l'occasion du tricentenaire de la fondation de la ville de Québec, en 1908, et légèrement modifiée au fil du temps, est celle qui a été acceptée par la population canadienne. Dès 1911, on put les voir figurer à l’endos de la couverture de nombreux manuels scolaires anglophones.<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgUs4QzpXlS4rdAkhbWi8WDflT66gkMj9JoF5rLu7X1YVT9V8NKYVZFEIjq4JVVbR3zBO7_tvh23vDyCabKkVD6Wscb92HXUlXF9MniCnmJEaaP2HdjiQ3pMY_F1SXaiRZ2CWlS1TmP7fM/s1600/o-canada-terre-de-nos-aieux-a.JPG" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"></a></div>La version française, nous l’apprenions, chantant couplet après couplet les vendredis après-midi, dans la grande salle de l’école Forget. Le ténor - car en plus d’être «principal» de l’école, Bruno Choquette était maître-chantre - entonnait l’hymne patriotique et de ses deux grands bras nous battait la mesure:<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgUs4QzpXlS4rdAkhbWi8WDflT66gkMj9JoF5rLu7X1YVT9V8NKYVZFEIjq4JVVbR3zBO7_tvh23vDyCabKkVD6Wscb92HXUlXF9MniCnmJEaaP2HdjiQ3pMY_F1SXaiRZ2CWlS1TmP7fM/s1600/o-canada-terre-de-nos-aieux-a.JPG" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgUs4QzpXlS4rdAkhbWi8WDflT66gkMj9JoF5rLu7X1YVT9V8NKYVZFEIjq4JVVbR3zBO7_tvh23vDyCabKkVD6Wscb92HXUlXF9MniCnmJEaaP2HdjiQ3pMY_F1SXaiRZ2CWlS1TmP7fM/s640/o-canada-terre-de-nos-aieux-a.JPG" width="480" /></a> </div>Ô Canada! Terre de nos aïeux,<br />
<div style="text-align: justify;">Ton front est ceint de fleurons glorieux!<br />
Car ton bras sait porter l'épée,<br />
Il sait porter la croix!<br />
Ton histoire est une épopée<br />
Des plus brillants exploits.<br />
Et ta valeur, de foi trempée,<br />
Protégera nos foyers et nos droits<br />
Protégera nos foyers et nos droits.<br />
<br />
Sous l'œil de Dieu, près du fleuve géant,<br />
Le Canadien grandit en espérant,<br />
Il est né d'une race fière,<br />
Béni fut son berceau;<br />
Le ciel a marqué sa carrière<br />
Dans ce monde nouveau.<br />
Toujours guidé par Sa lumière,<br />
Il gardera l'honneur de son drapeau,<br />
Il gardera l'honneur de son drapeau.<br />
<br />
De son patron, précurseur du vrai Dieu,<br />
Il porte au front l'auréole de feu;<br />
Ennemi de la tyrannie,<br />
Mais plein de loyauté,<br />
Il veut garder dans l'harmonie<br />
Sa fière liberté.<br />
Et par l'effort de son génie,<br />
Sur notre Sol asseoir la vérité,<br />
Sur notre Sol asseoir la vérité!<br />
<br />
Amour sacré du trône et de l'autel<br />
Remplis nos cœurs de ton souffle immortel.<br />
Parmi les races étrangères<br />
Notre guide est la foi;<br />
Sachons être un peuple de frères,<br />
Sous le joug de la loi;<br />
Et répétons comme nos pères<br />
Le cri vainqueur: «Pour le Christ et le Roi»<br />
Le cri vainqueur: «Pour le Christ et le Roi».<br />
<br />
Il est vrai que sir Adolphe-Basile était un ultramontain, mariolâtre et papolâtre, qui suivait l’enseignement de Pie IX à la lettre, aussi son hymne patriotique se terminait-il par une profession de foi qui appelle à rien de moins qu’une croisade, et il est difficile de dire si le Roi dont il est question ici est Victoria ou Léon XIII, pape-roi - la question romaine ne sera résolue qu'en 1929 -. (Il était clair en tout cas, dans son esprit, que le sentiment patriotique est indissoluble de la direction spirituelle romaine). Sir Robert Stanley ne pouvait donc pas donner une traduction mot pour mot d’une pompe ambiguë:<br />
<div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiajN8wN8PwGVYoic3Ar0j3Na2l206j17DVOJWfcEM7NJcHP8ZD8NF8A-oqqipiRoD5PZ5uh34JuppZvMH6mftfgptmSMLL-J6YZHI-zpG4eK5uGl5-CdpyPWCKBXPYI6DFSJprnn61asg/s1600/partition_o_canada.gif" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiajN8wN8PwGVYoic3Ar0j3Na2l206j17DVOJWfcEM7NJcHP8ZD8NF8A-oqqipiRoD5PZ5uh34JuppZvMH6mftfgptmSMLL-J6YZHI-zpG4eK5uGl5-CdpyPWCKBXPYI6DFSJprnn61asg/s640/partition_o_canada.gif" width="424" /></a></div>O Canada! Our home and native land!<br />
True patriot love in all thy sons command.<br />
With glowing hearts we see thee rise,<br />
The True North strong and free!<br />
From far and wide,<br />
O Canada, we stand on guard for thee.<br />
God keep our land glorious and free!<br />
O Canada, we stand on guard for thee.<br />
O Canada, we stand on guard for thee.<br />
<br />
O Canada! Where pines and maples grow.<br />
Great prairies spread and lordly rivers flow.<br />
How dear to us thy broad domain,<br />
From East to Western Sea,<br />
Thou land of hope for all who toil!<br />
Thou True North, strong and free!<br />
God keep our land glorious and free!<br />
O Canada, we stand on guard for thee.<br />
O Canada, we stand on guard for thee.<br />
<br />
O Canada! Beneath thy shining skies<br />
May stalwart sons and gentle maidens rise,<br />
To keep thee steadfast through the years<br />
From East to Western Sea,<br />
Our own beloved native land!<br />
Our True North, strong and free!<br />
God keep our land glorious and free!<br />
O Canada, we stand on guard for thee.<br />
O Canada, we stand on guard for thee.<br />
<br />
Ruler supreme, who hearest humble prayer,<br />
Hold our dominion within thy loving care;<br />
Help us to find, O God, in thee<br />
A lasting, rich reward,<br />
As waiting for the Better Day,<br />
We ever stand on guard.<br />
God keep our land glorious and free!<br />
O Canada, we stand on guard for thee.<br />
O Canada, we stand on guard for thee.<br />
<br />
Bien sûr, l’hymne anglophone ne s’en laisse pas montrer côté soumission à Dieu. Mais plutôt que la dynamique historique du combat pour la patrie, le port de la croix et de l’épée, le grand fleuve au bord duquel sont fondées les petites patries, l’hymne anglais ne porte que sur la description territoriale (<i>a mari usque ad mare</i>, d’un océan à l’autre comme le dit sa devise), et ramène le tout à une vague promesse que «nous sommes prêts à tout pour toi» dès que Dieu «garde» notre patrie:<br />
<br />
Ô Canada, notre patrie et pays natal<br />
Objet de l'amour patriotique de tous tes fils<br />
Le coeur heureux, nous te regardons grandir<br />
Pays du nord, puissant et libre<br />
De loin et de partout, Ô Canada<br />
Nous sommes prêts à tout pour toi<br />
Dieu garde notre patrie glorieuse et libre<br />
Ô Canada, nous sommes prêts à tout pour toi<br />
Ô Canada, nous sommes prêts à tout pour toi.<br />
<br />
Car qu’est-ce que ça veut dire «<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSTikzFM6Z3jewQS639PbS07rH1BboFGZQYp2oKCSgzxeNskh3VFHtHGsDDwXSluK7q9mnkmHRaO7_mVWzucexIckQFHfLfLVIGAZoEG8-MOUUL3Jym2GlKjaNH9sClfRTjxaq5H4j3lM/s104/o_canada_canada_day_poster-p228494391498592719t5wm_400.jpg">être prêt à tout pour toi</a>»? Peut-être est-ce là la question que Mary veut poser à Miss Leblanc? Mais les concepts de «raison d’État» et de <i>Realpolitik</i> ne faisaient sûrement pas partie de la formation d'institutrice de Miss Leblanc. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSTikzFM6Z3jewQS639PbS07rH1BboFGZQYp2oKCSgzxeNskh3VFHtHGsDDwXSluK7q9mnkmHRaO7_mVWzucexIckQFHfLfLVIGAZoEG8-MOUUL3Jym2GlKjaNH9sClfRTjxaq5H4j3lM/s1600/o_canada_canada_day_poster-p228494391498592719t5wm_400.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSTikzFM6Z3jewQS639PbS07rH1BboFGZQYp2oKCSgzxeNskh3VFHtHGsDDwXSluK7q9mnkmHRaO7_mVWzucexIckQFHfLfLVIGAZoEG8-MOUUL3Jym2GlKjaNH9sClfRTjxaq5H4j3lM/s200/o_canada_canada_day_poster-p228494391498592719t5wm_400.jpg" width="200" /></a>Aussi, en restons-nous à considérer ce que les deux hymnes nationaux, ou plutôt les deux versions d’un même hymne national, nous disent de l’enseignement patriotique canadien des <i>Fifties</i>. La version française, dynamique par son appel à la croisade nationaliste et religieuse, raconte «<a href="http://jeanpaulcoupal.blogspot.com/2010/10/jeu-de-cartes-canadiennes-wicked-game.html">Ton histoire est une épopée</a>», alors que la version anglaise n’est qu’une longue description, une accumulation de forêts de pins et d’érables, de rivières et de prairies et d'océans où les vrais patriotes et leurs fils sont autant «de légendes» qui font l’histoire du Canada. Complémentarité pour les uns, antagonisme pour les autres, les deux versions de l’hymne patriotique exaltent les deux tempéraments qui façonnent l’histoire canadienne: la conquête et l’expansion. L’une amorcée par les Français, l’autre poursuivie par les Anglais. La synthèse donne deux solitudes pour le prix d’un pays.<br />
<br />
Il est difficile de se dire que c’est là la leçon, consciente ou inconsciente, apprise par John & Mary à <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvr8PDwaMECiOLuSpenw4V0iUgsPMcCsAxCNVKiecb610wQALci9TBISoVSSrIR9WqB0jq0_FegWHKTSr_DBDn31qko1hm0b9AzproCpKZGyrLS_LSxP9GwcTS1F87BtcdfqdhR-W_UFI/s1600/c022001.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="255" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvr8PDwaMECiOLuSpenw4V0iUgsPMcCsAxCNVKiecb610wQALci9TBISoVSSrIR9WqB0jq0_FegWHKTSr_DBDn31qko1hm0b9AzproCpKZGyrLS_LSxP9GwcTS1F87BtcdfqdhR-W_UFI/s320/c022001.jpg" width="320" /></a>l’école. Sans doute, le respect et la fidélité à son pays font-ils partis de toutes les cultures occidentales. Dans un contexte où le patriotisme venait d’être sévèrement mis en cause dans le contexte de la participation du Canada à la Seconde Guerre mondiale et l’ébranlement moral du Québec entraîné par le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvr8PDwaMECiOLuSpenw4V0iUgsPMcCsAxCNVKiecb610wQALci9TBISoVSSrIR9WqB0jq0_FegWHKTSr_DBDn31qko1hm0b9AzproCpKZGyrLS_LSxP9GwcTS1F87BtcdfqdhR-W_UFI/s104/c022001.jpg">référendum</a> conscriptionniste de 1942, les années qui suivirent la proclamation de la paix devaient être employées à raccommoder les liens qui s’étaient tendus entre - ce qu’on ne concevait pas encore - «les deux peuples fondateurs». Plus prosaïquement, les deux solitudes allaient continuer à évoluer, chacune de leur côté, dans un «splendide isolement» qui devait mener, un jour encore lointain, dans leur âge adulte, John & Mary à se prononcer pour la séparation du Canada par l’indépendance du Québec comme nation.<br />
<br />
Il est vrai que les années qui suivirent l’apprentissage scolaire de John & Mary, le destin du monde mis à mal les principes que véhiculaient l’<i>Ô Canada</i>, du moins dans sa version pompeuse de sir Adolphe-Basile. L’<i>Aggiornemento</i> de Vatican II rendait la croisade anachronique. Le berceau, qui avait servi de revanche contre l’envahisseur étranger, se vidait de ses marmailles de dix-douze enfants. L’épée avait été remplacée par la mitrailleuse. Et le grand fleuve n’était plus qu’une voie maritime à grande circulation, polluée, se vidant de sa faune aquatique. Enfin, la foi trempée, les foyers et nos droits, la race et l’honneur du drapeau et le siège de la vérité, tous ces idéaux se voyaient refouler dans un code qui n’avait plus rien à voir avec la conduite quotidienne de tous et chacun orientée désormais vers la performance économique, la production de richesses et le divertissement. La version anglaise, par son insipidité, pouvait ne subir une telle usure de l’histoire. Mais comme l’essentiel y est dit dans la première strophe, les autres ont été tout simplement oubliées.<br />
<br />
La classe de John & Mary est une classe de petits blonds aux yeux bleus. L'oncle Adolf aurait sans doute été ému de la voir, et tatie Lenie l'aurait filmée pour l'ajouter à son <i>Triomphe de la Volonté. </i>Il était difficile alors de prévoir qu’un demi-siècle plus tard, ces bancs seraient occupés par des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhvOuOoMOzX5xZAi58Me92UrwOTfN-ZPj0L95UygNMx9dUXEzFfORn9JWvFk-I0mpI5pjbzL0sf7NOS4NQvbV9sSWHdyCS2YCzrH6webRD0P9SWTesWT18H_gxXu1RTGnLG24E8zWR4M3A/s104/128337-clientele-commission-scolaire-region-sherbrooke.jpg">petits colorés</a> de toutes provenances. Des enfants nés, ailleurs ou ici, de<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhvOuOoMOzX5xZAi58Me92UrwOTfN-ZPj0L95UygNMx9dUXEzFfORn9JWvFk-I0mpI5pjbzL0sf7NOS4NQvbV9sSWHdyCS2YCzrH6webRD0P9SWTesWT18H_gxXu1RTGnLG24E8zWR4M3A/s1600/128337-clientele-commission-scolaire-region-sherbrooke.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="213" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhvOuOoMOzX5xZAi58Me92UrwOTfN-ZPj0L95UygNMx9dUXEzFfORn9JWvFk-I0mpI5pjbzL0sf7NOS4NQvbV9sSWHdyCS2YCzrH6webRD0P9SWTesWT18H_gxXu1RTGnLG24E8zWR4M3A/s320/128337-clientele-commission-scolaire-region-sherbrooke.jpg" width="320" /></a> parents immigrants, pratiquant des religions diverses, usant de langues maternelles étrangères aux racines indo-européennes, enveloppés dans des familles aux nombreux membres fuyant des gouvernements sanguinaires ou cherchant en Amérique ce que nos propres ancêtres y cherchaient déjà, le Pactole et les <i>pots of gold</i> La classe perdrait son signe religieux (le crucifix) pour ne pas le remplacer, sinon que par des logos publicitaires pour un généreux donateur d’un squelette de verre anatomique ou autre coupe géologique. La carte de l’Amérique du Nord serait remplacée par une carte du monde, à l’image de la variété des origines ethniques des élèves. Les tracées de frontières ne seraient plus les mêmes sur le globe terrestre et les livres seraient remplacés par des ordinateurs et autres ajouts infographiques où les leçons apparaîtraient plus ludiques et moins austère que dans la classe de John & Mary. Dans le climat de sérénité et d'innocence heureuse de cette classe, le tableau 7 ne soulève aucun indice de ce qui attend l’évolution du système scolaire canadien et québécois au cours des années qui vont suivre.<br />
<br />
Ce monde semble établi pour toujours durer et c’est ainsi que nous vivions nos années d’enfance en 1961-1966. Ce fut le seul temps d’insouciance de ma vie. Pour John & Mary aussi, parions-le…<br />
<br />
<br />
<div style="text-align: right;">Montréal<br />
26 juin 2011</div></div></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgvr8PDwaMECiOLuSpenw4V0iUgsPMcCsAxCNVKiecb610wQALci9TBISoVSSrIR9WqB0jq0_FegWHKTSr_DBDn31qko1hm0b9AzproCpKZGyrLS_LSxP9GwcTS1F87BtcdfqdhR-W_UFI/s1600/c022001.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"></a></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-46784235938879736072011-06-25T22:21:00.000-07:002011-07-07T15:24:27.556-07:00Mary and John going to school<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqhSmKzSyG7qAX7MpxYudhfB4YS3Uw-59d8txsTCHFyopGdDZ1Em5PB9LHDpPpUS-Wes7WUkB_M-77DH4FYaGoD3qHuJdVGtEJ6kWgvwC1SWkyVH0SZFiLmhBoivaz8_S0Am20IRwuL68/s1600/6-+John+%2526+Mary+going+to+school.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="291" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqhSmKzSyG7qAX7MpxYudhfB4YS3Uw-59d8txsTCHFyopGdDZ1Em5PB9LHDpPpUS-Wes7WUkB_M-77DH4FYaGoD3qHuJdVGtEJ6kWgvwC1SWkyVH0SZFiLmhBoivaz8_S0Am20IRwuL68/s400/6-+John+%2526+Mary+going+to+school.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: center;"><br />
<b>MARY AND JOHN GOING TO SCHOOL</b></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDUErfIlte9SvBUpdWN7p-34fm-IsTJQcZmyz8LckzYlx_qOvNw_DoP0NjjSjVAfKEloB-zsX2rlKhiD1gLC967fJjVAQDzVU72KRQJIjl9DEQm0HbPe5eXJwVk0Zwf3c-_q8zEW-RKGk/s1600/5a-+going+to+school.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"></a></div><div style="text-align: justify;">Le titre du sixième tableau est celui que nous avons pris pour l’ensemble du blogue, car c’était l’étiquette avec laquelle on désignait l’esprit du manuel <b>conversation anglaise</b>. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgqhSmKzSyG7qAX7MpxYudhfB4YS3Uw-59d8txsTCHFyopGdDZ1Em5PB9LHDpPpUS-Wes7WUkB_M-77DH4FYaGoD3qHuJdVGtEJ6kWgvwC1SWkyVH0SZFiLmhBoivaz8_S0Am20IRwuL68/s104/6-+John+%2526+Mary+going+to+school.jpg"><i>John and Mary going to school</i></a>, c’est, après la famille et l’église, l’entrée des deux enfants dans le monde civil, plus précisément la rue et la conduite publique. Placés sur le trottoir, à la croisée des rues, John & Mary suivent ponctuellement le code de la route. Ils regardent à droite, ils regardent à gauche, s’arrêtent à la lumière rouge en attente de traverser la rue qui doit les mener …où? À l’école, nous dit le titre. Alors, pourquoi ne traversent-ils pas vers la gauche, suivant la lumière verte, pour se trouver ainsi en face de l’école au moment où la lumière deviendra verte à nouveau pour leur permettre de traverser la rue plutôt que d’attendre sur une lumière rouge? C’est plutôt vers l’église qu’on croirait qu’ils se rendent. Bien sûr, la fonction didactique du tableau est de nous présenter le décor urbain. D’une urbanité plutôt banlieusarde que celle d'un centre-ville. De fait, vivant en périphérie d’un centre urbain, je reconnaissais mon petit coin de rue dans ce tableau de John & Mary.<br />
<br />
Ce tableau 6 coïncide vraiment avec un décor propre à <i>Peyton Place</i>. De gauche à droite, nous voyons une maison coquette, l’école, un bloc d'appartements, l’église. Trois véhicules motorisés dont une camionnette plus un cycliste nous permettent d’apprendre le vocabulaire. Puis, il y a le «mobilier urbain»: la borne-fontaine, les feux de circulation, la boîte aux lettres, <i>street</i> et <i>sidewalk</i>. Le décor, toutefois, est franchement vieillot, reconnaissons-le. Et les retouches apportées pour la version ultérieure du tableau 6, ont fait passer le style des voitures des années quarante aux années cinquante. D’ailleurs, suivre l’évolution graphique du tableau 6 à travers ses deux versions nous montre, en même temps, les principales caractéristiques qui distinguent les <i>Fifties</i> de la décennie antérieure.</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhlFa9iv7xKiwGH0Rl9tExLB1eQPU-UowXkbRzTL7g3l5-9dTUEyoxh7trlsWo_VS6whw3S57QwpNiSyLecrC2wtju6L3n_foBEDJo2IS6dX5LhQmVVfcYpSxSQy4FQ1Qk0m2Pd5dYzD8A/s1600/41578_4709529670_4627616_n.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><br />
</a></div><div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDUErfIlte9SvBUpdWN7p-34fm-IsTJQcZmyz8LckzYlx_qOvNw_DoP0NjjSjVAfKEloB-zsX2rlKhiD1gLC967fJjVAQDzVU72KRQJIjl9DEQm0HbPe5eXJwVk0Zwf3c-_q8zEW-RKGk/s1600/5a-+going+to+school.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="285" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDUErfIlte9SvBUpdWN7p-34fm-IsTJQcZmyz8LckzYlx_qOvNw_DoP0NjjSjVAfKEloB-zsX2rlKhiD1gLC967fJjVAQDzVU72KRQJIjl9DEQm0HbPe5eXJwVk0Zwf3c-_q8zEW-RKGk/s400/5a-+going+to+school.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: justify;"><br />
La poétique du tableau reste la même dans ses lignes et ses traits. La disposition des personnages, les automobiles, des bâtiments reste strictement identique d’une version à l’autre. La voiture grise à l’avant-plan, avec un éperon à l’avant du capot (éperon qui pouvait s’avérer mortel. J’ai vu, dans le célèbre journal <i>Allo Police!</i> de l’époque, la photo d’une femme morte après avoir été heurtée par ce type de voiture, l’éperon lui ayant traversé le cou et la gorge.) est remplacée par une voiture verte moins menaçante. Par contre, la voiture vert-pomme de la première version est remplacée par un modèle courant des <i>Fifties</i> avec ailerons aérodynamiques.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhPY0_mLYGRHLwguhOhOQJiy5eeBx8LiXoPbTx_ODynxOLnaHp7zUqO-oj_CqeXIRPGjP8rqd61YECFj1yFnkkEBao5bybYOmVca02Uo62zVxi2jC23axOX7dIg1tJRHbj4R8KH-xsi9lg/s1600/DSCN1994.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="203" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhPY0_mLYGRHLwguhOhOQJiy5eeBx8LiXoPbTx_ODynxOLnaHp7zUqO-oj_CqeXIRPGjP8rqd61YECFj1yFnkkEBao5bybYOmVca02Uo62zVxi2jC23axOX7dIg1tJRHbj4R8KH-xsi9lg/s320/DSCN1994.jpg" width="320" /></a>Les bâtiments aussi ont varié. Si la coquette petite maison, à gauche, semble conserver l’essentiel de son apparence, il n’en est plus de même de l’école. Dans la version originale, l’école est conforme au <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhPY0_mLYGRHLwguhOhOQJiy5eeBx8LiXoPbTx_ODynxOLnaHp7zUqO-oj_CqeXIRPGjP8rqd61YECFj1yFnkkEBao5bybYOmVca02Uo62zVxi2jC23axOX7dIg1tJRHbj4R8KH-xsi9lg/s104/DSCN1994.jpg">modèle architectural catholique</a>, avec la porte d’entrée située au centre de l’édifice, la croix sur le toit est placée à la verticale de la porte d'entrée. Ces bâtiments, récupérés aujourd’hui, sont généralement transformés en <i>condos</i> de luxe. Dans la version retouchée, le style architectural est proprement celui des années cinquante, avec la porte à la gauche du bâtiment, vaste portique de pierre dominant un édifice de brique avec une entrée <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhlFa9iv7xKiwGH0Rl9tExLB1eQPU-UowXkbRzTL7g3l5-9dTUEyoxh7trlsWo_VS6whw3S57QwpNiSyLecrC2wtju6L3n_foBEDJo2IS6dX5LhQmVVfcYpSxSQy4FQ1Qk0m2Pd5dYzD8A/s1600/41578_4709529670_4627616_n.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="254" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhlFa9iv7xKiwGH0Rl9tExLB1eQPU-UowXkbRzTL7g3l5-9dTUEyoxh7trlsWo_VS6whw3S57QwpNiSyLecrC2wtju6L3n_foBEDJo2IS6dX5LhQmVVfcYpSxSQy4FQ1Qk0m2Pd5dYzD8A/s320/41578_4709529670_4627616_n.jpg" width="320" /></a>protégée et la croix située de profil, face à l’église. Celle-ci est moins «catholique» que son original des années précédentes. Au lieu d'être ostensiblement brandit, au centre du bâtiment, le dominant même, la croix, signe religieux, est apposée sur la façade de côté, face à l'église certes, mais non dominant la porte d'entrée. Ayant changé plusieurs fois d’écoles dans mon enfance, j’ai appris dans les deux modèles architecturaux. L’école de la première version ressemble à l’école Notre-Dame-Auxiliatrice, à Saint-Jean-sur-Richelieu. Vastes fenêtres qui gorgeaient les classe de lumière et structure de briques rouges industrielle. Le second édifice ressemble davantage à l’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhlFa9iv7xKiwGH0Rl9tExLB1eQPU-UowXkbRzTL7g3l5-9dTUEyoxh7trlsWo_VS6whw3S57QwpNiSyLecrC2wtju6L3n_foBEDJo2IS6dX5LhQmVVfcYpSxSQy4FQ1Qk0m2Pd5dYzD8A/s104/41578_4709529670_4627616_n.jpg">école Forget</a> où j’ai commencé mes classes, dans la même localité, avec sa porte à l’extrémité plutôt qu’au centre du bâtiment. Le portique plus impressionnant, les fenêtres moins grandes. Le terraseau à l’honneur pour le plancher, les escaliers, et le plâtre pour les murs.<br />
<br />
À l’arrière, nous voyons un immeuble que nous pouvons supposer être un «bloc d'appartements». Les traits sont les mêmes d’un tableau à l’autre, mais alors qu’il apparaît rose dans la version originale, il devient gris-bleu dans la version retouchée. De même, la camionnette, plutôt rondelette et rouge dans la version originale, devient plus carrée et bleue dans la version nouvelle. Les élèves devant l’école, la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjMIBx1wCg4TNPON6hlR1tnew7IyTbzXWgrMjzSe3GDIn4d46VpyiyzX-irb4XhChElK_Sl4zb00ttsnNqzIMXkJjisVT13c4S9hItNmSLM0CWCsiitbdAkIitxL1DFqmsfpTOkgha6sl4/s1600/ph_ahun_eglise_1830.gif" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjMIBx1wCg4TNPON6hlR1tnew7IyTbzXWgrMjzSe3GDIn4d46VpyiyzX-irb4XhChElK_Sl4zb00ttsnNqzIMXkJjisVT13c4S9hItNmSLM0CWCsiitbdAkIitxL1DFqmsfpTOkgha6sl4/s320/ph_ahun_eglise_1830.gif" width="240" /></a>boîte aux lettres et le monsieur traversant la rue sont restés identiques d’une version à l’autre.<br />
<br />
L’église aussi a subi des retouches d’importance. Dans la version originale, son clocher est plus large et domine l’entrée. Dans la version retouchée, le clocher est un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjMIBx1wCg4TNPON6hlR1tnew7IyTbzXWgrMjzSe3GDIn4d46VpyiyzX-irb4XhChElK_Sl4zb00ttsnNqzIMXkJjisVT13c4S9hItNmSLM0CWCsiitbdAkIitxL1DFqmsfpTOkgha6sl4/s104/ph_ahun_eglise_1830.gif">campanile</a> sur le côté de l’église tandis que ses trois portes sont conformes au modèle des églises neuves des années 1950. Le vélo du cycliste est également d’un modèle plus récent et la chemise rouge de l'ouvrier de la première version est devenue, blanche, celle d'un col blanc dans la seconde version. Le style de la borne fontaine est légèrement retouché.<br />
<br />
Mary & John ont également changé d’aspect. La robe bleue de Mary est devenue rouge, ses petits bas verts de longs bas blancs. John a la même pose, la même chemise bleue, mais il a troqué ses culottes courtes pour une paire de pantalon. Le chien, tant qu’à lui, a suivi les transformations du tableau 2: du cabot RCA Victor, il passe ici aussi au fox-terrier noir. Les traces d’ombre sont identiques d’un tableau à l’autre, mais le ciel a subi une variation non négligeable. Aux cumulus de beau temps qui fait jaillir la luminosité solaire dans le tableau de la première version, le ciel gris-bleu de la seconde version atténue la luminosité. C’est un ciel menaçant qui rend la lumière solaire encore plus inquiétante. Une ombre pesante pèse sur la seconde version alors que la version originale baigne dans le soleil d’un après-midi de septembre ou de juin.<br />
<br />
En modernisant le tableau 6, les dessinateurs voulaient rendre le tableau plus adapté à l’époque de la parution de la nouvelle édition de <b>conversation anglaise</b>. Ils voulaient donner l’image de la rue des années 50 plutôt que l’imagerie déjà vieillotte qui se situerait aussi bien dans les années 40 que 30! De même, la robe de Mary fait moins uniteinte. Son dessein est mieux travaillé, lui donne du volume et des contrastes. Le pantalon de John, de même, donne une meilleur idée de l’élève que ses culottes courtes et ses longs bas bleus. Aucun garçon du début des années soixante se serait présenté en public vêtu de cette façon! La retouche de la chemise du cycliste produit le même effet. Moins schématique que l’original, la version modifiée du tableau 6 entend insuffler de l’actualité, sinon de la vie, dans cette scène banale de coin de rue. Le paradoxe est qu’en voulant «actualiser», «rendre vivant» le tableau, les retouches en ont fait disparaître la luminosité solaire, porteuse de paix et d’insouciance.<br />
<br />
Ces retouches du Poétique du tableau 6 nous invitent-elles à modifier notre perception de la scène? Dans l’ensemble, l’action, l’intrigue si on peut dire, reste la même. Deux enfants attendent pour traverser la rue, et, contrairement à la logique du mouvement, le tableau <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh7Qs5KquefS8b209oZyM9_DsWeO2TImuHJwkY-6JaLw1tod0qsbW3cLTUc3iFrOgO5jyLpycB9OpnnC2p4Y2GzCv6rETSJhfVJ54AXO3usQD9D9wXYWk7TOybiLEYiwzBbZPrWEf2bKGw/s1600/6-+John+%2526+Mary+going+to+school+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh7Qs5KquefS8b209oZyM9_DsWeO2TImuHJwkY-6JaLw1tod0qsbW3cLTUc3iFrOgO5jyLpycB9OpnnC2p4Y2GzCv6rETSJhfVJ54AXO3usQD9D9wXYWk7TOybiLEYiwzBbZPrWEf2bKGw/s320/6-+John+%2526+Mary+going+to+school+-+copie.jpg" width="107" /></a>nous dit qu’ils s’en vont à l’école. Il est vrai que la didactique a sa raison que la raison ignore, et les non-sens abondent dans la Poétique de beaucoup de tableaux de la série <b>conversation anglaise</b>. Le dialogue entre l’église et l’école demeure le même, la scène est nettement située en milieu chrétien, et catholique suppose-t-on. Si dans <i>The Martin Family at church</i>, l’ordre provenait de l’inspiration divine, ici, c’est par la conduite publique inscrite dans les codes de lois - le respect du code routier - qui définit piétons, cycliste, conducteurs automobiles. On s’arrête sur la lumière rouge et l’on avance sur la lumière verte (il n'y a pas de place pour la lumière jaune, pourtant existante dans les feux de circulation). Le conditionnement correspond à celui que nous avons déjà rencontré dans le cadre de la conduite morale à l’église dans le tableau précédent. L’aspect Idéologique du tableau ne diffère donc point, à première vue, du précédent, sauf qu’à l’autorité ecclésiastique succède l’autorité civile, absente ici, en la personne du policier qui dirigerait normalement le trafic mais remplacé par les feux de circulation. Ce sont eux qui rythment le code civil et font marcher ou s’arrêter la vie. Si le malheur voulait que l’un des enfants traverse sur la lumière rouge, il serait heurté par l’automobile qui s’avance à gauche, dépassant la ligne blanche (la voiture verte dans la première version, la voiture aérodynamique dans la seconde). Le chien même a compris le principe qui traverse sur la lumière verte, alors que les deux enfants, sensés se rendre à l’école, ne réalisent pas qu’ils pourraient traverser dans le sens inverse, vers la gauche. Comme une preuve par l’absurde, John & Mary semblent inverser le code routier, se disant qu’il vaut mieux passer sur la lumière rouge s'il n'y a pas de voitures qui s'en viennent que d’attendre inutilement une lumière verte quand des automobilistes s'impatientent pour tourner! Telle est pourtant la différence entre le conditionnement et le bon sens, qui, disait Descartes, est la chose la mieux partagée! C’est ce que le piéton, en avant du camion, a bien compris, qui traverse sur la verte. Il est parfaitement conditionné par le code. Le cycliste également s’engage à reprendre son élan et à traverser. Combien d’élèves, durant toutes ces années, ont remarqué le non-sens de la logique de la conduite de John & Mary dans ce tableau?<br />
<br />
Poétique et Idéologique ne vont pas nécessairement de paire, même si les deux dimensions de la représentation mentale en appellent à la raison pour l’organisation de la logique des rapports entre les êtres. L’Idéologique veut que garçons et filles s’arrêtent au coin des rues, qu’importe le signal lumineux, pour être bien certain qu’aucun véhicule ne viendra les heurter. Comme on est jamais assez prudent, on regarde à droite, puis à gauche, et on traverse …sur la lumière verte. Le faire face à la lumière rouge n'est pas inutile, mais il suppose que l'on a fort peu confiance dans le jugement des automobilistes, et, par le fait même, au respect conventionnel du code routier. À moins que les deux enfants aient décidé de déroger à la conduite routière. Mais j'en doute fort. C’est en ce sens que leur démonstration est une preuve par l’absurde du bon droit de l’obéissance au code routier. Ces enfants sont tellement investis par l’ordre moral qu’ils en deviennent de véritables mécaniques automatisées. Le chien a plus d’élan vital en lui que ces deux enfants ensemble. Comme souvent, nous l’avons vu dans les autres tableaux, ils sont saisis par la pétrification, en pleine scène. Intérioriser à ce point la lettre plutôt que <i>l’esprit des lois</i> vide les mœurs de toutes substances vitales. Cela tue l’intelligence, la spontanéité, la réflexion. La substitution du policier ou d’un agent de la circulation par les feux qui passent du rouge au vert procède, suivant la psychologie behavioriste, du conditionnement: la seule psychologie applicable pour un ordre social qui attend de chaque individu la réaction appropriée à un signal donné.<br />
<br />
Ce qui se transforme vraiment de la première à la seconde version du tableau 5, c’est l’impression qui se dégage de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgnvobtX7gKr4gwA0uSijadJNVrc7zV4uoV41qVceDr-NXhvr-pHoEJmWE8oZGwzVzN-oV4lEz8sSGnfLCfftG6UmkPhpE7tszfCL6_V4nlBCKzl3UcRLl2zrK3DxMGzrRUrIRXS-tSctw/s1600/6-+John+%2526+Mary+going+to+school+-+copie+1.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="111" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgnvobtX7gKr4gwA0uSijadJNVrc7zV4uoV41qVceDr-NXhvr-pHoEJmWE8oZGwzVzN-oV4lEz8sSGnfLCfftG6UmkPhpE7tszfCL6_V4nlBCKzl3UcRLl2zrK3DxMGzrRUrIRXS-tSctw/s320/6-+John+%2526+Mary+going+to+school+-+copie+1.jpg" width="320" /></a>l’ambiance de la scène. D’une <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgnvobtX7gKr4gwA0uSijadJNVrc7zV4uoV41qVceDr-NXhvr-pHoEJmWE8oZGwzVzN-oV4lEz8sSGnfLCfftG6UmkPhpE7tszfCL6_V4nlBCKzl3UcRLl2zrK3DxMGzrRUrIRXS-tSctw/s104/6-+John+%2526+Mary+going+to+school+-+copie+1.jpg">atmosphère sereine et lumineuse</a>, la scène est plongée sous un climat inquiétant, entre l’orage et la fin du monde, dirions-nous. Car ce n’est pas seulement une question d’atmosphère. Il n’y a pas que la couleur du ciel qui assombrit le tableau. La peinture des automobiles également assombrit le dessin. La couleur vive du rouge de l’école dans la première version devient d'un rouge-brique sombre dans la seconde. La couleur des fenêtres y est sans doute pour quelque chose. Large et reflétant la lumière solaire dans la première version, elles sont devenues <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwl7HWqaTgr124k3F4DRlFSpEx81AgaW2MTlIhb4DqjTt8mIaIndv0cknudfG2r1qLmbOI1bmRcmLhV3oAZ9O26ujbVa5Um26Q8zO1HfPYV6A3zt-IJFXMx-bJ0N1pSQIUmGMIG_R4K2c/s1600/5a-+going+to+school+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="122" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwl7HWqaTgr124k3F4DRlFSpEx81AgaW2MTlIhb4DqjTt8mIaIndv0cknudfG2r1qLmbOI1bmRcmLhV3oAZ9O26ujbVa5Um26Q8zO1HfPYV6A3zt-IJFXMx-bJ0N1pSQIUmGMIG_R4K2c/s320/5a-+going+to+school+-+copie.jpg" width="320" /></a>bleues et étroites dans la seconde. Le porche d’entrée de la seconde école ajoute à la lourdeur du bâtiment. Passant du rouge au bleue, la camionnette contribue également à assombrir, et que dire du bloc d'appartements, rose dans la version originale, gris et sombre dans la version retouchée. Il n’y a pas jusqu’au jaune de la façade de l’église qui nous semble plus mât dans la seconde version. L’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwl7HWqaTgr124k3F4DRlFSpEx81AgaW2MTlIhb4DqjTt8mIaIndv0cknudfG2r1qLmbOI1bmRcmLhV3oAZ9O26ujbVa5Um26Q8zO1HfPYV6A3zt-IJFXMx-bJ0N1pSQIUmGMIG_R4K2c/s104/5a-+going+to+school+-+copie.jpg">atmosphère ombrageuse</a> fait même ressortir le rouge de la robe de Mary. Voilà en quoi les deux tableaux sont définitivement différents. D’une version à l’autre, la lumière solaire est devenue lunaire.<br />
<br />
À dix années de distance, qu’est-ce qui s’est passée pour que l’ombre menaçante vienne envahir la rue de notre Peyton Place? En 1949, date de circulation du premier tableau, le monde était pourtant en pleine crise d’après-guerre: la réinsertion des anciens soldats, la reconversion des industries militaires en industries ménagères, le passage d’une économie de privation à une économie de consommation, la menace de la guerre nucléaire et de l’affrontement avec la bloc soviétique; rien ne permettait de considérer que le ciel puisse être si bleu, à peine traversé par quelques cumulus de beau temps, et le soleil si radieux dans le cadre inquiétant que nous traversions. Au contraire, dix ans plus tard, en 1959-1960, l’Amérique du Nord vivait en pleine ère d’abondance. Une légère détente entre les deux <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgs7AKDMaiG60YNveKbVBnmIsxa9CSCBYFdsWjMM9RXtc9x7zWt_ZKApFJ-p9OTOX4Xp2qhS0wEeld7IUuIJiKtfc34qHZk9BpMtQQR2KAHrYsSoK8GqQUsfsEWWICaYjXr63ERDs-mOto/s1600/mod_article2721742_1.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgs7AKDMaiG60YNveKbVBnmIsxa9CSCBYFdsWjMM9RXtc9x7zWt_ZKApFJ-p9OTOX4Xp2qhS0wEeld7IUuIJiKtfc34qHZk9BpMtQQR2KAHrYsSoK8GqQUsfsEWWICaYjXr63ERDs-mOto/s320/mod_article2721742_1.jpg" width="259" /></a>superpuissances pouvait permettre de croire que les rivalités politiques internationales iraient en s’amenuisant. Le pouvoir d’achat des consommateurs était solide et la production roulait bon train. Nous ignorions alors des concepts comme «crise énergétique», «pollution des airs et des eaux», «espèces en voie de disparition», «immigrations massives», etc. Un ordre s’était établi qui semblait ne plus jamais être mis en danger, ni de l’extérieur, ni de l’intérieur. Les publicités respiraient la joie de vivre, contrairement à la propagande du temps de guerre et de la Guerre Froide. À nouveau, le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgs7AKDMaiG60YNveKbVBnmIsxa9CSCBYFdsWjMM9RXtc9x7zWt_ZKApFJ-p9OTOX4Xp2qhS0wEeld7IUuIJiKtfc34qHZk9BpMtQQR2KAHrYsSoK8GqQUsfsEWWICaYjXr63ERDs-mOto/s104/mod_article2721742_1.jpg">Coca Cola</a> ressortait la chanson de Charles Trenet, <i>Y'a d’la joie!</i> Alors, pourquoi cet assombrissement de la rue où John & Mary attendent la lumière verte pour traverser la rue?<br />
<br />
Il est possible que nous nous soyons mépris sur la valeur à donner à cette lumière rouge qui fixe la conduite de John & Mary. S’il s’agissait d’une lumière de circulation comme les autres, John & Mary seraient assez intelligents, se rendant à l’école, pour traverser sur la lumière verte qui leur permettrait de traverser vers la gauche du tableau, puis ensuite traverser en direction de leur école. Toute la logique de <i>Mary and John/ going to school</i> serait alors respectée. Mais si la lumière rouge ne reproduit pas le feu de circulation mais suppose un feu d’une autre nature, resterait à identifier la nature à laquelle il appartiendrait pour nous permettre de comprendre le sens exact de ce tableau.<br />
<br />
Le rouge, nous l’avons vu, représente plusieurs thèmes. Le sang, la passion, la violence, le danger, le communisme. En tant que feu de circulation, le rouge représente le danger, comme ces fanions que l’on attache à l’extrémité d’un morceau quelconque qui dépasse <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg5R_-q8WbkLbd9QlmZZoyFOXdxa7OJi6ejJDmzG3mWEevMcpWOTI7zuqza88num_aBSgdHLqTNK2Iq8aRHlMZbNOC2XiGZ9n2KnQFatB6fXHhhbjMGukbhmbuJkBlp85PwOB5DvnviIEA/s1600/bfi-00m-lth.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg5R_-q8WbkLbd9QlmZZoyFOXdxa7OJi6ejJDmzG3mWEevMcpWOTI7zuqza88num_aBSgdHLqTNK2Iq8aRHlMZbNOC2XiGZ9n2KnQFatB6fXHhhbjMGukbhmbuJkBlp85PwOB5DvnviIEA/s320/bfi-00m-lth.jpg" width="233" /></a>le coffre arrière d’une voiture. C’est ce fanion rouge signifiant danger que <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg5R_-q8WbkLbd9QlmZZoyFOXdxa7OJi6ejJDmzG3mWEevMcpWOTI7zuqza88num_aBSgdHLqTNK2Iq8aRHlMZbNOC2XiGZ9n2KnQFatB6fXHhhbjMGukbhmbuJkBlp85PwOB5DvnviIEA/s104/bfi-00m-lth.jpg">Charlot</a> inverse, malgré lui, en drapeau communiste, prenant sans le savoir la tête d’une manifestation ouvrière dans <i>Modern Times</i>. En tel sens, le rouge du danger est étroitement apparenté au sang qu’entraîne généralement tout accident automobile. Danger-violence-sang forment donc une lignée logique incontournable, mais elle reste dans la portée de la didactique du tableau: il est interdit de traverser la rue au feu rouge. Reste alors la passion et le communisme. Le rouge-passion concerne généralement la passion amoureuse, et il est douteux que nous ayons à répéter, comme un pansexualisme, que le rouge signifie partout l’interdit de l’inceste. À moins de replier le psychologique sur lui-même, il faut élargir la portée des signifiances. Le communisme serait déjà de meilleur aloi. C'est ici que l'Idéologique terminerait la logique poétique de la lignée danger-violence-sang-communisme.<br />
<br />
Car, après tout, les <i>Fifties</i>, c’est la décennie du grand procès-spectacle au Sénat américain où le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjRVhj9XFoaOfwPd4TF0cFpLKUkc0ew0qz7Cb-8UAeAKjGGqlgiGksbQD68IW7fOqb1v4QUJvO1KJk_GTxYxcRqWBGT490DH6eAXen6KWVgJG-25cXlQfGgCOlK-o8TMQHXM5ShUYPj9kE/s104/carthy.jpg">sénateur MacCarthy</a> fit passer en commission sénatoriale tout ceux qui passaient pour communistes dans la société américaine, en commençant par les hauts-fonctionnaires de l’administration jusqu’aux officiers militaires (sur lesquels la vague maccarthyiste se brisa), en passant par les vedettes de cinéma et les membres des services publiques. Plus qu’un danger réel, le communisme des années cinquante est un communisme <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjRVhj9XFoaOfwPd4TF0cFpLKUkc0ew0qz7Cb-8UAeAKjGGqlgiGksbQD68IW7fOqb1v4QUJvO1KJk_GTxYxcRqWBGT490DH6eAXen6KWVgJG-25cXlQfGgCOlK-o8TMQHXM5ShUYPj9kE/s1600/carthy.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="167" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjRVhj9XFoaOfwPd4TF0cFpLKUkc0ew0qz7Cb-8UAeAKjGGqlgiGksbQD68IW7fOqb1v4QUJvO1KJk_GTxYxcRqWBGT490DH6eAXen6KWVgJG-25cXlQfGgCOlK-o8TMQHXM5ShUYPj9kE/s320/carthy.jpg" width="320" /></a>de cauchemars de petits propriétaires et de familles bourgeoises qui voient des espions dans chaque politicien le moindrement «liberal» ou «socialiste». Les <i>un-american activities </i>se pratiqueraient jusqu'au sein de l'appareil d'État. C’est la psychose de l'<i>espionite, </i>la hantise des espions soviétiques ou chinois fouinant partout dans les détritus du monde occidental. L’affaire Rosenberg, qui se solda par l’exécution d’un couple de physiciens qui auraient transmis des informations à un agent soviétique, fut l’un des événements de la décennie les plus marquants. Plus tard, au Canada aussi, Gerda Munsiger, une blonde platine qu’on s'attendrait à voir chanter des chansons bavaroises dans un chalet suisse, considérée comme espionne est-allemande (1966), reproduisait à Ottawa le scandale Profumo (1961) qui, en Angleterre, avait vu compromis le ministre de la guerre Profumo avec une <i>call-girl </i>soupçonnée d’espionnage, Christine Keeler. La véracité ou non des soupçons comptait moins que l’atmosphère que faisait jaillir une suite de scandales. C’est cette atmosphère que nous retrouvons dans la version retouchée de <i>Mary & John going to school</i>.</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjhbRLYwAIacodUdOC10fUfEgz_PcG-dqKdru_tIjI4Zp4Cq0nDiOW-6bzCsABp8eTBwWnvOglY6nMebS1yyrscjukwsu53voGg39-nfWnAaNuaKlSv2krsnKWACLqvlC_Cem9qllZzf38/s1600/Oelze_Richard_Attente_peinture_1936.jpg" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="321" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjhbRLYwAIacodUdOC10fUfEgz_PcG-dqKdru_tIjI4Zp4Cq0nDiOW-6bzCsABp8eTBwWnvOglY6nMebS1yyrscjukwsu53voGg39-nfWnAaNuaKlSv2krsnKWACLqvlC_Cem9qllZzf38/s400/Oelze_Richard_Attente_peinture_1936.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: justify;"><br />
Depuis que nous avons commencé avec le tableau 1 de <b>conversation anglaise</b>, nous n’avons rencontré que des tableaux respirant le bonheur, la sécurité, la joie de vivre et la paix domestique. Rien de tragique, rien de grave ne se déroule que ces tableaux pourraient nous transmettre, sinon que dans l’inconscient. Même le ciel serein de la première version du tableau 6 ne déroge pas à la règle. Mais dix ans plus tard, l’atmosphère s’est remplie d’orage. Nous nous attendons, à contempler ce tableau, à ce qu’un éclair vienne zébrer le ciel, un roulement de tonnerre presser les piétons, enfin qu’une averse, une ondée, vienne détremper la chaussée. John & Mary reprennent la pose des figures anonymes des personnages du tableau de Richard Oelze intitulé <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjhbRLYwAIacodUdOC10fUfEgz_PcG-dqKdru_tIjI4Zp4Cq0nDiOW-6bzCsABp8eTBwWnvOglY6nMebS1yyrscjukwsu53voGg39-nfWnAaNuaKlSv2krsnKWACLqvlC_Cem9qllZzf38/s104/Oelze_Richard_Attente_peinture_1936.jpg"><i>L’attente</i></a>. Peint avant la Seconde Guerre mondiale, (1936), ce tableau, conservé à New York, est pratiquement contemporain de l’esprit qui anime les illustrations de <b>conversation anglaise</b>. Certes, la menace qui couvait sur le monde - surtout européen - durant l’Entre-deux-Guerres s’est transportée sur l’ensemble du monde occidental, même lorsque les fascismes furent abattus par les Alliés en 1945, mais l’enclenchement quasi immédiat de la Guerre Froide et l’aspect sinistre que représentait le stalinisme comme forme de communisme furent à l’origine d’événements que l’on devait baptiser plus tard, de «légendes urbaines»: invasion de soucoupes volantes, rencontre avec des <i>Aliens</i>, enlèvement et expérimentation dans des vaisseaux spatial, mutations génétiques commandées, guerres bactériologiques ou chimiques, etc., c’est bien le ciel de Oelze qui se transpose dans la version corrigée de <i>Mary and John going to school</i>. Preuve qu’il n’y avait pas que les scandales sordides locaux qui contribuaient à angoisser les habitants de bleds tranquilles comme celui de <i>Peyton Place.</i></div><div style="text-align: right;">Montréal<br />
25 juin 2011</div><div style="text-align: justify;"></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-4015215609218847982011-06-24T22:21:00.000-07:002011-07-04T10:08:34.369-07:00The Martin Family at church<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7WOR9tUhVsav1gx2VBt4SlAD0yFITbc5gl2XEq2O6tj6ouXHFplAFY6MlA2BTXRCaH_CpGzD3UkMlHTz1MMtM1rGbBxettwVrsOOLb_ZJNAYiNT8fTaMxrf3QTa73-p45OgNRqDGyazk/s1600/5-+at+the+church.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="290" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7WOR9tUhVsav1gx2VBt4SlAD0yFITbc5gl2XEq2O6tj6ouXHFplAFY6MlA2BTXRCaH_CpGzD3UkMlHTz1MMtM1rGbBxettwVrsOOLb_ZJNAYiNT8fTaMxrf3QTa73-p45OgNRqDGyazk/s400/5-+at+the+church.jpg" width="400" /></a></div><div style="text-align: center;"><b></b></div><br />
<div style="text-align: center;"><b>THE MARTIN FAMILY AT CHURCH</b><br />
<br />
</div><div style="text-align: center;"></div><div style="text-align: justify;">Après quatre tableaux, John & Mary ont enfin un nom de famille: Martin. Évidemment, il ne s’agit pas des Martin d’Ontario dont le peu d’imagination faisait se succéder les Paul au Paul. John Martin et Mary Martin (nom aussi courant en français qu’en anglais) sont l’exemple des enfants appartenant à la famille canadienne idéale et dont les racines ethno-linguistiques seraient effacées. À la fois anglaise et française, cette famille réalise, avant même la commission Laurendau-Dunton (1963), le projet du bilinguisme et du biculturalisme canadien. Car tous les anglophones ne sont pas anglicans ou réformés, et ils en demeurent parmi eux des catholiques. Toutefois, si la nef semble peu peuplée, le chœur (lieu où se célèbre le rite) correspond toujours aux dispositions prescrites par le rite tridentin, la messe de saint Pie X: le prêtre célèbre la messe en latin, dos aux fidèles et la communion se donne alors que le fidèle est à genoux à la sainte table. L'<i>aggiornemento </i>de Vatican II allait changer tout cela.</div><br />
<div style="text-align: justify;">Étrange nef d’église que celle où assiste à la célébration la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgn4XXWHVz_7jEq2fTC-7eKbIYHrRP6558xy-TA8BF24Zv6zWdG4u2azmFEz3DCtjaNtOMhQp6LSd6e4hSj9vFONEaqgm7zVz73PYoIVMCObt2ZPWOPESvtCOI-VtR6J7dbFg9qGOhaI7A/s1600/%25C3%25A9glise+bond%25C3%25A9e.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgn4XXWHVz_7jEq2fTC-7eKbIYHrRP6558xy-TA8BF24Zv6zWdG4u2azmFEz3DCtjaNtOMhQp6LSd6e4hSj9vFONEaqgm7zVz73PYoIVMCObt2ZPWOPESvtCOI-VtR6J7dbFg9qGOhaI7A/s320/%25C3%25A9glise+bond%25C3%25A9e.jpg" width="210" /></a>famille Martin. L’église est déjà pratiquement déserte. Rien à voir avec la nef bondée de cette autre reproduction tirée du manuel d’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgn4XXWHVz_7jEq2fTC-7eKbIYHrRP6558xy-TA8BF24Zv6zWdG4u2azmFEz3DCtjaNtOMhQp6LSd6e4hSj9vFONEaqgm7zVz73PYoIVMCObt2ZPWOPESvtCOI-VtR6J7dbFg9qGOhaI7A/s104/%25C3%25A9glise+bond%25C3%25A9e.jpg"><i>Histoire du Canada</i></a> de 1ère année de Guy Laviolette. Plus de quinze ans avant la décléricalisation qui devait suivre le concile Vatican II, l’église où se rend les Martin est déjà en voie de se clairsemer si on se fie à l’occupation des bancs. Il y a pourtant un célébrant à l’autel et un vicaire qui distribue la communion. <i>The province ruled by priests</i> nous donne ici la proportion de deux prêtres pour sept fidèles (moins les enfants de chœur!). Pourtant, les bancs d’église sont bien ceux, en bois, des églises de mon enfance. Les petits crochets pour y suspendre les chapeaux n’y manquent même pas. Le missel déposé sur un prie-dieu est la réplique des vieux missels d’avant Vatican II, page latine et page française (ou anglaise) l’une face à l’autre. Chaque étape de la célébration y est représentée, avec illustrations et icônes qui rythment mouvements et récits. La chasuble du célébrant est rouge, symbole de sang et de feu dans la liturgie catholique, elle signifie que la famille vient d’assister à une célébration du Saint-Esprit et des Martyrs. L’autel est décoré d’une reproduction de la <i>Cène</i> de Léonard de Vinci.<br />
<br />
Après nous être arrêtés aux corps de John et de Mary, à leur rituel matinal et à leurs vêtements, nous pénétrons dans leur milieu. Nous retrouvons les deux enfants au sein de leur famille. Famille bourgeoise qui suit déjà les préceptes de la modernité en limitant le nombre de leur marmaille à deux enfants. Portant les vêtements propres aux <i>Fifties</i>, ils sont assidus au rite, respectueux, pieux. La <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi66LmziUuPheoneduFSShxb51Wsd5vvuIAiVfBOIpAWZ0AImhy0Qzu3qnf-mbBV7Ainx5tUEJeA_MvxETgzZaaNIhzZDzTdLvFZ3mtr26gnL3oufHQjI19JDlgVmwDidkwxa9wvZYGBR8/s1600/dominiquebuste.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi66LmziUuPheoneduFSShxb51Wsd5vvuIAiVfBOIpAWZ0AImhy0Qzu3qnf-mbBV7Ainx5tUEJeA_MvxETgzZaaNIhzZDzTdLvFZ3mtr26gnL3oufHQjI19JDlgVmwDidkwxa9wvZYGBR8/s320/dominiquebuste.jpg" width="245" /></a>démarche de John qui retourne à son banc, avec le corps du Christ qui baigne dans sa salive et fond sur la langue, est celle d’une image d’un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi66LmziUuPheoneduFSShxb51Wsd5vvuIAiVfBOIpAWZ0AImhy0Qzu3qnf-mbBV7Ainx5tUEJeA_MvxETgzZaaNIhzZDzTdLvFZ3mtr26gnL3oufHQjI19JDlgVmwDidkwxa9wvZYGBR8/s104/dominiquebuste.jpg">Dominique Savio</a> nouveau genre. Je nomme Dominique Savio (1842-1857) parce qu’en tant que disciple de Dom Bosco, il nous était offert, à nous les garçons, en tant que modèle de piété catholique. Venu d’une famille pauvre de l’arrière-pays de Turin, Dominique était au départ fervent catholique lorsque Dom Bosco, voyant sa grande aptitude à l’instruction, le ramena avec lui. Détesté par les autres enfants - ce n’est pas étonnant au siècle de l’anticléricalisme et de l’irréligion -, ils menacèrent même de le mettre à mort lorsque par un mouvement spontané, il brandit une croix et les convertit instantanément. Dominique Savio devint ainsi <i>chef de gang</i>, la Compagnie de l’Immaculée Conception, dont le but n’était rien de moins que de ramener l’Angleterre dans le giron du catholicisme! Heureusement, la tuberculose vint à bout de l’enfant qui mourut, comme il se devait, dans les râles de l’agonie. L’hagiographie nous rapporte que «juste avant de s'éteindre, il aurait dit à ses parents, en extase: «Oh ! Comme c'est beau ce que je vois!» Dom Bosco écrivit alors une biographie exemplaire de Dominique Savio, rappelant comment son grand souhait était de devenir saint. Souhait que Pie XII réalisa d’abord en le béatifiant en 1950 et en le canonisant quatre ans plus tard. Voilà pourquoi il était encore si populaire de mon temps.<br />
<br />
Les fillettes n’étaient pas laissées en reste. À elles, on leur offrait l’idéal de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhvJrGwEJHkevpB5VtjsCz-9MlQ0wciXJ3tCQFcFQTD8dZIHyIGfuWs-sZCt2uvciu0pEyUw6wAMvMnswG2tsOHqFMWcOvv-2WePMbCgd2xF1toq3xkAAAyxvd8EoLC1czsmdiJgza4x-g/s104/MaryGoretti.jpg">Maria Goretti</a> (1890-1902). Plus que pour Dominique, la vie de Maria est un condensé de sainteté spirituelle et de conduite morale. Le tableau 4, <i>Mary’s clothes</i>, nous montrait bien tous les dangers qui menaçaient la petite fille. Cette petite Italienne, elle aussi née de parents pauvres dans l’arrière-pays, se voyait, dès l'âge de onze ans, poursuivie par les assiduités d’un jeune homme, Alessandro Serenelli. Il est vrai que Maria paraissait plus vieille que son âge et qu’on la surnommait la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhvJrGwEJHkevpB5VtjsCz-9MlQ0wciXJ3tCQFcFQTD8dZIHyIGfuWs-sZCt2uvciu0pEyUw6wAMvMnswG2tsOHqFMWcOvv-2WePMbCgd2xF1toq3xkAAAyxvd8EoLC1czsmdiJgza4x-g/s1600/MaryGoretti.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhvJrGwEJHkevpB5VtjsCz-9MlQ0wciXJ3tCQFcFQTD8dZIHyIGfuWs-sZCt2uvciu0pEyUw6wAMvMnswG2tsOHqFMWcOvv-2WePMbCgd2xF1toq3xkAAAyxvd8EoLC1czsmdiJgza4x-g/s320/MaryGoretti.jpg" width="243" /></a>«petite femme»! Alessandro, 20 ans, se montra plus qu’insistant et l’hagiographie nous apprend que Maria, pour fuir la tentation, se réfugia dans la prière. Il est probable que la statue de l’Immaculée Conception, dans la chambre de Mary, lui soufflait à l’oreille le même conseil contre le dialogue obscène de la paterre et de la chatte Pussy! Quoi qu'il en soit, le martyre attendait la jeune dévote. Le 5 juillet 1902, «vers quinze heures», alors qu’elle se trouvait seule avec sa petite sœur, Teresa (à ne pas confondre avec Mère Teresa), le vil Alessandro se présenta et l’amèna de force dans la grande cuisine. Maria se débatît et trouva un argument qui ne fut pas suffisamment convainquant pour calmer les ardeurs de l’agresseur: «Alessandro, Dieu ne veut pas ces choses là! Si tu fais cela tu iras en enfer!» Vexé et fou de rage, l’hagiographie nous apprend alors qu’il «saisit un poinçon de vingt-sept centimètres de long» et la frappa à «quatorze reprises». Transportée à l’hôpital, elle mourut le lendemain après, bien entendu, avoir reçu la communion et donnant son pardon à l’agresseur à la demande du prêtre: «Oui, pour l'amour de Jésus, je pardonne. Je veux qu'il vienne lui aussi avec moi au Paradis. Que Dieu lui pardonne, car moi, je lui ai déjà pardonné». On ne peut être plus altruiste à l’article de la mort! Condamné à une peine de trente ans de prison, le vil meurtrier rêva une nuit de 1910 que Maria lui offrait des lys qui se transformaient en lumières scintillantes. Comme Claudel, il se voyait ainsi frappé par la conversion. Libéré de prison en 1929, après 27 ans de détention, il entra en tant que laïc au Couvent des Capucins d’Ascoli Piceno et mourut au Couvent de Macerata en 1970, après avoir rédigé un testament jugé édifiant. Encore là, nous devons à Pie XII la béatification de Maria en 1947 et sa canonisation en 1950. Assunta, sa mère qui était toujours vivante, fut la première femme à assister à la canonisation de son enfant. Pour le centième anniversaire du drame, le divin Jean-Paul II, dans un Message spécial à l’Évêque d’Albano, souligna «l’actualité de cette Martyre de la pureté».<br />
<br />
Voilà donc John & Mary dotés de modèles de conduite et de sainteté. John, à l’exemple de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEir5vPKFl6V-COLO8TtsdLHDVwoGiFKj-YS16wlRVB_zKZSscqXRfI872mhrYnbkzIDfI5dDrQ_GRWf8krzdlWSx4qSh2WYczXN7DsUg4X1xmlEwOUUFW6yglBLHk3OCvCItP9rHHemY0A/s104/dominiqueapotre.jpg">Dominique </a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEir5vPKFl6V-COLO8TtsdLHDVwoGiFKj-YS16wlRVB_zKZSscqXRfI872mhrYnbkzIDfI5dDrQ_GRWf8krzdlWSx4qSh2WYczXN7DsUg4X1xmlEwOUUFW6yglBLHk3OCvCItP9rHHemY0A/s1600/dominiqueapotre.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="205" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEir5vPKFl6V-COLO8TtsdLHDVwoGiFKj-YS16wlRVB_zKZSscqXRfI872mhrYnbkzIDfI5dDrQ_GRWf8krzdlWSx4qSh2WYczXN7DsUg4X1xmlEwOUUFW6yglBLHk3OCvCItP9rHHemY0A/s320/dominiqueapotre.jpg" width="320" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEir5vPKFl6V-COLO8TtsdLHDVwoGiFKj-YS16wlRVB_zKZSscqXRfI872mhrYnbkzIDfI5dDrQ_GRWf8krzdlWSx4qSh2WYczXN7DsUg4X1xmlEwOUUFW6yglBLHk3OCvCItP9rHHemY0A/s104/dominiqueapotre.jpg">Savio</a>, communie pieusement, recueillie en lui-même, rien n’indique qu’il ne planifie, toutefois, une croisade pour recatholiciser l’Angleterre! Mary, que l’on voit de dos, habillée elle aussi en rouge, comme la chasuble du curé, est encadrée par son père et sa mère, comme deux anges gardiens chargés de veiller sur sa pureté. Comme c’est la célébration de l’Esprit-Saint et des Martyrs, on comprend que cette fête touche autant Maria Goretti que Mary Martin. Rien ne semble être laissé au hasard dans ce tableau d’éducation morale plus que religieuse.<br />
<br />
Nous avons dit que le tableau 5 voyait l’introduction de la famille dans la vie de John & Mary (et des élèves). C’est aussi l’introduction de la famille dans la société. Outre Dieu qui veille du Saint-Sacrement, nous apprenons à connaître le célébrant, le père Smith et le père MacManus qui distribue la communion. Certes, une fois la page tournée, nous ne les reverrons plus, mais ils seront toujours présents dans la vie de la petite Peyton Place où se déroule la vie des Martin. Ils en sont les gardiens de la bonne conscience morale. Ils ont éduqué monsieur et madame Martin lorsqu’ils avaient l’âge de John & Mary (les cheveux blancs du père MacMagnus donnant la communion à monsieur Martin suppose qu’il le connaît depuis longtemps). Eux aussi seront confessés par les deux curés qui connaîtront leurs moindres secrets, seront les seuls à véritablement visiter leurs «placards», à fouiller dans la malle de Mary et jusque dans sa sacoche. En ce sens, la société joue deux rôles vis-à-vis des fidèles. Elle est à la fois source de tentations et gardienne des interdits.<br />
<br />
Là aussi les concepteurs auraient pu faire défiler un long cortège d’articles et de signes de piété religieuse: autel, crucifix, statue, cierge, calice, hostie, ciboire, tabernacle (on croirait une litanie de sacres québécois!), missel, enfants de chœur, sainte table, chaire, bancs, sacristie, sans oublier la lampe du sanctuaire et le Saint-Sacrement. Mais les dessinateurs ont préféré insérer les objets directement dans la scène, de sorte que le tableau est poétiquement plus vivant et sans pour autant perdre de sa subtilité symbolique ni surtout sa grande édification moralisatrice.<br />
<br />
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFK1bY7HGnA8nAPE4hPsOSQ5mp66tW6TYYJrFP77NDkK8Btf42bljbFNbf9SQukBteCKDg3NabPOo8Qs9FV4JShZgpPJccxKtf9tPqhG6kckaCtc9Ktf3ofmJJwROvlN7YE9PrKxhF7po/s1600/5-+at+the+church+-+copie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFK1bY7HGnA8nAPE4hPsOSQ5mp66tW6TYYJrFP77NDkK8Btf42bljbFNbf9SQukBteCKDg3NabPOo8Qs9FV4JShZgpPJccxKtf9tPqhG6kckaCtc9Ktf3ofmJJwROvlN7YE9PrKxhF7po/s320/5-+at+the+church+-+copie.jpg" width="123" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgBJ_7nLX2KxalaOohXGSegTdocjQdgA59_Yudqc_xhtpRsNZ0ZJWJKLjwo4zgSJs5xnpUcxVuPqvVukKFW3kFdvUJNSzZ_sNTi7Ti9jJApf12GgSZNUQ5J2p0YPEXiBf4CUwYO6DzU2hI/s1600/2-+John+doing+his+prayer+-+copie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgBJ_7nLX2KxalaOohXGSegTdocjQdgA59_Yudqc_xhtpRsNZ0ZJWJKLjwo4zgSJs5xnpUcxVuPqvVukKFW3kFdvUJNSzZ_sNTi7Ti9jJApf12GgSZNUQ5J2p0YPEXiBf4CUwYO6DzU2hI/s320/2-+John+doing+his+prayer+-+copie.jpg" width="123" /></a>Et c’est peut-être cet aspect qui est le plus intéressant à comprendre du vécu religieux d’avant Vatican II, dans le monde de la petite-bourgeoisie de <i>Peyton Place</i>. Si nous passons par-dessus la morale de la chasteté dans laquelle on ne croit plus trop trop, c’est combien la spiritualité est moins une affaire d’intériorité que de conditionnement social. Certes, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFK1bY7HGnA8nAPE4hPsOSQ5mp66tW6TYYJrFP77NDkK8Btf42bljbFNbf9SQukBteCKDg3NabPOo8Qs9FV4JShZgpPJccxKtf9tPqhG6kckaCtc9Ktf3ofmJJwROvlN7YE9PrKxhF7po/s104/5-+at+the+church+-+copie.jpg">John est fort pieux</a>, mais il ressemble davantage à la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgBJ_7nLX2KxalaOohXGSegTdocjQdgA59_Yudqc_xhtpRsNZ0ZJWJKLjwo4zgSJs5xnpUcxVuPqvVukKFW3kFdvUJNSzZ_sNTi7Ti9jJApf12GgSZNUQ5J2p0YPEXiBf4CUwYO6DzU2hI/s104/2-+John+doing+his+prayer+-+copie.jpg">pose que prend Mary</a> dans le tableau 2, presque figé sur place même si on nous le présente se dirigeant vers le banc familial. Cette intériorité spirituelle est belle, sans doute, mais elle n’est pas ce que le tableau vise à nous enseigner d’abord. Elle passe tout simplement au second rang, avec les images pieuses de Dominique Savio et de Maria Goretti. Tout cela n’est que jeu d’enfants auxquels s’est toujours prêté l’appareil clérical.<br />
<br />
Ce qui est plus important encore, c’est le cadre général de la vie en société. Le père Smith et l’enfant de chœur sont situés sur les plus hautes marches menant à l’autel. Ils sont plus près de Dieu en tant que figures d’autorité. Ce rapport privilégié du surnaturel et du clergé est, bien entendu, séparé par la sainte table, dans une église où le transept sert, comme dans la salle à l’italienne, au théâtre, de frontière infranchissable entre le sacré et le profane. Le père MacMagnus, qui n’a revêtu que l’étole sur l’aube est déjà un peu plus éloigné du tabernacle que le père Smith. Entre les deux curés déjà s’établit une distance liée à la hiérarchie (MacMagnus est dit vicaire et Smith prêtre de la paroisse).<br />
<br />
Même ordre hiérarchique dans la société profane. Dans le premier <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9jADfaDdOAS0nZKV4AMN-3he9Nk7DJZ1ZDQjZ-rv-mQEme3R36dshBBQu_Vipxr_OdPfaLmfvuqVFENohoeVjuV8C3FwuMDJyxWR731Dak_jc6lLj7Nkj_dlmhRNOxnvPaCqvHor93zk/s1600/l_9dde8bf89d33fa37d90ddee96ab75982.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="148" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9jADfaDdOAS0nZKV4AMN-3he9Nk7DJZ1ZDQjZ-rv-mQEme3R36dshBBQu_Vipxr_OdPfaLmfvuqVFENohoeVjuV8C3FwuMDJyxWR731Dak_jc6lLj7Nkj_dlmhRNOxnvPaCqvHor93zk/s200/l_9dde8bf89d33fa37d90ddee96ab75982.jpg" width="200" /></a>banc, nous retrouvons un couple de personnes âgées et leur fils adulte et immédiatement derrière eux, la famille Martin, père et mère avec fils et fille. L’autorité est commandée par l’âge. Plus nous nous rapprochons de Dieu (et l’âge nous en rapproche dans la mesure où elle diminue la distance qui nous sépare de notre mort), plus nous serions élevés dans l’ordre hiérarchique. Cette vision de la «politesse» et de la «bienséance» enseignée aux enfants est reprise ici intégralement. Le monde des <i>Fifties</i>, qui se voulait le temps de la jeunesse, ne lui reconnaissait <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjNcsdgf0n4ppBpcQ0or67I3sgdmWwrkDjTKyYqwUhuUn4PB9SzejfNGgMd_72PqyuZHtbGy-nUOBc_bOpcXFwRdsQZOguall1LnDwJ_gGhjbtMloRE_TlLDMlEKzNtSuAERlO0sqM9U-A/s1600/st_maria_goretti.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="165" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjNcsdgf0n4ppBpcQ0or67I3sgdmWwrkDjTKyYqwUhuUn4PB9SzejfNGgMd_72PqyuZHtbGy-nUOBc_bOpcXFwRdsQZOguall1LnDwJ_gGhjbtMloRE_TlLDMlEKzNtSuAERlO0sqM9U-A/s200/st_maria_goretti.jpg" width="200" /></a>aucun privilège face à la proximité de Dieu et du chrétien, sinon que par la mort. Si, comme le disait Heidegger, l’homme est un <i>être-pour-la-mort</i>, rien de tel que ce tableau pour l’illustrer. Si <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9jADfaDdOAS0nZKV4AMN-3he9Nk7DJZ1ZDQjZ-rv-mQEme3R36dshBBQu_Vipxr_OdPfaLmfvuqVFENohoeVjuV8C3FwuMDJyxWR731Dak_jc6lLj7Nkj_dlmhRNOxnvPaCqvHor93zk/s104/l_9dde8bf89d33fa37d90ddee96ab75982.jpg">Dominique Savio</a> et <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjNcsdgf0n4ppBpcQ0or67I3sgdmWwrkDjTKyYqwUhuUn4PB9SzejfNGgMd_72PqyuZHtbGy-nUOBc_bOpcXFwRdsQZOguall1LnDwJ_gGhjbtMloRE_TlLDMlEKzNtSuAERlO0sqM9U-A/s104/st_maria_goretti.jpg">Maria Goretti</a> sont offerts comme modèles aux enfants, jusqu’à la canonisation, ordre le plus élevé de la hiérarchie céleste (pour les humains), c’est que l’un est mort de tuberculose et l’autre martyre de sa virginité. C’est la mort autant que la piété, sinon même plus, qui crée le respect de l’autorité, avec comme corollaire, l’obéissance et la soumission.<br />
<br />
<i>The Martin Family at chuch</i> illustre donc la position hiérarchique des individus dans la Cité de Dieu autant que dans la Cité terrestre. Saint Augustin a bien pu condamner cette dernière comme étant dans les pompes de Satan, il n’en reste pas moins que l’ordre paulinien de l’<i>omni potestas eo Deo</i> se reproduit tout au long de la descente de l’autel vers le banc dans la nef. Cette règle sociale, étant sous le regard de Dieu, ne permet aucune entorse. Ainsi donc, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiflmsTQD8RCTnIEWsRPF9gAIpr7SF6QL9ONMdrmje5GQywRGjsJKHDZwgS4FoUMHCw9axMWvU-bwBKU2gC1bK-34wWK6hG3tIU2vx6zpprO4oMtxP1JfCg2CZ3msSZ5X5DN5U4H-BZ8Pk/s1600/ite+missa+est.tif" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="184" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiflmsTQD8RCTnIEWsRPF9gAIpr7SF6QL9ONMdrmje5GQywRGjsJKHDZwgS4FoUMHCw9axMWvU-bwBKU2gC1bK-34wWK6hG3tIU2vx6zpprO4oMtxP1JfCg2CZ3msSZ5X5DN5U4H-BZ8Pk/s320/ite+missa+est.tif" width="320" /></a>peut-on déduire que le sentiment religieux se trouve complètement absorbé par la religion comme fonction sociale. Faisant régresser la spiritualité vers des rites automatiques, elle s’accorde très bien avec les inventions modernes de la Révolution industrielle appliquée à l’organisation domestique avec la société de consommation. On se lève, on s’asseoit, on s’agenouille, on baisse la tête, on lève les yeux, on se relève, on se rasseoit, on écoute, on se dirige vers la sainte table, on communie - non plus selon le rite des premiers chrétiens, comme une redistribution, mais comme une distribution opérée par l’autorité -, on retourne à sa place, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiflmsTQD8RCTnIEWsRPF9gAIpr7SF6QL9ONMdrmje5GQywRGjsJKHDZwgS4FoUMHCw9axMWvU-bwBKU2gC1bK-34wWK6hG3tIU2vx6zpprO4oMtxP1JfCg2CZ3msSZ5X5DN5U4H-BZ8Pk/s104/ite+missa+est.tif"><i>ite, missa est</i></a>.<br />
<br />
La sérénité dans laquelle baigne la scène du tableau 5, qui est censée célébrer la messe des martyrs, s’oppose avec le tragique des récits hagiographiques. À l’exemple des autres tableaux de <b>conversation</b></div><table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><br />
</td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="float: left; margin-right: 1em; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0XSRsopUkd1oaCfEHkIHsdTiJ5TCG-nH68cSFs6PzNJS_zPB_DoSS6ZjoBLJD4SEPEbbztqaBU9DG0Z5icLUl1k8coAAgozZo9UP6ItOoyBM9ejPXlZPctcaOQyvjo_hcgYfftHqLOk0/s1600/charlemagne_couronnement.jpg" style="clear: left; margin-bottom: 1em; margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0XSRsopUkd1oaCfEHkIHsdTiJ5TCG-nH68cSFs6PzNJS_zPB_DoSS6ZjoBLJD4SEPEbbztqaBU9DG0Z5icLUl1k8coAAgozZo9UP6ItOoyBM9ejPXlZPctcaOQyvjo_hcgYfftHqLOk0/s320/charlemagne_couronnement.jpg" width="312" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Couronnement de Charlemagne </td></tr>
</tbody></table></td></tr>
</tbody></table><div style="text-align: justify;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgiCip07Hwoil7GwfKwwl-MDr6Ja_LxNaf6RoxIrwiK_uLpLMdyGpcJjXZtRCQIELg5GXbMzwWj4eUNQ0rMQdmB2QecuMr8S-7SVks1j8NykX9UVr8sUMC0MXA6oPzPbFpj5xGcU1eOaVo/s1600/premi%25C3%25A8re+communion+1962.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a><b>anglaise</b>, mieux que l’encens, c’est le bonheur familial, domestique que l’on respire à pleins naseaux. «Une famille qui prie est une famille unie», avait l’habitude de répéter le Premier ministre de la Province de Québec, Maurice Duplessis, et c’est ce qu’illustre <i>The Martin Family at church</i>. Les deux alignements de personnages (à la sainte table et dans le banc avant) nous indiquent la parfaite linéarité du comportement des individus soumis à Dieu et à ses pasteurs. Les pères Smith et MacMagnus assurent, au niveau collectif, la protection que John & Mary attendent de M. Martin, leur père. Le moment précis de la communion du père Martin montre que l’autorité lui est attribuée directement de Dieu par la main du prêtre. Le choix n’est pas innocent. Si John a reçu le <i>corpus Christi</i> avant son père, ce n’est que dans la mesure où il reprendra un jour la relève de ce dernier. Il en est ainsi depuis que les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0XSRsopUkd1oaCfEHkIHsdTiJ5TCG-nH68cSFs6PzNJS_zPB_DoSS6ZjoBLJD4SEPEbbztqaBU9DG0Z5icLUl1k8coAAgozZo9UP6ItOoyBM9ejPXlZPctcaOQyvjo_hcgYfftHqLOk0/s104/charlemagne_couronnement.jpg">empereurs</a> recevaient les symboles de la royauté du pape. La leçon s’adresse à l’enfant, bien sûr, et non à l’adulte qui l’a déjà assimilée depuis longtemps.<br />
<br />
Ce monde s’est effondré sur lui-même, quelques années après la publication du manuel. À l’âge de six ans (en 1961), les églises que je fréquentais étaient pleines. À l’âge de douze, elles étaient quasi vides. Et moi-même je cessai d’y aller autour de quinze ans, lorsqu’il n'était plus remarquable de se pavaner,<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjMnvxPVw33VDmuSEyQkbs8wcsL1kzErJuY1tBlZSvO_aJZaRIw1B96Q4wnlQapQTJyUjcuD8uXVXg5fQuoyKdpteVGqmIkp1eVISxZXZGZNgQl_BfzA6OftY4OgrPtXDIudbaQdbYIScw/s1600/1962+premi%25C3%25A8re+communion.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjMnvxPVw33VDmuSEyQkbs8wcsL1kzErJuY1tBlZSvO_aJZaRIw1B96Q4wnlQapQTJyUjcuD8uXVXg5fQuoyKdpteVGqmIkp1eVISxZXZGZNgQl_BfzA6OftY4OgrPtXDIudbaQdbYIScw/s320/1962+premi%25C3%25A8re+communion.jpg" width="213" /></a></div>bien habillé, à l’église. Ce spectacle de parades de mode et d’exhibitions pharisiennes, ma mère le retenait du milieu dans lequel nous vivions. Aller à la messe, la basse ou la grande, distinguait les niveaux sociaux, les revenus (par l’habillement), la bonne réputation (selon les apparences), enfin le jugement social. Comme dans ces petites villes américaines protestantes - nos Peyton Places -, c’était la bigoterie des grenouilles de bénitier et des lécheux de balustres qui les rassemblait autour de la chaire où un père Blanc venait faire de la prédication pour les pauvres en Afrique ou en pays de colonisation, ou un père dominicain ou jésuite qui venait planifier une retraite fermée. Je n’ai jamais été enfant de chœur car je ne savais pas le latin et que mes aptitudes religieuses étaient déjà fort douteuses. De plus, malgré toutes les apparences de la respectabilité cléricale, les histoires de pédophilies étaient déjà connues comme Mickey Mouse dans la Passion. On savait que des membres du clergé avaient un appétit peu catholique pour les petits <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjMnvxPVw33VDmuSEyQkbs8wcsL1kzErJuY1tBlZSvO_aJZaRIw1B96Q4wnlQapQTJyUjcuD8uXVXg5fQuoyKdpteVGqmIkp1eVISxZXZGZNgQl_BfzA6OftY4OgrPtXDIudbaQdbYIScw/s104/1962+premi%25C3%25A8re+communion.jpg">garçons blonds</a> (ce que j’étais à l’époque), mais que tout ça devait être tenu secret.<br />
<br />
Cette hypocrisie morale de l’usage de la religion comme clef de la morale publique et individuelle rongeait le sentiment religieux comme un cancer un organe, et lorsque la société de consommation parvint à renverser les rapports du bien et du mal, alors la religion, qu’elle soit catholique ou protestante, perdit de son emprise sociale. Le sentiment religieux put se libérer, mais par réaction, il déserta les églises et chercha, tantôt dans le bouddhisme, tantôt dans l’ésotérisme, tantôt dans les drogues, tantôt dans le nationalisme un chemin, une voie par où s’exprimer. Lorsqu’il voulut revenir au catholicisme, il trouva sur son chemin Jean-Paul II et le cardinal Ratzinger (Benoît XVI) qui, eux, n’avaient pas voulu évoluer autrement qu’en essayant d’adapter les stratégies spectaculaires à la vieille religion dominante, gardienne de la foi, ou plutôt des mœurs seules qui intéressent les autorités.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgZP-q6qBEs08nuykMO_GKAvzIwQggAxX6I8FqluS_yZt0WxDTeOLEtETk3DuovsXkAPrSjp0Nt2zNHdtWY-3_P-TeiX2T14CurCvR_zelN-VKxPw13_2yLhATsd-t92zIfRL8IOoFR0qk/s1600/5-+at+the+church+-+copie.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgZP-q6qBEs08nuykMO_GKAvzIwQggAxX6I8FqluS_yZt0WxDTeOLEtETk3DuovsXkAPrSjp0Nt2zNHdtWY-3_P-TeiX2T14CurCvR_zelN-VKxPw13_2yLhATsd-t92zIfRL8IOoFR0qk/s320/5-+at+the+church+-+copie.jpg" width="189" /></a></div>La déchristianisation de l’Occident, et plus particulièrement de l’Amérique du Nord, où le rigorisme catholique québécois n’avait rien à envier au fondamentalisme des sectes protestantes, est prophétisée étrangement dans le tableau 5, avec tous ces bancs vides (à la gauche de l’image). Le manque de chaleur humaine dans ce tableau confirme les seuls intérêts d’autorité et de hiérarchie sociale que représente la pratique religieuse d’alors. Il est même difficile de dire si la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgZP-q6qBEs08nuykMO_GKAvzIwQggAxX6I8FqluS_yZt0WxDTeOLEtETk3DuovsXkAPrSjp0Nt2zNHdtWY-3_P-TeiX2T14CurCvR_zelN-VKxPw13_2yLhATsd-t92zIfRL8IOoFR0qk/s104/5-+at+the+church+-+copie.jpg">lampe du sanctuaire</a> est allumée ou éteinte, signe alors de la présence ou de l’absence de Dieu dans les lieux: du moins y sent-on vaciller une flamme… Il n’est pas évident non plus que le dieu idéalisé des chrétiens d’Occident, qui partage la souffrance de chacune de ses âmes, habite véritablement ce tableau. Pour les enseignants de l’époque, la chose importait peu puisqu’il ne s’agissait pas de l’enseignement du catéchisme mais de celui de l’anglais. Cependant, à vouloir faire trop de propagande morale, on finit par manquer son but et susciter une indifférence qui, aux yeux de Lamennais, était pire que le péché ou même l’athéisme.<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhuNou1G71bR0dXCUMQjRnTUzUzYlJ2DitpIZh_uECtqIm3p7ZupwV2BfxT5nOTUiYtiPXK76Jih739E4Dbzp3jqA7SmFjutCFfwBEDDGXR296gqi-9wNTqPMeOk8WKEd6XmUG3ThBKt7g/s1600/porte+noire.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhuNou1G71bR0dXCUMQjRnTUzUzYlJ2DitpIZh_uECtqIm3p7ZupwV2BfxT5nOTUiYtiPXK76Jih739E4Dbzp3jqA7SmFjutCFfwBEDDGXR296gqi-9wNTqPMeOk8WKEd6XmUG3ThBKt7g/s320/porte+noire.jpg" width="114" /></a></div>Enfin, je ne saurais passer sous silence cette <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhuNou1G71bR0dXCUMQjRnTUzUzYlJ2DitpIZh_uECtqIm3p7ZupwV2BfxT5nOTUiYtiPXK76Jih739E4Dbzp3jqA7SmFjutCFfwBEDDGXR296gqi-9wNTqPMeOk8WKEd6XmUG3ThBKt7g/s104/porte+noire.jpg">porte</a> en arche, à la gauche du tableau, qui, sur un mur jaune - du jaune que nous avons rencontré dans la chambre de John - semble mener dans la sacristie complètement noire. Le noir, c’est le deuil. Lorsque la chasuble du prêtre est noire, c’est qu’il s’apprête à réciter la messe des défunts ou célébrer le Vendredi Saint. De plus, le noir n’indique pas tant l’enfer que le néant. Il est la couleur du vide, la couleur du gouffre. <i>L’Être et le Néant</i>, Dieu et le non-sens de la matière, de la vie, de l’humanité. Le grand Rien, le Trou Noir, concentration d’énergie qui finirait par aspirer tout l’intérieur de cette église, avec ses icônes, ses idoles, ses serviteurs et ses pasteurs. Pour beaucoup, c’est cela que finissait par signifier la déchristianisation, et pour pallier au vide, on recourut à l’hédonisme, à la dépression, aux barbituriques, à l’ennui, à la lassitude, enfin au suicide moral et à la mort, le jour où la jouissance n’eut plus aucun goût. Tout cela semble impensable à l’esprit des Martin tant ils semblaient bien intégrés au rituel. Seul l’avenir pouvait dire ce qu’il en serait une fois que les Dominique Savio et Maria Goretti quitteraient l’échelle des valeurs de John & Mary.</div><div style="text-align: right;">Montréal<br />
24 juin 2011</div><div style="text-align: justify;"></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-19425056228272094622011-06-22T22:19:00.000-07:002011-07-10T14:10:24.113-07:00Mary's clothes<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEho1DeKuC0FNeUlYYCN1avXPrycY1OFvG1oHpoRbHvw5-uGzxJM_U8C2wxdhfv5Yw46F7saOR5lyvKHh-dmVymW6I42AP9LV4i3hvXasgN28xvEoxzaeVeIg0m_Ifl7DkRWOZqUBTGHQJI/s1600/4-+Mary%2527s+clothes.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><span id="goog_715445531"></span><img border="0" height="296" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEho1DeKuC0FNeUlYYCN1avXPrycY1OFvG1oHpoRbHvw5-uGzxJM_U8C2wxdhfv5Yw46F7saOR5lyvKHh-dmVymW6I42AP9LV4i3hvXasgN28xvEoxzaeVeIg0m_Ifl7DkRWOZqUBTGHQJI/s400/4-+Mary%2527s+clothes.jpg" width="400" /><span id="goog_715445532"></span></a></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: justify;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiIK92UMOoRcgjzm-pPIckCEbB3fq8xsTEHr7pFMDCEgcS9pf-ryBkNt0HIedvSvv8Xl6ghOw5wTGn4uVm1y3tg7UdlcniA70v6Z5hwcUoBCTJhx_CyDRXl9PTvJ1WX5R86g_b3gV-g-EQ/s1600/4-+Mary%2527s+clothes.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"> </a></div><div style="text-align: center;"><div style="text-align: center;"><b>MARY’S CLOTHES</b> </div><br />
<div style="text-align: justify;">Deux tableaux fétichistes pour le prix d’un, avons-nous dit. Il était tout à fait normal de passer de la garde-robe de John à celle de Mary. Ici aussi, les vêtements et accessoires tournent dans le sens de l’aiguille d’une montre autour de la scène où l’on voit Mary reprisant une chaussette tandis que maman range un paletot dans le placard. La porte toute grande ouverte, nous voyons l’intérieur de ce placard. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxIGbJFL1X6vFoymqJhT02TcbMWvThP-XppfpbVtHIU5awr2Eq8A5CaLz2lmNsz88FvVKGcLYea7sGfD8ZxOo5d4BXKzqKCxbzKFYaaik7RaOXvWMKokJlIK5gyCLBxT7d9Drc5BzPsG4/s1600/MPW-44852.jpeg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxIGbJFL1X6vFoymqJhT02TcbMWvThP-XppfpbVtHIU5awr2Eq8A5CaLz2lmNsz88FvVKGcLYea7sGfD8ZxOo5d4BXKzqKCxbzKFYaaik7RaOXvWMKokJlIK5gyCLBxT7d9Drc5BzPsG4/s320/MPW-44852.jpeg" width="211" /></a>C’est connu. Les petites filles n’ont aucun secret pour leur mère. Contrairement à la chambre de John, on ne voit aucun vêtement d’extérieur suspendu à la paterre. La couleur jaune a été remplacée par un vert tendre et la croix par une statue de la Vierge (dans les <i>Fifties, </i>même les connotations religieuses étaient sexistes!). L’harmonie des rideaux avec le couvre-lit montre que maman a été la décoratrice d'intérieure de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEho1DeKuC0FNeUlYYCN1avXPrycY1OFvG1oHpoRbHvw5-uGzxJM_U8C2wxdhfv5Yw46F7saOR5lyvKHh-dmVymW6I42AP9LV4i3hvXasgN28xvEoxzaeVeIg0m_Ifl7DkRWOZqUBTGHQJI/s104/4-+Mary%2527s+clothes.jpg">pièce</a>. Cette pièce d'ailleurs est décidément mieux rangée que celle de son frère. Et remarquez la posture de Mary, jambes croisées genou contre genou, assise sur sa chaise, elle a déjà acquise la posture de la parfaite sténo-dactylo des <i>Fifties</i>. La petite chatte noire à ses pieds déroule la pelote de fil (<i>cat</i> est, dans la circonstance, allégorie; la «chatte»: dans le manuel il est clairement écrit <i>«The cat's name is Pussy», </i>nom que les concepteurs du manuel ne lui auraient sans doute pas donné sachant qu'une vingtaine d'années plus tard, ils apprendraient, par le titre d'un film, que<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxIGbJFL1X6vFoymqJhT02TcbMWvThP-XppfpbVtHIU5awr2Eq8A5CaLz2lmNsz88FvVKGcLYea7sGfD8ZxOo5d4BXKzqKCxbzKFYaaik7RaOXvWMKokJlIK5gyCLBxT7d9Drc5BzPsG4/s104/MPW-44852.jpeg"> <i>Pussy talk</i></a>!). En en appelant au bestiaire sexiste, c’est la référence à l’organe sexuelle de Mary que la scène invite à considérer.</div></div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">En ce qui a trait aux accessoires et vêtements de Mary, nous ne pouvons que considérer qu’ils échappent au stéréotype que <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrmZXvtwiEMFLq87WGiZDsEolP4suk1OF-qVn55XCvrHFcGe9J_h_WA5VtKIqnPz6V3jzIf7-m1htZ8FNWzQ4mihtg8FX3shVuRKzU-WQ-dVHeHw7Q0QubB4eKC68TLcCO4DdbaX1wcfo/s1600/4-+Mary%2527s+parapluie.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrmZXvtwiEMFLq87WGiZDsEolP4suk1OF-qVn55XCvrHFcGe9J_h_WA5VtKIqnPz6V3jzIf7-m1htZ8FNWzQ4mihtg8FX3shVuRKzU-WQ-dVHeHw7Q0QubB4eKC68TLcCO4DdbaX1wcfo/s200/4-+Mary%2527s+parapluie.jpg" width="157" /></a>nous retrouvions dans la garde-robe de John. Chandail et jupe, manteau à collet de fourrure, bas, foulard, costume de bain, soulier et caoutchouc, robe sans manche et tablier, chapeau, gants et mouchoir sont entremêlés avec un parapluie (remarquez la forme de la crosse complètement <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrmZXvtwiEMFLq87WGiZDsEolP4suk1OF-qVn55XCvrHFcGe9J_h_WA5VtKIqnPz6V3jzIf7-m1htZ8FNWzQ4mihtg8FX3shVuRKzU-WQ-dVHeHw7Q0QubB4eKC68TLcCO4DdbaX1wcfo/s104/4-+Mary%2527s+parapluie.jpg">ronde</a> opposée à celle du parapluie d’homme du tableau 3 <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3hmLRfEG53DrRL0-U40oPbrUmPFhaIwgvYU07Bpo__alAvGYqiQUr6ma0L9fKazf_lRg75STQDgsYhTPLKkPNVurPNNBLncG-ZhESRmjT7PgEnOwXiRdHBz8ORqel-CX84nHEo3TiRmo/s104/3-+John%2527s+parapluie.jpg">en crochet</a>, là aussi la distinction sexuelle est nettement marquée), <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3hmLRfEG53DrRL0-U40oPbrUmPFhaIwgvYU07Bpo__alAvGYqiQUr6ma0L9fKazf_lRg75STQDgsYhTPLKkPNVurPNNBLncG-ZhESRmjT7PgEnOwXiRdHBz8ORqel-CX84nHEo3TiRmo/s1600/3-+John%2527s+parapluie.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3hmLRfEG53DrRL0-U40oPbrUmPFhaIwgvYU07Bpo__alAvGYqiQUr6ma0L9fKazf_lRg75STQDgsYhTPLKkPNVurPNNBLncG-ZhESRmjT7PgEnOwXiRdHBz8ORqel-CX84nHEo3TiRmo/s200/3-+John%2527s+parapluie.jpg" width="140" /></a>un cintre et son crochet, une malle, une sacoche… La mère, que l’on voit ici de dos, alors qu’elle regardait John dans le tableau précédent, s’affaire dans le placard. Ici nulle attente à y avoir. Le fond jaune de la galerie renvoie à ce que apprenions sur le symbolisme de cette couleur dans le tableau 2: <i>John his saying his morning prayer</i>. La boucle rouge que porte Mary est la même que celle qu’elle portait dans ce même tableau. Coquette et innocente à la fois, Mary est une jeune fille range dont les jambes sont bien fermées. N’y entrera pas qui y pense.</div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;"> Mary est une petite fille rangée. Bien élevée, comme son frère, elle est le symbole même de l’innocence. Souriante, assidue à sa tâche ingrate de repriser un bas, elle apprend à imiter maman. Son parcours est prévu pour être moins <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg8F-jkYwY2LfW6dD6DFWYy0B8eHwOJMbZjk5SVxFXa3mfKgQio1TRjngOX4xERm_qVXAx7fz-gA0y-ZjzJB6EawMRKY22Bp1NRUoZT-mofL3YbXWHawRJA3WZlZjAGV2dlgu1FlHZGZVA/s1600/chaperon-rouge.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="259" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg8F-jkYwY2LfW6dD6DFWYy0B8eHwOJMbZjk5SVxFXa3mfKgQio1TRjngOX4xERm_qVXAx7fz-gA0y-ZjzJB6EawMRKY22Bp1NRUoZT-mofL3YbXWHawRJA3WZlZjAGV2dlgu1FlHZGZVA/s320/chaperon-rouge.jpg" width="320" /></a>sinueux que celui de son frère. Pourtant, elle est bien ce que nous révèle son allégorie animale: elle est une petite chatte sur une chaise brûlante. La paterre à crochets dressée derrière elle est un rappel de la menace qui plane sur cette virginité pré-pubère. Là où John mettait son pied sur la chaise, ici Mary y est confortablement assise. Sa robe décente jusqu’au collet qui enserre son cou la désigne comme l’enjeu d’une bataille qui se livre à l’arrière-plan entre l’invitation à la luxure et la protection de la Vierge Marie. Paterre, statue de la Vierge et la chatte qui déroule la pelote de fil se confrontent pour le corps et la conscience de la malheureuse jeune fille. <i>Mary’s clothes</i> équivaut à une fable moderne analogue au conte du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg8F-jkYwY2LfW6dD6DFWYy0B8eHwOJMbZjk5SVxFXa3mfKgQio1TRjngOX4xERm_qVXAx7fz-gA0y-ZjzJB6EawMRKY22Bp1NRUoZT-mofL3YbXWHawRJA3WZlZjAGV2dlgu1FlHZGZVA/s104/chaperon-rouge.jpg">Petit Chaperon rouge</a>. La grand-mère est remplacée par la statue de la Vierge et le loup avec ses crocs par la paterre. La chatte indique un détour du chemin (par le fil déroulé). La robe rouge de Mary évoque de même le costume du personnage du conte. </div><div style="text-align: justify;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: justify;"><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: justify;">Le tableau 4 pourrait porter comme sous-titre Rencontre de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVuUSp4Jk6khtsSpJCxvUJ7oYynUJaTjV02sLXkjr6q_pM3RSYEiXx9c4IfUGwo_gAAdSPxHeYmYMfHcGkkLATU7h45WjExRNqSMTIN_xWwNuU2ZK0RAIysCgjmKkfj_9OnE5ioOOD868/s104/Sainte-Vierge-Marie--crasant-le-Serpent.jpg">Vierge et du serpent</a>. Il reprendrait à la fois l’avertissement de Yahweh au serpent au moment de la condamnation au Paradis: «Je mettrai <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVuUSp4Jk6khtsSpJCxvUJ7oYynUJaTjV02sLXkjr6q_pM3RSYEiXx9c4IfUGwo_gAAdSPxHeYmYMfHcGkkLATU7h45WjExRNqSMTIN_xWwNuU2ZK0RAIysCgjmKkfj_9OnE5ioOOD868/s1600/Sainte-Vierge-Marie--crasant-le-Serpent.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVuUSp4Jk6khtsSpJCxvUJ7oYynUJaTjV02sLXkjr6q_pM3RSYEiXx9c4IfUGwo_gAAdSPxHeYmYMfHcGkkLATU7h45WjExRNqSMTIN_xWwNuU2ZK0RAIysCgjmKkfj_9OnE5ioOOD868/s320/Sainte-Vierge-Marie--crasant-le-Serpent.jpg" width="164" /></a>une hostilité entre toi et la femme, entre ton lignage et le sien. Il t’écrasera la tête et tu l’atteindras au talon» (Gn 3, 15), et l’écho contenu dans la fable de l’Apocalypse (12) de la Femme et du Dragon. Le serpent rampera vers toi et toi tu l’écraseras du talon. C’est exactement ce qui se passe dans le tableau. Comme les apôtres endormis au jardin des Oliviers, la mère est dans le placard où l’on sait que dans la version de Perrault le loup enferma la grand-mère. Ici, elle s’occupe de mettre le paletot sur un cintre et de ranger le placard parfumé. Elle fait dos à la fois à Mary, à la petite chatte et aux spectateurs du tableau. Elle veut qu’on l’ignore et tient à ignorer ce qui se passe dans la chambre. À sa fille de savoir quoi faire.</div></div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">La <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiJOPJWR_0QsE3-gO15K1tCcFCQ9loqOdr7TuIhz547oSQckg-zSpB8ZMhX53GulVjFQGerOopl8uDFsBb048n3zh4fbI4CL4q-xNv0vjywL-ko1lhuD-WqZpnqHCmbGQZx1cyIm4k8Jg0/s104/Vierge+et+paterre+copie+1.jpg">paterre</a> est dressée droite, dénudée de vêtements (que fait-elle donc là?). Ses crochets sont à l’image de ceux des vipères et autres serpents venimeux. Le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiJOPJWR_0QsE3-gO15K1tCcFCQ9loqOdr7TuIhz547oSQckg-zSpB8ZMhX53GulVjFQGerOopl8uDFsBb048n3zh4fbI4CL4q-xNv0vjywL-ko1lhuD-WqZpnqHCmbGQZx1cyIm4k8Jg0/s1600/Vierge+et+paterre+copie+1.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiJOPJWR_0QsE3-gO15K1tCcFCQ9loqOdr7TuIhz547oSQckg-zSpB8ZMhX53GulVjFQGerOopl8uDFsBb048n3zh4fbI4CL4q-xNv0vjywL-ko1lhuD-WqZpnqHCmbGQZx1cyIm4k8Jg0/s200/Vierge+et+paterre+copie+1.jpg" width="195" /></a>dessinateur la fait se dresser derrière l’épaule de Mary. Près d’elle, la statue de la Vierge est posée sur un socle vissé au mur. Ce n’est pas n’importe quelle Vierge, il s’agit de l’Immaculée Conception, c’est-à-dire la Vierge honorée dans l’image d’une conception virginale, donc épargnée par l’acte de chair dans l’accomplissement de son devoir de mère. C’est elle qui, dans la mariolâtrie d’un Pie IX, met le pied sur la tête du serpent. La Vierge, c'est connue, est la protectrice des prostituées, malgré elles, pauvresses dans le besoin ou courtisanes esseulées, elle va les sauver de la perdition du Malin. Les deux adversaires s’apprêtent donc à croiser le croc pour le salut de la petite Mary.</div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">Chaque parti à son allié. La paterre a la chatte. C’est elle dont l’allégorie (par l’animal mais aussi par la couleur!) envoie au sexe de la femme. La <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh1-OXGETpPq6rXb1ai-Jgz0V7MdaSnCoEnxPcvskUgH42god-v1fc66nBEwRXoamL21kBSbPD3QATHpfRy7jh9LE1Euu_tOCuP6KYhpG6JjoCeGyQ6QXdK_q7Yy1Be6_dCegrS9ia5H-A/s104/4-+Mary%2527s+cat+-+copie+1.jpg">patte de l’animal</a> est posé sur la pelote jaune. Le jaune, rappelons-le encore, est un jaune solaire, un jaune royal, impérial, christique. C’est aussi la couleur de la chaussette qu’elle reprise, mais est-ce bien la sienne, et de cette ambivalence dépend la réponse. En effet, il est inconcevable dans <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh1-OXGETpPq6rXb1ai-Jgz0V7MdaSnCoEnxPcvskUgH42god-v1fc66nBEwRXoamL21kBSbPD3QATHpfRy7jh9LE1Euu_tOCuP6KYhpG6JjoCeGyQ6QXdK_q7Yy1Be6_dCegrS9ia5H-A/s1600/4-+Mary%2527s+cat+-+copie+1.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="159" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh1-OXGETpPq6rXb1ai-Jgz0V7MdaSnCoEnxPcvskUgH42god-v1fc66nBEwRXoamL21kBSbPD3QATHpfRy7jh9LE1Euu_tOCuP6KYhpG6JjoCeGyQ6QXdK_q7Yy1Be6_dCegrS9ia5H-A/s320/4-+Mary%2527s+cat+-+copie+1.jpg" width="320" /></a>l’univers sexiste des Peyton Places des <i>Fifties</i> que les garçons se mettent eux-mêmes à repriser leurs chaussettes. On s’imagine déjà mal papa reprisant sa chaussette! C’est une tâche pour maman, c’est évident. Et Mary étant appelée à succéder à sa mère, elle s’entraîne déjà à repriser des bas …de John. Le jaune rappelle sa présence à laquelle il est associé depuis le tableau 2. Pour le moment, rien n’indique que ce soit précisément son bas à elle que Mary reprise puisqu’elle les porte aux pieds. Ce bas peut donc appartenir aussi bien à John qu’à Mary. Que peuvent nous révéler alors la parade des vêtements qui gravitent autour de la scène?</div><br />
<div style="text-align: justify;">Certes, comme dans le tableau précédent, nous ne retrouverons ni soutien-gorge, ni gaine culotte, ni petite culotte, ni jarretière dans la garde-robe de Mary. Pourtant, nous la voyons moins «pognée» que John. Elle a une robe sans manche, ce qui ne révèle rien de particulièrement pudique chez les jeunes filles. On y voit aussi son costume de bain (une pièce), ce qui est déjà plutôt audacieux mais non déplacé pour l’époque. Inscrits dans leurs stéréotypes sexistes John & Mary traduisent le <i>double bind </i>entre la retenue bourgeoise du garçon et la légèreté acceptée de la jeune fille. Mary est là pour plaire aux garçons, beaucoup plus que John ne l’est pour les filles. S’il était possible de considérer John comme un futur <i>mobster</i> par son costume anachronique, on ne peut pas en dire autant d’une éventuelle Mary <i>belle-de-jour</i>.</div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">Ce que le tableau indique, c’est plutôt que la vocation de Mary est contenue dans son sexe. Elle est fille et son éducation doit en faire une femme, voilà pourquoi maman n’est pas inquiète du drame qui se déroule dans la pièce. La Vierge mettra son pied <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiK8tdzGdB4ncDo6H6-Ay8zWRw8qmsxiw3rhu_kq5ER0nhVYiDz5IBinG7sVFVCgSNuD2oWjwEIF_r63eQ3MLLspIQaamgEghOajqTiiPlY-RXlJzljAxME1RMTP2rsb3M8lMIBQ9YJIKE/s1600/secr%25C3%25A9taires.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="194" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiK8tdzGdB4ncDo6H6-Ay8zWRw8qmsxiw3rhu_kq5ER0nhVYiDz5IBinG7sVFVCgSNuD2oWjwEIF_r63eQ3MLLspIQaamgEghOajqTiiPlY-RXlJzljAxME1RMTP2rsb3M8lMIBQ9YJIKE/s320/secr%25C3%25A9taires.jpg" width="320" /></a>sur la tête de la paterre. Si John pouvait anticiper de devenir comptable, ingénieur, médecin ou quelque autre professionnel à l’image de son père; l’idée d’une carrière pour Mary est impensable. À peine possède-t-elle la position d’un des seuls métiers autorisés aux filles: le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiK8tdzGdB4ncDo6H6-Ay8zWRw8qmsxiw3rhu_kq5ER0nhVYiDz5IBinG7sVFVCgSNuD2oWjwEIF_r63eQ3MLLspIQaamgEghOajqTiiPlY-RXlJzljAxME1RMTP2rsb3M8lMIBQ9YJIKE/s104/secr%25C3%25A9taires.jpg">secrétariat</a>! Nul uniforme professionnelle dans le tableau: ni infirmière, ni guide, ni policière ni soldate. Mary, au mieux, suivra les traces de son institutrice, que nous rencontrerons plus loin, qui est, pour une jeune fille, la seule profession à peu près tenue pour honnête à l’époque. Son sac à main et sa malle laissent supposer qu’elle sera une jeune fille rangée, tenant sa place, et nous n’aurions aucun doute sur cet avenir certain si la malle n’était pas ouverte et vide…</div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">Serait-ce aller trop loin de mettre en parallèle les jambes croisées et fermées de Mary avec la malle à la gueule toute grande ouverte? La malle peut être un doublet du placard, ici les deux ouvertures se renverraient l’une à l’autre. La seule différence est que le placard est plein et contrôlé par la mère alors que la malle est large ouverte et ouvert à tout venant. Elle s’oppose, en suivant une ligne imaginaire en diagonale, aux genoux collés de Mary. Sur une même horizontale, on retrouve des symboles virils (crochet et cintre, soulier et caoutchouc) et féminins (le costume de bain une pièce, le foulard et la sacoche, celle-ci fermée!). Mary serait-elle bien une <i>belle de jour</i> en puissance, fantasme masculin des femmes de petites villes telle que <i>Peyton Place</i>? Le seul constat solide que nous puissions supposer, c’est que les stéréotypes sexistes traînaient avec eux l’inversion de la morale qu’ils supposaient enseigner. L’obéissante jeune fille, sous la protection de Marie, se laisserait tenter par sa «chatte», la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDvr4J4zTYFY-sQ7qps_41TMF2e7nG1doGEbQt7JYz5sghLFCQT2Gd24F30sVmKQduTrHcAbrF6qJa9uuYuG6eRvNk1XTG1T5IHbD7-IF3FSZe75JOECtd2T42exVOrFkm7pzmvnargUc/s1600/laphilosophiedansleboudoir3.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDvr4J4zTYFY-sQ7qps_41TMF2e7nG1doGEbQt7JYz5sghLFCQT2Gd24F30sVmKQduTrHcAbrF6qJa9uuYuG6eRvNk1XTG1T5IHbD7-IF3FSZe75JOECtd2T42exVOrFkm7pzmvnargUc/s1600/laphilosophiedansleboudoir3.jpg" /></a>patte sur la pelote jaune, à écouter la suggestion de la paterre. Au pire du drame, Mary refermerait la porte enfermant maman dans le placard, tandis que la paterre jetterait la statue de la Vierge par terre qui se briserait en morceaux: le drame se jouerait sur le lit, comme dans <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgDvr4J4zTYFY-sQ7qps_41TMF2e7nG1doGEbQt7JYz5sghLFCQT2Gd24F30sVmKQduTrHcAbrF6qJa9uuYuG6eRvNk1XTG1T5IHbD7-IF3FSZe75JOECtd2T42exVOrFkm7pzmvnargUc/s104/laphilosophiedansleboudoir3.jpg"><i>La philosophie dans le boudoir</i></a> du marquis de Sade, la fille s'en prenant à l'utérus de sa propre mère, profanant son esthétique et sa bienséance. Le malle serait alors toute grande ouverte prête à recevoir la pelote jaune lancée par la chatte. Là où on ne s’imaginait pas John se retourner pour violer sa mère contre la porte fermée du placard, ici, il est permis d’imaginer le sacrilège, crime à la fois de lèse-maternité et de lèse-divinité. Alors que le tableau 3 ne présentait qu’une évocation onirique et cinématographique de la dégradation professionnelle de John, le tableau 4 se charge d'une forte dose de projections perverses. Il se prête plus que jamais aux pires débauches de la morale bourgeoise des <i>Fifties</i>.</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: justify;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiZ2FZiL5qQg1Y6s_ZQhe2oAvtOVml7-dybcUyX8Wub0ummQ2EnCPeQHoAZ6rbQt6NKdgGXqvXOytU5CLVYCdV_H2pRHbGhCd3m-NiuKiz60lBDt38Yq71etn9VGcy4eeN4Up_bsNdDAlg/s1600/Stickers-pub-des-annees-50_FICHE1159_reduit290px.jpg" imageanchor="1" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"></a></div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">Mary n’a rien pourtant d’une tentatrice. Elle n’annonce ni la <i>vamp</i>, ni la petite fille perverse. Elle joue à la poupée et fait ses devoirs avec son frère. Elle apprend, avec maman, à faire la cuisine, s’amuse à fabriquer des robes pour ses poupées. Elle ne s’inquiète pas <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiZ2FZiL5qQg1Y6s_ZQhe2oAvtOVml7-dybcUyX8Wub0ummQ2EnCPeQHoAZ6rbQt6NKdgGXqvXOytU5CLVYCdV_H2pRHbGhCd3m-NiuKiz60lBDt38Yq71etn9VGcy4eeN4Up_bsNdDAlg/s1600/Stickers-pub-des-annees-50_FICHE1159_reduit290px.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiZ2FZiL5qQg1Y6s_ZQhe2oAvtOVml7-dybcUyX8Wub0ummQ2EnCPeQHoAZ6rbQt6NKdgGXqvXOytU5CLVYCdV_H2pRHbGhCd3m-NiuKiz60lBDt38Yq71etn9VGcy4eeN4Up_bsNdDAlg/s200/Stickers-pub-des-annees-50_FICHE1159_reduit290px.jpg" width="200" /></a>de son avenir qui semble déjà tout tracé, mais sur un autre mode que celui de John. Elle n’est ni Susan Hayward ou Marilyn Monroe. Elle est pourtant l’une de ces innombrables petites filles rêveuses de ces temps où, coincée entre la menace de la bombe atomique et l’insouciance de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiZ2FZiL5qQg1Y6s_ZQhe2oAvtOVml7-dybcUyX8Wub0ummQ2EnCPeQHoAZ6rbQt6NKdgGXqvXOytU5CLVYCdV_H2pRHbGhCd3m-NiuKiz60lBDt38Yq71etn9VGcy4eeN4Up_bsNdDAlg/s104/Stickers-pub-des-annees-50_FICHE1159_reduit290px.jpg">vie domestique</a>, le choix semblait ne pas être trop difficile à faire. Dans le monde où papa et maman ne seront plus là, elle pourrait toujours compter sur le soutien affectueux de son frère, et John de celui de Mary. Tel était l’idéalisme de la vie familiale en ces années 50-60. Le Vietnam, le déploiement des missiles à Cuba, la prolifération des armes à destruction <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiVBWU1lNLuTKaii4r08ZzMyN-fVIYb2SBtJUaSxJ6loEW04jZqKLaSqv1VhK2MloGRjpls6kS1sYcWcsEsWR113OwKxWTnvVPFQME0zr17EZOA5SA-QX0AzUaLREj7pNjKRp7Sm4wfTN8/s1600/Coca.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiVBWU1lNLuTKaii4r08ZzMyN-fVIYb2SBtJUaSxJ6loEW04jZqKLaSqv1VhK2MloGRjpls6kS1sYcWcsEsWR113OwKxWTnvVPFQME0zr17EZOA5SA-QX0AzUaLREj7pNjKRp7Sm4wfTN8/s320/Coca.jpg" width="256" /></a>massive ont dressé une situation inconnue dans les années 1950 pour les jeunes filles. Si le féminisme a été l’idéologie par laquelle ce recentrement de la place des femmes dans la société a pu s’accomplir, ce n’est pas lui qui a créé la situation propice à ce recentrement. Comme la prophétie des dix années de vaches grasses et les dix années de vaches maigres, le cocon familial des <i>Fifties</i> fut le temps des vaches grasses. Les revues et les publicités de l’époque le confirment. La place des femmes est d’être des objets symboliques dans la pure tradition bourgeoise. Mère, épouse et fille obéissante, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiVBWU1lNLuTKaii4r08ZzMyN-fVIYb2SBtJUaSxJ6loEW04jZqKLaSqv1VhK2MloGRjpls6kS1sYcWcsEsWR113OwKxWTnvVPFQME0zr17EZOA5SA-QX0AzUaLREj7pNjKRp7Sm4wfTN8/s104/Coca.jpg">même trajectoire</a>. La femme fatale était une icône des films, les mêmes où l’on voyait les gangsters s’entretuer pour elle et le butin qui venait avec! Mary est peut-être coquette, elle n’est sûrement pas coquine!</div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">Voilà comment on apprenait à être femme dans les années cinquante, en Amérique du Nord. Il était difficile d’imaginer que les années 60 étaient pour modifier ces perspectives. Les grands tabous de la sexualité non reproductrice, de la contraception et du contrôle des naissances, du célibat et du lesbianisme, des mariages successifs et des familles éclatées restaient encore inimaginables. Si la fameuse pilule anticonceptionnelle pouvait enfin libérer le sexe de la maternité (ou de la reproduction), elle séparait aussi le sexe du sentiment amoureux. À court terme, tout le monde y gagnait, et surtout les femmes. Plus jamais aucune petite fille ne serait éduquée comme Mary, à répéter la fonction maternelle comme le prix d’Ève à payer pour la faute au Paradis. Cette libération était pourtant contenue dans cette éducation, mais sous forme inconsciente. La chatte noire la patte sur la pelote jaune en appelait à sa sexualité tout comme les crocs du chien de John déchiquetant une chaussette. Ses jambes croisées, genoux serrés, attendaient pour se décroiser comme était ouverte le couvercle de la malle. Bientôt, la statue de la Vierge serait remplacée par les <i>posters</i> des idôles masculines de groupes <i>rock’n roll</i> ou des stars de cinéma. La paterre pourrait toujours être repeinte de couleurs et servir à suspendre toutes sortes de maillots ou de bonnets de soleil. La vie cesserait d’être insipide. Les souffrances des petites Mary de <i>Peyton Place</i> ne seraient plus muettes, mais elles allaient être encore plus éprouvantes.</div><div style="text-align: justify;"><br />
La profondeur du champ de vision, ici comme dans le tableau précédent, reste un effet didactique pour le maître de classe; elle maintient la distanciation que nous rencontrons depuis le tableau 2. Ce n’est pas seulement une question de perspective comme effet poétique du tableau. Il y a une dimension symbolique et une dimension morale qui s'y ajoutent et aucune des deux n’échappe à l’autre dans la lecture de la scène. Le fétichisme se renouvelle ici pour les voyeurs, ceux qui prêtent une intention équivoque aux objets et aux individus représentés.<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhr5F4-ZpXu9-f58qYHBYhT00tZuH_g10h37y4twpeyl6n2pDhwhyphenhyphenTgDk3iLiiPmqTWdhOeCcVmZfW55283sqbGFBa81c2dSvaArQaQoJJ1iwCfhnTsv3aO0nQEh8_XL-M_2TdzVcYOb4g/s1600/capot+d%2527auto.jpg" style="clear: right; float: right; margin-bottom: 1em; margin-left: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhr5F4-ZpXu9-f58qYHBYhT00tZuH_g10h37y4twpeyl6n2pDhwhyphenhyphenTgDk3iLiiPmqTWdhOeCcVmZfW55283sqbGFBa81c2dSvaArQaQoJJ1iwCfhnTsv3aO0nQEh8_XL-M_2TdzVcYOb4g/s320/capot+d%2527auto.jpg" width="236" /></a> La violence de <i>John’s clothes</i> s’exprimait par l’aspect <i>mobster</i> de ses vêtements que nous ne trouvions pas aussi stéréotypés pour les jeunes garçons. Celle de <i>Mary’s clothes</i> s’exprime plus brutalement. Sa lecture symbolique saute aux yeux avec la même évidence que l’ambiguïté morale semble renversée par l’accumulation des symboles contradictoires: Vierge/paterre, chatte/pelote jaune, jambes croisées/valise ouverte, etc. S’en tenir au sexisme qui transpire de la superposition des deux tableaux est également une évidence mais sa portée est banale. John apprend déjà à «s’uniformiser», c’est-à-dire à porter un uniforme, un costume qui le réduit à un état fonctionnel, criminel ou soldat, policier ou marin peu importe. Mary en est encore à l’identité sexuelle de sa fonction sociale. Elle n’est là qu’en tant qu’accessoire, non seulement aux personnages mâles, le père ou le frère, John. Elle l’est aussi pour sa mère qui se reproduit en elle. Elle l’est pour ceux qui l’emploieront si elle devient secrétaire ou institutrice. Elle finira par poser en <i>bathing suit</i> sur le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhr5F4-ZpXu9-f58qYHBYhT00tZuH_g10h37y4twpeyl6n2pDhwhyphenhyphenTgDk3iLiiPmqTWdhOeCcVmZfW55283sqbGFBa81c2dSvaArQaQoJJ1iwCfhnTsv3aO0nQEh8_XL-M_2TdzVcYOb4g/s104/capot+d%2527auto.jpg">capot</a> d’une voiture dans une publicité de <i>Playboy</i>. Son problème est décidément ontologique. Qu’est Mary dans l’ordre des êtres entre le naturel et le surnaturel? Rien qu’une femme, dirions-nous. Et John, un garçon qui deviendra un homme en s’accomplissant par une fonction familiale (donc sexuelle également), mais par une fonction sociale plus large. On lui permettra un pouvoir de vie et de mort qu’on refusera à Mary …du moins, encore pour un certains temps.</div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">Toute la crise des genres repose sur ce conflit ontologique qui réduit une moitié de l’humanité à sa seule fonction sexuelle (et les rôles sociaux immédiatement liés) alors que l’autre moitié est ouverte à des fonctions sociales variées (le monde de la politique, du droit, de la recherche scientifique, des sports de contact, des corps d’officiers: armée, police, pompier, etc.)… L’entrée massive de cette première moitié de l’humanité dans le cercle restreint de ce qui était le privilège de la seconde moitié va se jouer durant l’âge adulte de John & Mary. Ce fut peut-être l’un des plus grands bouleversements révolutionnaires, non seulement en Occident, mais dans le monde entier, et dont les résonances sont encore manifestes dans les civilisations non-occidentales. On a mis la priorité sur la technique, le savoir, l’armement bien sûr, la consommation et les communications de masse, mais nos yeux sont restés aveugles sur l’ampleur de «la révolution sexuelle», car si elle n’a pas apporté le bonheur attendu, elle a bouleversé dans la quotidienneté des liens interpersonnels et des rapports sociaux la distance qui autrefois séparait les individus les uns des autres.</div><div style="text-align: justify;"><br />
</div><div style="text-align: justify;">Nous pouvons bien rire aujourd’hui de ce combat symbolique entre la statue de la Vierge et la paterre, l’ignorance de la mère et l’innocence de la fille, la petite chatte qui joue avec la pelote de fil, la forme de la crosse des parapluies et la malle ouverte et le sac à main fermé. Nous nous disons que ce tableau est tout imbu de la sérénité de la vie familiale et domestique d’avant les grands <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiZTplqr-fpc6FC05HGT0c7QDLIcfRIDpAPxr0uuFu1poR_uwIL8V8IURw__ArW35mwt2XAAEftKMXdfTcMt9r31_ZaodTMyEBXiQix9b799LqyfgYf0Yust4jhPt200RPtP6Oy6OSoOCM/s1600/publicite_Eram_m.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiZTplqr-fpc6FC05HGT0c7QDLIcfRIDpAPxr0uuFu1poR_uwIL8V8IURw__ArW35mwt2XAAEftKMXdfTcMt9r31_ZaodTMyEBXiQix9b799LqyfgYf0Yust4jhPt200RPtP6Oy6OSoOCM/s320/publicite_Eram_m.jpg" width="212" /></a>bouleversements, un peu comme un tableau de Chardin ou de Fragonard rappelleront la <i>douceur de vivre</i> de l’Ancien Régime à ceux qui auront survécu à la Révolution. Aujourd’hui, ils bercent nos films de nostalgies, nos émissions télé d’anecdotes promptes à scandaliser les nouveaux bien-pensants du post-modernisme. La mode rétro du post-féminisme, même parmi les jeunes filles qui s’acceptent comme accessoires sexuels pour les hommes comme pour les employeurs, va jusqu'à entraîner combien de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiZTplqr-fpc6FC05HGT0c7QDLIcfRIDpAPxr0uuFu1poR_uwIL8V8IURw__ArW35mwt2XAAEftKMXdfTcMt9r31_ZaodTMyEBXiQix9b799LqyfgYf0Yust4jhPt200RPtP6Oy6OSoOCM/s104/publicite_Eram_m.jpg">jeunes hommes</a> à s’accepter sur le même mode comme accessoires sexuels pour les deux sexes comme pour les employeurs. L’innocence idéologique des <i>Fifties</i> a trouvé dans l’<i>outrageous</i> du XXIe siècle la perversion érigée en idéologie dominante. Entre les deux <i>hybris</i>, il est difficile de dire laquelle est le moins déshonorable pour l’homme comme pour la femme, le sens de l’honneur ne faisant plus partie de la définition que nous attachons au concept de dignité humaine. À travers les conflits entre la nature et la culture, il était possible, à travers les symboles subliminaux du tableau 4, d’éviter le recours à la pornographie où nous n’y retrouvons plus aucun contenu symbolique et où la dimension idéologique se réduit au cynisme du corps-objet en échange du <i>money talks</i>.</div><div style="text-align: right;">Montréal</div><div style="text-align: right;">22 juin 2011</div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-18530752306876643982011-06-21T16:49:00.000-07:002011-06-24T22:45:05.006-07:00John's clothes<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5kjtWbYhZidw7OdT7EjDt0gnKYQDctgSK_MBVABGuhcmXAUOkysAv2kFZFgvu-jo44PfuoQu2SC0jkPMJYK9Oeb_6H7x1_dhsb4QOM8plLLx1ZghgZYuTCxQY8jbgOxHRaFgF1ja0Chc/s1600/3-+Taking+care+of+clothes.jpg" onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620824863616790914" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi5kjtWbYhZidw7OdT7EjDt0gnKYQDctgSK_MBVABGuhcmXAUOkysAv2kFZFgvu-jo44PfuoQu2SC0jkPMJYK9Oeb_6H7x1_dhsb4QOM8plLLx1ZghgZYuTCxQY8jbgOxHRaFgF1ja0Chc/s400/3-+Taking+care+of+clothes.jpg" style="cursor: pointer; display: block; height: 279px; margin: 0px auto 10px; text-align: center; width: 400px;" /></a><br />
<div style="text-align: justify;"><div style="text-align: center;"><span style="font-weight: bold;">JOHN’S CLOTHES</span></div><br />
Décidément, la prière de John a été exaucée. On l’a changé de chambre. Celle-ci n’a plus rien à voir avec celle du tableau précédent. La disposition du lit, la croix sur le mur (qui semble ne plus être un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjLjm5QAfRFNNhbbf38g4cQ5tlG6zGcRAsQR4RSd9HIlICYFEmxStuNRXRo0z4gBq5OXvK-Jlu99of4atoTwTYM-tC8rqV7cD0bFScTWphUqpFLAJNL0GaqjXYeqTwlTsT70D_jMAtgSMc/s1600/%25C3%25A9cole+1966.jpg" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="231" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjLjm5QAfRFNNhbbf38g4cQ5tlG6zGcRAsQR4RSd9HIlICYFEmxStuNRXRo0z4gBq5OXvK-Jlu99of4atoTwTYM-tC8rqV7cD0bFScTWphUqpFLAJNL0GaqjXYeqTwlTsT70D_jMAtgSMc/s320/%25C3%25A9cole+1966.jpg" width="320" /></a>crucifix: réforme dans la famille de John & Mary?), la disposition de la fenêtre et les rideaux, nous ne sommes définitivement plus dans la même pièce. Plus de soleil. Plus de rossignol. Et le chien mordille un bas de John. Celui-ci cire d’ailleurs méticuleusement ses souliers et son pied est chaussé d’un bas de laine qui monte jusqu’au genou! On devinerait que c'est un petit tyrolien qui se prépare à danser à l'<span style="font-style: italic;">Oktoberfest</span>! Habillé à la dernière mode, notre John? Il déclencherait des rires inquiétants s’il se promènerait ainsi vêtu sur <span style="font-style: italic;">Wisteria Lane.</span> Même à l’époque de <span style="font-style: italic;">Peyton Place</span>, les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjLjm5QAfRFNNhbbf38g4cQ5tlG6zGcRAsQR4RSd9HIlICYFEmxStuNRXRo0z4gBq5OXvK-Jlu99of4atoTwTYM-tC8rqV7cD0bFScTWphUqpFLAJNL0GaqjXYeqTwlTsT70D_jMAtgSMc/s104/%25C3%25A9cole+1966.jpg">garçonnets</a> ne portaient plus ce type de vêtements.<br />
<br />
Ici, comme dans le tableau 1, <span style="font-style: italic;">Names of the parts of the body</span>, nous assistons à une séance de fétichisme à deux pour le prix d’un (le second sera pour le tableau suivant, <span style="font-style: italic;">Mary’s clothes</span>). Là où, dans le premier tableau, nous trouvions des membres épars qui tournaient selon le sens des aiguilles du cadran d’une montre, ici on nous montre les vêtements sensés les recouvrir. Mais après avoir fait l’inventaire du chapeau et des gants jaunes, du veston et du pantalon, du gilet et de la boucle, des chaussettes, de la chemise avec la cravate, du mouchoir et des bretelles, des souliers et des caoutchoucs (<span style="font-style: italic;">rubbers</span>), de l’imperméable et du parapluie, enfin du paletot et du foulard, on voit que notre petit John s’habille déjà comme un véritable <span style="font-style: italic;">mobster</span> des films des années 40.<br />
<br />
C’est Joseph Cotten ou <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHRxcZgfiV_Xc4DWP63LXlbSP9yKMBTjvrr9K6x8TgWOBxn0FgWMvrp7oarq6SRcV59VvBkmrwfUgjTp0MCNm45Fcw9E1Xa-KswR_IJZ-ck-6rNZAhwmOx_BtYXSlZvaJFhdi7LMzWixM/s1600/humphrey-bogart.jpg">Humphrey Bogart</a>. C’est<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHRxcZgfiV_Xc4DWP63LXlbSP9yKMBTjvrr9K6x8TgWOBxn0FgWMvrp7oarq6SRcV59VvBkmrwfUgjTp0MCNm45Fcw9E1Xa-KswR_IJZ-ck-6rNZAhwmOx_BtYXSlZvaJFhdi7LMzWixM/s1600/humphrey-bogart.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620883935735443458" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHRxcZgfiV_Xc4DWP63LXlbSP9yKMBTjvrr9K6x8TgWOBxn0FgWMvrp7oarq6SRcV59VvBkmrwfUgjTp0MCNm45Fcw9E1Xa-KswR_IJZ-ck-6rNZAhwmOx_BtYXSlZvaJFhdi7LMzWixM/s320/humphrey-bogart.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 320px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 256px;" /></a> <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSoz30uWFo15t9nAyJsw2pUeh9imeqEmEdzjbXZCdy4ER9gebt_vZ1JB9Dh2dMVL-3mIW958qckWSXHZd98uuMmmbriYoMxO7-6TUoobpDa7ZrXHdZYtp4u4nmNUPc2J6xW5waZGC2VV4/s1600/dillinger_morgue.jpg">John Dillinger</a> ou <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhr4SyqkEDbM3rmN-KOUXgKHwoUvANfeVdJ1jxmBCh7-cjIx6P05YfgPQoidCh6guLQX_3VykpfhBM4CItA4AjLU469ajkNHOGgNuGawam5oqSdf6h4NY9MhBRQrrF1kuolGhRma_x4Z98/s1600/al-capone.jpg">Al Capone</a>. C’est à peine s'il manque les mitrailleuses automatiques et les revolvers. On le verrait très bien jouer dans un épisode de <span style="font-style: italic;">Naked City</span> ou <span style="font-style: italic;">The Untouchables</span>, les séries policières de l’époque. Même par rapport à <span style="font-style: italic;">Peyton Place</span>, la garde-robe de John retarde sur le temps. Maman a donc bien tourné le verrou sur le temps de sa jeunesse à elle, projetée sur celle de son fils. Elle brosse son chapeau borsalino avec la même méticulosité que son fils cire son soulier. De la tête aux pieds, la «maman» est fière de la propreté de son fils, peu importe de savoir s’il n’a pas déjà ses entrées au club des mafieux.<br />
<br />
Les couleurs également sont de circonstances. Sur un fond beige, la couleur terne des vêtements <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh3a3WK0GJfOV14nYWInFRDuW-g7GZLcrEtzIzRkxUTw3hWBNA-1CLllQye_xOz0_jrbsrL-XNtEs7Z8N8_bz_HbBOFoqjUV7d2tHMvPB_hyDEyiSEdU_yAQY2uJHI-ohvxw7rHrR9go1U/s1600/chapeau+borsalino.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620837557100582578" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh3a3WK0GJfOV14nYWInFRDuW-g7GZLcrEtzIzRkxUTw3hWBNA-1CLllQye_xOz0_jrbsrL-XNtEs7Z8N8_bz_HbBOFoqjUV7d2tHMvPB_hyDEyiSEdU_yAQY2uJHI-ohvxw7rHrR9go1U/s320/chapeau+borsalino.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 320px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 320px;" /></a>va du bleu sombre au brun des bretelles et du <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh3a3WK0GJfOV14nYWInFRDuW-g7GZLcrEtzIzRkxUTw3hWBNA-1CLllQye_xOz0_jrbsrL-XNtEs7Z8N8_bz_HbBOFoqjUV7d2tHMvPB_hyDEyiSEdU_yAQY2uJHI-ohvxw7rHrR9go1U/s1600/chapeau+borsalino.jpg">borsalino</a>, le jaune des gants, du foulard et du mouchoir ne cède en rien à la couleur vert-diarrhée de bébé de l’imperméable. La boucle elle-même n’est qu’une fantaisie morbide. Ce jeune homme transpire la mort dans ces vêtements tordus mais sans faux-plis. Ce ne sont pas ceux d’un gamin mais d’un homme, du père de John peut-être? Loin de respirer l’honnêteté et l’aisance naturelle, c’est une véritable réplique moderne des armures médiévales. Malgré les symboles malsains que nous avons dégagés de la chambre de John au tableau 2, sa nouvelle chambre nous apparaît encore plus sinistre. Le jaune domine le mur du placard, mais le jaune éteint, encore-là, enveloppe la croix et la fenêtre. Le lit de John se rapproche de ce jaune éteint d’autant qu’il s’éloigne du jaune clair.<br />
<br />
La porte du placard, ici, est fermée (elle sera ouverte dans le tableau suivant où maman y est pénétrée corps et âme parmi les vêtements de sa fille Mary). Il ne sied pas à une mère de fouiller dans les placards de son garçon. Ce qu’elle pourrait y trouver la peinerait sans doute puisqu’il ne lui apparaîtrait plus comme ce garçon docile et poli, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEifdHk6B7JNsaZFfJeCoC_N7RYvqi4L84QuqSbBrWCMIDxbM3QaxJ1eQcQ5bxspVkvRUixIqE4LaOvVjj4720Lw79masEm2y2Y_2JJ3YPuK8JkRFFCMiQZd3Kzwgz0S8IzHgjxRkD47Zgk/s1600/cosa_nostra.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620838601457231490" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEifdHk6B7JNsaZFfJeCoC_N7RYvqi4L84QuqSbBrWCMIDxbM3QaxJ1eQcQ5bxspVkvRUixIqE4LaOvVjj4720Lw79masEm2y2Y_2JJ3YPuK8JkRFFCMiQZd3Kzwgz0S8IzHgjxRkD47Zgk/s320/cosa_nostra.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 201px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 320px;" /></a>mais comme un être soudainement doté d’une <span style="font-style: italic;">inquiétante étrangeté</span>. Certes, John n’a rien d’un caïd de la drogue ou de la contrebande. On ne peut lui imputer le célèbre <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEifdHk6B7JNsaZFfJeCoC_N7RYvqi4L84QuqSbBrWCMIDxbM3QaxJ1eQcQ5bxspVkvRUixIqE4LaOvVjj4720Lw79masEm2y2Y_2JJ3YPuK8JkRFFCMiQZd3Kzwgz0S8IzHgjxRkD47Zgk/s1600/cosa_nostra.jpg">massacre de la Saint-Valentin</a>, ni de participer à ces bandes de brigands du Middle-West des années 30. Dans le fond, c’est maman qui choisit le linge que portera John, et elle l’habille comme les vedettes de cinéma de son temps. Et comme ces vedettes masculines jouent dans des films de «série noire», pourquoi pas? Après tout, comme le chantait Gainsbourg dans <span style="font-style: italic;">Bonnie & Clyde</span>, c’était «la société qui les avait définitivement abimés». Au-delà de cette légère torsion de la loi, c’étaient des garçons aimants, proches de leur maman, fidèles et dévoués. L’«uniforme», car il s’agit bien d’un uniforme équivalent à celui d’un policier ou d’un pompier, rend compte que son John est bien en voie de devenir «un petit homme»; il y a de quoi être fière. Ne voyant que l’habit, elle ne peut soupçonner qu’il finira par faire le moine.<br />
<br />
La porte du placard est donc bien fermée. Les vêtements extérieurs sont mêmes suspendus au mur de la chambre. La variété de souliers, pantoufles et caoutchoucs sont rangés au pied du lit: John n’a que l’embarras du choix. Le foulard est sur le dossier de la chaise où il cire ses souliers, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhr4SyqkEDbM3rmN-KOUXgKHwoUvANfeVdJ1jxmBCh7-cjIx6P05YfgPQoidCh6guLQX_3VykpfhBM4CItA4AjLU469ajkNHOGgNuGawam5oqSdf6h4NY9MhBRQrrF1kuolGhRma_x4Z98/s1600/al-capone.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620839970860515538" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhr4SyqkEDbM3rmN-KOUXgKHwoUvANfeVdJ1jxmBCh7-cjIx6P05YfgPQoidCh6guLQX_3VykpfhBM4CItA4AjLU469ajkNHOGgNuGawam5oqSdf6h4NY9MhBRQrrF1kuolGhRma_x4Z98/s320/al-capone.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 242px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 320px;" /></a>ce qui est plutôt négligent. Question. Que met-il donc dans son placard? Ses jouets? Ce n’est visiblement pas une chambre de jeux; dans la maison de John, chaque pièce à une fonction précise, nous le verrons plus loin. Ses livres sont soigneusement déposés sur le lit, c’est donc qu’il se prépare pour aller à l’école. Son chien, toujours lui, a saisi une chaussette par les crocs et s’amuse avec, et on n’imagine pas un seul instant maman donné un coup de pied au sale cabot pour qu’il n’abîme point ainsi les vêtements de son maître. Toute la scène se passe devant cette porte close (pas même entr’ouverte) où on pourrait voir autres pièces vestimentaires du jeune garçon. Tout le placard est là, sous nos yeux, dans ces vêtements ternes où manque, comme vous l’aurez remarqué, les vêtements de corps (camisole, caleçon, etc.). Si les vêtements que nous portons en disent long sur ce que nous sommes, nous ne pouvons guère dire plus de John sinon ses aspirations adultes a devenir un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhr4SyqkEDbM3rmN-KOUXgKHwoUvANfeVdJ1jxmBCh7-cjIx6P05YfgPQoidCh6guLQX_3VykpfhBM4CItA4AjLU469ajkNHOGgNuGawam5oqSdf6h4NY9MhBRQrrF1kuolGhRma_x4Z98/s1600/al-capone.jpg"><span style="font-style: italic;">mobster</span></a>.<br />
<br />
Même les culottes courtes, dont nous le verrons souvent <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFk-fBc5bLeatjpIm4YmKKgn73JmxB72KLk01pD-2hiAqKg6RyM6UW7Gw5v-6kJEoFrxXeqgIVX5MGSJBFJoKCIhOFi6ZgMg68CM3eCP8M6IQ_RacBWRH8MclU9h0lltXkphmyVEhO7z4/s1600/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620861191257202370" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFk-fBc5bLeatjpIm4YmKKgn73JmxB72KLk01pD-2hiAqKg6RyM6UW7Gw5v-6kJEoFrxXeqgIVX5MGSJBFJoKCIhOFi6ZgMg68CM3eCP8M6IQ_RacBWRH8MclU9h0lltXkphmyVEhO7z4/s320/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 320px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 223px;" /></a>affublé, manquent à l’inventaire. Voilà pourquoi il est difficile de tenir ces pièces de vêtements comme étant ceux de John, mais bien plutôt les vêtements de son <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFk-fBc5bLeatjpIm4YmKKgn73JmxB72KLk01pD-2hiAqKg6RyM6UW7Gw5v-6kJEoFrxXeqgIVX5MGSJBFJoKCIhOFi6ZgMg68CM3eCP8M6IQ_RacBWRH8MclU9h0lltXkphmyVEhO7z4/s1600/9-+at+the+dining+room+-+copie.jpg">père</a>. Alors ces vêtements dissimulés dans le placard ne seraient pas ceux d’aujourd’hui, du jeune garçon, mais bien de celui qu’il deviendra à l’âge adulte. À ce compte, il importe peu que les vêtements du père soient également ceux du fils. Ils n'habillent qu’une seule et même personne, lus au niveau du Symbolique. Si le modèle du gangster des films noirs est le Poétique du placard, c’est bien par l’agencement de ces pièces que nous parvenons à confirmer que nous ne nous sommes guère égarer dans notre analyse de ce qui fait un homme dans le monde des Peyton Place où habitent les petits John: l’homme est un être vil, hors-la-loi, pêcheur, tueur à l’occasion, mais toujours respectant les normes apparentes de la civilité, de la propreté, de la bienséance. En retour, cette respectabilité lui est donnée par la femme, l’épouse aussi bien que la mère.<br />
<br />
Évidemment, nous ne sommes pas invités à nous convertir au gangstérisme seulement à regarder le tableau 3 de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span>. Le gangstérisme est là, suggéré par le défilé des sur-vêtements. La moralité de l’affaire ne souffre aucune déviance ni aucune débauche. C’est l’hypocrisie bourgeoise à son meilleur. Le parfum surané des rues de Peyton Place, le confort anémique de ses intérieurs douillets où les hystéries se déchaînent derrière les volets clos et les portes fermées sont les résultats de la confrontation entre la respectabilité apparente et la déviance forcenée. Tous les métiers invitent à la fraude ou à une quelconque criminalité.<br />
<br />
Le père de John est-il comptable - ou deviendra-t-il lui-même comptable? -, et c’est déjà la tentation des colonnes de chiffres maquillées. C’est la dissimulation d’une faillite derrière des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhmZm4tCUoByFYLAvmRBxrxEAKdTotL8bQPHJWsxOEHvBRpoF2ygmJRUBMaokJLFWZFEs7HEbiJYDOcxSceZMeYjEUPu4zs18M1Vja_QaRom-tizwsZr25ZtqMjMjVIsRlv_G68tIUCKXU/s1600/220px-BernardMadoff.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620861778577609666" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhmZm4tCUoByFYLAvmRBxrxEAKdTotL8bQPHJWsxOEHvBRpoF2ygmJRUBMaokJLFWZFEs7HEbiJYDOcxSceZMeYjEUPu4zs18M1Vja_QaRom-tizwsZr25ZtqMjMjVIsRlv_G68tIUCKXU/s320/220px-BernardMadoff.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 279px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 220px;" /></a>profits gonflés. Si la bulle n’éclate pas - et elle éclatera un jour ou l’autre -, le père de John peut empocher de fortes sommes en attendant de tout placer dans un compte couvert aux Bahamas. Les grands scandales financiers du début du millénaire - Enron en 2001, WorldCom en 2002, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjfva7jkY5ecnMWsTBFBklVtMGwQ70w-12VuYT8iicoIzyMoVksv62MDi8ZIx84GWS1xRkT5SYc3Ymc_KioHyv71OiLbYPOM1dVMj4ro1eidvFxLwwQc8RmbzlO4GWm2i0Ifu9ylOXTwCE/s1600/220px-BernardMadoff.jpg">Bernard L. Madoff</a> Investment Securities LLC. en 2008, Stanford International Bank en 2009 - ont finalement fait basculer le monde occidental dans la crise financière et économique. Dans le cas de Madoff, son fils (son petit «John») s’est suicidé en se pendant dans son appartement dans Manhattan, tandis que le Français Thierry de la Villehuchet s'est donné la mort dans son bureau de New York deux semaines après l'éclatement du scandale. Le Québec a aussi eu ses scandales, de plus petites tailles mais tout aussi désastreux pour les investisseurs mal avisés: Norbourg avec l’ineffable Vincent Lacroix, Earl Jones, et quelques autres magouilleurs-magouilleuses. La comptabilité, métier honorable sans doute, n’est pas à l’abri des tentations.<br />
<br />
Le père de John est-il ingénieur - ou si John est fort en maths, ne sera-t-il pas tenté de le devenir? -, alors les alléchants contrats où la compétition avantage les plus bas soumissionnaires pourraient inviter à contourner les frais d’outillage, la qualité des matériaux, la compétence des contremaîtres de chantiers, l’expérience de la main-d'œuvre<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSWhjX0Z8jZKlg_6qiJrmD9ce5NIWxnpAkNSmD1HL5ezm4OZ65VZKPYLna08DoVI8rk1JjogX8wE_t9xCGM0-V6GCUbxXuqtp3dk_5HMbFwmyDuM9Q14hlp4aSfNFHmlG54thuaBcsaa4/s1600/ep305318669.id129719.concorde.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620861986087044066" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiSWhjX0Z8jZKlg_6qiJrmD9ce5NIWxnpAkNSmD1HL5ezm4OZ65VZKPYLna08DoVI8rk1JjogX8wE_t9xCGM0-V6GCUbxXuqtp3dk_5HMbFwmyDuM9Q14hlp4aSfNFHmlG54thuaBcsaa4/s320/ep305318669.id129719.concorde.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 240px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 320px;" /></a> de la construction. Des enveloppes brunes - à l’image du borsalino de John - pourraient circuler de main en main, passer par des mains politiques avant d’être encaissés par les protecteurs. Après, quand un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEieHjFkO3huiKarKo01jyYEJzihvqSi1wM5W-2w0WRkOXD-pRY0ZKgQpfMYoTCQtZQw6xd3kPL1W_MnWCkzUnXosfIe76NBRFV4fuhyAtm1e-r-PMLHHyegsVvOFm6gfSL-K45nFt3EiaQ/s1600/ep305318669.id129719.concorde.jpg">viaduc se sera effondré</a> tuant des passagers dans une auto, qu’un plafond de garage aura aplati des voitures, qu’un balcon se sera détaché du trentième étage… on pourra toujours en accuser l’érosion, et de plus, il y aura de bien grandes chances pour que le responsable de la catastrophe ait quitté ce bas monde. Certes, ce n’est pas la profession d’ingénieur qui est en cause et encore moins l’intégrité de ceux-ci, mais la compétition, la course des bas soumissionnaires, les trafics des coûts qui font croître les prix, sans oublier la complicité des syndicats qui tirent parfois des avantages marginaux des ratées de la construction. Ce n’est plus la profession qui est fautive, mais bien le milieu même.<br />
<br />
Le père de John serait-il plutôt médecin - ou John rêve peut-être d’une carrière médicale s’il est bon dans les sciences? -, alors la tentation sera de chargé des coûts de santé. Dans une société comme la nôtre, où les lois de la régie de l’assurance-maladie empêchent les médecins inscrits au <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidsoMagUMSneT4wGPHXaS4ao40yQ7G8r1KP-cRPPgOxdmMhJCZNQBrgFfguW4W0kDj_bV1L_TXGY-8BkRXJ_a0Of1vTwuys4_oxNuIbUTbHeWLKT9-BaX4RQwGWi9HiYCz8HIpXkX0k0g/s1600/150649-quebec-duree-moyenne-attente-salle.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620863748872264290" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidsoMagUMSneT4wGPHXaS4ao40yQ7G8r1KP-cRPPgOxdmMhJCZNQBrgFfguW4W0kDj_bV1L_TXGY-8BkRXJ_a0Of1vTwuys4_oxNuIbUTbHeWLKT9-BaX4RQwGWi9HiYCz8HIpXkX0k0g/s320/150649-quebec-duree-moyenne-attente-salle.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 183px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 320px;" /></a>programme de pratiquer parallèlement une carrière privée, il est tentant d’ajouter des frais marginaux par ci par là. Des gouttes pour les yeux ne sont pas couverts par le régime? On charge les frais aux «bénéficiaires». Vous trouvez que les temps d’attente à l'<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidsoMagUMSneT4wGPHXaS4ao40yQ7G8r1KP-cRPPgOxdmMhJCZNQBrgFfguW4W0kDj_bV1L_TXGY-8BkRXJ_a0Of1vTwuys4_oxNuIbUTbHeWLKT9-BaX4RQwGWi9HiYCz8HIpXkX0k0g/s1600/150649-quebec-duree-moyenne-attente-salle.jpg">urgence</a> ou en clinique externe sont trop longs, que les Cliniques Locales de Santé Communautaire (C.L.S.C.) sont inefficaces? Qu’il y a un manque de médecins de famille? Rien de mieux, pour l'arriviste, que de se mettre sur le privé et d’offrir en échange de frais élevés la rapidité du service, le confort du traitement, la chirurgie privée. Là aussi, il y a eu des ratées avec des conséquences criminelles. Le médecin qui respecte son serment d'Hippocrate n'a pas cours dans une société capitaliste, même quand les frais sont déboursés par l'État.<br />
<br />
Oui, la société abime fortement les hommes, dans quelles que professions que ce soient. L’intégrité, l’honnêteté sont des visions de l’esprit dans un monde où les autorités institutionnelles acceptent des <span style="font-style: italic;">double binds</span> qui contredisent<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBJ9vjZlxkjbyEDxJq0FAU9LN653jzZw1-OaObRnJl4UddqipqyoU9mVlBcGwDi2moOoz_hNT7-Rvqehb-nTN7_dY5YHmB75pjRBDT791viZjr6YnV0IzGuH60KMK6oeN4XeLpM762XXM/s1600/Gardien-Geant-Casino_large.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620864445489973746" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBJ9vjZlxkjbyEDxJq0FAU9LN653jzZw1-OaObRnJl4UddqipqyoU9mVlBcGwDi2moOoz_hNT7-Rvqehb-nTN7_dY5YHmB75pjRBDT791viZjr6YnV0IzGuH60KMK6oeN4XeLpM762XXM/s320/Gardien-Geant-Casino_large.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 300px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 284px;" /></a> la valeur des normes enseignées. On peut trouver autant de criminels honnêtes qu’il y a de professionnels véreux. Le renversement du bien et du mal s’opère d’ailleurs le plus facilement du monde depuis que les bornes repères tendent à s’effacer. Les criminels bénéficient de «preuves circonstancielles» qui rendent les «circonstances atténuantes» de la peine, même pour les délits les plus graves. Des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhBJ9vjZlxkjbyEDxJq0FAU9LN653jzZw1-OaObRnJl4UddqipqyoU9mVlBcGwDi2moOoz_hNT7-Rvqehb-nTN7_dY5YHmB75pjRBDT791viZjr6YnV0IzGuH60KMK6oeN4XeLpM762XXM/s1600/Gardien-Geant-Casino_large.jpg">mercenaires</a> à l’emploi d’entreprises privées se voient doter d’un accès à la violence autorisée qu’on mesure avec parcimonie parmi les forces légales policières. Les sphères du privée et du public ne cessent de se confondre et les actes privés deviennent des délits publics. Fumer une cigarette dans un endroit public fait de vous un contrevenant. Vous devenez un assassin potentiel à cause du concept de «fumée secondaire». La marge de la liberté ne cesse de se rétrécir alors qu’on brandit le spectre du totalitarisme de toutes formes de sociétés qui ne se qualifieraient pas de «libérale» et de «démocratique». Bref, la <span style="font-style: italic;">tyrannie de la majorité</span> anticipée par Tocqueville est devenue la tyrannie des lobbyistes de bons sentiments et des biens-pensants. La moralité n’a jamais eu goût aussi vulgaire.<br />
<br />
Et John dans tout cela? La vérité se cache, bien entendue, dans le placard. Elle n’est pas montrable même si elle est visible. Elle appartient aux moralités bourgeoises des <span style="font-style: italic;">Fifties</span>. Elle se <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHBwcasVTITVFqqFVjVr5WXtBGsHYY1OK4VRAe0rvrHbbQRbSUU8XKbrd_r2ZHYqDJIbLqimgrwyK_2fy219BdbToQy9JaLVQF9Cq5YuIYIy_OHdj79P4RK_mj6fzFuXmL7cdN-QaIg1M/s1600/cotten_shadowofadoubt.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620883473993811122" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHBwcasVTITVFqqFVjVr5WXtBGsHYY1OK4VRAe0rvrHbbQRbSUU8XKbrd_r2ZHYqDJIbLqimgrwyK_2fy219BdbToQy9JaLVQF9Cq5YuIYIy_OHdj79P4RK_mj6fzFuXmL7cdN-QaIg1M/s320/cotten_shadowofadoubt.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 243px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 320px;" /></a>vit sur le mode onirique du cinéma. Après tout, Humphrey Bogart n’a rien de ces criminels sadiques ultérieurs que nous présenteront la télévision à partir des années 2000. Joseph Cotten, pour Hitchcock, joue un «oncle Charlie» inquiétant gigolo qui tue des veuves pour empocher leur fric: «<span style="font-style: italic;">Tu sais que le monde n'est qu'une vaste porcherie</span>» (<span style="font-style: italic;">Shadow of a Doubt</span>, 1943), déclare-t-il à la nièce et filleule qui porte le même nom que lui. Son <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgHBwcasVTITVFqqFVjVr5WXtBGsHYY1OK4VRAe0rvrHbbQRbSUU8XKbrd_r2ZHYqDJIbLqimgrwyK_2fy219BdbToQy9JaLVQF9Cq5YuIYIy_OHdj79P4RK_mj6fzFuXmL7cdN-QaIg1M/s1600/cotten_shadowofadoubt.jpg">monologue</a> dans lequel il expose son mépris viscérale des femmes bourgeoises qui font suer sang et eau leur mari durant toute leur vie, par le travail et les caprices domestiques, jusqu'à ce qu'il meure prématurément et encaissent leurs pensions pour mener la vie de <span style="font-style: italic;">veuves joyeuses,</span> est probablement le monologue le plus misogyne de l'histoire du cinéma. Derrière le calme apparent de Peyton Place, des ressentiments inouïs sont cultivés et rendent possibles les crimes les plus odieux.<br />
<br />
Voilà pourquoi il est difficile de ne pas s’arrêter sur la portée inconsciente du troisième tableau. Il nous révèle du monde actuel, tissé depuis les origines de la société de consommation, l’ambiguïté idéologique du bien commun. Balayer la poussière sous le tapis et dissimuler un cadavre dans un placard sont des issus tout à fait bourgeois. Il n’y a pas la brutale franchise du coup d’épée chevaleresque ni la piété des conduites de l’Antiquité grecque ou romaine. La corruption a changé le monde tout en laissant les normes de la respectabilité féminine cacher les travers, les défaillances et les crimes masculins. Plus aucune institution - et surtout pas l’État des législateurs - ne peut se sentir à l’abri de la corruption et des détournements. Les scandales ne cessent de se multiplier parce que les «fripons ont gagné», comme s’exclamait Robespierre au soir du IX Thermidor. La jeunesse des Maddox, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSoz30uWFo15t9nAyJsw2pUeh9imeqEmEdzjbXZCdy4ER9gebt_vZ1JB9Dh2dMVL-3mIW958qckWSXHZd98uuMmmbriYoMxO7-6TUoobpDa7ZrXHdZYtp4u4nmNUPc2J6xW5waZGC2VV4/s1600/dillinger_morgue.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620887241281057842" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSoz30uWFo15t9nAyJsw2pUeh9imeqEmEdzjbXZCdy4ER9gebt_vZ1JB9Dh2dMVL-3mIW958qckWSXHZd98uuMmmbriYoMxO7-6TUoobpDa7ZrXHdZYtp4u4nmNUPc2J6xW5waZGC2VV4/s320/dillinger_morgue.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 227px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 320px;" /></a>Lacroix, Jones et Stanford correspond à l'atmosphère dans laquelle baignaient les Peyton Places d’après-guerre. C’est en regardant des illustrations dans le genre de celles dessinées pour le manuel de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span> qu’ils ont appris à honorer la justice tout en supposant que leur bonne conduite pouvait l’aveugler au point de ne pas les laisser se faire prendre par la loi lorsque les bulles financières finiraient par éclater. Mais il y a une limite à toute ambition démesurée. L’<span style="font-style: italic;">hybris</span> de ces fraudeurs, leur incapacité à mesurer leur appétit, les ont conduit à des deuils et des cellules de prison parce qu'ils entraînaient la mort d’innocents dans leur sillage. Contrairement aux <span style="font-style: italic;">films noirs</span> des années cinquante, tout ne se terminait pas dans un échange de coups de feu entre criminels et policiers. L’<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjSoz30uWFo15t9nAyJsw2pUeh9imeqEmEdzjbXZCdy4ER9gebt_vZ1JB9Dh2dMVL-3mIW958qckWSXHZd98uuMmmbriYoMxO7-6TUoobpDa7ZrXHdZYtp4u4nmNUPc2J6xW5waZGC2VV4/s1600/dillinger_morgue.jpg">âge héroïque</a> du banditisme est un mythe, une légende littéraire ou cinématographique. Dans la plupart des cas, les points de chute ne furent qu’humiliants et sans éclats.<br />
<br />
Les enfants rêvent tous de jouer aux Robins des Bois, voler les riches pour donner au pauvre. C’est la façon dont ils comprennent la légitimité d’un acte par rapport à sa légalité, et tant que l’enfance sera sensible davantage à la légitimité qu’à la légalité, il y aura de l’espoir pour notre monde. Je ne voyais pas à l’époque, dans ce tableau, ce que je viens d’y exposer. La distance entre le monde des <span style="font-style: italic;">films noirs</span> et celui où je vivais n’était pas suffisamment énorme pour que je ne visse dans ces costumes que l’uniforme du <span style="font-style: italic;">mobster</span>. Mais les décennies se succédant, il apparaît aujourd’hui que les vêtements de John ne pouvaient être les siens; que c’étaient des vêtements d’adultes, d’hommes, et plus précisément, des vêtements extérieurs qui s’assemblaient sur un modèle qui était ceux des Joseph Cotten et des Humphrey Bogart. Dans la mesure où ces tableaux étaient conçus par des adultes selon un mode de commande didactique, il semblait innocent que de présenter une succession de vêtements masculins à partir desquels apprendre le vocabulaire de la langue seconde. La question qui se pose est alors celle-ci: aujourd’hui, si nous avions à sélectionner les vêtements masculins les plus courants, vers quel type de vêtements nous tournerions-nous? Quel modèle social, évalué comme positif dans les catégories morales, metterions-nous en évidence pour dire, voilà les vêtements qui font le père de John ou qui anticipent sa carrière future?<br />
<br />
Il est vrai que déjà dans la langue française, <span style="font-style: italic;">blue jeans</span> et <span style="font-style: italic;">tee-shirt</span> sont d’usage courant. Les <span style="font-style: italic;">running shoes</span> et les caps à palettes sont acceptées dans les écoles. Les adultes, les enseignants <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhLuihuUSkEzibkOjZ7ZXwD6Fi2PxRALQ5glIg5Ec9_uN6wOKi_gi2E54-B2ORJ6gRmxw2tdah97ellcqiQ88LLAU6A-DjR5DzDg84tRneZQVQlzHlT23bFU8GE309uTn-9LoOQnuY3FuI/s1600/3230588383_294fe9f650_o.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5621031810459784738" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhLuihuUSkEzibkOjZ7ZXwD6Fi2PxRALQ5glIg5Ec9_uN6wOKi_gi2E54-B2ORJ6gRmxw2tdah97ellcqiQ88LLAU6A-DjR5DzDg84tRneZQVQlzHlT23bFU8GE309uTn-9LoOQnuY3FuI/s320/3230588383_294fe9f650_o.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 190px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 320px;" /></a>mêmes parfois les portent. La <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg9_v5cjeZ0lyH_qlTRMrBUyiLNqJO6r3Mzrg39LnHBMXyGuNYBjTTNO9NGU8YF_I-Fd236Vs-z4ZVbKsyLI26XoOSi6pmu-wj7_XoB2_Wiz5rgBfJYnu2cvN1Tr33HKbDNpH7TOK_FRLk/s1600/3230588383_294fe9f650_o.jpg">distinction sociale</a> vestimentaire, si insistante jadis, n’existe pratiquement plus. Fils de bourgeois comme fils de travailleurs portent à peu près les mêmes logos. Dans une conception du monde où le temps semble être arrêté et que la consommation est le plus grand commun dénominateur de la démocratie, l’élitisme que représentait le monde de <span style="font-style: italic;">Peyton Place</span> se dissout progressivement. Les uniformes perdent de leurs symboles indicatifs. Paradoxalement, c’est ce qui ancre encore mieux les vêtements de John dans la catégorie du stéréotype du <span style="font-style: italic;">mobster</span>.Cette compulsion vestimentaire, pour didactique qu’elle soit, aurait-elle pu être composée diversement? Sans aucun doute. Les vêtements <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgfG4Ga-0znBl4eFB2qW9jYTERZHSiMzG5NSDoxq-fMRcXmngsS9U_2urZAdKcCIv54snM2ZvYv6XFuxdMKH2dpngA9S67Bn80eM2Mi9WpbjBgPkpXeogZnzg168ZOjR9ayh16H5pnTsJE/s1600/naked-city4.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620890764909922354" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgfG4Ga-0znBl4eFB2qW9jYTERZHSiMzG5NSDoxq-fMRcXmngsS9U_2urZAdKcCIv54snM2ZvYv6XFuxdMKH2dpngA9S67Bn80eM2Mi9WpbjBgPkpXeogZnzg168ZOjR9ayh16H5pnTsJE/s320/naked-city4.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 245px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 320px;" /></a>étalés ici en suivant les aiguilles de l’horloge étaient rarement portés par les enfants de mon temps et moi-même je n’ai jamais porté de borsalino ni d’imperméable couleur diarrhée de bébé. La lourdeur faisait en sorte que tout cet équipement n’aurait jamais pu être entassé dans les étroits casiers que nous avions à l’école. Être habillé proprement, avec un <span style="font-style: italic;">bleazer</span> bleu marine, un pantalon gris, des souliers noirs, une cravate rouge sur une chemise blanche suffisait. Nul n’était tenu même à ce type de costume tant le temps des uniformes s’effaçait progressivement au cours des <span style="font-style: italic;">Fifties</span>. Nous nous éloignions de la décennie de la guerre. Entre-temps, espions et agents secrets portaient toujours l’imper, le borsalino, la cigarette entre les lèvres pincées et le revolver dans la pochette à bretelles dans les séries policières. Entre le monde du réel vécu et celui de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgfG4Ga-0znBl4eFB2qW9jYTERZHSiMzG5NSDoxq-fMRcXmngsS9U_2urZAdKcCIv54snM2ZvYv6XFuxdMKH2dpngA9S67Bn80eM2Mi9WpbjBgPkpXeogZnzg168ZOjR9ayh16H5pnTsJE/s1600/naked-city4.jpg">fiction policière et criminelle</a>, le tableau <span style="font-style: italic;">John’s clothes</span> servait de ligne de démarcation où tous les renversements devenaient possibles.<br />
<br />
<div style="text-align: right;">Montréal<br />
21 juin 2011</div><br />
</div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-25305584388491833432011-06-19T16:44:00.000-07:002011-06-21T12:38:42.338-07:00John is saying his morning prayer<a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiaNR2vxPrOuBbeD18ZgNyZa2Bmv3TtLjiH5sAFSy8hE8ZHo3iAA0_KGlLHbZAEUncKLg_YD-bykckGn7w4hJr_IPSdx8X9DZi-Sq18MApQ2lEJTf1qC3fm1hoygdmQZ1bllhl4Dee1c6Q/s1600/2-+John+doing+his+prayer.jpg"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 400px; height: 274px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiaNR2vxPrOuBbeD18ZgNyZa2Bmv3TtLjiH5sAFSy8hE8ZHo3iAA0_KGlLHbZAEUncKLg_YD-bykckGn7w4hJr_IPSdx8X9DZi-Sq18MApQ2lEJTf1qC3fm1hoygdmQZ1bllhl4Dee1c6Q/s400/2-+John+doing+his+prayer.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620081400449020450" border="0" /></a><br /><div style="text-align: justify;"><div style="text-align: center;"><span style="font-weight: bold;">JOHN IS SAYING HIS MORNING PRAYER</span><br /></div><br />Le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiaNR2vxPrOuBbeD18ZgNyZa2Bmv3TtLjiH5sAFSy8hE8ZHo3iAA0_KGlLHbZAEUncKLg_YD-bykckGn7w4hJr_IPSdx8X9DZi-Sq18MApQ2lEJTf1qC3fm1hoygdmQZ1bllhl4Dee1c6Q/s1600/2-+John+doing+his+prayer.jpg">second tableau</a> de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span> est l’un des plus étrange que l’on puisse imaginer. Dès l’enfance, je savais que quelque chose n’allait pas avec ce tableau, et ce quelque chose est d’ordre purement architectural. L’observation est relativement simple: comment la porte de la salle de bain (et de la toilette) de la famille donne-t-elle directement dans la chambre à coucher du garçon? Un Le Corbusier ou un Mies van der Rohe de maisons de banlieue aurait-il, dans les <span style="font-style: italic;">Fifties</span>, inventé un intérieur tout-ouvert sur le modèle de ce que seront les <span style="font-style: italic;">loft</span> de la fin du XXe siècle? Autre fantaisie de la perspective, la fenêtre, par laquelle nous voyons oiseau et soleil matutinal devrait donner plutôt dans la salle de bain considérant la profondeur du champ que laisse entrevoir la porte entr’ouverte par Mary, qui en ressort comme si de rien n’était! Le tableau est baroque dans la mesure où il suppose un oxymoron: où il y a un vice de construction quelque part dans l’architecture de la maison de John & Mary, où il y a tout simplement une construction du vice qui s’offre ici au frère et à sa sœur. En tout cas, je n’ai jamais vu de maisons des <span style="font-style: italic;">Fifties</span> offrir un tel aménagement intérieur.<br /><br />Mais peut-être est-ce mon ignorance? Après tout, comme Hamlet le disait à Horatio, il y a plus de mystères dans le ciel et dans les étoiles que dans tous les livres de philosophie. En tout cas, on peut toujours commencer par quelques livres. Il est vrai que leur problématique demeure plus l’insertion de l’architecture dans l’urbanisme moderne. Ils discutent donc moins de question de <span style="font-style: italic;">design</span> ou d’aménagement intérieur. J. M. Richards, Siegfried Giedion et Michel Ragon sont quand même des critiques avérés de l’architecture contemporaine dans son ensemble, aussi bien en Amérique qu’en Europe. Dans leurs livres, les constructions les plus excentriques se donnent à voir, et l’on pourrait s’amuser à penser que l’architecte de la maison de la famille de John & Mary s’en était inspiré. Pourtant, dans les plans des intérieurs d’appartement, on voit rarement, sinon jamais, la salle des w.c. côtoyer une chambre à coucher ni même un <span style="font-style: italic;">living-room</span>. Contrairement à nos modernes salles de bain, les pièces de l’époque n’étaient pas munies de ventilateurs. Peut-être que la maison de John & Mary était-elle équipée déjà de cet instrument tout à fait avant-gardiste. Je l’espère en tout cas, pour John.<br /><br />Bref, ce qui donne une allure fantastique à cette chambre, c’est qu’il y manque une cloison, un mur. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à regarder la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtT_r5CYX_CRTglrnBEjipWAVzqmoBDr1Itry_wfLf66uTa2hfB2o5i6ssjdl2ZBa8fKWptrpYs4B5-z3II3nM0B43HppM335GzZNLoK0HZXZAnx843DtBnE6PU2XqqVxYhMO_KdO4Jnc/s1600/couverture.jpg">page couverture</a> <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtT_r5CYX_CRTglrnBEjipWAVzqmoBDr1Itry_wfLf66uTa2hfB2o5i6ssjdl2ZBa8fKWptrpYs4B5-z3II3nM0B43HppM335GzZNLoK0HZXZAnx843DtBnE6PU2XqqVxYhMO_KdO4Jnc/s1600/couverture.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 239px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjtT_r5CYX_CRTglrnBEjipWAVzqmoBDr1Itry_wfLf66uTa2hfB2o5i6ssjdl2ZBa8fKWptrpYs4B5-z3II3nM0B43HppM335GzZNLoK0HZXZAnx843DtBnE6PU2XqqVxYhMO_KdO4Jnc/s320/couverture.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620083016992862578" border="0" /></a>du manuel. Ici, John fait la leçon à Mary et se sert du tableau 2 comme support didactique. Nous voyons très bien le mur doté de la fenêtre. La porte est ouverte, mais dans le sens opposée à celle de la salle de bain; en fait, c’est bien la porte de la chambre de John qui donne sur un corridor (suppose-t-on). Le tableau 2 <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgayYv9WBM-eJorrh6t0bhuoq49q8RLMaEBHt1zuZlyLTcyXmIe7FKfYmwReP-n78yybDXHmwpEEe7vTv9IgDRBYLl73ORti2a7cBxBKndZj6elDlXhieeTxTNgqEwMn0TEy6ovcKRg0eo/s1600/2a-Saying+his+prayer+-+copie.tif"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 98px; height: 200px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgayYv9WBM-eJorrh6t0bhuoq49q8RLMaEBHt1zuZlyLTcyXmIe7FKfYmwReP-n78yybDXHmwpEEe7vTv9IgDRBYLl73ORti2a7cBxBKndZj6elDlXhieeTxTNgqEwMn0TEy6ovcKRg0eo/s200/2a-Saying+his+prayer+-+copie.tif" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620759430434891874" border="0" /></a>suggère un espace entre la porte de la salle de bain et la chambre de John, mais la fenêtre porte à faux l’idée d’un corridor. Au mieux peut-on imaginer que le mur d’arrêt du corridor se situerait juste entre la bordure de la fenêtre et le mur sur lequel on peut voir accrochés un lavabo et une frange de miroir sur le mur. C’est la solution à laquelle ont pensé les dessinateurs du tableau en le <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjQVEfvuw6rktwqZO1BFf5shj9p3RA-80UWaTc6He06Wqu7GVT8P0rFRKKGZlxtjWTwxjmI9RHsdBY8Tfg_IccXeY-NkFYIpFfeGiYiu2aSv_uYF-af-l_7s1w_kahuNVjbUXZ2RgHPSRA/s1600/2a-Saying+his+prayer.tif">retouchant</a> pour la version ultérieure du début des années 1960. Des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhE9Lr1oS5RYkGvAIuuwrz5UH6Q4-iF0mkkrJDN0PIKiXNz7QcaWZGGUUTOjUP4uf4ql-gfiF3RiQ2scAynu0-DiqiNaybgXjXcuI3EX0VteD-onDkCYE1wxQ5VVF-Z-jnW3aTD3qOfGpY/s1600/2a-Saying+his+prayer+-+copie.tif">lignes de joints</a> dessinent comme un mur qui ferait la limite même de la maison, permettant à la fenêtre de donner directement dans la chambre de John.<br /><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjQVEfvuw6rktwqZO1BFf5shj9p3RA-80UWaTc6He06Wqu7GVT8P0rFRKKGZlxtjWTwxjmI9RHsdBY8Tfg_IccXeY-NkFYIpFfeGiYiu2aSv_uYF-af-l_7s1w_kahuNVjbUXZ2RgHPSRA/s1600/2a-Saying+his+prayer.tif"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 400px; height: 286px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjQVEfvuw6rktwqZO1BFf5shj9p3RA-80UWaTc6He06Wqu7GVT8P0rFRKKGZlxtjWTwxjmI9RHsdBY8Tfg_IccXeY-NkFYIpFfeGiYiu2aSv_uYF-af-l_7s1w_kahuNVjbUXZ2RgHPSRA/s400/2a-Saying+his+prayer.tif" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620084140618480914" border="0" /></a>D’autres incongruités sont manifestes dans le tableau. Ainsi, la pose subitement tenue par Mary. «On ne bouge plus! Le petit oiseau va sortir!» Certes, ce n’est pas pour «se faire tirer le portrait» que Mary, avec sa boucle rouge dans les cheveux (<span style="font-style: italic;">sic</span>) s’immobilise, les deux jambes parallèles plantées l’une à côté de l’autre. Elle ne provient de, ni ne va nulle part. Comme une statue, elle tient la place de la porte qu’elle semble repousser pour sortir. Là encore, les dessinateurs qui ont retouché la version «modernisée» se sont aperçus que quelque chose n’allait pas dans ce tableau. Si Mary n’existe pas dans le tableau de la couverture, autrement qu’à l’extérieur, ici, il fallait l’animer. Et les retouches nous montrent, plus logiquement, une Mary avec ce qui me semble être des rouleaux dans les cheveux et une jambe s’avançant pour esquisser un pas naturel. Elle provient bien de la salle de main et se dirige maintenant vers sa chambre.<br /><br />Si le tableau retouché nous montre une chambre au décor plus stylisé - des fleurs ont été <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5YbHOzLSG_DY00Pe6oyOPkl9ah3ScvGRkjmSUvJjN4HFXBR1NLbMyb0j8t6dgasVvrKQvhnQVqUoULAyKwKWOeE3XPrfSPtBmffkk1tei4brq7SQH9ju_ZVdUPBtG-AMAherbV9ca9CE/s1600/grande02.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 320px; height: 240px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5YbHOzLSG_DY00Pe6oyOPkl9ah3ScvGRkjmSUvJjN4HFXBR1NLbMyb0j8t6dgasVvrKQvhnQVqUoULAyKwKWOeE3XPrfSPtBmffkk1tei4brq7SQH9ju_ZVdUPBtG-AMAherbV9ca9CE/s320/grande02.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620087029373547794" border="0" /></a>rajoutées sur les tapis, le vernis des meubles est plus luisant -, un troisième personnage change totalement d’aspect: il s’agit du chien de John, assis, sur le seuil de la porte. Dans le tableau original, <span style="font-style: italic;">La voix de son maître</span>, du peintre anglais Francis Barraud, on voit le modèle du chien de John appelé à devenir le logo corporatif de la <span style="font-style: italic;">Berliner</span>, avant de l'être de celui de <span style="font-style: italic;">RCA Victor</span>. Il s'agit bien, en effet, du célèbre chien de la <span style="font-style: italic;">His Master’s Voice</span>, aujourd'hui plus connue sous l'acronyme H.M.V. Il ne manque que le cornet du gramophone dans lequel le chien plongeait le museau pour entendre sortir la voix de son maître, placé dans le cercueil sous la composition d’ensemble. Dans le tableau retouché, le chien <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgEAaMhgGOGw9xmYU7j8c1Sk4DHm8VtzrWcIxGwGeR94D2CP9oxFiVWHAk9FCGzvvDE6XmWhArLO07AUZe6ZwRTbXoxTgnN4tqqSfXCBoSt91HoLDuXoFmbllYCDnDWnPbFEibm-wlWNtE/s1600/Milou.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 210px; height: 290px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgEAaMhgGOGw9xmYU7j8c1Sk4DHm8VtzrWcIxGwGeR94D2CP9oxFiVWHAk9FCGzvvDE6XmWhArLO07AUZe6ZwRTbXoxTgnN4tqqSfXCBoSt91HoLDuXoFmbllYCDnDWnPbFEibm-wlWNtE/s320/Milou.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620089158635564258" border="0" /></a>ressemble plus à un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgEAaMhgGOGw9xmYU7j8c1Sk4DHm8VtzrWcIxGwGeR94D2CP9oxFiVWHAk9FCGzvvDE6XmWhArLO07AUZe6ZwRTbXoxTgnN4tqqSfXCBoSt91HoLDuXoFmbllYCDnDWnPbFEibm-wlWNtE/s1600/Milou.jpg">fox-terrier</a> qui prend les traits du célèbre Milou de la bande dessinée d’Hergé, mais plus noir que blanc. Ce symbole associé à la masculinité (comme on le verra plus loin), relève des allégories traditionnelles. La signification de sa présence, dans cette maison à l’architecture incongrue, est la seule dont on peut dire qu’elle signifie quelque chose de déterminant. Elle est à situer dans la ligne invisible qui va de Mary à John, comme un point de milieu que la perspective du tableau déforme à notre perception. Le chien est également un des trois points du triangle formé avec le crucifix et John. Ici, ce n’est plus le chien qui écoute la voix de son maître mais bien le maître qui prie son Dieu, non plus en regardant la croix comme dans les images pieuses, mais en fermant les yeux, à la fois sous le regard de Dieu et celui du chien. Derrière le triangle, la femme offerte et interdite, la transgression en puissance, onirique dans le vieux tableau, manifeste dans le tableau retouché, Mary la sœur utérine.<br /><br />Après avoir été invité au fétichisme par le premier tableau des <span style="font-style: italic;">Parts of the body</span>, nous verrions-nous convier ici à commettre l’inceste? N’est-ce pas tirer un peu par les cheveux? John prie pour la belle journée qui commence. Il ferme les yeux pour être plus en présence avec le Seigneur son Dieu qui le protégera durant cette nouvelle journée qui commence assez tôt (7 <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiNwfkkYeRJPCBltWBREMDzLlMLDXwy-5QnROSafi6CnQ1TsAN6IXRRdjxOB5p3wKjUpoBBf5xAIPGBS2VCOJ_4h4Uy0Y60VxOdJQonWH1v-9s1peCZ89k_Lr1toiHu8pJF93ZLW5iS95w/s1600/EYCK%252C+Jan+van36.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 261px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiNwfkkYeRJPCBltWBREMDzLlMLDXwy-5QnROSafi6CnQ1TsAN6IXRRdjxOB5p3wKjUpoBBf5xAIPGBS2VCOJ_4h4Uy0Y60VxOdJQonWH1v-9s1peCZ89k_Lr1toiHu8pJF93ZLW5iS95w/s320/EYCK%252C+Jan+van36.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620091827081384562" border="0" /></a>heures du matin). L’oiseau chante (autre symbole ambiguë) et le soleil semble tout rond à l’horizon, un peu comme une orange juteuse (autre symbole …etc.) Les rideaux sont ouverts, tout comme la porte de sa chambre qui donne hors du tableau mais qui se dédouble par la porte de la salle de bain. Décidément, la tentation de la chair est forte pour que l’une s’offre (la sœur, évidemment) et l’autre résiste (le frère priant les mains jointes et …les pieds nus). Il n’a pas pris le temps de mettre ses pantoufles, rangées avec ordre aux pieds du lit. Dans la symbolique de l’art, les pantoufles représentent généralement la fidélité et le bonheur conjugal (comme dans le célèbre tableau de Jan Van Eck, les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiNwfkkYeRJPCBltWBREMDzLlMLDXwy-5QnROSafi6CnQ1TsAN6IXRRdjxOB5p3wKjUpoBBf5xAIPGBS2VCOJ_4h4Uy0Y60VxOdJQonWH1v-9s1peCZ89k_Lr1toiHu8pJF93ZLW5iS95w/s1600/EYCK%252C+Jan+van36.jpg"><span style="text-decoration: underline;"><span style="font-style: italic;">époux</span></span></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiNwfkkYeRJPCBltWBREMDzLlMLDXwy-5QnROSafi6CnQ1TsAN6IXRRdjxOB5p3wKjUpoBBf5xAIPGBS2VCOJ_4h4Uy0Y60VxOdJQonWH1v-9s1peCZ89k_Lr1toiHu8pJF93ZLW5iS95w/s1600/EYCK%252C+Jan+van36.jpg"><span style="font-style: italic;"> Arnolfini</span></a>). On ne se promène pas pieds nus dans la maison petite-bourgeoise de Peyton Place. Ce serait un signe aussi indécent que la nudité du torse. Le pyjama est de mise. De fait, une fois les <span style="font-style: italic;">Body Parts</span> exposés en pièces détachées, il n’y aura plus l’ombre d’un bout de peau dans le manuel de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span>, sauf dans le dernier tableau, où John & Mary sont si loin qu’ils n’apparaissent que comme des silhouettes éthérées, et ici, les pieds de John.<br /><br />Dieu donc. Le Christ sur la croix qui observe tout et pèse déjà nos consciences ensommeillées. John prie. Par rite, comme nous le verrons dans un autre tableau, mais indiscutablement avec ferveur. Et le chien le tient à l’œil, gueule <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9MN3Y1jGrj0F78WsGmkWPxrurSwxzJOwwPiYQcKoEr5WOk0hFRI3gpPoA803cpzarKxfkvXzegKGUrQ_cMrudRwlbhf_FYy0T0jhy6EiMvuBHKg8O51LDtHVtXSS-Zd91Q4AOLA0rRC4/s1600/EYCK-Jan-van---Epoux-Arnolfini--d-tail-chien--copie-1.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 286px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9MN3Y1jGrj0F78WsGmkWPxrurSwxzJOwwPiYQcKoEr5WOk0hFRI3gpPoA803cpzarKxfkvXzegKGUrQ_cMrudRwlbhf_FYy0T0jhy6EiMvuBHKg8O51LDtHVtXSS-Zd91Q4AOLA0rRC4/s320/EYCK-Jan-van---Epoux-Arnolfini--d-tail-chien--copie-1.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620093637421220914" border="0" /></a>ouverte (mais fermée dans le tableau retouché). Lui aussi faisait déjà parti du célèbre tableau des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi9MN3Y1jGrj0F78WsGmkWPxrurSwxzJOwwPiYQcKoEr5WOk0hFRI3gpPoA803cpzarKxfkvXzegKGUrQ_cMrudRwlbhf_FYy0T0jhy6EiMvuBHKg8O51LDtHVtXSS-Zd91Q4AOLA0rRC4/s1600/EYCK-Jan-van---Epoux-Arnolfini--d-tail-chien--copie-1.jpg">époux Arnolfini</a>, à la fois symbole de la virilité mais aussi de la mise en garde, doublet de cet ange gardien qui voletait dans les manuels de lectures et du catéchisme de l’école primaire. L’oiseau à la fenêtre - réglons ce premier cas animalier - n’est pas une colombe de paix. Il ressemble plutôt à ce rossignol dont on connaît l’importance allégorique qu’il tient dans un conte du <span style="font-style: italic;">Décameron</span> de Boccace (Ve journée, 4e conte) où, pour retrouver son jeune amoureux, Caterine, la fille de la famille, fait installer son lit sur le balcon où le jeune homme la rejoint la nuit. Au matin, le père les surprend tout nu et les fait se marier sur le champ. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg96LsvaQJy1Dru2QBFwFb6mL40XnlhtMScCxl36_3GMRpjmnDD5KRDUeICTwhX2wBiw4T7ccaKLeF-fDduzHCHcQCfZ7KrGatOSFfH94-QB1QEPw9Jfm_Lsj2IPt3poeglPiUCR8BahQ0/s1600/pasolini3.jpg">Pasolini</a> n’a pu résister à inclure ce conte dans son adaptation cinématographique. Comme une sirène, le rossignol chantant à la fenêtre, le soleil se levant, n’est-ce pas une invitation adressée à John d'ouvrir les yeux et regarder cette «Gradiva» qui sort de la salle de bain?<br /><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg96LsvaQJy1Dru2QBFwFb6mL40XnlhtMScCxl36_3GMRpjmnDD5KRDUeICTwhX2wBiw4T7ccaKLeF-fDduzHCHcQCfZ7KrGatOSFfH94-QB1QEPw9Jfm_Lsj2IPt3poeglPiUCR8BahQ0/s1600/pasolini3.jpg"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 372px; height: 301px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg96LsvaQJy1Dru2QBFwFb6mL40XnlhtMScCxl36_3GMRpjmnDD5KRDUeICTwhX2wBiw4T7ccaKLeF-fDduzHCHcQCfZ7KrGatOSFfH94-QB1QEPw9Jfm_Lsj2IPt3poeglPiUCR8BahQ0/s400/pasolini3.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620094345202960626" border="0" /></a>Mais bien d’autres choses sortes de la salle de bain que Mary. Étudier la symbolique du chien nous permet de comprendre pourquoi le folklore en fait le meilleur ami de l’homme. Chez les Égyptiens comme chez les Phéniciens, l’animal était déjà sacré. Jean-Louis Bernard écrit: «Assoiffé des <span style="font-style: italic;">fluides</span> résiduels humains (il s’en nourrit effectivement), ceux qui s’écoulent par les pieds en direction du <span style="font-style: italic;">tellurisme</span>, le chien voue un culte aux chaussures. Il suit une trace à partir d’une chaussure, jusqu’au barrage que constituent les rivières, elles-mêmes absorbantes quant aux fluides de diverses natures (dont le <span style="font-style: italic;">magnétisme</span>). Son <span style="font-style: italic;">sixième sens</span> et la longueur de son nez sont directement proportionnels. Imbibés des fluides de la maison, le chien a horreur du facteur, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhDUnUw3AVvnkxNcNHTR1Ifc1LvhxGhHwzs3xoXK1pB3aMKNIjOurF3iR8uL7KnLfv7romXg6xPmFU4l7AVximYbn2SOa2J_j0Q8sX3gS8IA458uMfCXItuyNdGMw3eWIsLKcGBmV4DKgA/s1600/piste.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 263px; height: 115px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhDUnUw3AVvnkxNcNHTR1Ifc1LvhxGhHwzs3xoXK1pB3aMKNIjOurF3iR8uL7KnLfv7romXg6xPmFU4l7AVximYbn2SOa2J_j0Q8sX3gS8IA458uMfCXItuyNdGMw3eWIsLKcGBmV4DKgA/s400/piste.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620096420591350370" border="0" /></a>non à cause de son uniforme, mais parce que les lettres qu’il apporte sont porteuses d’influences étrangères. Symbole d’<span style="font-style: italic;">analité</span>, il ne se nourrit pas seulement de fluides résiduels; tout ce qui se décompose l’attire comme un aimant. Il hurle à la mort aussi pour cette raison. Les Égyptiens voyaient dans le chacal un chien parfait parce qu’il poussait l’analité à son terme extrême; il mange en effet les chairs pourries, mais sans en être incommodé; bien au contraire, puisqu’il en tire santé et beauté». (1) Il est inutile de faire l’inventaire de toutes les mythologies du monde où apparaît le chien ou l’une de ses formes (loup ou chacal) sauvages. Sa première fonction mythique, universellement reconnue, serait d’être un animal <span style="font-style: italic;">psychopompe</span>. C’est le guide de l’homme dans la nuit de la mort, après avoir été son compagnon dans le jour de la vie. Chez les Germains, dont une partie de notre culture <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7U_7smwbv-xBVPH9XKbINWOl0C9gLgc_vCKNFwgFFcT6eP35-AXiAfUUcm5e8Js8fj1SXmsEwZegMbVc6IW5-BqoBoqK2oEKSwYpnfVQqCp1LLtM_Th9AR4lQfVicJYUxApWV1N6RiBo/s1600/Garm_reference_sheet_by_Yellow_eyes.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 320px; height: 256px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7U_7smwbv-xBVPH9XKbINWOl0C9gLgc_vCKNFwgFFcT6eP35-AXiAfUUcm5e8Js8fj1SXmsEwZegMbVc6IW5-BqoBoqK2oEKSwYpnfVQqCp1LLtM_Th9AR4lQfVicJYUxApWV1N6RiBo/s320/Garm_reference_sheet_by_Yellow_eyes.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620097025297248338" border="0" /></a>est un sous-produit, on retrouve le chien terrible <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7U_7smwbv-xBVPH9XKbINWOl0C9gLgc_vCKNFwgFFcT6eP35-AXiAfUUcm5e8Js8fj1SXmsEwZegMbVc6IW5-BqoBoqK2oEKSwYpnfVQqCp1LLtM_Th9AR4lQfVicJYUxApWV1N6RiBo/s1600/Garm_reference_sheet_by_Yellow_eyes.jpg">Garm</a>, le gardien de l’entrée du Nifîheim, le royaume des morts, des glaces et des ténèbres. Une des tâches du chien psychopompe, «auquel l’invisible est si familier, ne se contente pas de guider les morts. Il sert aussi d’intercesseur entre ce monde et l’autre, de truchement aux vivants pour interroger les morts et les divinités souterraines de leur pays». (2) Jean Chevalier et Alain Gheerbrant ajoutent à ceci: «Si le chien visite les enfers, bien souvent aussi il en est le gardien ou il prête son visage à leurs maîtres», mais par sa connaissance «de l’au-delà comme de l’en-deçà de la vie humaine fait que le chien est souvent présenté comme un héros civilisateur, le plus souvent maître ou conquérant du feu, et également comme ancêtre mythique, ce qui enrichit son symbolisme d’une signification sexuelle». Symbole chtonien pour les Germains, les Celtes voyaient par contre en lui un type de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidpRLXCGll8SAq9KrhmwXb7HxfRrTKhqZxIlxpzqBVDeGle0FRGvJM3NWvTIYzGbbAAcR-lcOWOMwG1O_ewswb4k79YLySIjV1xUqMQi2zXCBHAs_vm_UWDp5BAWuS58ZRDX3oejcsQBM/s1600/2adbd58b97492d7f-moyen2-chien-arret-devant-perdrix-rouge-desportes-francois.jpg">figure héroïque et virile</a>, d’où l’ambiguïté que les Occidentaux en ont conservé. <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidpRLXCGll8SAq9KrhmwXb7HxfRrTKhqZxIlxpzqBVDeGle0FRGvJM3NWvTIYzGbbAAcR-lcOWOMwG1O_ewswb4k79YLySIjV1xUqMQi2zXCBHAs_vm_UWDp5BAWuS58ZRDX3oejcsQBM/s1600/2adbd58b97492d7f-moyen2-chien-arret-devant-perdrix-rouge-desportes-francois.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 246px; height: 191px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidpRLXCGll8SAq9KrhmwXb7HxfRrTKhqZxIlxpzqBVDeGle0FRGvJM3NWvTIYzGbbAAcR-lcOWOMwG1O_ewswb4k79YLySIjV1xUqMQi2zXCBHAs_vm_UWDp5BAWuS58ZRDX3oejcsQBM/s320/2adbd58b97492d7f-moyen2-chien-arret-devant-perdrix-rouge-desportes-francois.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620103548390423954" border="0" /></a>Dans l’Islam, le chien est plus souvent considéré comme l’image de ce que la création comporte de plus vil. «En résumé», conclut nos deux auteurs: «le chien recouvre un symbole aux aspects antagonistes, entre lesquels toutes les cultures n’ont pas tranché. Mais il est frappant, à cet égard, de rappeler que, pour les alchimistes et philosophes, le chien dévoré par le loup représente la purification de l’or par l’antimoine, avant dernière étape du grand-œuvre. Or, que sont ici le chien et le loup, sinon les deux aspects du symbole en question, qui trouve sans doute, dans cette image ésotérique, sa résolution en même temps que sa plus haute signification; chien et loup à la fois, le sage - ou le saint - se purifie en se dévorant, c’est-à-dire en se sacrifiant en lui-même, pour accéder enfin à l’étape ultime de sa conquête spirituelle». (3)<br /><br />Le chien de John lui sert donc de truchement entre le ciel (la croix) et l’enfer (toucher à Mary). Il sert d’ange gardien contre la tentation sifflée par le rossignol. Comme dans les bandes dessinées, chien et rossignol apparaissent comme l’ange gardien et le démon sussurant à l’oreille de John le dilemme où se trouve placée sa conscience entre son désir et son assouvissement. C’est John le porteur de culpabilité. Dans le sexisme propre à l’époque, il est la cause du bonheur comme du malheur de la femme. Ses bas sortis épars du tiroir, ses pantoufles sagement disposées, reprennent exactement le même dialogue que le rossignol et le chien. Les pieds nus de John sont le point de bascule placé sur la ligne de partage moral du tableau. «Le chien est parmi les plus anciens animaux domestiques. Il est le symbole par excellence de la confiance et de la vigilance, et on le considère aussi comme le gardien de la porte de l’Au-delà». Au Moyen Âge, les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjJQLscrLfMkY4vlT5tUeFnOMTFw8S01PcmgWAbKIlMnL2NCuMTcwtS-A_w0V76cXu1AQWF7KhfDLx7VDS0CVxrVD-4FgM2AyRNVYiLDNTX8WR56iGs4r8A2r9ra3NY8Eg885v3F9sGDSE/s1600/m500306_06-517325_p.jpg">sculpteurs</a> des cathédrales le prenaient comme «emblème de la permanence inébranlable de la foi.<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjJQLscrLfMkY4vlT5tUeFnOMTFw8S01PcmgWAbKIlMnL2NCuMTcwtS-A_w0V76cXu1AQWF7KhfDLx7VDS0CVxrVD-4FgM2AyRNVYiLDNTX8WR56iGs4r8A2r9ra3NY8Eg885v3F9sGDSE/s1600/m500306_06-517325_p.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 320px; height: 210px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjJQLscrLfMkY4vlT5tUeFnOMTFw8S01PcmgWAbKIlMnL2NCuMTcwtS-A_w0V76cXu1AQWF7KhfDLx7VDS0CVxrVD-4FgM2AyRNVYiLDNTX8WR56iGs4r8A2r9ra3NY8Eg885v3F9sGDSE/s320/m500306_06-517325_p.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620103961156713202" border="0" /></a> Mais il personnifie aussi le courroux déchaîné. Le chasseur des âmes, Satan, est accompagné de chiens infernaux. Il existe aussi d’étranges représentations d’un “cynocéphale christophore”, c’est-à-dire d’un porteur de Christ à tête de chien, qui est probablement issu de l’Anubis égyptien, et qui constitue une des figures sacrées du légendaire médiéval». (4) Bref, on ne s’en sort pas, l’ambiguïté du chien nous laisse penser qu’il peut être aussi bien celui qui apportera les pantoufles de John que le complice du rossignol en dispersant ses chaussettes. En se plaçant entre Mary et John, nous pouvons nous demander s’il invite ou s’il empêche l’inceste. Il n’y a pas jusqu’à la dominante du ton jaune du tableau qui ajoute au dilemme symbolique. Le jaune, symbole de la lumière solaire, que l’on trouve sur le mur qui porte la croix, devient un jaune qui s’éteint, qui perd sa valeur de justice divine, sombrant dans la traîtrise et finissant par mourir, à l’image de la teinte qu’il prend sur le mur portant la fenêtre et donnant sur la porte. (5)<br /><br />Le <span style="font-style: italic;">jeu de la tentation</span> est plus subtile que dans les romans de Jeanne Bourin. Il s’inscrit dans les ambiguïtés mêmes des concepteurs. La Poétique illogique de la disposition des murs et des portes, le Symbolique ambivalent de l’inceste offert et refoulé, l’Idéologique enfin qui suppose l’interdit provenant d’un commandement surnaturel que le Christ sur la croix impose comme un Sur-Moi plongeant et menacé de toute part, c’est toute la trame d’une tragédie domestique qui s’insinue dans une banale leçon où l’on doit appendre comment dire lit, oreiller et couverture en anglais.<br /><br />Il ne faut donc pas s’étonner que ce tableau ait servi de page couverture à l’un des derniers recueils du poète québécois Denis <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_IuPP8gUAyXxVgXXcX-HKnijPAcVglMA_Lwo3bgqmiJc_KlnKblxUQNuHKirFHK_4zpG8i8H-ChZ42CFoMNSc2B_qca3CovujCJBIerJHATgvxSy4rXmjt9g5rKJMsax_s0XoFq21eIc/s1600/denis-vanier.jpg">Vanier</a>. Né en 1949 (mort en 2000), il était l’enfant parfait <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_IuPP8gUAyXxVgXXcX-HKnijPAcVglMA_Lwo3bgqmiJc_KlnKblxUQNuHKirFHK_4zpG8i8H-ChZ42CFoMNSc2B_qca3CovujCJBIerJHATgvxSy4rXmjt9g5rKJMsax_s0XoFq21eIc/s1600/denis-vanier.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 320px; height: 213px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_IuPP8gUAyXxVgXXcX-HKnijPAcVglMA_Lwo3bgqmiJc_KlnKblxUQNuHKirFHK_4zpG8i8H-ChZ42CFoMNSc2B_qca3CovujCJBIerJHATgvxSy4rXmjt9g5rKJMsax_s0XoFq21eIc/s320/denis-vanier.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620106700387942242" border="0" /></a>pour recevoir cette <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span> toute d’ambiguïté imbue. L’auteur de <span style="font-style: italic;">Lesbienne d’acide</span> restait le parfait petit John en prière sous la croix et tenté par l’image de sa sœur. Si <span style="font-style: italic;">la vérité se passe un doigt</span> comme il l’écrit dans un autre titre, c’est que l’image domestique bon enfant du tableau <span style="font-style: italic;">John is saying his morning prayer</span> est correspondante à l’univers de Peyton Place, où la morale bourgeoise et la grâce divine se bercent au-dessus des perversions et des transgressions les plus choquantes. Le chien qui renifle sueur et excrément, qui identifie la personne par les fluides que laissent ses pieds, avec ou sans chaussures, c'est l’invitation à passer du côté de la mort (Vanier est, à toute fin pratique, un suicidé moral), de la destruction de la virginité et de l’innocence comme de soi-même, en tant que personne morale. Le chien psychopompe devient complice du rossignol et du désordre qui sort du tiroir. Et, passive, Mary attend que son frère ait fini de prier.<br /><br />Avec un tel tableau, «l’innocence de l’enfance» en prend tout un coup! Tout ce qui porte symboles converge dans une lutte morale sans fin non sur des peccadilles, larcins ou touche-pipi, mais sur les tabous les plus fondamentaux du comportement moral de l’humanité. Pourquoi l’inceste domine-t-il les romans et les séries <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgy10tLNpm1BGVj4deU7EjcgjTdPytJozyGtMONW0pfdpO0qzt8LBNCVvEKDtRL9pFR0zIcQtGZ5j7ezW49fNzSFaUrySrm_VAfLyW8dU_mGbtRuAiNdGU7AXSQ-4duJSNqPFI0H97OGiU/s1600/19640912.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 320px; height: 308px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgy10tLNpm1BGVj4deU7EjcgjTdPytJozyGtMONW0pfdpO0qzt8LBNCVvEKDtRL9pFR0zIcQtGZ5j7ezW49fNzSFaUrySrm_VAfLyW8dU_mGbtRuAiNdGU7AXSQ-4duJSNqPFI0H97OGiU/s320/19640912.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5620108932194935346" border="0" /></a>télé de Victor-Lévy Beaulieu? Pourquoi tant de pièces de théâtre, encore aujourd’hui, inspirées par les pièces de Marcel Dubé, lui-même traducteur des pièces américaines d’après-guerre, tournent-elles tant autour de l’inceste frère-sœur ou de l’homosexualité? Ce sont des transgressions du même genre que l'on retrouve dans les romans de Claude Jasmin, adaptés au cinéma dans les années 60 par <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgy10tLNpm1BGVj4deU7EjcgjTdPytJozyGtMONW0pfdpO0qzt8LBNCVvEKDtRL9pFR0zIcQtGZ5j7ezW49fNzSFaUrySrm_VAfLyW8dU_mGbtRuAiNdGU7AXSQ-4duJSNqPFI0H97OGiU/s1600/19640912.jpg">Pierre Patry</a>, racontant la chute de la volonté jusqu’à l’issue de toutes perversités: le meurtre. Père et fille, frère et sœur, l’inceste est un tissu traditionnel des fantasmes immoraux des Québécois, et probablement des nord-américains en général. Issue d’une société qui pratiquait l’endogamie, de peur de voir des apports étrangers à sa culture catholique et française venir «corrompre» la «pureté» de la race canadienne, la tentation illustrée par le tableau 2 permet de comprendre qu’à chaque discours clérical la ligne s’amincissait entre les relations cousins/cousines et, pourquoi pas après tout, entre frères et sœurs? La brutalité de la vie rurale, dans des zones isolées des grands centres urbains, où la culture ne dépassait guère un enseignement religieux érigé sur la <span style="font-style: italic;">pastorale de la peur</span>, rendait tout conflit intérieur douloureux et incertain. Il est compréhensible que le chien de garde se soit souvent trouvé impuissant devant le chant du rossignol face au mépris de l'enfer.<br /><br />Est-ce pour cette raison qu’en retouchant le tableau, les dessinateurs se sont sentis obligés de donner du mouvement à Mary et la rendre moins coquette que dans le tableau précédent? Sans rien changer de l'essentiel du contenu de la leçon, les élèves n’étaient pas les seuls à se poser d’étrange question sur la disposition de la chambre de John par rapport à la salle de bain et aux allées et venues de sa sœur Mary! Les petites villes, les quartiers, les gros villages des <span style="font-style: italic;">Fifties</span>, du temps où Peyton Place était le modèle de la double vie des nord-américains, ont vécu de ces histoires sordides. Qu’il y ait eu viol ou consentement de Mary, séduction ou brutalité de John, les résultats ne pouvaient qu’être dysfonctionnels, à la fois psychologiques et moraux. Il est facile dès lors de deviner ce que John récite en lui-même au moment où il tient ses yeux si fermement clos<br /><br /><div style="text-align: center;"><span style="font-style: italic;">Et ne nous laissez pas succomber à la tentation</span><span style="font-style: italic;"><br /></span><span style="font-style: italic;">Mais délivrez-nous du Mal. Amen<br /><br /></span><div style="text-align: justify;">Notes<br /><ol><li>J.-L. Bernard. <span style="font-style: italic;">Les archives de l'insolite, </span>s.v. Éditions du Dauphin, rééd. Livre de poche, #6803, 1971, p. 96.</li><li>J. Chevalier et A. Gheerbrant. <span style="font-style: italic;">Dictionnaire des symboles, </span>Paris, Robert Laffont/Jupiter, Col. Bouquins, 1982, p. 239.</li><li>J. Chevalier et A. Gheerbrant. ibid. pp. 239, 240 et 245.</li><li>M. Cazenave (éd.) <span style="font-style: italic;">Encyclopédie des symboles, </span>Paris, Livre de poche, Col. La Pochothèque: Encyclopédies d'aujourd'hui, 1996, p. 136.</li><li>M. Cazenave (éd.) ibid. p. 332.<br /></li></ol></div></div><div style="text-align: right;">Montréal<br />19 juin 2011<br /></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-53145236120286945092011-06-16T22:22:00.000-07:002011-06-17T20:54:55.341-07:00Names of parts of the body<a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgD18uYUkyp5pEf_FPbujHiW_ozr1nV2jeWfBoxJQRTmsuDN-ckQNtodnI5akyF6YXR82IUQ2VcYFWz9wOMCsrjy-qJIZr41l_mmI0tm5jXNij838SM_ncxZnqFiApH-hzMafrCPC52enM/s1600/1-+Body+parts.jpg"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 400px; height: 282px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgD18uYUkyp5pEf_FPbujHiW_ozr1nV2jeWfBoxJQRTmsuDN-ckQNtodnI5akyF6YXR82IUQ2VcYFWz9wOMCsrjy-qJIZr41l_mmI0tm5jXNij838SM_ncxZnqFiApH-hzMafrCPC52enM/s400/1-+Body+parts.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619055279368209026" border="0" /></a><br /><div style="text-align: justify;"><div style="text-align: center;"><span style="font-weight: bold;">NAMES OF PARTS OF THE BODY</span><br /></div><br />Un soir d’automne ou d’hiver de 1963, j’avais sept ans, mon père arriva avec une boîte remplie <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiOH5gBxF83ykRf6RqBgXlyTnMxX3Uy7thq4z9-Ilgi8F__OrPDvv0Jh_OEaskO34J-EHKjO__KIz0UHNsJ_HDeBMtGvKvAJviYnUGAPcxufypyeuC4LZh-9WCjevhLKGWm-rlNbn22xJo/s1600/MarcellinChampagnat.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 320px; height: 312px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiOH5gBxF83ykRf6RqBgXlyTnMxX3Uy7thq4z9-Ilgi8F__OrPDvv0Jh_OEaskO34J-EHKjO__KIz0UHNsJ_HDeBMtGvKvAJviYnUGAPcxufypyeuC4LZh-9WCjevhLKGWm-rlNbn22xJo/s320/MarcellinChampagnat.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619227349105906034" border="0" /></a>de livres qu’un de ses amis de travail lui avait donnée. Je ne me souviens plus trop de tous les livres hétéroclites qu’il y avait dedans; je me souviens qu'il y avait quelques petits livres pour enfants, un livre illustré - une bande dessinée - racontant la vie de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiOH5gBxF83ykRf6RqBgXlyTnMxX3Uy7thq4z9-Ilgi8F__OrPDvv0Jh_OEaskO34J-EHKjO__KIz0UHNsJ_HDeBMtGvKvAJviYnUGAPcxufypyeuC4LZh-9WCjevhLKGWm-rlNbn22xJo/s1600/MarcellinChampagnat.jpg">Marcellin Champagnat</a>, le fondateur des Frères maristes (dont la résidence principale se situait à Iberville), avec une tache d’encre rouge - et un livre usé, à la couverture verte, qui était un manuel de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span> pour les élèves du primaire avancé. Je n’avais pas encore commencé à apprendre l’anglais - ça ne devait venir que l’année d’après, en 4<span style="font-size:100%;">e</span> -, mais c’était un livre de méthode assez simple, modèle catéchétique, comme tous les manuels scolaires de l’époque, avec une série de parallèles anglais/français. Ce que je me souviens surtout, c’était l’odeur. Tout cela sentait le moisi ou le fond de cave humide.<br /><br />Ce manuel avait 24 tableaux. (En 4e, on ne devait en avoir que 12), et la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgD18uYUkyp5pEf_FPbujHiW_ozr1nV2jeWfBoxJQRTmsuDN-ckQNtodnI5akyF6YXR82IUQ2VcYFWz9wOMCsrjy-qJIZr41l_mmI0tm5jXNij838SM_ncxZnqFiApH-hzMafrCPC52enM/s1600/1-+Body+parts.jpg">première illustration</a> était une illustration composite. Au niveau supérieur, une scène où un jeune garçon s’entraînait en levant des petites haltères tandis que sa sœur faisait des exercices de gymnastique. John & Mary jouaient aussi au ping-pong, puisqu’il y avait une table à l’arrière, au ballon et aux quilles. Tout cela devant une fenêtre ouverte sur un décor bucolique. Ce qu’il y avait de surréaliste - mot dont je ne connaissais pas l’existence à l’époque -, c’est qu’autour de cette scène, tournait des «parties du corps». Dans le sens de l’aiguille d’une montre, on pouvait voir le nez et la bouche, une main et les doigts, un bras avec l’avant-bras dressé pour faire saillir le biceps, un pied, des orteils, une cuisse un genou et une jambe, une oreille, un œil, enfin une bouche ouverte qui étale des dents.<br /><br /><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJu6gotYAND77wy9nxuK-9Sq1Ggd7GoFZbeas3ssw1-6VBdYJ41rnCZv_ugLCr8X_TUV5W9HHtlwabC6f7YBY9BQZ3Tl0P3Ad2mPf9RZFLCtT1VHftRqFVnnMidkcgqi3P3D51aCW3QPM/s1600/Berenice.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 204px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhJu6gotYAND77wy9nxuK-9Sq1Ggd7GoFZbeas3ssw1-6VBdYJ41rnCZv_ugLCr8X_TUV5W9HHtlwabC6f7YBY9BQZ3Tl0P3Ad2mPf9RZFLCtT1VHftRqFVnnMidkcgqi3P3D51aCW3QPM/s320/Berenice.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619234411079603938" border="0" /></a>Je n’ai pas attendu la <span style="font-style: italic;">voix off</span> du film <span style="font-style: italic;">Léolo</span> de l’irremplaçable Jean-Claude Lauzon (1992) pour me faire constater qu’il manquait quelques parties dont on n’apprendrait ni les noms en français, ni en anglais non plus. On n’y voyait ni poitrine (de garçon ou de fille), ni abdomen, et encore moins le dos et les fesses. Sans parler de ces organes qui auraient sûrement évoqué des mauvaises pensées. Pourtant, ces morceaux de corps qui tournaient autour de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFQelYlsrYD9FFnflImpDCz_FDlZDmZ45bwHS_o7dG5bHflMncPu_WBbIVslqAYW0sV1oeaL0WNr0B3EzXYsITmOtX7zXB4BKrtJkN84SNhwQJ5Wxfyb7D9EGfkQxELBjTHoxY2TZG1TE/s1600/220px-Ante_Paveli%25C4%2587.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 220px; height: 317px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFQelYlsrYD9FFnflImpDCz_FDlZDmZ45bwHS_o7dG5bHflMncPu_WBbIVslqAYW0sV1oeaL0WNr0B3EzXYsITmOtX7zXB4BKrtJkN84SNhwQJ5Wxfyb7D9EGfkQxELBjTHoxY2TZG1TE/s320/220px-Ante_Paveli%25C4%2587.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619234571031924786" border="0" /></a>scène bucolique évoqueraient ce que nous appellerions du fétichisme (les pieds qu’enrobent les petites bottines du fétichiste du <span style="font-style: italic;">Journal d’une femme de chambre</span> de Mirbeau-Bünuel; les dents de la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEht1h7-u6OCl9UR8e2yj4WU8mNhle_yLk6XQ_ln3jmdTupaxkpWSXlK85IVawz9SNBv0kU0UJp5luRvkh968sd1JnZPdYTo1bCz35cVwQm1LeJw83utUiTliCVrVfa_QIxFpZmN_lPrIKk/s1600/Berenice.jpg"><span style="font-style: italic;">Berenice</span></a> d’Edgar Poe, l’œil chez le dictateur croate <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhFQelYlsrYD9FFnflImpDCz_FDlZDmZ45bwHS_o7dG5bHflMncPu_WBbIVslqAYW0sV1oeaL0WNr0B3EzXYsITmOtX7zXB4BKrtJkN84SNhwQJ5Wxfyb7D9EGfkQxELBjTHoxY2TZG1TE/s1600/220px-Ante_Paveli%25C4%2587.jpg">Ante Pavelić</a>, le bourreau des Balkans, qui en conservaient, selon Malaparte, des quantités dans un bocal, les comparant à des huitres, le lobe de l’oreille célèbre dans <span style="font-style: italic;">L’Oreille cassée</span> de la série Tintin, les gants pour les mains, et on pense au <span style="font-style: italic;">Genou de Claire</span>, le film de 1970 de Rohmer. En fait <span style="font-style: italic;">Names of Parts of the Body</span> était une véritable leçon de fétichisme pour pré-pubère.<br /><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgbpG0AiKWnFdJcYbJwzR0Vd4M2hiAgSUajVNWGp8wiI4SLyEyrXTGoq_gw8rQPUwm3sBek71pmkwUTiSuD2HeZP5QrqlHNwutrUrfikiGUHTs6V5F_cYskoB_j-yyjaj_MWJm5DrZovZM/s1600/783035073.jpg"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 320px; height: 246px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgbpG0AiKWnFdJcYbJwzR0Vd4M2hiAgSUajVNWGp8wiI4SLyEyrXTGoq_gw8rQPUwm3sBek71pmkwUTiSuD2HeZP5QrqlHNwutrUrfikiGUHTs6V5F_cYskoB_j-yyjaj_MWJm5DrZovZM/s320/783035073.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619235021149062962" border="0" /></a>Ce n’était sûrement pas la volonté des auteurs, ni celle des illustrateurs de semer le trouble psychique dans la tête des élèves, mais quand on sait, depuis les découvertes de la psychanalyse, que tous les membres du corps humain en appellent au membre viril (par sa présence chez les garçons, son absence chez les filles), le jeu du caché/montré est une véritable sollicitation à ne penser qu’à ce membre qu’on ne voit pas et qu’on sait qu’il existe, puisque ses fonctions sont conséquentes des fantasmes: le regard du voyeur, l’audition du voyeur (on pense à la scène de Marcel espionnant Charlus et Jupien dans <span style="font-style: italic;">Sodome et Gomorrhe</span> I), l’exhibitionnisme du biceps saillant qui affiche une virilité dominatrice, la main «baladeuse», l’odeur des pieds, etc. sont tous liés à l’excitation sexuelle, en partie ou en totalité, comme chez le fétichiste. Le membre dont on ne dit pas le nom, ni en français ni en anglais, est la clé de l’interprétation du tableau.<br /><br />Mais sa symbolique est dissimulée derrière une représentation beaucoup plus forte. La poétique du tableau vise une ontologie beaucoup plus vicieuse car non <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-H-TX2hNvlFa_zmVp-i1elb4tsetv1MBCEuyvaMs-tZE9zybvDyzjILNRvz8SggIWbmuNPGlYpQMDpZyI57A5RV9pMYECSpGa3ktRHQ18KkdxNCYB5vM2a4UlAAemZ99H3Yy4IaMQWH4/s1600/La_mettrie.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 214px; height: 196px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-H-TX2hNvlFa_zmVp-i1elb4tsetv1MBCEuyvaMs-tZE9zybvDyzjILNRvz8SggIWbmuNPGlYpQMDpZyI57A5RV9pMYECSpGa3ktRHQ18KkdxNCYB5vM2a4UlAAemZ99H3Yy4IaMQWH4/s320/La_mettrie.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619236607402302418" border="0" /></a>teintée de pudicité: l’idée que le corps humain est bien cette merveilleuse machine dont les membres et les organes s’articulent les uns aux autres, comme l’un de ces totems en polystyrène dans lequel on enfonçait des yeux, des nez, des oreilles, des bouches et dont les faces se montaient les unes sur les autres. Derrière ce tableau plein d’innocence (<span style="font-style: italic;">sic</span>), toute une conception ontologique de l’être humain se dessinait dans l’esprit des enseignants et des élèves. C’était l’idée de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-H-TX2hNvlFa_zmVp-i1elb4tsetv1MBCEuyvaMs-tZE9zybvDyzjILNRvz8SggIWbmuNPGlYpQMDpZyI57A5RV9pMYECSpGa3ktRHQ18KkdxNCYB5vM2a4UlAAemZ99H3Yy4IaMQWH4/s1600/La_mettrie.jpg">La Mettrie</a> <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgPOUrSWC18xqqPUDPRH89J2Utki8zpp-goKP69e41D2wPObGtAVkhwR8JU-DT3bk-OnYPymzEBzGxYIq31fnRHzut1a3RG1tCS3yYeCMY5HMnLfdkJoSkU36i_T5Eicz2a9hjSI1qM9zE/s1600/vesale_planche_anatomique.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 194px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgPOUrSWC18xqqPUDPRH89J2Utki8zpp-goKP69e41D2wPObGtAVkhwR8JU-DT3bk-OnYPymzEBzGxYIq31fnRHzut1a3RG1tCS3yYeCMY5HMnLfdkJoSkU36i_T5Eicz2a9hjSI1qM9zE/s320/vesale_planche_anatomique.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619237718274591170" border="0" /></a>(1709-1751), <span style="font-style: italic;">L’Homme-machine</span> (1747). Influencé par la physique de Boyle et de Newton, par la médecine de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgPOUrSWC18xqqPUDPRH89J2Utki8zpp-goKP69e41D2wPObGtAVkhwR8JU-DT3bk-OnYPymzEBzGxYIq31fnRHzut1a3RG1tCS3yYeCMY5HMnLfdkJoSkU36i_T5Eicz2a9hjSI1qM9zE/s1600/vesale_planche_anatomique.jpg">Vésale</a> et de Harvey, le médecin anglais qui découvrit la circulation sanguine, enfin par l’idée des «esprits animaux» par lesquels Descartes déjà «expliquait» les mécanismes de l’influx nerveux et supposa la glande pinéale comme étant le siège de l’âme chez l’humain, La Mettrie, poussant le matérialisme à son maximum, ne concevait plus l’être humain que comme une addition de mécaniques articulées les unes aux autres et appelées à fonctionner en harmonie; la maladie n'était que la défectuosité de l’une de ces mécaniques dont il fallait trouver les causes du dérapage. Les développements de la pharmacologie et de la chimie comme ceux de la chirurgie, convergèrent à donner naissance à la médecine moderne, hors de ses origines alchimiques et astrologiques. La physiologie devenait la voie royale par laquelle pénétrer à l’intérieur du corps humain et le développement d’outillages, tel que le microscope, ne cessa de confirmer cette vision tout au long du XIXe et même encore au XXe siècle.<br /><br />À partir de ce modèle, tout le reste s’en suivait. L’Homme-machine ouvrait à la Société-machine, la société n’étant que le mécanisme fonctionnel d’un ensemble <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_IY6jYh7Jv7vx1mMg8upPhU8bPZRNtTd2LgMdqsfgvBTm8h8j5eMFbNdiCyVyZM-VhkJAmOAuMSjisXHdyZyzSzsjc-hjajzTdF16gKh3BMHxnFeO7t8_vqbBe5aRESEZqn3thKvUXp4/s1600/barri_re_de_Clichy.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 320px; height: 221px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_IY6jYh7Jv7vx1mMg8upPhU8bPZRNtTd2LgMdqsfgvBTm8h8j5eMFbNdiCyVyZM-VhkJAmOAuMSjisXHdyZyzSzsjc-hjajzTdF16gKh3BMHxnFeO7t8_vqbBe5aRESEZqn3thKvUXp4/s320/barri_re_de_Clichy.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619239042295186370" border="0" /></a>de mécaniques institutionnelles et morales. La façon dont Montesquieu lie l’influence du climat sur le développement des mœurs est la rencontre de la vieille médecine hippocratique avec la nouvelle vision de l’articulation des sociétés avec l’environnement. Les doctrines raciales du siècle suivant expliqueront par la latitude terrestre la peau noire des Africains comme la peau jaune des Asiatiques! Aujourd’hui - bien après les exercices de John & Mary -, la sociobiologie poursuit cette vision mécaniciste de l’être humain et de la société. L’économie de marché fonctionne encore selon les principes simplistes des physiocrates et d’Adam Smith: comme un réseau sanguin chargé d’alimenter les villes et les régions. Des ensembles de valves (les douanes ou les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg_IY6jYh7Jv7vx1mMg8upPhU8bPZRNtTd2LgMdqsfgvBTm8h8j5eMFbNdiCyVyZM-VhkJAmOAuMSjisXHdyZyzSzsjc-hjajzTdF16gKh3BMHxnFeO7t8_vqbBe5aRESEZqn3thKvUXp4/s1600/barri_re_de_Clichy.jpg">barrières d'octroi</a>), souhaitables ou non, accélèrent ou <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjC-esAVA0Zv3r3SFtf6JGDHvZoSmdRabpXm9NVtYJvjYM2MmK6ZKDGlQnziQipfdvMKEMObNV1-JwAhgKz0CKum9hc-KITPL4MYEBCrdm7AYMsZsNBs9OeiL3fJqmY0MtUvkm_tpPKtGg/s1600/machine_newcomen2.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 320px; height: 311px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjC-esAVA0Zv3r3SFtf6JGDHvZoSmdRabpXm9NVtYJvjYM2MmK6ZKDGlQnziQipfdvMKEMObNV1-JwAhgKz0CKum9hc-KITPL4MYEBCrdm7AYMsZsNBs9OeiL3fJqmY0MtUvkm_tpPKtGg/s320/machine_newcomen2.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619239671959062370" border="0" /></a>modèrent le flux agricole et des objets industrialisés, permettant ainsi au capital d'arriver avec des bénéfices et d'entraîner ainsi <span style="font-style: italic;">la richesse des nations</span>. Le libre-échange comme le protectionnisme, les deux mécanismes économiques du capitalisme, fonctionnent selon les mêmes principes que les leviers ou les pompes chez Boyle ou encore la vapeur de la pompe <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjC-esAVA0Zv3r3SFtf6JGDHvZoSmdRabpXm9NVtYJvjYM2MmK6ZKDGlQnziQipfdvMKEMObNV1-JwAhgKz0CKum9hc-KITPL4MYEBCrdm7AYMsZsNBs9OeiL3fJqmY0MtUvkm_tpPKtGg/s1600/machine_newcomen2.jpg">Newcomen</a>. On y retrouve l'antagonisme biceps/triceps illustré dans le tableau <span style="font-style: italic;">Body Parts.</span> L’application à la vapeur donnera la Révolution industrielle de l’Angleterre au cours du XVIIIe siècle. De La Mettrie à Montesquieu en passant par Newcomen et Papin, avant les grandes inventions techniques de Watt et de Stephenson, il y avait là un véritable <span style="font-style: italic;">Zeitgeist</span> dont l’ontologie de l’Homme-machine et la physiologie mécaniciste, sont demeurées les icônes les plus durables de la représentation que les Occidentaux se sont donnés d’eux-mêmes et à partir desquelles, l’économie politique s’est développée, aussi bien parmi les positivistes que chez Marx et les marxistes.<br /><br />Comment dans les petites Peyton Places d’Amérique du Nord, aussi bien au-delà qu’en-deçà du 45e parallèle, pouvait-on concevoir le corps humains, que catholiques et protestants enseignaient comme étant le Temple, l’unité rédimée par le sacrifice du Christ sur la croix, pouvaient n’être qu’une suite de machins fixés les uns aux autres? <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhagfwsyhhEqQEJM1fvHUE6UELvSLKhE2l82RO9qtGgnxYWqrbkMeW0QMIkPLgJEDrQ3A6DJ7WyEM7HQTTjhTECra0xQ7hKXuLQ5P6TDhcFRoPupaoL-rs-hOjKTBGBdX9ns2Do0eaOAFs/s1600/manuel+de+zoologie.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 212px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhagfwsyhhEqQEJM1fvHUE6UELvSLKhE2l82RO9qtGgnxYWqrbkMeW0QMIkPLgJEDrQ3A6DJ7WyEM7HQTTjhTECra0xQ7hKXuLQ5P6TDhcFRoPupaoL-rs-hOjKTBGBdX9ns2Do0eaOAFs/s320/manuel+de+zoologie.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619249297516880658" border="0" /></a>Certes, on pense à évoquer l’habileté didactique du tableau. Mais lors des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhagfwsyhhEqQEJM1fvHUE6UELvSLKhE2l82RO9qtGgnxYWqrbkMeW0QMIkPLgJEDrQ3A6DJ7WyEM7HQTTjhTECra0xQ7hKXuLQ5P6TDhcFRoPupaoL-rs-hOjKTBGBdX9ns2Do0eaOAFs/s1600/manuel+de+zoologie.jpg">cours de zoologie</a>, les manuels commenceront bien par présenter le corps comme une unité: une unité <span style="font-style: italic;">organique.</span> Mais déjà on sait que cette unité est reconnue comme une addition dont les membres et les organes internes ou externes fournissent la dynamique du vivant. Les cours de biologie venant après - bien après - les cours de langue seconde, c’était avant tout mettre la table pour une ontologie qui sera vite appelée à servir d’idéologie. <span style="font-style: italic;">Body Parts</span> anticipe les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwSO-mF3P-x_iyS9wdAHCgG3fu8NZk06xbSysrk_PqQcma_2t5Unw-r96OTKSQzCurfzf0naEz8MT3aRbRA-X_yYa8R-90eiUtQYEeAhC0XMNwrs2GF-H6KkdYvQ1DtFKIiNac_u3Mwbg/s1600/BMW-Parts.jpg"><span style="font-style: italic;">Auto Parts</span></a>. L’uniforme du chirurgien est de la même couleur que la vareuse du mécanicien automobile. La conservation et le clonage des cellules débordent de la science-fiction pour devenir de véritables centres de production où vos cellules organiques peuvent être cultivées si jamais une greffe ou une intervention chirurgicale vous serait nécessaire. Les banques d’yeux du temps de John & Mary sont devenues les banques de dons d’organes. On fusille en Chine un opposant politique à la tête afin de vendre ses organes à la pièce à de riches malades en attente d’un foie ou d’un estomac, d’un poumon ou d’un rein. La conception <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwSO-mF3P-x_iyS9wdAHCgG3fu8NZk06xbSysrk_PqQcma_2t5Unw-r96OTKSQzCurfzf0naEz8MT3aRbRA-X_yYa8R-90eiUtQYEeAhC0XMNwrs2GF-H6KkdYvQ1DtFKIiNac_u3Mwbg/s1600/BMW-Parts.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 320px; height: 178px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgwSO-mF3P-x_iyS9wdAHCgG3fu8NZk06xbSysrk_PqQcma_2t5Unw-r96OTKSQzCurfzf0naEz8MT3aRbRA-X_yYa8R-90eiUtQYEeAhC0XMNwrs2GF-H6KkdYvQ1DtFKIiNac_u3Mwbg/s320/BMW-Parts.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619250911274865138" border="0" /></a>mécaniciste de l’être humain et de ses institutions sociales ouvrent à l’assassinat pur et simple. La santé réclame son lot de donateurs généreux qui signeront leurs cartes d’assurance-maladie (ou santé, selon le bout par lequel on regarde par la lorgnette) en vue de prélever des organes survenant une mort accidentelle. Le geste est généreux, chrétien, comme l’a illustré Denys Arcand dans <span style="font-style: italic;">Jésus de Montréal</span>, mais il est aussi commercial et la charité se paie de l'intégrité identitaire des individus. Il a pour conséquence de cautionner la désintégration de l’unité humaine pour cet autre fantasme qu’est la vie prolongée au-delà des limites de sa durée naturelle. L'ignorance de la mort dans la leçon de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise </span>a conduit à un refus, parfois pathétique de la mort.<br /><br />Faisant leurs exercices, John & Mary apprenaient également la différenciation de leurs fonctions physiques. John se voulait fort: il levait des haltères, lançait le ballon ou abattait les quilles. Mary se voulait souple: <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhp_v2A0VEvbycY7pSFf8eZka1TGA8_9jNsXAQeuAO-IW00Nr7Hu-BA3u5s1qeCHa_W3-Ge5hOWCc8Jp7g0UpNzyKAUkjtU5mUu6bNTmcQdoPzzW6UdY8kq6Rkc-6CujpN5ge4NniOfBf8/s1600/51925.jpg">elle tendait le bras</a> à la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhp_v2A0VEvbycY7pSFf8eZka1TGA8_9jNsXAQeuAO-IW00Nr7Hu-BA3u5s1qeCHa_W3-Ge5hOWCc8Jp7g0UpNzyKAUkjtU5mUu6bNTmcQdoPzzW6UdY8kq6Rkc-6CujpN5ge4NniOfBf8/s1600/51925.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 320px; height: 213px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhp_v2A0VEvbycY7pSFf8eZka1TGA8_9jNsXAQeuAO-IW00Nr7Hu-BA3u5s1qeCHa_W3-Ge5hOWCc8Jp7g0UpNzyKAUkjtU5mUu6bNTmcQdoPzzW6UdY8kq6Rkc-6CujpN5ge4NniOfBf8/s320/51925.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619256815779543042" border="0" /></a>pointe des orteils. John jouerait au football et Mary ferait partie des <span style="font-style: italic;">cheerleaders</span>. En même temps, l’inclinaison qu’elle faisait dans son exercice juste devant John reproduisait un rapport homme/femme que la société d’avant le féminisme ne regeignait pas. Tout au long de la succession des tableaux, le sexisme évident des messages idéologiques n’échappe plus aujourd’hui à la conscience ouverte. C’était un paradoxe un peu bizarre à une époque où les écoles étaient divisées en genres et que les cours d’éducation physique mixtes - surtout d’éducation physique - étaient impensables, même au niveau secondaire ou <span style="font-style: italic;">high school</span>…<br /><br />L’aliénation à la fois symbolique et idéologique du corps était la leçon non dite du premier tableau de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span>. Les rites anthropologiques de la perception du corps que l’on retrouve tout au long de l’histoire des civilisations se font en fonction de l’activité organique du corps: l’alimentation et l’excrétion (on mentionne la bouche mais sûrement pas le cul [anus et rectum], comme si les aliments disparaissaient par magie à l’intérieur d’un corps sans organe (pas plus l’estomac n’existe que les intestins, l’abdomen est rigoureusement absent du tableau). On peut dire la même chose de la respiration où si le nez et la bouche sont bien présents, les poumons sont inexistants non plus. Ce sont des corps sans fonctions, autrement dire, des corps vidés de toute vie qui s’agitent dans <span style="font-style: italic;">Body Parts</span> de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span>.<br /><br /><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzy2npjvn3e-yqnoUAQX3a7Fvzj7ylAXNbLYrGBTWR5Yq31zbAvfi0FW7c-CjeTTzyL8Hl062nIiGiDEIUMZmFgVsRV2Gv6cs4WfQsMk4TBg6bm1E1WncULCoanVuPETP4FyCI0BuqK6s/s1600/1233655.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 239px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzy2npjvn3e-yqnoUAQX3a7Fvzj7ylAXNbLYrGBTWR5Yq31zbAvfi0FW7c-CjeTTzyL8Hl062nIiGiDEIUMZmFgVsRV2Gv6cs4WfQsMk4TBg6bm1E1WncULCoanVuPETP4FyCI0BuqK6s/s320/1233655.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619260494105217058" border="0" /></a>Étrange monde, donc, que celui des <span style="font-style: italic;">Fifties</span> qui ignore ou feint d’ignorer les subtilités anatomiques et physiologiques qu’il faut absolument éviter d’enseigner aux jeunes esprits encore angéliques de John & Mary! Pourquoi alors les Peyton Places regorgeaient-elles de fœtus avortés, d’adolescents abusant de la masturbation devant de pathétiques <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzy2npjvn3e-yqnoUAQX3a7Fvzj7ylAXNbLYrGBTWR5Yq31zbAvfi0FW7c-CjeTTzyL8Hl062nIiGiDEIUMZmFgVsRV2Gv6cs4WfQsMk4TBg6bm1E1WncULCoanVuPETP4FyCI0BuqK6s/s1600/1233655.jpg">catalogues</a> d’Eaton ou de Simpson? Comment corsets et gaines-culottes féminins excitaient-ils l’Imaginaire des garçons alors que les filles se voyaient déjà porter des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrMR4pSklmbhdEz6H3KTypcy5IGm1lS1-uROEq-IfyCxpjvCJovfkXpuWd4vSkUVrdJRfGZceErWE6Ym2RxGQA8zI8Uenr7ZiHnw89ScSjt2bpNfY4jZv-53jquPjri00Ppt6gCNye7dE/s1600/1ebf4ff20040414092442213.jpg">souliers</a> à<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrMR4pSklmbhdEz6H3KTypcy5IGm1lS1-uROEq-IfyCxpjvCJovfkXpuWd4vSkUVrdJRfGZceErWE6Ym2RxGQA8zI8Uenr7ZiHnw89ScSjt2bpNfY4jZv-53jquPjri00Ppt6gCNye7dE/s1600/1ebf4ff20040414092442213.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 240px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrMR4pSklmbhdEz6H3KTypcy5IGm1lS1-uROEq-IfyCxpjvCJovfkXpuWd4vSkUVrdJRfGZceErWE6Ym2RxGQA8zI8Uenr7ZiHnw89ScSjt2bpNfY4jZv-53jquPjri00Ppt6gCNye7dE/s320/1ebf4ff20040414092442213.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619260856505416162" border="0" /></a> talon haut et des boucles aux oreilles? Comment la découverte de la sexualité allait souvent être vécue sur le mode d'un traumatisme pour bien des petits John et de maternités non désirées pour bien des petites Mary auxquelles l’avortement était légalement interdit ou pratiqué, en secret, par des bouchers usant de broches à tricoter? Tant de drames aux conséquences parfois mortelles mais toujours dissimulées dans l’environnement des banlieues à la Peyton Place se situaient, précisément, en ces années heureuses et confortables de l’après-guerre.<br /><br />Car précisément, ces corps n’étaient pas mort et pour autant que nous voulions en ignorer les fonctions, les mécanismes demeuraient. L’excitation sexuelle, qui animait déjà les motivations secrètes du pénis comme de la vulve et du clitoris, n’échappaient pas pour autant aux mécanismes physiologiques des enfants et des adolescents. L’ignorance feinte des adultes et des éducateurs finissait, comme pour ces curés athées, par devenir des évidences d’auto-suggestion. À force de mentir, on finit toujours par croire à ses propres mensonges. À force de persuader John & Mary qu’ils n’étaient que des assemblages de membres articulés et fixés, les adultes et éducateurs se prenaient à leurs propres jeux et s’étonnaient, jusqu’à l’horreur, le jour où ils découvraient deux petits frères en train de s’initier mutuellement à la masturbation ou leur petite sœur crier à mort le jour de sa première menstruation. Non, cela ne pouvait pas leur arriver! Du moins pas si tôt! Bien des épisodes de <span style="font-style: italic;">Peyton Place</span> sont construits autour de la découverte de la sexualité, et pas seulement chez les adolescents.<br /><br /><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgC5sf3OmAP-BgQY3PHQFIlzBMcKRw5biFl52P9ZNlZ0yhHOpW8k1Xa9mWUVurFTK821-5Rhv2L2rP4mNMGxsoUXY3rUHF5YqRyUqgkrFHVT-iJncIMCjhYjRkdHCKg0yawOrWc3O8SDQY/s1600/fun%25C3%25A9raille.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 234px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgC5sf3OmAP-BgQY3PHQFIlzBMcKRw5biFl52P9ZNlZ0yhHOpW8k1Xa9mWUVurFTK821-5Rhv2L2rP4mNMGxsoUXY3rUHF5YqRyUqgkrFHVT-iJncIMCjhYjRkdHCKg0yawOrWc3O8SDQY/s320/fun%25C3%25A9raille.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619265998172888178" border="0" /></a>Si ces corps ne sont pas vivants, ils ne sont pas morts non plus. La mort, avons-nous dit, est absente des tableaux de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span>. Nous ne verrons jamais <span style="font-style: italic;">John & Mary going to the funeral center</span>. La mort, c'était pour les livres de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgC5sf3OmAP-BgQY3PHQFIlzBMcKRw5biFl52P9ZNlZ0yhHOpW8k1Xa9mWUVurFTK821-5Rhv2L2rP4mNMGxsoUXY3rUHF5YqRyUqgkrFHVT-iJncIMCjhYjRkdHCKg0yawOrWc3O8SDQY/s1600/fun%25C3%25A9raille.jpg">lecture française</a> et d'histoire. Les cercueils, les cadavres, les accidents d’automobiles ou de vélos se voyaient exclus des banlieues heureuses des <span style="font-style: italic;">Fifties</span>. James Dean, myope dissimulant ses lunettes comme sa sexualité marginale, icône des jeunes filles hystériques ou romantiques; sage garçon retapé en <span style="font-style: italic;">rebell without a cause</span>, où l'on voit dans ce film un <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiLhHkJyT35XuI8pVn2NVQdIi-HcfzCKDzHytrieBLkaC1uvSoE7E6ODBIS7SRs7w5Y3TK7hcwCI65ZuXxBo7a4mFw3EIsh9-iLR4QmcW_2IqjTCnTE3hvxuVMY4Nv5iJNBwWr3531-GJ8/s1600/rebel%252Bwithout%252Bcause.JPG">père portant le <img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 200px; height: 136px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiLhHkJyT35XuI8pVn2NVQdIi-HcfzCKDzHytrieBLkaC1uvSoE7E6ODBIS7SRs7w5Y3TK7hcwCI65ZuXxBo7a4mFw3EIsh9-iLR4QmcW_2IqjTCnTE3hvxuVMY4Nv5iJNBwWr3531-GJ8/s320/rebel%252Bwithout%252Bcause.JPG" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619266224860979410" border="0" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiLhHkJyT35XuI8pVn2NVQdIi-HcfzCKDzHytrieBLkaC1uvSoE7E6ODBIS7SRs7w5Y3TK7hcwCI65ZuXxBo7a4mFw3EIsh9-iLR4QmcW_2IqjTCnTE3hvxuVMY4Nv5iJNBwWr3531-GJ8/s1600/rebel%252Bwithout%252Bcause.JPG">tablier</a> et la mère totalement hystérique, se suicide (c’est maintenant certain) avec son bolide. Ça, aucun tableau ne pouvait inviter à penser une telle série de non-sens par rapport à la vie heureuse de John & Mary. Que de catastrophes en clairs-obscurs!<br /><br />Avec les années, les concepteurs de <span style="font-weight: bold;">conversation anglaise</span> ont retouché le dessein, le rendant plus hyperréaliste, à la mode de l’art issue de la copie plus-que-parfaite de la photographie. Mais la composition du tableau est restée la même. Je n’ai pu, pour le moment, mettre la main sur la composition retouchée du tableau. Le fait est que la vie n’est pas la vie et la mort ne peut en être l’issue,. Alors de quel genre de vie vivaient les parents et les enfants, les enseignants et leurs élèves devant l’étude des tableaux de John & Mary? Au moment où la société de consommation et la société de communications nord-américaine s’affirmaient comme le modèle universel, du moins occidental grâce à la <span style="font-style: italic;">pax americana</span>, il est possible de concevoir <span style="font-style: italic;">Body Parts</span> comme des morts-vivants ou des vivants-automates. Le monde de John & Mary n’est pas celui des goules ou des vampires. Pourtant, le monde des <span style="font-style: italic;">Fifties</span> est celui où le cinéma d’horreur explose à travers des films de série B jouant dans les salles de cinéma de provinces avant d'être recyclés pour la télévision. Le célèbre film <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEheDqSNRFuUQjufe76vrRkRNREZMU4zk5wrRyvB5tpk47-PWRjGTrkjeUU7dToNaLcp1NMWCc7seCkHRr0h-tlfGjGLfkLYgq2oCcMqrRBr8kB2ClpYgh6CYY_a3o5oEKH3YBUHoLFOH3g/s1600/invasion4.jpg"><span style="font-style: italic;">The invasion of the body </span><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 320px; height: 257px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEheDqSNRFuUQjufe76vrRkRNREZMU4zk5wrRyvB5tpk47-PWRjGTrkjeUU7dToNaLcp1NMWCc7seCkHRr0h-tlfGjGLfkLYgq2oCcMqrRBr8kB2ClpYgh6CYY_a3o5oEKH3YBUHoLFOH3g/s320/invasion4.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619270398876557154" border="0" /></a><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEheDqSNRFuUQjufe76vrRkRNREZMU4zk5wrRyvB5tpk47-PWRjGTrkjeUU7dToNaLcp1NMWCc7seCkHRr0h-tlfGjGLfkLYgq2oCcMqrRBr8kB2ClpYgh6CYY_a3o5oEKH3YBUHoLFOH3g/s1600/invasion4.jpg"><span style="font-style: italic;">snatchers</span></a> date de 1956. Réalisé par Don Siegel, la trame en est toute simple. Dans une petite ville des États-Unis, un médecin découvre peu à peu que les habitants sont remplacés par des êtres étrangers qui sont, dirait-on aujourd’hui leurs clones, et dont les comportements ont évacué toute émotion. La petite ville, c’est Peyton Place, on l’aura reconnue, et les clones vidés d’émotion sont des Hommes-machines qui fonctionnent selon la mécanique automatique. Évidemment l’horreur joue sur le contraste entre la petite ville sécuritaire, confortable et petite-bourgeoise et la stupeur de reconnaître derrière une figure hier sympathique, aujourd’hui un être dépossédé de tous signes émotionnels. Ici se scinde l'inquiétante rupture entre le vivant et l'émotion (ou du moins son expression). L'<span style="font-style: italic;">alien</span> se repaît de ceux dont il prend la forme. C’est le prix pour avoir ignoré la digestion et l’excrétion. Plus tard, Stephen King inversera la trame et fera de <span style="font-style: italic;">Christine</span>, la voiture des années 50 dotée de sentiments, mais de sentiments négatifs de jalousie et de vengeance meurtrière, l'<span>antithèse</span> des <span style="font-style: italic;">body snatchers</span>.<br /><br />On constate donc que le mort-vivant n’est rien de plus qu’un automate mû par des forces qui sont tout sauf des forces émotionnelles. Que sont ces forces? Des forces venues d’un autre monde? Des forces issues de la décomposition du vivant <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgXOS0KobbG_dFNSBR-KpoQpyq334eO9thMbIYGNJIV_s4agxWgTXnuCiXzjfDC6dMPAq3XjEJ1Dm-O8zP9pgBBKGu2T9h5Q-5q7RWQttTBkiTBserKQAH9LSTsZd2rPpKB6vyRSAilZZg/s1600/235px-Jacques_de_Vaucanson_2.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 235px; height: 275px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgXOS0KobbG_dFNSBR-KpoQpyq334eO9thMbIYGNJIV_s4agxWgTXnuCiXzjfDC6dMPAq3XjEJ1Dm-O8zP9pgBBKGu2T9h5Q-5q7RWQttTBkiTBserKQAH9LSTsZd2rPpKB6vyRSAilZZg/s320/235px-Jacques_de_Vaucanson_2.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619272075002834178" border="0" /></a>(d’où l’idée de morts-vivants)? Des forces finalement mécaniques, automatiques, à l'image des lessiveuses-sécheuses et des cuisinières alimentées à l'électricité? Au temps où La Mettrie rédigeait son essai sur l’<span style="font-style: italic;">Homme-machine</span> et où Newcomen érigeait sa pompe à vapeur qui fonctionnait sur le principe simple du levier, <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgXOS0KobbG_dFNSBR-KpoQpyq334eO9thMbIYGNJIV_s4agxWgTXnuCiXzjfDC6dMPAq3XjEJ1Dm-O8zP9pgBBKGu2T9h5Q-5q7RWQttTBkiTBserKQAH9LSTsZd2rPpKB6vyRSAilZZg/s1600/235px-Jacques_de_Vaucanson_2.jpg">Jacques de Vaucanson</a> (1709-1782) épatait la galerie des nobles d’Europe avec ses automates auxquels il donnait des formes animales. Son célèbre <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfykVZfJf5KiYVZ7utlOqWguDd04XRY7QgPq0XmaVE7z6Wx7O0EiRgj3-OQ8HDO0tAMOuaUiYi6stdUPyu5Z7C7BpEma42bMQ1qS0MhKIhp9bOYRsTFirbXHqv0b4WAkW3qYruLYNx6fo/s1600/220px-Vaucanson_duck1.jpg">canard</a>, qui picorait et qui faisait des boulettes de caca, nous apparaîtrait beaucoup plus vivant que ne l’étaient John & Mary soumettant <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfykVZfJf5KiYVZ7utlOqWguDd04XRY7QgPq0XmaVE7z6Wx7O0EiRgj3-OQ8HDO0tAMOuaUiYi6stdUPyu5Z7C7BpEma42bMQ1qS0MhKIhp9bOYRsTFirbXHqv0b4WAkW3qYruLYNx6fo/s1600/220px-Vaucanson_duck1.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 220px; height: 295px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhfykVZfJf5KiYVZ7utlOqWguDd04XRY7QgPq0XmaVE7z6Wx7O0EiRgj3-OQ8HDO0tAMOuaUiYi6stdUPyu5Z7C7BpEma42bMQ1qS0MhKIhp9bOYRsTFirbXHqv0b4WAkW3qYruLYNx6fo/s320/220px-Vaucanson_duck1.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619272448673703394" border="0" /></a>leurs <span style="font-style: italic;">Body Parts</span> à des exercices physiques. L’automate de Vaucanson était un appareil peut-être compliqué, mais au mécanisme relativement simple comparé à nos modernes inventions électroniques. Le joueur d’échec de Maelzel, dénoncé dans un conte de Poe, n’était qu’un simulacre sous lequel se dissimulait un nain, mais aujourd’hui, les ordinateurs perfectionnés battent les humains aux échecs. La mémorisation d’une quantité de combinaisons leur permet de se mesurer aux capacités cérébrales. Dans le fond, l'ingéniosité du joueur d’échec habile et prévoyant quatre à cinq coups à l’avance est défiée par la capacité même d'une mécanique capable d’acquérir, si elle est dotée d’une «intelligence artificielle», une «mémoire vive» dans laquelle accumuler les données qu’on lui enregistrera. Lorsque les ordinateurs se fabriqueront entre eux, il n’y aura nul besoin d’y faire intervenir le moindre ingénieur humain.<br /><br />La «mémoire vive» contraste encore plus avec les «corps dévitalisés», fantasmatiques, du tableau <span style="font-style: italic;">Names of Parts of the Body</span>. C’aurait pu être <span style="font-style: italic;">Names of Parts of the car,</span> ou <span style="font-style: italic;">the automobile</span>, ou <span style="font-style: italic;">the train…</span> La dualité du montré et du caché, de l’efficient et de l’inquiétant, tout en permettant d’acquérir le vocabulaire anglais correspondant aux choses, comme un virus invisible à l’œil nu, transmettait une ontologie humaine <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgIDb1AwbLd349BAUQYDyswmaKjWcoFA5g-GqYafw8ndhECPZv1Vdgtv4SRlW3QD0ZBtaX3ZPRS0mhG2aav-b_XzBfpFAgyi7uK_MY231z8J7ktAa7u5zM7E2d3QcdOEAzAN0ZkPFL0sw8/s1600/De-sade-Juliette-mise-en-scene-MV-photo-de-scene.jpg"><img style="float: right; margin: 0pt 0pt 10px 10px; cursor: pointer; width: 228px; height: 320px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgIDb1AwbLd349BAUQYDyswmaKjWcoFA5g-GqYafw8ndhECPZv1Vdgtv4SRlW3QD0ZBtaX3ZPRS0mhG2aav-b_XzBfpFAgyi7uK_MY231z8J7ktAa7u5zM7E2d3QcdOEAzAN0ZkPFL0sw8/s320/De-sade-Juliette-mise-en-scene-MV-photo-de-scene.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5619276074975360114" border="0" /></a>et sociale qui hypothéquait l’esprit de l’enfance. Entre la réalité honteuse et dissimulée, ignorée, et la poétique d’un corps déconstruit, démembré, fétichisé, parcellarisé, désarticulé et désassemblé, une subversion sociale s’infiltrait dans le rapport de l’enfant au corps, au sien et à celui des autres. Aux futurs dominants, il apprenait à considérer le corps comme un outil ou un assemblage de pièces organisées (et non organiques), utilitaires et fonctionnant entre la performance et la panne; à la masse des exécutants, les futurs dominés, il enseignait qu’ils n’étaient rien de plus que ce qu’ils produiraient, ce qu’ils effectueraient, ce qu’ils collaboreraient à accomplir avec ces membres parcellarisés et pour lesquels ils recevraient une compensation financière que l’on appelle salaire et une participation minimale à la société-machine, dans un mécanisme démocratique qui rend les institutions fonctionnelles mais mécanisées par le prisme de la bureaucratie et des services publiques. En fait, c’était le renouvellement du troc entre <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgIDb1AwbLd349BAUQYDyswmaKjWcoFA5g-GqYafw8ndhECPZv1Vdgtv4SRlW3QD0ZBtaX3ZPRS0mhG2aav-b_XzBfpFAgyi7uK_MY231z8J7ktAa7u5zM7E2d3QcdOEAzAN0ZkPFL0sw8/s1600/De-sade-Juliette-mise-en-scene-MV-photo-de-scene.jpg">Juliette</a> et Noirceuil: «Prêtez-moi la partie de votre corps qui peut me satisfaire un instant et jouissez, si cela vous plaît, de celle du mien qui peut vous être agréable». Une bouche pour un orteil; un travail pour un salaire; le tout sans la moindre émotion ni le plus petit soupçon de sentiment.<br /><br /><div style="text-align: right;">Montréal<br />16 juin 2011<br /></div></div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5234478693415454888.post-5638341211895886272011-06-09T21:30:00.000-07:002012-07-14T11:08:42.146-07:00John and Mary shooted by creazy cops<div dir="ltr" style="text-align: left;" trbidi="on">
<div style="text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgogZgFeJk1rC1Eu8Xojfopb7ZiVghlrI_lsIfu-D4laCwNqF8648AqlsVyZvdrPMJTedBfd39M2tvHyqxzZoDm3xGqr05e6cWNLukTQbGxG4FJhfikOlyLRGuq2iTqvpCwIcezJHipzhA/s1600/tumblr_ksltppIkzZ1qa70eyo1_500.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616649332600849202" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgogZgFeJk1rC1Eu8Xojfopb7ZiVghlrI_lsIfu-D4laCwNqF8648AqlsVyZvdrPMJTedBfd39M2tvHyqxzZoDm3xGqr05e6cWNLukTQbGxG4FJhfikOlyLRGuq2iTqvpCwIcezJHipzhA/s400/tumblr_ksltppIkzZ1qa70eyo1_500.jpg" style="cursor: pointer; display: block; height: 313px; margin: 0px auto 10px; text-align: center; width: 400px;" /></a>Policiers et cadavres de Bonnie & Clyde</div>
<br />
<div style="text-align: center;">
<span style="font-weight: bold;"><br />
JOHN AND MARY SHOOTED BY CREAZY COPS</span><br />
<br />
<div style="text-align: justify;">
Qu'est-il arrivé à John & Mary depuis que nous les avons quittés à la dernière des vingt-quatre images du manuel <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi3CxcwNQcMDr-Pagt_dpRn0pHME_UP_ZKLYpOHxDRrmjV7Vr4v0tk32niBBEbD1OnOByIqPsgzBP9wBpgcYg-j7yp4NM8LH3AB1MrEFbMzW-06r2Wpwc5xwiVZHEnry9IUPjK7AGX0mtI/s1600/Conversation+anglaise.tif"><span style="font-weight: bold;"><span style="font-style: italic;">Conversation anglaise</span></span></a>? Vingt-quatre images chrono? Vingt-quatre <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi3CxcwNQcMDr-Pagt_dpRn0pHME_UP_ZKLYpOHxDRrmjV7Vr4v0tk32niBBEbD1OnOByIqPsgzBP9wBpgcYg-j7yp4NM8LH3AB1MrEFbMzW-06r2Wpwc5xwiVZHEnry9IUPjK7AGX0mtI/s1600/Conversation+anglaise.tif"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5618670303745168402" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi3CxcwNQcMDr-Pagt_dpRn0pHME_UP_ZKLYpOHxDRrmjV7Vr4v0tk32niBBEbD1OnOByIqPsgzBP9wBpgcYg-j7yp4NM8LH3AB1MrEFbMzW-06r2Wpwc5xwiVZHEnry9IUPjK7AGX0mtI/s320/Conversation+anglaise.tif" style="cursor: pointer; float: left; height: 320px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 232px;" /></a>images secondes: c'est le rythme de la séquence filmique. En vingt-quatre images, une seconde d'une vie est enregistrée. Les auteurs et illustrateurs du manuel nous donnaient un instantané de l'enfance. Vingt-quatre images qui s'achevaient <span style="font-style: italic;">on a golden pond</span>, au moment des vacances d'été de la famille de John & Mary. Puis après, plus rien. Le manuel rédigé par Albert Filteau et Charles Villeneuve pour enseigner les langues secondes aux petits canadiens et illustré par une équipe (Roy Dyer, Charles David, Joseph Lebrun, Julien Délorme et Rhéal Paul) était un modèle de représentation de la vie nord-américaine aux lendemains de la guerre, au moment où la société de consommation - l'<span style="font-style: italic;">American Way of Life </span>- était sur sa lancée, prête à réaliser l'<span style="font-style: italic;">American Dream </span>d'une société de l'abondance qui visait désormais rien de moins qu'à conquérir le monde.<br />
<br />
Le monde de John & Mary était donc celui de l'immédiat après-guerre 39-45 en Amérique du Nord, la décennie des <span style="font-style: italic;">Fifties</span>. Cette Amérique vivait encore dans les décors que le cinéma avait dessinés à travers ces films du temps de guerre, ces <i>feel good movies </i>dont <i>Et la vie continue</i> de William Saroyan qui se situait à Ithaca, une de ces villes natales «des rêves de la petite bourgeoisie américaine: composée de spacieuses maisons blanches à bardeaux, avec de vastes vérandas, des rues d’un blanc éclatant, et des boutiques aux vitrines accueillantes, une place pittoresque où l’on peut jouer au lancer des fers à cheval par une paisible soirée d’été, une bibliothèque de la taille d’une petite cathédrale, un lycée archétypal avec des professeurs corpulents qui dédiaient toute leur existence à inculquer la vertu. Ses citoyens étaient industrieux, religieux, bien propres et honnêtes. Même s’ils étaient issus de différentes classes, d’origines ethniques diverses, ils étaient liés par un sens plus large, presque spirituel de la famille…» (1) Ce monde idéalisé d'Ithaca de Saroyan allait devenir celui du roman de Grace Metalious qui raconte la vie privée de trois femmes dans une petite ville de la Nouvelle-Angleterre, au temps de <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj8fhOoXbeLVKVLYr15h_ocqlgTVjO0W3cTI4DLRVfCpfI98dFtjbAZOKST3GHiF6sLky-TrlZD9VcQntNrvt9odbbGEmnRIkkB8uvzKMZp89i6DgCsO2iIHpnoYm71d9ehfjHtnYquZTY/s1600/PeytonPlace.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616577257095371314" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj8fhOoXbeLVKVLYr15h_ocqlgTVjO0W3cTI4DLRVfCpfI98dFtjbAZOKST3GHiF6sLky-TrlZD9VcQntNrvt9odbbGEmnRIkkB8uvzKMZp89i6DgCsO2iIHpnoYm71d9ehfjHtnYquZTY/s320/PeytonPlace.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 320px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 179px;" /></a>Pearl Harbor: <span style="font-style: italic;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj8fhOoXbeLVKVLYr15h_ocqlgTVjO0W3cTI4DLRVfCpfI98dFtjbAZOKST3GHiF6sLky-TrlZD9VcQntNrvt9odbbGEmnRIkkB8uvzKMZp89i6DgCsO2iIHpnoYm71d9ehfjHtnYquZTY/s1600/PeytonPlace.jpg">Peyton Place</a>.</span> Publié en 1956, le roman fut ce qu'on appelle un <span style="font-style: italic;">best-seller, </span>vendu en plus de 60,000 exemplaires dans les dix premiers jours, et resta à la tête du palmarès du <span style="font-style: italic;">New-York Times</span> durant 59 semaines! Il fut rapidement adapté pour le cinéma en 1957 et en série télé de 1964 à 1969. <span style="font-style: italic;">Peyton Place</span> est un composite de plusieurs petites villes modèles américaines et l'époux de Grace, George, suggéra d'abord le nom de Potter Place, petit site de la banlieue d'Andover au New Hampshire. Ils consultèrent un atlas des États-Unis et trouvèrent un bled du nom de Payton au Texas. Échangeant un «a» pour un «e», l'affaire était ketchup. Sous les apparences de la petite ville morale et patriotique, l'intrigue consistait à y semer dans les placards des heureux résidents des squelettes plutôt vilains.<br />
<br />
En quoi consistaient ces squelettes? Rien que de la banalité si on mesure ces intrigues à ceux de nos modernes romans de mœurs. On y retrouvait, ais-je dit, comme par hasard, trois femmes, seules et refoulées. Constance MacKenzie, sa fille illégitime Allison et son employée Selena Cross, une fille provenant «de l'autre bord des <span style="font-style: italic;">tracks</span>», car Peyton Place, comme toute les petites villes américaines, voyait son côté huppé séparé de son côté pauvre et sordide par la voie de chemin de fer. Là, les belles maisons avec véranda, ornées de belles pelouses avec de larges avenues séparées des trottoirs par une bande de verdure et d'arbres, respiraient le bonheur tranquille de la vie américaine. La paix urbaine. Ici, les taudis, les maisons de bois laides, sordides, avec des rues étroites et mal entretenues et aux trottoirs lézardés. L'objectif des auteurs consistait à montrer comment ces femmes finissaient par faire le nettoyage de leur placard et à confronter leurs squelettes afin d'assumer leur propre identité en tant que femmes ayant des attentes sexuelles et la manière de les vivre dans ce milieu supposément ordonné et harmonieux. Dans une Amérique puritaine, mettre à l'évidence les problèmes sexuels des femmes, c'était précéder <span style="font-style: italic;">Playboy </span>dans sa vanité creuse d'avoir été le porte-étendard de la révolution sexuelle aux États-Unis.<br />
<br />
Évidemment, <span style="font-style: italic;">Peyton Place</span>, c'était l'hypocrisie, les inégalités sociales, les privilèges de classes, bref la matrice sociale propre à la bourgeoisie (grande et petite) d'où naissent les intrigues les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjqtx-FZznQPxgjb7uaHtqbHA30jOIzVGge5ACxmZAMU4IWNZd9-HO5eVZ6t5KNEgGw-H4TQkRK5k79SBI9XBZQrK4LhziMEmLL1xlWJyzlJB_evTDyBYjzQydt_ZY1OELZ_rUYMcDvHbM/s1600/526869.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616638491713445650" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjqtx-FZznQPxgjb7uaHtqbHA30jOIzVGge5ACxmZAMU4IWNZd9-HO5eVZ6t5KNEgGw-H4TQkRK5k79SBI9XBZQrK4LhziMEmLL1xlWJyzlJB_evTDyBYjzQydt_ZY1OELZ_rUYMcDvHbM/s320/526869.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 320px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 198px;" /></a>plus sordides: inceste, avortement, adultère, le désir sexuel qui se transforme en luxure et en meurtre. Le succès du roman, puis des deux films qui en furent tirés, et enfin des séries télé qui prirent la relève, fit de «Peyton Place» le synonyme d'une communauté dont les habitants dissimulaient tous de sordides secrets. Inutile de dire que chaque communauté américaine pouvait être qualifiée de <span style="font-style: italic;">Peyton Place </span>par une voisine jalouse, qui, elle-même couvait des fièvres tout aussi terribles. Il n'y eut jamais de concours à travers les États-Unis pour savoir qui sera la <span style="font-style: italic;">Peyton Place </span>de l'année tant, faut-il penser, que chaque petite communauté américaine pouvait également se reconnaître dans les épisodes de <span style="font-style: italic;">Peyton Place.</span><br />
<br />
Soixante-dix ans plus tard, Peyton Place est devenue Fairview, l'endroit où se déroulent les intrigues des <span style="font-style: italic;">Desperate Housewifes, </span>les <span style="font-style: italic;">Beautés désespérées. </span>De trois nous sommes passées à quatre femmes dont la vie mouvementée contredit le calme paisible apparent de Fairview. On y retrouve, comme dans le roman des années cinquante, le bovarysme des banlieusardes, mais Susan Mayer, Lynette Scavo, Bree Van De Kamp et Gabrielle Solis n'ont pas les mêmes types de frustrations que celles des femmes de Peyton Place. De plus, leur squelette parle: il (ou plutôt elle) se nomme Mary Alice Young et s'est suicidée et, d'outre-tombe, commente les mésaventures et sert de narratrice à chaque épisode de la série. On le voit, les <span style="font-style: italic;">Desperate Housewifes</span> ont un humour qu'on ne retrouvait pas dans <span style="font-style: italic;">Peyton Place</span>. Le milieu social, toutefois, n'a guère changé. Il s'agit toujours de femmes appartenant à la classe moyenne, vivant dans des banlieues proprettes de grandes villes. Les <span style="font-style: italic;">tracks </span>ont disparu et l'espace s'est réduit à une seule rue, Wisteria Lane, autrement dit <span style="font-style: italic;">Hysteria Lane.<br />
<br />
</span>La nature des intrigues n'a, elle non plus, guère changée. Adultère, homosexualité, nymphomanie, échangisme, agence d'escortes, meurtre et esprit criminel, seul le ton a monté dans le sordide, proportionnellement à sa baisse <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgtqLix-EdZ92z_XZnsSYysleR87Vuqg1BO_keuPwO7HjQfFdPmh4-yDcUMyBojDdhbn-Bu7pXHccrBNAzT5KjwY18z4f7d2Dj3LXoc_2ugJbpn3uzR8Yht2TlfRQcEfMCI-JhdmTxfuTw/s1600/desperate-housewives-1.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616647039820727410" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgtqLix-EdZ92z_XZnsSYysleR87Vuqg1BO_keuPwO7HjQfFdPmh4-yDcUMyBojDdhbn-Bu7pXHccrBNAzT5KjwY18z4f7d2Dj3LXoc_2ugJbpn3uzR8Yht2TlfRQcEfMCI-JhdmTxfuTw/s200/desperate-housewives-1.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 160px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 200px;" /></a>au niveau de la critique sociale.<span style="font-style: italic;"> </span>D'où la nécessité d'ajouter l'humour et le surnaturel à une lourdeur de l'existence qui rendrait <span style="font-style: italic;">Peyton Place</span> insupportable aux banlieusardes des <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhW5B2Wt_3eygU66E0C8osmsZeivKpvC1JUpASzaB0ILkzLTYux3W0dde-rIpgatHm_x7zl7nKHI-Z_rkHaRVRJ3ycv573hBLSkwyaYiNQwavJQvlqCr6mPKFBX3s9BzCxHjLYvPjD1nns/s1600/desperate-housewives-1.jpg"><span style="font-style: italic;">Desperate Housewifes</span></a>. John & Mary auraient bien quitté Peyton Place en 1949 s'ils avaient été conscients que Papa et Maman cachaient de vilains cadavres dans le placard de leur chambre (qu'on ne vit jamais sur aucun des vingt-quatre tableaux de la série), tant la chambre des parents demeure cet endroit sombre où se sont commis quelques crimes dont les résultats se sont appelés, précisément, John et Mary! En 2004, John & Mary, non seulement voudraient rester à Fairview mais échangeraient volontiers leurs secrets de polichinelle avec leurs amis de Wisteria Lane. Les secrets ne sont plus de mises entre amis. Voilà peut-être toute la distance qui sépare le <span style="font-style: italic;">Volksgeist </span>de 2004 de celui de 1954. Hormis ce point, il faut convenir que l'hystérie féminine, depuis les temps où les Parisiens se rendaient à la Salpêtrière observée les «fous» jusqu'aux séances du docteur Charcot, a toujours fait vendre beaucoup de ticket dans les salles de spectacles…<br />
<br />
Malheureusement, il en a été autrement.<br />
<br />
Car le syndrôme <span style="font-style: italic;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgl_1epUwoZ-wCFCONFgUJ6IcuWjiDVbepmqhlcYaQ4eabnsyEKp8Ud_nH6cafY-ikFLImhjLV78DVAfVBodB6uLlmP4z4GzdxTaSd1rar5-85Za550uuwHy0FsPHrQmJ06vBPKwOGA4vU/s1600/peyton-place-complete-and-movies-aae36.jpg">Peyton Place</a> </span>(ou <span style="font-style: italic;">Wisteria Lane</span>) est un <span style="font-style: italic;">John & Mary going to school </span>pour adultes avertis, 18 ans et +. Les squelettes ne restent jamais dans les placards bien longtemps, car si nous les conservons dans un placard, c'est précisément parce qu'un jour, nous voudrons bien les ressortir. Cette métaphore spatiale de l'inconscient et de ses aléas (le refoulement, le défoulement, les perversions et les névroses) est propre à la culture nord-américaine. Ses romans et ses nouvelles, son théâtre et son cinéma ne cessent de nous inviter à assister à <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhv4GA-PhBC3uYftfFE6hyphenhyphenK8O9e3tqe-om08CGnW-7f7jUWg2Ku7FQP9M2rB8VWasy5L9VfMuTZG1_QMA7iiERjM3vcJxqBYinuLQaARSVsLPvMhftnxoQsuKb9JHnN2sk8uXOuEiYf2-g/s1600/peyton-place-complete-and-movies-aae36.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616647350606994290" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhv4GA-PhBC3uYftfFE6hyphenhyphenK8O9e3tqe-om08CGnW-7f7jUWg2Ku7FQP9M2rB8VWasy5L9VfMuTZG1_QMA7iiERjM3vcJxqBYinuLQaARSVsLPvMhftnxoQsuKb9JHnN2sk8uXOuEiYf2-g/s320/peyton-place-complete-and-movies-aae36.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 240px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 320px;" /></a>l'ouverture d'une porte qui donne sur un placard d'où sortiront fœtus avortés, handicapés physiques et mentaux suites à une tentative d'avortement manquée, pédérastes incestueux, petite bonne violée par <span style="font-style: italic;">Father knows best </span>et autres choses pas très jolies mais ô combien juteuses! Nous lisons ces romans et mordons à ces films précisément parce que nous voulons savoir ce qu'il y a dans le placard, comment ou par quels mécanismes ces choses sortiront-elles du refoulé et quel sera l'issu de la confrontation du caché et du montré: divorce, suicide, réconciliation? Tel était le véritable univers de <span style="font-style: italic;">John & Mary going to school. </span>Nous, en tant qu'enfants, nous l'ignorions et lorsque l'adolescence ou la vie adulte nous ont restitué les secrets de la maison, nous avons, à la fois, perdu notre âme d'enfance et nos rêves d'adolescents. Voilà pourquoi, dans les années soixante, John & Mary devinrent <span style="font-style: italic;">hippies, </span>entre le mezcal et les <span style="font-style: italic;">magic mushrooms</span>; dans les années soixante-dix en clinique de désintoxication, dans les années quatre-vingt en <span style="font-style: italic;">addictes</span> d'informatique, mariés avec une famille; dans les années quatre-vingt-dix divorcés, en dépression, cocaïnomane pour l'une, héroïnomane pour l'autre, les enfants en famille d'accueil et sur ritalin. Comment une si bonne éducation a-t-elle pu en venir à un tel aboutissement de détresse morale et de désertion sociale?<br />
<br />
Sans doute Grace Metalious, écrivant la vie de John & Mary tracerait-elle la descente aux enfers puis la rédemption. Pour une scénariste catholique, ça <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjgIH-nRGqJ9FwQWeeYCmDYtRcXLBcsVIrfcT2UXuGT7losiEsdVp7rc_EJ_o1mDfLcNWSXet4ia024ULIx2-4EnWQYk-sSpCESiT7z66OxjKmGhRScAM-j_PiXVckiMA1rdw_8dlqzKtI/s1600/bonnie-and-clyde.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616644234856893762" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjgIH-nRGqJ9FwQWeeYCmDYtRcXLBcsVIrfcT2UXuGT7losiEsdVp7rc_EJ_o1mDfLcNWSXet4ia024ULIx2-4EnWQYk-sSpCESiT7z66OxjKmGhRScAM-j_PiXVckiMA1rdw_8dlqzKtI/s320/bonnie-and-clyde.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 320px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 247px;" /></a>donnera le film <span style="font-style: italic;">Gerry, </span>mais la rédemption par la souffrance n'est pas un thème de l'Amérique WASP. Ici le vieux calvinisme fataliste de la prédestination joue sans aucun ressort déclencheur. Tout était inscrit déjà dans le (ou plutôt) les tableaux. John & Mary, c'est plutôt <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjgIH-nRGqJ9FwQWeeYCmDYtRcXLBcsVIrfcT2UXuGT7losiEsdVp7rc_EJ_o1mDfLcNWSXet4ia024ULIx2-4EnWQYk-sSpCESiT7z66OxjKmGhRScAM-j_PiXVckiMA1rdw_8dlqzKtI/s1600/bonnie-and-clyde.jpg">Bonnie & Clyde</a>, avec ou sans inceste. La confrontation de l'impuissance masculine et de la nymphomanie féminine (<span style="font-style: italic;">the dog and the cat</span>, les allégories animalières sont déjà dans les tableaux pour nous prévenir), conduiront aux crimes mineurs, à la débauche, au viol, enfin au meurtre, et la justice vengeresse leur rappellera qu'on ne niaisait pas avec le bien et le mal à Peyton Place. L'univers idyllique des tableaux de John & Mary possède en soi l'envers de l'éden qui y est outrageusement étalé.<br />
<br />
Faisons un rapide tour d'horizon avant de nous arrêter sur chacun d'eux: tout commence par les parties du corps. John & Mary font leurs exercices physiques, comme s'ils étaient déjà des <span style="font-style: italic;">addictes</span> de la bonne santé de Wisteria Lane. Autour d'eux gravitent, comme dans un cauchemar à la Dali/Hitchcock, des morceaux d'anatomie dont certains ont été judicieusement écartés. L'homme-machine de La Mettrie nous donne donc une première leçon. Dans le second tableau, nous voyons John faire sa prière et Mary sortir de la salle de bain! Comment la porte de la salle de bain que doit traverser une honnête jeune fille de Peyton Place passe-t-elle directement dans la chambre d'un garçon? Que d'occasions offertes… Dans le troisième tableau, Maman brosse le chapeau de John qui cire ses souliers pendant que son petit chien est …au pied de Maman. Les vêtements de John sont déjà ceux de son père, pour ne pas dire que les vêtements de son père sont déjà ceux de John. Vous vous souvenez de la parabole: les raisins mangés par les pères verront leurs noyaux agacer les dents des enfants? Le tableau suivant montre Mary reprisant sa chaussette alors que Maman (il n'est pas question que ce soit Papa) range le …placard! Même leçon!<br />
<br />
Puis, John & Mary sortent de la maison infernale. Les voici à l'Église (catholique ou anglicane) communiant pieusement avec Papa et Maman. Un autre beau dimanche plate s'annonce. Puis, c'est <span style="font-style: italic;">John and Mary going to school, </span>qui est une leçon du cadre urbain. Ensuite, il sont <span style="font-style: italic;">at school, </span>où John trace un <span style="font-style: italic;">O Canada</span> vibrant au tableau noir. Le patriotisme est une manière de s'incruster dans l'esprit des enfants avec la carte du Canada et le globe terrestre sur le pupitre de l'institutrice. Puis, il faut bien s'amuser un peu, c'est l'édification du bonhomme de neige, avant de rentrer souper où Maman présente la dinde familiale pendant que la famille rigole en mangeant leur soupe. Le bonheur, en conserve, est instantané. Puis, John & Mary font leurs devoirs avant d'aller passer la soirée en famille, au salon. Mary joue du piano (elle a du talent) tandis que John joue avec son chien (attention à la masturbation!). Enfin, la belle saison est revenue et Papa et Maman aménagent le jardin tandis que John passe la tondeuse et Mary arrose on ne sait trop quoi. Fin de la première saison. <span style="font-style: italic;">To be continue.</span><br />
<br />
Et il faut bien vieillir. Maman montre à Mary comment devenir une vraie petite épouse en faisant la cuisine. Après tout, ne prend-on pas son homme par l'estomac? Maman a sûrement lu <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidTridjnNrbpg1flBEXTJOhAALrZto24qmMbCuxRatGLu2OMDTkNHoVRc39erqa5tOh03-WmO2IP2SQBZibuVh7LT26V0ARWLgrtn7B_QodXQ1yRrgF__ZSOGqqo2oipF6ZoyOgYX1lQE/s1600/3647231601_21ae5e2bc3_s.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616731734590891346" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidTridjnNrbpg1flBEXTJOhAALrZto24qmMbCuxRatGLu2OMDTkNHoVRc39erqa5tOh03-WmO2IP2SQBZibuVh7LT26V0ARWLgrtn7B_QodXQ1yRrgF__ZSOGqqo2oipF6ZoyOgYX1lQE/s400/3647231601_21ae5e2bc3_s.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 112px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 112px;" /></a>l'<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEidTridjnNrbpg1flBEXTJOhAALrZto24qmMbCuxRatGLu2OMDTkNHoVRc39erqa5tOh03-WmO2IP2SQBZibuVh7LT26V0ARWLgrtn7B_QodXQ1yRrgF__ZSOGqqo2oipF6ZoyOgYX1lQE/s1600/3647231601_21ae5e2bc3_s.jpg"><span style="font-style: italic;">Encyclopédie de la Femme</span></a> de Michelle Tisseyre. Puis, c'est la visite du marchand de fruits et légumes ambulant. Le végétarisme était déjà dans l'air!, ne manque que le <span style="font-style: italic;">jugging</span>! Ensuite, John & Mary élargissent leur horizon en se retrouvant à la ferme. Image bucolique d'une basse-cour et on épargnera les scènes de boucherie pour les jeunes esprits sensibles qui commencent déjà à désapprendre la brutalité de la vie rurale. Tout ce long parcours pour finir par se retrouver à l'épicerie où Maman montre à John qu'il faut payer son beau panier de fruits. Le marchand ambulant est en voie de perdre son job. Enfin, c'est Noël et Papa et Maman espionnent, coquins (sans fausses pensées?), Mary balancer sa poupée et John jouer avec son train et son avion. Papa et Maman sont déjà assurés d'une relève.<br />
<br />
John est un sportif, ça on le sait depuis le début. Il joue au hockey et on entend René Lecavalier suivre le manuel pour retrouver les expressions françaises propres aux actions de la partie. Pendant ce temps, Mary et sa petite amie (!) «jouent» à la maison: l'une est à sa machine à coudre et l'autre manie le fer à repasser avec aplomb. Décidément,<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiTU3_U1JnD0s72M7czaRVbx3Jh7oXdb7yDrrpRtjp8iNbuh6sG3uXax81W-vRzorpVg5anaZDGv5czNkbMr-KuLXlC-cvuIZ1vdCFZhbF_u-d3mlOv7Cm2QssESz6vJZpGY5ExfsBeUJ8/s1600/cuisine.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616732412592127842" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiTU3_U1JnD0s72M7czaRVbx3Jh7oXdb7yDrrpRtjp8iNbuh6sG3uXax81W-vRzorpVg5anaZDGv5czNkbMr-KuLXlC-cvuIZ1vdCFZhbF_u-d3mlOv7Cm2QssESz6vJZpGY5ExfsBeUJ8/s320/cuisine.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 250px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 320px;" /></a> c'est là que nous apprenons la distinction sexuelle entre «<span style="font-style: italic;">game</span>» et «<span style="font-style: italic;">play</span>». Le tableau suivant nous présente la <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiTU3_U1JnD0s72M7czaRVbx3Jh7oXdb7yDrrpRtjp8iNbuh6sG3uXax81W-vRzorpVg5anaZDGv5czNkbMr-KuLXlC-cvuIZ1vdCFZhbF_u-d3mlOv7Cm2QssESz6vJZpGY5ExfsBeUJ8/s1600/cuisine.jpg">cuisine</a> avec la famille réunie: une véritable pub de Brault & Martineau des années 50 pour le poêle et le réfrigérateur Bélanger! Et que d'armoires! John & Mary grandissent, le chien aussi, alors on se met en famille, sous la direction de Papa, à la construction d'une niche. Voilà ce que l'on fait, après la messe, les beaux dimanches plates! Tous les accessoires meurtriers avec lesquels Jason, de la série de films <span style="font-style: italic;">gore</span> <span style="font-style: italic;">Friday the 13th, </span>tuera les adolescents lubriques trente ans plus tard, gravitent autour du tableau de la niche. Décidément, même Monsieur Bricole a sa part d'ombre, tant il y a des niches qui servent aussi de placards! Et voilà que tout le monde se retrouve à l'érablière en train de boire à la chaudière le bon sucre qui préparera le diabète de leur vieillesse! On retrouve ensuite John qui du hockey est passé au baseball. Il ne joue pas car il s'est fait mal à la main, aussi a-t-il amené son chien pour lui tenir compagnie… Enfin, car toutes bonnes choses ont une fin, Papa et Grand-Papa taquinent la truite tandis qu'au loin, John & Mary se jettent à l'eau …pour de bon.<br />
<br />
Quel avenir préparaient ces tableaux pour nos petits anges modèles?<br />
<br />
Comme toujours, le diable se cache dans les détails, et plus ils sont petits, mieux il est caché. Dans la mesure où l'on considère qu'aucun destin n'est définitivement déterminé et que toutes les options sont ouvertes par la relativité, la génération des <span style="font-style: italic;">Baby-boomers</span> ne pouvait interpréter <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgFtyijfa9Thuwop9k0VEnXPtpa0yk90nwegWfqBdVM82iIMCWQ2i_tZyh4T8H8RdzlUOPhBc74s82xIAlmKYHGdJd-MNrm5Z5_uo0h3X79g9DMDc4vmlLvJrFNGT7B0Xwwa3Uvws6SC3s/s1600/Sky_is_the_Limit_by_ArthurBlue.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616732999676929378" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgFtyijfa9Thuwop9k0VEnXPtpa0yk90nwegWfqBdVM82iIMCWQ2i_tZyh4T8H8RdzlUOPhBc74s82xIAlmKYHGdJd-MNrm5Z5_uo0h3X79g9DMDc4vmlLvJrFNGT7B0Xwwa3Uvws6SC3s/s320/Sky_is_the_Limit_by_ArthurBlue.jpg" style="cursor: pointer; float: left; height: 320px; margin: 0pt 10px 10px 0pt; width: 230px;" /></a>les images de <span style="font-style: italic;">Conversation anglaise </span>que comme à travers une boule de cristal. Les valeurs de <span style="font-style: italic;">Peyton Place, </span>comme celles aujourd'hui de <span style="font-style: italic;">Desperate Housewifes,</span> sont des valeurs transitoires appelées à se modifier au cours d'un rythme rapide et sans précédent avant la Seconde Guerre mondiale. D'un côté, il y a le modèle rêvé où l'existence sera heureuse, avec une croissance constante (<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgFtyijfa9Thuwop9k0VEnXPtpa0yk90nwegWfqBdVM82iIMCWQ2i_tZyh4T8H8RdzlUOPhBc74s82xIAlmKYHGdJd-MNrm5Z5_uo0h3X79g9DMDc4vmlLvJrFNGT7B0Xwwa3Uvws6SC3s/s1600/Sky_is_the_Limit_by_ArthurBlue.jpg"><span style="font-style: italic;">sky is the limite</span></a>) et la réussite professionnelle et familiale à l'image de celle des parents de John & Mary. De l'autre, il y a le réel vécu où l'existence, sans être malheureuse, n'est pas aussi jubilatoire qu'espérée. La croissance n'a pas été continue mais hachurée, entre des pointes de prospérité, souvent assez brèves, et des creux abyssaux plus longtemps durables. Si on passe rapidement sur la menace nucléaire associée à la Guerre Froide, on sait combien la crise du pétrole en 1973, la révolution conservatrice autour de 1980, la fausse sécurité apportée par l'effondrement du bloc soviétique, la flambée du terrorisme avec 2001, la crise économique de 2008 et maintenant le déplacement des centres économiques vers les pays émergents sont autant de ces pointes élevées que de ces abysses profonds. Le monde dans lequel vivront John & Mary ne sera plus celui de Papa et de Maman.<br />
<br />
On peut deviner comment John & Mary sont devenus les <a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxWz09UifZYO_NhjAjM3ZeKjKM4IrtfcR19nz-O6SKkV13LrhlklUomi3avqCE3exmu7W5DsuKTtdFfELW-GKzHAV6w2Qtiu7Qyd84Kk2nh86gRDF8cg9wy2dFG4ZJKbrbyf34WofGN5U/s1600/BonnieAndClydeOnSlabs.jpg">Bonnie & Clyde</a> de leur génération. Les deux délinquants des années 30 avaient suivis un parcours identiques, bien qu'issus de milieux moins favorisés que John & Mary. Ils avaient connu l'insouciance des années folles, la crise de 1929, le <span style="font-style: italic;">dust bowl </span>du milieu des années 30,<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxWz09UifZYO_NhjAjM3ZeKjKM4IrtfcR19nz-O6SKkV13LrhlklUomi3avqCE3exmu7W5DsuKTtdFfELW-GKzHAV6w2Qtiu7Qyd84Kk2nh86gRDF8cg9wy2dFG4ZJKbrbyf34WofGN5U/s1600/BonnieAndClydeOnSlabs.jpg"><img alt="" border="0" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5616733277808367202" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhxWz09UifZYO_NhjAjM3ZeKjKM4IrtfcR19nz-O6SKkV13LrhlklUomi3avqCE3exmu7W5DsuKTtdFfELW-GKzHAV6w2Qtiu7Qyd84Kk2nh86gRDF8cg9wy2dFG4ZJKbrbyf34WofGN5U/s320/BonnieAndClydeOnSlabs.jpg" style="cursor: pointer; float: right; height: 261px; margin: 0pt 0pt 10px 10px; width: 320px;" /></a> la fausse sécurité promise par le <span style="font-style: italic;">New Deal </span>de Roosevelt, la montée des dictatures fascisantes, le triomphalisme économique américain. Le rêve américain était à portée de main, ou plus exactement au bout de leurs mitrailleuses. Les banques des petits bleds du centre-ouest s'offraient, les portes toutes grandes ouvertes. Les policiers étaient aussi violents et corrompus que les bandits qu'ils pourchassaient. La «brutalisation» du monde, au lieu d'être en voie de se résorber, s'acheminait progressivement mais sûrement vers l'hécatombe de 1939-1945. Là comme aujourd'hui, la rencontre du rêve et de la réalité s'est produite dans la conviction que si la vie n'était pas conforme au rêve, elle ne méritait pas d'être vécue. Lorsque la mort a partagé le rêve de la vie, les raisons d'exister se sont dissoutes comme la fumée ou les nuages sous la poussée des vents. John était devenu clochard au centre-ville et Mary se rendait en bicyclette travailler à la cuisine de l'hôpital, en plein centre-ville. Les policiers voulurent contrôler John qui était en état de panique à fouiller les déchets. Il sortit un couteau de sous son paletot. Sans hésiter les policiers dégainèrent et firent feu criblant le malheureux de balles. L'une d'elle ricocha et atteignit sa sœur Mary au moment où elle passait en vélo pour se rendre à son travail. Si vous ne croyez pas à ce récit de tragédie-bouffe, peu importe. Il arrive parfois que ce genre de chose arrive.<br />
<br />
Ne restent plus qu'à apprendre les mots de vocabulaire nouveaux de cet issu sans bon sens:<br />
<br />
<span style="font-style: italic;">cops</span> = policiers.<br />
<span style="font-style: italic;">shotgun</span> = arme à feu.<br />
<span style="font-style: italic;">shot wound</span> = blessure par balle.<br />
<span style="font-style: italic;">crime scene</span> = scène de crime.<br />
<span style="font-style: italic;">shot to death</span> = tirer à mort.<br />
<span style="font-style: italic;">serial killer</span> = tueur en série.<br />
<span style="font-style: italic;">robbery</span> = vol, dévaliser.<br />
<span style="font-style: italic;">madness</span> = folie.<br />
<span style="font-style: italic;">bullet </span>= balle…<br />
<br />
Notes:<br />
(1) N. Gabler. <i>Le royaume de leurs rêves</i>, Paris, Calmann-Lévy, Col. Pluriel, 2005, p. 446.<br />
<br />
<br />
<div style="text-align: right;">
Montréal<br />
10 juin 2011</div>
</div>
</div>
</div>Coupalhttp://www.blogger.com/profile/14839226309394850656noreply@blogger.com0